mardi 13 septembre 2016

saint Jean Chrysostome, évêque et docteur de l'Eglise . v. 344.349 + 407



Jean, surnommé Chrysostome, c'est-à-dire Bouche d'Or, à cause de la force et de la beauté de son éloquence, naquit à Antioche, vers l'an 344. Veuve à vingt ans, sa mère n'épargna rien pour lui donner une brillante éducation. Doué d'un génie supérieur, objet de l'admiration universelle, incliné au plaisir, Jean fut ramené à la réalité des choses et conquis à la perfection de l'Évangile par l'amitié fidèle d'un jeune homme de son âge, qui fut saint Basile. Noble exemple de l'apostolat qu'un véritable ami peut exercer dans son entourage ! L'amitié des deux jeunes gens ne fit que s'accroître par l'union désormais parfaite des pensées et des aspirations.

Devenu clerc de l'église d'Antioche, Chrysostome renonce complètement aux vanités du siècle ; il ne paraît qu'avec une tunique pauvre ; la prière, la méditation, l'étude de l'Écriture Sainte, partagent son temps. Il jeûne tous les jours et prend sur le plancher de sa chambre le peu de sommeil qu'il accorde à son corps, après de longues veilles. S'élevant par degré dans les fonctions ecclésiastiques, il devient l'œil, le bras, la bouche de son évêque. Son éloquence est si grande que toute la ville accourt à ses premières prédications où il y a souvent jusqu'à cent mille auditeurs à l'entendre.

À trente ans, Chrysostome fuit, dans la vie monastique, l'épiscopat auquel, plus tard, il ne pourra échapper. C'est en 398, qu'il est emmené de force à Constantinople et sacré patriarche de la ville impériale. Son zèle, l'indépendance de son langage ne furent égalés que par sa charité ; son éloquence séduisante, qui brillait alors de tout son éclat, attirait les foules autour de sa chaire ; il ranimait la foi au cœur des fidèles et convertissait une multitude de personnes. L'éloquence de l'orateur dévoilait le cœur d'un père, d'un apôtre et d'un saint.
Dieu permit que la croix vienne achever en Chrysostome l'œuvre de la perfection. Le courage invincible du Pontife, sa liberté à flétrir les désordres de la cour, lui valurent l'exil. En quittant Constantinople, il fit porter à l'impératrice cette fière réponse : « Chrysostome ne craint qu'une chose : ce n'est ni l'exil, ni la prison, ni la pauvreté, ni la mort, c'est le péché. » Il mourut en exil, victime des mauvais traitements de ses ennemis. Bien qu'il ne porte pas le titre de martyr, il en a tout le mérite et toute la gloire.

PIOMBO SEBASTIANO DEL


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BENOÎT XVI
AUDIENCE GÉNÉRALE
Mercredi 19 septembre 2007

Saint Jean Chrysostome   
Chers frères et sœurs!
On célèbre cette année le seizième centenaire de la mort de saint Jean Chrysostome (407-2007). Jean d'Antioche, appelé Chrysostome, c'est-à-dire "Bouche d'or" en raison de son éloquence, peut se dire encore vivant aujourd'hui, également en raison de ses œuvres. Un copiste anonyme écrivit que celles-ci "traversent le monde entier comme des éclairs foudroyants". Ses écrits nous permettent également, ainsi qu'aux fidèles de son temps, qui furent à plusieurs reprises privés de sa présence en raison de ses exils, de vivre avec ses livres, malgré son absence. C'est ce qu'il suggérait lui-même dans l'une de ses lettres (cf. A Olympiade, Lettre 8, 45).
Né autour de 349 à Antioche de Syrie (aujourd'hui Antakya, au sud de la Turquie), il y exerça son ministère pastoral pendant environ onze ans, jusqu'en 397, puis, ayant été nommé Evêque de Constantinople, il exerça le ministère épiscopal dans la capitale de l'Empire avant ses deux exils, qui se suivirent à brève distance l'un de l'autre, entre 403 et 407. Nous nous limitons aujourd'hui à prendre en considération les années de Chrysostome vécues à Antioche.
Orphelin de père en bas âge, il vécut avec sa mère, Antusa, qui lui transmit une extrême sensibilité humaine et une profonde foi chrétienne. Après avoir terminé ses études élémentaires et supérieures, couronnées par des cours de philosophie et de rhétorique, il eut pour maître Libanios, un païen, le plus célèbre rhéteur de son temps. A son école, Jean devint le plus grand orateur de l'antiquité grecque tardive. Baptisé en 368 et formé à la vie ecclésiastique par l'Evêque Melezio, il fut institué lecteur par celui-ci en 371. Ce fait marqua l'entrée officielle de Chrysostome dans le cursus ecclésiastique. De 367 à 372, il fréquenta l'Asceterio, une sorte de séminaire d'Antioche, avec un groupe de jeunes, dont certains devinrent ensuite Evêques, sous la direction du célèbre exégète Diodore de Tarse, qui initia Jean à l'exégèse historico-littérale, caractéristique de la tradition antiochienne.
Il se retira ensuite pendant quatre ans parmi les ermites du proche mont Silpio. Il poursuivit cette retraite par deux autres années encore, vécues en totale solitude dans une grotte sous la direction d'un "ancien". Au cours de cette période, il se consacra totalement à méditer "les lois du Christ", les Evangiles et en particulier les Lettres de Paul. Etant tombé malade, il se trouva dans l'impossibilité de se soigner tout seul, et il dut donc revenir dans la communauté chrétienne d'Antioche (cf. Palladius, Vie 5). Le Seigneur - explique le biographe - intervint à un juste moment avec cette infirmité, pour permettre à Jean de suivre sa véritable vocation. En effet, il écrira lui-même que, placé dans l'alternative de choisir entre les vicissitudes du gouvernement de l'Eglise et la tranquillité de la vie monastique, il aurait préféré mille fois le service pastoral (cf. Sur le sacerdoce, 6, 7):  c'est précisément à cela que Chrysostome se sentait appelé. Et ici s'accomplit le tournant décisif de l'histoire de sa vocation:  pasteur d'âme à plein temps! L'intimité avec la Parole de Dieu, cultivée au cours des années de son ermitage, avait fait mûrir en lui l'urgence irrésistible de prêcher l'Evangile, de donner aux autres ce qu'il avait reçu au cours des années de méditation. L'idéal missionnaire le lança ainsi, âme de feu, dans le service pastoral.
Entre 378 et 379 il revint en ville. Devenu diacre en 381 et prêtre en 386, il devint un célèbre prédicateur dans les églises de sa ville. Il prononça des homélies  contre  les  ariens, suivies de celles pour commémorer les martyrs antiochiens, ainsi que d'autres sur les festivités liturgiques principales:  il s'agit d'un grand enseignement de la foi dans le Christ, également à la lumière de ses saints. 387 fut l'"année héroïque" de Jean, celle de la "révolte des statues". Le peuple abattit les statues impériales, en signe de protestation contre l'augmentation des impôts. Au cours de ces journées de Carême et d'angoisse en raison des punitions dont l'empereur menaçait, il prononça ses 22 vibrantes Homélies sur les statues, finalisées à la pénitence et à la conversion. Suivit ensuite la période sereine du ministère pastoral (387-397).
Chrysostome s'inscrit parmi les Pères les plus prolifiques:  de lui, nous sont parvenus 17 traités, plus de 700 homélies authentiques, les commentaires à Matthieu et à Paul (Lettres aux Romains, aux Corinthiens, aux Ephésiens et aux Hébreux), et 241 lettres. Ce ne fut  pas  un  théologien spéculatif. Il transmit cependant la doctrine traditionnelle et sûre de l'Eglise, à une époque de controverses théologiques suscitées en particulier par l'arianisme, c'est-à-dire par la négation de la divinité du Christ. Il est donc un témoin digne de foi du développement dogmatique atteint par l'Eglise aux IV-V siècles. Sa théologie est typiquement pastorale, avec la constante préoccupation de la cohérence entre la pensée exprimée par la parole et le vécu existentiel. Tel est, en particulier, le fil conducteur des splendides catéchèses, avec lesquelles il préparait les catéchumènes à recevoir le Baptême. Proche de la mort, il écrivit que la valeur de l'homme se trouve dans la "connaissance exacte de la véritable doctrine et dans la rectitude de vie" (Lettre de l'exil). Les deux choses, connaissance de la vérité et rectitude de vie, vont de pair:  la connaissance doit se traduire en vie. Chacune de ses interventions visa à développer chez les fidèles l'exercice de l'intelligence, pour comprendre et traduire en pratique les exigences morales et spirituelles de la foi.
Jean Chrysostome se soucia d'accompagner par ses écrits le développement intégral de la personne, dans les dimensions physique, intellectuelle et religieuse. Les diverses phases de la croissance sont comparées à tout autant de mers d'un immense océan! "La première de ces mers est l'enfance" (Homélie 81, 5 sur l'Evangile de Matthieu). En effet, "précisément au cours de ce premier âge se manifestent les inclinations au vice et à la vertu". C'est pourquoi la loi de Dieu doit être dès le début imprimée dans l'âme "comme sur une tablette de cire" (Homélie 3,1 sur l'Evangile de Jean):  de fait, c'est l'âge le plus important. Nous devons nous rappeler qu'il est fondamental qu'en cette première phase de la vie, entrent réellement dans l'homme les grandes orientations qui donnent sa juste perspective à l'existence. Chrysostome recommande donc:  "Dès l'âge le plus tendre fortifiez les enfants avec des armes spirituelles, et enseignez-leur à marquer le front avec la main" (Homélie 12, 7 sur la première Lettre aux Corinthiens). Viennent ensuite l'adolescence et la jeunesse:  "A l'enfance suit la mer de l'adolescence, où les vents soufflent avec violence..., car en nous croît... la concupiscence" (Homélie 81, 5 sur l'Evangile de Matthieu). Arrivent enfin les fiançailles et le mariage:  "A la jeunesse succède l'âge de la personne mûre, où se présentent les engagements de la famille:  le temps est venu de chercher une femme" (ibid.). Il rappelle les objectifs du mariage, en les enrichissant - avec un rappel à la vertu de la tempérance - d'un riche tissu de relations personnalisées. Les époux bien préparés barrent ainsi la route au divorce:  tout se déroule avec joie et l'on peut éduquer les enfants à la vertu. Lorsque naît ensuite le premier enfant, celui-ci est "comme un pont; les trois deviennent une seule chair, car l'enfant réunit les deux parties" (Homélie 12, 5 sur la Lettre aux Colossiens), et les trois constituent "une famille, petite Eglise" (Homélie 20, 6 sur la Lettre aux Ephésiens).
La prédication de Chrysostome se déroulait habituellement au cours de la liturgie, "lieu" où la communauté se construit à travers la parole et l'Eucharistie. L'assemblée réunie là exprime l'unique Eglise (Homélie 8, 7 sur la Lettre aux Romains), la même parole est adressée en tout lieu à tous (Homélie 24, 2 sur la première Lettre aux Corinthiens), et la communion eucharistique devient le signe efficace de l'unité (Homélie 32, 7 sur l'Evangile de Matthieu). Son projet pastoral était inséré dans la vie de l'Eglise, dans laquelle les fidèles laïcs assument avec le Baptême la charge sacerdotale, royale et prophétique. Il dit au fidèle laïc:  "A toi aussi le Baptême fait de toi un roi, un prêtre et un prophète" (Homélie 3, 5 sur la deuxième Lettre aux Corinthiens). C'est de là que naît le devoir fondamental de la mission, car chacun est dans une certaine mesure responsable du salut des autres:  "Tel est le principe de notre vie sociale... ne pas s'intéresser seulement à nous!" (Homélie 9, 2 sur la Genèse). Le tout se déroulait entre deux pôles:  la grande Eglise et la "petite Eglise", la famille, en relation réciproque.
Chers frères et sœurs, comme vous pouvez le voir, cette leçon de Chrysostome sur la présence authentiquement chrétienne des fidèles laïcs dans la famille et dans la société, demeure encore aujourd'hui plus que jamais actuelle. Prions le Seigneur, afin qu'il nous rende dociles aux enseignements de ce grand Maître de la foi.
 * * *
 Je salue cordialement les pèlerins francophones présents ce matin, notamment les pèlerins sénégalais, guidés par Mgr Ndiaye, Évêque de Kaolack, les membres de l’Association des Vieilles Maisons françaises, le groupe des Missionnaires d’Afrique et les pèlerins de Côte d’Ivoire et du Canada. Je vous souhaite à tous un heureux pèlerinage, source d’approfondissement de votre foi et de renouvellement pour votre vie.


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BENOÎT XVI
AUDIENCE GÉNÉRALE
Mercredi 26 septembre 2007
Saint Jean Chrysostome
Chers frères et sœurs!
Nous poursuivons aujourd'hui notre réflexion sur saint Jean Chrysostome. Après la période passée à Antioche, il fut nommé en 397, Evêque de Constantinople, la capitale de l'Empire romain d'Orient. Dès le début, Jean projeta la réforme de son Eglise: l'austérité du palais épiscopal devait constituer un exemple pour tous - clergé, veuves, moines, personnes de la cour et riches. Malheureusement, un grand nombre d'entre eux, concernés par ses jugements, s'éloignèrent de lui. Plein d'attention à l'égard des pauvres, Jean fut également appelé l'"Aumônier". En effet, en administrateur attentif, il avait réussi à créer des institutions caritatives très appréciées. Son esprit d'entreprise dans les divers domaines fit de lui pour certains un dangereux rival. Toutefois, comme un véritable pasteur, il traitait chacun de manière cordiale et paternelle. En particulier, il avait toujours des accents tendres pour la femme et des attentions spéciales pour le mariage et la famille. Il invitait les fidèles à participer à la vie liturgique, qu'il rendit splendide et attrayante grâce à une créativité de génie.
Malgré son bon cœur, il ne connut pas une vie tranquille. Pasteur de la capitale de l'Empire, il se trouva souvent concerné par des questions et des intrigues politiques, en raison de ses relations permanentes avec les autorités et les institutions civiles. De même, sur le plan ecclésiastique, ayant déposé en Asie en 401 six Evêques illégitimement élus, il fut accusé d'avoir franchi les limites de sa juridiction, et devint ainsi la cible d'accusations faciles. Un autre prétexte contre lui fut la présence de plusieurs moines égyptiens, excommuniés par le patriarche Théophile d'Alexandrie et qui s'étaient réfugiés à Constantinople. Une vive polémique naquit ensuite en raison des critiques faites par Jean Chrysostome à l'égard de l'impératrice Eudoxie et de ses courtisanes, qui réagirent en jetant sur lui le discrédit et des insultes. On arriva ainsi à sa déposition, lors du synode organisé par le Patriarche Théophile lui-même en 403, avec pour conséquence une condamnation à un premier bref exil. Après son retour, l'hostilité suscitée contre lui par la protestation contre les fêtes en l'honneur de l'impératrice - que l'Evêque considérait païennes, luxueuses -, et l'expulsion des prêtres chargés des Baptêmes lors de la Veillée pascale de 404 marquèrent le début de la persécution des fidèles de Chrysostome, qu'on appelait les "Johannites".
Jean dénonça alors les faits, par écrit, à l'Evêque de Rome, Innocent I. Mais il était désormais trop tard. En l'an 406, il dut à nouveau partir en exil, cette fois à Cucuse, en Arménie. Le Pape était convaincu de son innocence, mais n'avait pas le pouvoir de l'aider. Un Concile, voulu par Rome pour parvenir à une pacification entre les deux parties de l'Empire et entre leurs Eglises, ne put avoir lieu. Le voyage épuisant de Cucuse vers Pytius, un objectif qu'il n'atteignit jamais, devait empêcher les visites des fidèles et briser la résistance de l'exilé qui était épuisé: sa condamnation à l'exil fut une véritable condamnation à mort! Les nombreuses lettres de son exil, dans lesquelles Jean manifeste ses préoccupations pastorales avec des accents de participation et de douleur pour les persécutions contre les siens, sont émouvantes. La marche vers la mort s'arrêta à Comana dans le Pont. C'est là que Jean, moribond, fut conduit dans la chapelle du martyre saint Basilisque, où il rendit son esprit à Dieu et fut enseveli, martyr à côté d'un martyr (Pallade, Vie 119). C'était le 14 septembre 407, fête de l'Exaltation de la sainte Croix. La réhabilitation eut lieu en 438 avec Théodose II. Les reliques du saint Evêque, déposées dans l'église des Apôtres, à Constantinople, furent ensuite transportées à Rome en 1204, dans la Basilique constantinienne primitive, et elles reposent à présent dans la chapelle du Chœur des Chanoines de la Basilique Saint-Pierre. Le 24 août 2004, une partie importante de celles-ci fut donnée par le Pape Jean-Paul II au Patriarche Bartholomaios I de Constantinople. La mémoire liturgique du saint est célébrée le 13 septembre. Le bienheureux Jean XXIII le proclama patron du Concile Vatican II.
On dit de Jean Chrysostome que, lorsqu'il fut assis sur le trône de la nouvelle Rome, c'est-à-dire de Constantinople, Dieu fit voir en lui un deuxième Paul, un docteur de l'Univers. En réalité, chez Chrysostome, il existe une unité substantielle entre la pensée et l'action, à Antioche comme à Constantinople. Seuls le rôle et les situations changent. En méditant sur les huit œuvres accomplies par Dieu dans la séquence des six jours dans le commentaire de la Genèse, Chrysostome veut reconduire les fidèles de la création au Créateur: "C'est un grand bien", dit-il, "de connaître ce qu'est la créature et ce qu'est le Créateur". Il nous montre la beauté de la création et la transparence de Dieu dans sa création, qui devient ainsi presque comme une "échelle" pour monter vers Dieu, pour le connaître. Mais à ce premier passage s'en ajoute un deuxième: ce Dieu créateur est également le Dieu de la condescendance (synkatabasis). Nous sommes faibles dans notre démarche de "monter", nos yeux sont faibles. Et ainsi, Dieu devient le Dieu de la condescendance, qui envoie à l'homme déchu et étranger une lettre, l'Ecriture Sainte, si bien que la Création et l'Ecriture se complètent. Dans la lumière de l'Ecriture, de la Lettre que Dieu nous a donnée, nous pouvons déchiffrer la création. Dieu est appelé "père tendre" (philostorgios) (ibid.), médecin des âmes (Homélie 40, 3 sur la Genèse), mère (ibid.) et ami affectueux (Sur la providence 8, 11-12). Mais, à ce deuxième passage - tout d'abord la Création comme "échelle" vers Dieu, et ensuite la condescendance de Dieu à travers une lettre qu'il nous a donnée, l'Ecriture Sainte - s'ajoute un troisième passage. Dieu ne nous transmet pas seulement une lettre: en définitive, il descend lui-même, il s'incarne, il devient réellement "Dieu avec nous", notre frère jusqu'à la mort sur la Croix. Et à ces trois passages - Dieu est visible dans la création, Dieu nous donne une lettre, Dieu descend et devient l'un de nous - s'ajoute à la fin un quatrième passage. A l'intérieur de la vie et de l'action du chrétien, le principe vital et dynamique de l'Esprit (Pneuma), qui transforme les réalités du monde. Dieu entre dans notre existence elle-même à travers l'Esprit Saint et il nous transforme de l'intérieur de notre cœur.
C'est dans ce cadre que Jean, précisément à Constantinople, dans le commentaire continu des Actes des Apôtres, propose le modèle de l'Eglise primitive (Ac 4, 32-37), comme modèle pour la société, en développant une "utopie" sociale (presque une "cité idéale"). En effet, il s'agissait de donner une âme et un visage chrétien à la ville. En d'autres termes, Chrysostome a compris qu'il n'est pas suffisant de faire l'aumône, d'aider les pauvres ponctuellement, mais il est nécessaire de créer une nouvelle structure, un nouveau modèle de société; un modèle fondé sur la perspective du Nouveau Testament. C'est la nouvelle société qui se révèle dans l'Eglise naissante. Jean Chrysostome devient donc réellement ainsi l'un des grands Pères de la Doctrine sociale de l'Eglise: la vieille idée de la "polis" grecque doit être remplacée par une nouvelle idée de cité inspirée par la foi chrétienne. Chrysostome soutenait avec Paul (cf. 1 Co 8, 11) le primat de chaque chrétien, de la personne en tant que telle, également de l'esclave ou du pauvre. Son projet corrige ainsi la vision grecque traditionnelle de la "polis", de la cité, dans laquelle de larges couches de la population étaient exclues des droits de citoyen, alors que dans la cité chrétienne, tous sont frères et sœurs avec des droits égaux. Le primat de la personne est également la conséquence du fait que c'est réellement à partir d'elle que l'on construit la cité, alors que dans la "polis" grecque, la patrie était au-dessus de l'individu, qui était totalement subordonné à la cité dans son ensemble. Ainsi, Chrysostome définit la vision d'une société construite par la conscience chrétienne et il nous dit que notre "polis" est une autre, "notre patrie est dans les cieux" (Ph 3, 20) et, même sur cette terre, cette patrie nous rend tous égaux, frères et sœurs, et nous oblige à la solidarité.
Au terme de sa vie, dans son exil aux frontières de l'Arménie, "le lieu le plus reculé du monde", Jean, se rapportant à sa première prédication de 386, reprit le thème qui lui était cher du dessein que Dieu poursuit à l'égard de l'humanité: c'est un dessein "indicible et incompréhensible", mais certainement guidé par Lui avec amour (cf. Sur la Providence 2, 6). Telle est notre certitude. Même si nous ne pouvons pas déchiffrer les détails de l'histoire personnelle et collective, nous savons que le dessein de Dieu est toujours inspiré par son amour. Ainsi, malgré ses souffrances, Chrysostome réaffirmait la découverte que Dieu aime chacun de nous avec un amour infini, et désire donc le salut de tous. Pour sa part, le saint Evêque coopéra généreusement à ce salut, sans ménager ses forces, toute sa vie. En effet, il considérait comme le but ultime de son existence cette gloire de Dieu, que - désormais mourant - il laissa comme dernier testament: "Gloire à Dieu pour tout!" (Pallade, Vie 11).
* * *
Je salue cordialement les pèlerins francophones présents à cette audience, en particulier Mgr Guy Thomazeau, Archevêque de Montpellier avec des pèlerins de Béziers, le groupe de Frères Maristes en année de formation permanente, les jeunes de Tours et les pèlerins de La Réunion. Puisse votre séjour à Rome vous donner l’occasion de découvrir davantage le Seigneur, qui nous aime et qui veut nous sauver.
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wikipédia – à jour au 29 juin 2016

Jean Chrysostome

Jean Chrysostome
Image illustrative de l'article Jean Chrysostome
Jean Chrysostome, mosaïque du IXe siècle, Sainte-Sophie.
Naissance
Décès
407  (58 ans)
Nationalité
Romaine
Vénéré à
Vénéré par
Fête
Saint patron
Jean Chrysostome, né à Antioche entre 344 et 3491, et mort en 407 près de Comana, a été archevêque de Constantinople et l'un des pères de l'Église grecque. Son éloquence est à l'origine de son surnom de « Chrysostome » (en grec ancien χρυσόστομος/chrysóstomos, littéralement « Bouche d'or »). Sa rigueur et son zèle réformateur l'ont conduit à l'exil et à la mort.
C'est un saint et un docteur de l'Église catholique, de l'Église orthodoxe et de l'Église copte, fêté le 13 septembre en Occident et le 30 janvier en Orient.

Sommaire

Biographie

Sa famille, chrétienne, appartient à la bourgeoisie d'Antioche. Son père, officier dans l'armée syrienne, perd la vie alors que Jean est encore enfant. Il est alors élevé par sa mère. Devenu adolescent, il aurait reçu, selon certains auteurs chrétiens du Ve siècle, l'enseignement du célèbre orateur et professeur de rhétorique Libanios, mais ce n'est nullement assuré, bien qu'il ait été certainement formé à la rhétorique. Il témoigne avoir mené une jeunesse désordonnée et avoir été « enchaîné par les appétits du monde » (Du Sacerdoce, I, 3), pour s'accuser ensuite d'avoir été gastronome, amateur d'éloquence judiciaire et de théâtre.
À 18 ans, il demande le baptême, après avoir rencontré l'évêque Mélétios. Il commence alors à suivre des cours d'exégèse auprès de Diodore de Tarse. Après avoir terminé ses études supérieures, il reçoit les ordres mineurs, puis s'installe en ermite aux portes d'Antioche, et se consacre à la théologie. Il compose alors son traité Du Sacerdoce, influencé par les idées de Grégoire de Nazianze. Selon Jean, le monachisme n'est pas la seule voie menant à la perfection. Si le moine, menant une vie recluse, éloignée des tentations, peut plus facilement atteindre son but, Jean juge plus méritante encore la voie du prêtre, qui se consacre au milieu des périls du monde au salut de ses prochains (VI, 5) :
« Le moine qui mettrait ses travaux et ses sueurs en comparaison avec le sacerdoce tel qu'il doit être exercé, y verrait autant de différence qu'entre les conditions de sujet et d'empereur. »
Durant l'hiver 380381, il est ordonné diacre par Mélèce à Antioche. Quelques années plus tard, il est ordonné prêtre. Il devient alors prédicateur et directeur spirituel. Il poursuit son travail d'écriture, et rédige de nombreux traités : pour consoler une veuve, sur le remariage, sur l'éducation, sur la pratique de cohabitation de moines et de moniales, etc. Il acquiert une certaine célébrité pour son talent d'orateur : des fidèles prennent des notes de ses homélies.
En 397, Nectaire, archevêque de Constantinople, perd la vie. Au terme d'une bataille de succession acharnée, l'empereur Arcadius choisit Jean. Il s'élève alors avec une grande force contre la corruption des mœurs et la vie licencieuse des grands, ce qui lui attire beaucoup de haines violentes. Il destitue les prêtres ou les évêques, qu'il juge indignes, parmi lesquels l'évêque d'Éphèse, et ramène de force à leur couvent les moines vagabonds. Il s'attaque également aux hérétiques, aux Juifs et aux païens : « Les Juifs et les païens doivent apprendre que les chrétiens sont les sauveurs, les protecteurs, les chefs et les maîtres de la cité » (Homélies sur les statues, I, 12). Il tient un langage sévère à l'égard des Juifs, en qui il voit les adversaires de l'Évangile de Jésus. S'agissant d'eux, il disait : « La synagogue est un mauvais lieu où afflue tout ce qu'il y a de plus dépravé ; c’est un rendez-vous pour les prostituées et pour les efféminés. Les démons habitent et les âmes mêmes des juifs et les lieux dans lesquels ils se rassemblent2 ».
Article détaillé : Adversus Judaeos (Chrysostome).
Jean Chrysostome, icône en stéatite byzantine du XIe siècle, musée du Louvre.
Il impose son autorité aux diocèses d'Asie Mineure alentour. Répugnant à ses devoirs de représentation, il prend seul ses repas et impose un mode de vie frugal et austère à son entourage.
S'il jouit au départ de la faveur du couple impérial, il s'attire rapidement l'inimitié des classes supérieures et des évêques par ses critiques sévères de leur mode de vie non conforme à l'idéal évangélique. Lorsque Jean ordonne le retour des reliques de saint Phocas, l'impératrice Eudoxie, épouse d'Arcadius, se charge en personne de porter la châsse à travers la ville, ce dont Jean la remercie ensuite vivement dans une homélie. En 399, son influence parvient à sauver, dans un premier temps, l'eunuque Flavius Eutropius, chambellan et favori de l'empereur, disgracié et réfugié dans la cathédrale, et qui avait pourtant été un temps parmi ses adversaires. Mais Flavius Eutropius est décapité peu après. Cependant, l'inimitié de la cour impériale va croissant. Jean finit par blesser vivement Eudoxie en lui reprochant l'accaparement d'une somme appartenant à la veuve Callitrope et des biens d'une autre veuve : il aurait comparé l'impératrice à l'infâme reine Jézabel de l'Ancien Testament.
En 402, Jean est mêlé à l'affaire de Théophile, patriarche d'Alexandrie, accusé publiquement de tyrannie et d'injustice par un groupe de moines égyptiens, accusés d'être disciples d'Origène. Ces derniers font appel à Jean, qui tente de se récuser, mais doit finalement accepter de présider un synode, convoqué par l'empereur, devant lequel Théophile est censé se présenter. Théophile engage alors la lutte contre son juge, en rassemblant tous les mécontents. Arrivant finalement à Constantinople en juin 403, Théophile est accompagné de vingt-neuf évêques égyptiens. L'affaire se retourne alors contre Jean : il est convoqué par ces évêques pour répondre des accusations formulées contre lui à un concile qui a lieu dans la villa du Chêne près de Chalcédoine. Jean est alors déposé et condamné, condamnation ratifiée par Flavius Arcadius.
Il est aussitôt rappelé à la demande de l'impératrice qui, à la suite d'un mystérieux accident - une fausse couche de l'impératrice - y voit un avertissement du Ciel. Cependant, les accusations reprennent contre lui. Quand la tension avec la cour est à son comble, Jean se montre peu diplomate, commençant un sermon par une allusion à Hérodiade réclamant la tête de Jean le Baptiste : « De nouveau Hérodiade est en démence. De nouveau elle danse. De nouveau elle réclame la tête de Jean sur un plat3. » Finalement, il est une deuxième fois condamné et exilé à Cucusus, en Arménie. Il est remplacé au siège patriarcal le 26 juin 404 par un vieillard, Arsace, auquel succède très vite Atticus, un ennemi de Jean4. Peu de temps après, Jean doit se réfugier au château d'Arabisse pour fuir une incursion des Isauriens. Cependant, sa renommée va grandissant. Devant l'afflux des visiteurs qui viennent à lui, il est exilé en 407, sur ordre impérial, à Pithyos, sur la mer Noire, aux confins de l'empire. Affaibli par la maladie, Jean meurt au cours du voyage près de Comana dans le Pont. Selon la tradition, ses derniers mots sont : « Gloire à Dieu en toutes choses » (« doxa to theo pantôn eneken »).
L'Église romaine est toujours restée fidèle à l'évêque Jean. Le pape Innocent Ier lui écrivit dans son exil pour le consoler. Il condamna le concile du Chêne qui l'avait déposé, et ne reconnut que Jean comme seul patriarche légitime de Constantinople.
En 438, l'empereur Théodose II fait rapatrier les restes de Jean à Constantinople ; ils sont triomphalement déposés dans l'église des Saints-Apôtres. Cette translation est commémorée dans l'Église le 27 janvier5. Aujourd'hui, ses reliques sont vénérées sous l'autel d'une chapelle dans la Basilique Saint-Pierre de Rome, dans la Cité du Vatican.

« Bouche d'or »

Une pierre pour oreiller
Saint Jean Bouche d'or fait dans le texte suivant l'éloge de Jacob, (Gn 28, 10-11) :
« Voyons comment Jacob a fait son départ. Ce jeune homme qui avait grandi dans sa maison et n'avait jamais fait l'expérience du voyage, ni d'un séjour à l'étranger, ni d'une quelconque autre épreuve, vois-le commencer son voyage. Cet homme qui avait eu tant de gens pour le servir — il était simple, dit l'Écriture, et restait à la maison (Gn 25, 27) —, au moment de partir, n'eut point besoin de bêtes de somme, ni de suite, ni de provisions, mais, imitant déjà les Apôtres (Lc 9, 3), c'est ainsi qu'il se mit en route ! Et comme le soleil, est-il dit, se couchait, il s'endormit là où la nuit le surprit. Il prit, est-il dit, une pierre et la mit sous sa tête. Vois le courage de l'enfant : il se servit d'une pierre au lieu d'un oreiller et dormit à même le sol !
Considère aussi la bonne volonté de ce juste. Après tant de promesses, il besogna pendant vingt ans chez Laban sans se plaindre ni s'engourdir avec le temps qui passe, mais il supporta tout vaillamment, attendant la réalisation des promesses et sachant que les paroles de Dieu ne peuvent faillir, surtout si nous nous efforçons d'y apporter notre contribution : la foi, la patience, la confiance en l'idée que ce qui n'a jamais eu lieu, du moment que le maître promet, c'est comme si c'était déjà fait.
Telle est la vraie foi, elle ne fait pas attention à ce qui se voit, même si c'est contraire à la promesse, mais elle a confiance en la puissance de celui qui a promis6. »

Jean Chrysostome et l'Église orthodoxe

Icône de saint Jean Chrysostome (en phélonion) de l'église Saint-Jean-Chrysostome d'Etterbeek
Déposé, exilé de son vivant par l'autorité politique, Jean Chrysostome est un des saints les plus marquants de l'Église orthodoxe.
Sa mémoire est célébrée trois jours dans l'année : le 13 novembre pour sa fête, le 27 janvier pour la translation de ses reliques et le 30 janvier pour la fête des "Trois saints hiérarques"5.

Sur le plan liturgique

L'Église orthodoxe utilise actuellement trois liturgies eucharistiques : celle de saint Basile (utilisée une dizaine de fois dans l'année, particulièrement durant le Grand Carême et pour la Saint Basile), la liturgie des Présanctifiés (en semaine, durant le Grand Carême), et la liturgie de saint Jean Chrysostome, utilisée tout le reste de l'année. Quelques églises locales utilisent encore aussi la Liturgie de saint Jacques.

Sur le plan théologique

Si l'Église orthodoxe se définit souvent comme l'Église des Pères, soulignant la continuité dans la transmission de la foi, elle désigne sous le vocable des « Trois saints hiérarques » (hiérarque = évêque) trois Pères qui, chacun sous un aspect particulier, ont particulièrement compté au IVe siècle : Grégoire de Nazianze, Basile de Césarée et Jean Chrysostome. Cette réunion de saints si différents les uns des autres par certains aspects, a pour but de montrer que l'unité de l'Église se fait dans la foi unique, et non dans l'uniformité.

Sur le plan social

Prédicateur inlassable, commentateur infatigable de l'Évangile, Jean Chrysostome entrecroise en permanence deux thèmes : la gloire de Dieu et l'amour du prochain. S'il prêche sur le « sacrement de l'autel » (l'eucharistie), c'est pour continuer sur le « sacrement du frère » (l'expression est de lui), et sur la responsabilité des riches en faveur des plus pauvres. S'il parle du Christ ressuscitant, c'est pour souligner qu'il ressuscite « nu », et qu'à son exemple, il n'est nul besoin d'être enterré dans de luxueuses étoffes, les vendre pour soutenir les miséreux étant bien plus « intelligent »... Fidèle à ces lignes de conduite, il emploie l'argent reçu des dons ou même de la vente de trésors de l'église à la restauration ou la fondation d'hospices pour les malades ou les personnes sans ressources.

Patronages

Il est le protecteur des personnes qui souffrent d’épilepsie (car cette maladie est appelée mal de saint Jean) et qui lui adressent des prières pour espérer une guérison.
Il est le patron des professionnels qui doivent s’exprimer devant un public (orateurs, présentateurs, maîtres de conférence, etc.).

Postérité

Dans le langage courant, un « saint Jean bouche d'or » est une personne qui s'exprime avec éloquence ou qui parle franchement et nettement7.
Stevan Stojanović Mokranjac, Sergueï Rachmaninov, Piotr Tchaïkovski, et Arvo Pärt (Litany) entre autres, ont mis en musique la liturgie de saint Jean Chrysostome. Ivan Rebroff débutait tous les récitals qu'il donnait dans des églises par un chant a cappella extrait de la liturgie de saint Jean Chrysostome.
Son éloquence et la force oratoire de sa prédication invitant à mourir pour Dieu sont les raisons pour lesquelles le poète Georges Brassens l'a évoqué dans la chanson « Mourir pour des idées ».
Dans le film Le Rouge et le Noir (1954), Julien Sorel (joué par Gérard Philipe), séminariste, cite saint Jean Chrysostome.
Un quartier de la ville de Lévis (Québec) porte le nom de Saint-Jean-Chrysostome. Ce quartier compte plus de 21 000 habitants.

Œuvres

Jean Chrysostome a beaucoup prêché, beaucoup écrit. Si nombre d'œuvres, autrefois faussement attribuées à son patronage, ont été rendues à leur légitime auteur, le nombre de ses œuvres authentiques n'en reste pas moins considérable.
On divise ses écrits (Clavis Patrum Græcorum 4305-5197) en plusieurs groupes, les numéros 4305-4620 recouvrant à peu près les écrits authentiques (dubia: 4333.5 et 8-9, 4336.2, 4356, 4366-4367, 4395-4399, 4417, 4445-4451, 4513-4554; spuria: 4322, 4333.7, 4343, 4350, 4354, 4408, 4500).

Liturgie

Enfin, même si elle n'est pas directement de lui, la liturgie habituelle de l'Église orthodoxe porte son nom. De même, l'homélie lue lors de la vigile de Pâques, est attribuée à Jean Chrysostome.

Écrits

  • Dans le texte suivant, Jean Chrysostome fait l'éloge des Apôtres qui ont annoncé le Christ ressuscité :
« Ce qui est faiblesse de Dieu est plus fort que les hommes (1 Co 1, 25). De là ressort le caractère divin de la prédication des Apôtres. Et d'où a pu venir à douze hommes le dessein de se jeter dans une aussi téméraire entreprise ? Ils n'avaient jamais, peut-être, abordé la ville et la vie publique ; comment ont-ils osé entrer en lutte avec tout l'univers ?
Qu'ils aient été craintifs et pusillanimes, l'écrivain qui nous parle d'eux8 le fait clairement entendre, il ne le dissimule pas, pas plus du reste qu'il ne tait leurs défauts, preuve éclatante de sa véracité. Que dit-il à leur sujet ? Que, lorsque le Christ fut arrêté, après tant de miracles qu'il avait opérés, eux prirent la fuite, et que leur chef lui-même le renia. Comment se fait-il que ces mêmes hommes, qui n'avaient pas eu le courage de résister du vivant de leur maître, se soient portés, après sa mort et sa sépulture, à combattre contre le monde entier, si ce maître n'est pas ressuscité, s'il ne leur a pas parlé pour leur inspirer du courage ? Ne devraient-ils pas tenir ce langage : « Quoi donc ? Il n'a pu se sauver lui-même, nous protégera-t-il ? Il ne s'est pas défendu vivant, mort nous tendra-t-il la main pour nous aider ? »
Il est évident que, si les apôtres n'avaient vu Jésus ressuscité, s'ils n'avaient eu par devant eux un gage incontestable de sa puissance, jamais ils n'auraient joué ce terrible jeu9. »
La vraie gloire, c'est d'être aimé
« Jésus dit à Pierre : M'aimes-tu plus que ceux-ci ? (Jn 21, 15). Il montre par là qu'il n'attend de nous rien de plus. S'il a ordonné à Abraham de sacrifier son fils (Gn 22, 1-18), c'était pour montrer à tous l'ardent amour du patriarche. Or cette volonté d'être aimé ardemment vient elle-même d'un amour ardent. C'est pourquoi il disait aux Apôtres : Qui aime son père ou sa mère plus que moi n'est pas digne de moi (Mt 10, 37)10.
S'il ordonne de placer notre âme, qui est ce que nous avons de plus cher, au second rang après son amour, c'est qu'il veut que nous l'aimions avec excès. Nous-mêmes, en effet, quand nous n'avons pas de sentiments trop ardents pour quelqu'un, nous n'avons pas non plus ardemment besoin de son amitié, même si c'est un grand et qu'il est en vue. Mais, si nous aimons quelqu'un avec ferveur et sincérité, même si c'est un sans-grade et un petit, son affection est pour nous un très grand sujet de gloire.
Voilà pourquoi le Christ lui-même appelait gloire non seulement notre amour pour lui, mais aussi tous ces outrages qu'il a endurés pour nous. Or ces outrages ne devenaient un sujet de gloire que par amour, et ceux que nous, nous subissons pour lui, c'est non seulement par amour, mais aussi par la grandeur et la dignité de celui que nous chérissons, qu'à bon droit ils sont appelés et deviennent une gloire.
Courons donc pour lui aux dangers comme vers des couronnes de haut prix, et que ni la pauvreté, ni la maladie, ni l'injure, ni la calomnie, ni la mort même ne soient pour nous un fardeau trop pesant, dès lors que nous les endurons pour lui11. »
  • Jean Chrysostome, écrit à son très excellent Théophile.
Saint Luc, évangéliste : « J'ai décidé ... d'écrire pour toi un exposé suivi. » (Lc 1, 3)
« La lecture des saintes Écritures est un pré spirituel et un paradis de délices, bien plus agréable que le paradis d'autrefois. Ce paradis, Dieu ne l'a pas planté sur la terre, mais dans les âmes des fidèles. Il ne l'a pas placé dans l'Éden, ni en Orient dans un lieu précis (Gn 2,8), mais il l'a étendu partout sur la terre et l'a déployé jusqu'aux extrémités de la terre habitée. Et puisque tu comprends qu'il a étendu les saintes Écritures sur toute la terre habitée, écoute le prophète qui dit : « Leur voix a retenti par toute la terre et leurs paroles jusqu'aux extrémités du monde » (Ps 18,5) ; (Rm 10,18)
Ce paradis a aussi une source comme celui d'autrefois (Gn 2,6.10), source d'où naissent d'innombrables fleuves… Qui le dit ? Dieu lui-même qui nous a fait le don de tous ces fleuves : « Celui qui croit en moi, dit-il, selon le mot de l'Écriture, de son sein couleront des fleuves d'eau vive » (Jn 7,38)… Cette source est incomparable non seulement par son abondance, mais encore par sa nature. En effet ce ne sont pas des rivières d'eau, mais les dons de l'Esprit. Cette source se partage entre toutes les âmes des fidèles, mais elle n'en est pas diminuée. Elle est divisée, mais elle n'est pas épuisée… Tout entière chez tous et tout entière en chacun : tels sont en effet les dons de l'Esprit.
Veux-tu savoir quelle est l'abondance de ces rivières ? Veux-tu savoir la nature de ces eaux ? En quoi elles sont différentes des eaux d'ici-bas, parce qu'elles sont meilleures et plus magnifiques ? Écoute à nouveau le Christ parlant à la Samaritaine pour comprendre l'abondance de la source : « L'eau que je donnerai à celui qui croit, dit-il, deviendra en lui source d'eau jaillissant en vie éternelle » (Jn 4,14)… Veux-tu aussi connaître sa nature ? Fais-en usage ! Elle n'est pas utile en effet pour la vie d'ici-bas, mais pour la vie éternelle. Passons donc notre temps dans ce paradis : soyons invités à boire à cette source12. »

Voir aussi

Éditions modernes

Traités

  • Exhortations à Théodore
  • Traité du sacerdoce
  • Apologie de la vie monastique
  • Comparaison du solitaire et du roi
  • Traité de la componction
  • Traité des cohabitations illicites
  • Traité de la virginité
  • Traités contre les secondes noces
  • Traités polémiques.

Homélies, sermons et discours

Sur l'Ancien Testament
  • Jean Chrysostome (trad. Laurence Brottier), Sermons sur la Genèse, Paris, CERF, coll. « Sources chrétiennes », octobre 1998, 410 p. (ISBN 2-204-05996-X)
  • Jean Chrysostome, édition Henri Sorlin, Commentaire sur Job, vol. 1, Paris, CERF, coll. « Sources chrétiennes », janvier 1998, 372 p. (ISBN 2-204-03007-4)
  • Jean Chrysostome, édition Henri Sorlin, Commentaire sur Job, vol. 2, Paris, CERF, coll. « Sources chrétiennes », novembre 1988, 312 p. (ISBN 2-204-03050-3)
  • Jean Chrysostome (trad. Jean Dumortier), Homélies sur Ozias, Paris, CERF, coll. « Sources chrétiennes », janvier 1981, 256 p. (ISBN 2-204-01687-X)
Sur le Nouveau Testament
  • Jean Chrysostome, Commentaire sur l’Évangile selon saint Jean : édition abrégée, établie et présentée par Jacques de Penthos, Perpignan, Artège, juin 2012, 499 p. (ISBN 978-2-36040-097-3)
  • Jean Chrysostome, édition abrégée, établie et présentée par Jacques de Penthos, Homélies sur les épîtres de saint Paul : Lettres aux Corinthiens, vol. 1, Paris, F.-X. de Guibert, coll. « Religion », janvier 2009, 350 p. (ISBN 978-2-7554-0322-0)
  • Jean Chrysostome, édition abrégée, établie et présentée par Jacques de Penthos, Homélies sur les épîtres de saint Paul : Lettre aux Romains, Lettre aux Éphésiens, vol. 2, Paris, F.-X. de Guibert, coll. « Religion », mars 2009, 286 p. (ISBN 978-2-7554-0327-5)
  • Jean Chrysostome, édition abrégée, établie et présentée par Jacques de Penthos, Homélies sur les épîtres de saint Paul : Lettre aux Galates, Lettre aux Philippiens, Lettre aux Colossiens, Lettres aux Thessaloniciens, vol. 3, Paris, F.-X. de Guibert, coll. « Religion », mai 2009, 264 p. (ISBN 978-2-7554-0328-2)
  • Jean Chrysostome, édition abrégée, établie et présentée par Jacques de Penthos, Homélies sur les épîtres de saint Paul : Lettres à Timothée, Lettre à Tite, Lettre à Philémon, vol. 4, Paris, F.-X. de Guibert, coll. « Religion », juin 2009, 274 p. (ISBN 978-2-7554-0329-9)
Sur Dieu
  • Jean Chrysostome (trad. Robert Flacelière, préf. Jean Daniélou), Sur l'incompréhensibilité de Dieu : Homélies I-V, Paris, CERF, coll. « Sources chrétiennes », juin 2000, 366 p. (ISBN 2-204-06569-2)
  • Jean Chrysostome (trad. Anne-Marie Malingrey), Sur la providence de Dieu, Paris, CERF, coll. « Sources chrétiennes », mai 2000, 288 p. (ISBN 2-204-06525-0)
  • Homélies diverses : Homélies sur les textes de la Bible (Genèse, Psaumes, Isaïe, Matthieu, Actes des apôtres, Lettres aux Thessaloniciens, aux Hébreux) ;

Lettres

Un exemple particulier est la série des Lettres à Olympias.
  • Jean Chrysostome, Lettres à Olympias, Éditeur : Cerf, 1976, Collection : Sources Chrétiennes, (ISBN 978-2204036122)

Bibliographie

  • Hans von Campenhausen, Les Pères grecs, Seuil, coll. « Livre de vie », 1969 (1re édition 1963) (ISBN 2-02-000546-8).
  • J.-M. Le Mayeur et al., Histoire du Christianisme, tome 2, Naissance d'une chrétienté, Desclée de Brouwer, 1995, p. 481-497.
  • (en) dans Catholic encyclopedia.
  • Diaconie Apostolique, La Divine Liturgie de saint Jean Chrysostome, Éditions de Chevetogne, juillet 2012
  • Catherine Broc-Schmezer, Les figures féminines du Nouveau Testament dans l’œuvre de Jean Chrysostome : Exégèse et pastorale, Paris, Institut d'études augustiniennes, coll. « Collection des études augustiniennes », novembre 2010, 581 p. (ISBN 978-2-85121-230-6)
  • Jean Chrysostome (préf. Laurence Brottier), Les Propos sur la contrition de Jean Chrysostome : Le destin d'écrits de jeunesse méconnus, Paris, CERF, coll. « Patrimoine christianisme », janvier 2010, 452 p. (ISBN 978-2-204-08971-5)
  • Rudolf Brändl, Gilles Dorival, Charles Chauvin, Jean Chrysostome : Saint Jean Bouche d'or, 349-407, Cerf, 2003, (ISBN 2204070238)
  • Jacques de Penthos, Saint Jean Chrysostome, Commentaire sur l'évangile selon Saint Matthieu, Édit. Artège, 2012, (ISBN 2360401173)
  • Jacques de Penthos, Saint Jean Chrysostome, Commentaire sur l'évangile de Saint Jean, Édit. Artège, 2012, (ISBN 2360400975)
  • Collectif, La Divine liturgie de saint Jean Chrysostome, Cerf, (Catéchèse orthodoxe), 1986, (ISBN 2204024279)
  • Jacques de Penthos, Saint Jean Chrysostome, Homélies sur les épîtres de saint Paul : Tome 1, Lettres aux Corinthiens, Édit. François-Xavier de Guibert, 2009, (ISBN 2755403225)
  • Jean-Yves Leloup, Robert Flacelière, Homélies de Jean Chrysostome sur l'incompréhensibilité de Dieu, Albin Michel - Editions du Cerf, 1993, (ISBN 2226063919)
  • Jacques de Penthos, Saint Jean Chrysostome, Commentaire sur les actes des apôtres, Édit. Artège, 2013, (ISBN 2360402102)
  • Jacques de Penthos, Saint Jean Chrysostome, Homélies sur les épîtres de saint Paul : Tome 2, Lettre aux Romains - Lettre aux Ephésiens, Édit. François-Xavier de Guibert, 2009, (ISBN 2755403276)
  • Jacques de Penthos, Saint Jean Chrysostome, Homélies sur les épîtres de saint Paul : Tome 3, Lettre aux Galates, Lettre aux Philippiens, Lettre aux Colossiens, Lettres aux Thessaloniciens, Édit. François-Xavier de Guibert, 2009 (ISBN 2755403284)
  • Jacques de Penthos, Saint Jean Chrysostome, Homélies sur les épîtres de Saint Paul : Tome 4, Lettres à Timothée, Lettre à Tite, Lettre à Philémon, Lettre aux Hébreux, Édit. François-Xavier de Guibert, 2009, (ISBN 2755403292)
  • Anne-Marie Malingrey, Lettres à Olympias suivi de Vie anonyme d'Olympias, Collection « Sources chrétiennes » - Textes grecs N° 13—bis, Cerf, 1968, (ISBN 2204036129)
  • Laurence Brottier, Sermons sur la Genèse, Cerf, Collection « Sources chrétiennes » - Textes grecs N° 433, Cerf, 1998, (ISBN 978-2204059961)
  • Laurence Brottier, Figures de l'évêque idéal : Jean Chrysostome, Jean Damascène, Belles Lettres, 2004, (ISBN 978-2251339450)
  • Louis Doutreleau, Auguste Piédagnel, Trois catéchèses baptismales, Collection « Sources chrétiennes » - Textes grecs N° 366, Cerf, 1990, (ISBN 2204042315)
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Articles connexes

Liens externes

Notes et références

  1. La date de naissance est discutée.
  2. Deuxième discours, Contre ceux qui observent le jeûne des juifs et contre les juifs eux-mêmes, 3.
  3. Ce sermon nous a été rapporté par l'historien Socrate le Scolastique. Mais l'historiographie du XIXe siècle tend à le considérer comme apocryphe.
  4. Ces nominations sont condamnées et cassées par le pape Innocent Ier.
  5. a et b Saint Jean Chrysostome [archive] sur nominis
  6. Homélie 54 sur la Genèse, § 3-4 (PG 54, 475-476), trad. inédite de G. Bady.
  7. Source dictionnaire du CNRTL [archive]
  8. En particulier saint Jean (Jn 1, 45-51).
  9. Homélie 4 sur la 1er Épître aux Corinthiens, trad. En-Calcat, Lectionnaire pour chaque jour de l'année, 3, Solesmes/Cerf, 2005, p. 795-796.
  10. Homélies sur les épîtres de saint Paul : Tome 2, Lettre aux Romains - Lettre aux Éphésiens, Jacques de Penthos, édit : François-Xavier de Guibert, 2009, (ISBN 2755403276)
  11. Homélie 10 sur l'Épître aux Romain, 5-6, PG 60, 482, trad. inédite de G. Bady
  12. Troisième Homélie sur l’inscription des Actes des Apôtres, PG 51,87, trad. coll. Migne, n° 66, p. 132.
  • Dernière modification de cette page le 29 juin 2016, à 13:40.

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