jeudi 28 février 2013

renonciation de Benoît XVI - homélie de Dom Robert Le Gall, abbé émérite de Kergonan et archevêque de Toulouse

MESSE D’ACTION DE GRÂCES
POUR LE PONTIFICAT DE BENOÎT XVI
EN LA CATHÉDRALE SAINT-ÉTIENNE DE TOULOUSE
LE JEUDI 28 FÉVRIER 2013

            Oui, frères et sœurs, nous avons bien l’impression d’être « passés au crible comme le froment », selon la parole de Jésus à Pierre que nous venons d’entendre. L’Église est malmenée par les médias : c’était vendredi dernier en la fête de la chaire de saint Pierre à Rome, avec l’affaire de lobbies gay au Vatican, liée à des accusations de blanchiment d’argent de la drogue. Rien n’aura épargné notre pape Benoît XVI pendant son pontificat et jusqu’à son dernier jour d’« humble travailleur à la vigne du Seigneur », comme il s’était présenté au balcon de saint Pierre de Rome le jour de son élection, le 19 avril 2005.
            Lui-même a dit que « l’ennemi le plus dangereux de l’Église se trouvait à l’intérieur », ce qui nous invite tous à un examen de conscience. Comment notre vie, nos actes rendent témoignage à la vérité de l’Évangile ? Comment, pour reprendre les termes du Message final du Synode sur la nouvelle évangélisation, sommes-nous dans notre vie en cohérence avec notre foi ? Comment sommes-nous crédibles aujourd’hui dans un monde où tout est livré à nu ? Une orientation de fond nous a été donnée pour répondre à ces questions cruciales : faire l’expérience personnelle d’une relation vivante avec Jésus Christ, grâce à sa Parole et aux sacrements, à l’image de la rencontre de Jésus avec la Samaritaine sur la margelle du puits de Jacob. En tout cas, nous pouvons dire, nous les Évêques de France, que nous sommes revenus de Rome, « affermis » (Lc 22, 32) par notre visite ad limina auprès du Saint-Père et de ses services ; la Province de Toulouse était la dernière à être reçue par lui, que nous avons trouvé fragile, fatigué, mais présent et délicat. Son discours aux 33 évêques m’a profondément « affermi » dans nos orientations diocésaines : liens pasteurs-communautés et pastorale des jeunes.
             Au tout début du Synode, Benoît XVI avait dit, de façon improvisée, ce qui suit en prélude aux interventions des Pères : « Le chrétien ne doit pas être tiède. L’Apocalypse nous dit que là est le plus grand danger du chrétien : il ne dit pas non, mais un oui très tiède. Cette tiédeur discrédite le christianisme. La foi doit devenir en nous une flamme de l’amour, une flamme qui allume réellement mon être, devient une grande passion de mon être et allume ainsi mon prochain. Ceci est le mode de l’évangélisation. Que la vérité devienne en moi charité. Et la charité allume l’autre aussi, comme le fait le feu. C’est seulement dans cette action d’allumer l’autre à travers la flamme de notre charité que croît réellement l’évangélisation, la présence de l’Évangile, qui n’est plus seulement parole, mais réalité vécue. Il convient en outre que ce feu soit un feu intelligent. » Le pape employait l’image de « la sobre ivresse de l’Esprit », que chante une hymne de la Liturgie des heures, pour exprimer l’élan missionnaire qui doit suivre la chaude saveur laissée en nos cœurs par la présence dynamique de l’Esprit Saint.
            « Que la vérité devienne en moi charité ! », disait Benoît XVI au Synode. Au tout début de l’Année de la foi, il relie de la sorte les deux vertus théologales. Il est curieux de constater que ce pape théologien a tenu à consacrer sa première Lettre encyclique à la charité, à l’amour, dont il détaille avec finesse les diverses formes, pour montrer que Dieu est Amour (littéralement « charité » »), selon l’annonce faite par saint Jean en sa première lettre : un amour exigeant, qui s’incarne et qui invite à s’engager au service des petits et des pauvres. « Si je vois avec les yeux du Christ, je peux donner à l’autre bien plus que les choses qui lui sont extérieurement nécessaires : je peux lui donner le regard d’amour dont il a besoin » (n. 18).
            La troisième Lettre encyclique de Benoît XVI, La charité dans la vérité, est consacrée au « développement humain intégral dans la charité et la vérité ». Toujours ce duo qui, pour notre pape, est seul fécond, y compris dans le domaine économique et social. « L’être humain est fait pour le don, c’est le don qui exprime et réalise sa dimension de transcendance » (n. 34). Ce qui se vérifie dans le domaine concret des relations humaines de tous ordres, où le pape ose parler d’ « échange de dons » et même de « principe de gratuité », à condition que l’on reçoive les dons de Dieu : « Parce qu’elle est un don que tous reçoivent, la charité dans la vérité est une force qui constitue la communauté, unifie les hommes de telle manière qu’il n’y ait plus de barrières ni de limites » (Ibid.).
            La charité revient encore dans son Exhortation apostolique post-synodale sur l’Eucharistie : Le sacrement de l’amour (littéralement « charité », un an après l’Encyclique Dieu est Amour), celui que nous célébrons ce soir en action de grâce pour le service d’amour de notre Saint-Père, sacrement où retentit en toute sa puissance et sa délicatesse la Parole de Dieu (cf. l’Exhortation apostolique Verbum Domini).
            Entre la charité, force et délicatesse de l’amour venu de Dieu et dirigé vers Dieu, et la vérité, où foi et raison se confortent l’une l’autre, il faut mentionner la deuxième Lettre encyclique de Benoît XVI, où il s’attarde sur « L’espérance chrétienne » : Sauvés dans l’espérance. Le pape y parle du désir et de l’attente, dans un monde pleins de dieux ou plutôt d’idoles, les gens sont sans espérance, parce que « sans Dieu » comme dit saint Paul (Ep 2, 12 ; n. 2). Les chrétiens se distinguent en cela qu’ils ont un avenir, un au-delà et un chemin vers cet au-delà qui s’appelle le Royaume. Notre Saint-Père termine par un appel à la prière comme école de l’espérance ; elle est un exercice du désir qui élargit le cœur.
            À cette heure où se retire Benoît XVI, il nous dit, selon les paroles prononcées hier en sa dernière Audience générale sur la Place Saint-Pierre : « J’ai demandé à Dieu avec insistance, dans la prière, de m’éclairer de sa lumière pour me faire prendre la décision la plus juste, non pour moi, pas pour le bien de l’Église. J’ai fait ce pas en pleine conscience de sa gravité et aussi de sa nouveauté, mais avec une profonde sérénité d’âme. Je n’abandonne pas la croix, mais je reste de façon nouvelle près du Seigneur crucifié. Je ne porte plus le poids de la charge pour le gouvernement de l’Église, mais, dans le service de la prière, je reste dans l’enceinte de Saint-Pierre. Saint Benoît, dont je porte le nom comme Pape, me sera d’un grand exemple en cela. Il nous a montré le chemin pour une vie qui, active ou passive, appartient totalement à l’œuvre de Dieu. »
            Le Pape a dit encore, hier, en une sorte de testament : « Je voudrais vous inviter tous à vous confier comme des enfants dans les bras de Dieu, sûrs que ses bras nous soutiennent toujours et nous permettent de marcher chaque jour, même dans la difficulté. Je voudrais que chacun se sente aimé de ce Dieu qui a donné son Fils pour nous, et qui nous a montré son amour sans limite. Je voudrais que chacun sente la joie d’être chrétien ». Le dernier tweet du Saint-Père va bien dans ce sens : « Puissiez-vous expérimenter toujours la joie de mettre le Christ au centre de votre vie ! » Docteur de la foi, docteur de la joie, avec des mots très simples et profondément vrais, voilà le Pape qui se retire, mais qui reste avec nous. Béni soit le pape Benoît ! Qu’il nous bénisse et que Dieu le bénisse !
           

renonciation de Benoît XVI - homélie de Mgr. Raymond Centène, évêque de Vannes



cathédrale Saint-Pierre . soir du jeudi 28 Février 2013

mise au net n’engageant que le preneur de notes . Bertrand Fessard de Foucault


Une célébration partciulièrement exceptionnelle, alors que le siège de Pierre est vacant depuis quelques minutes. Nous sommes rassemblés pour rendre grâce. Particulièrement inédite, celui pour le ministère duquel nous rendons grâce est toujours vivant. Le mystère de la mort, de l’entrée dans la vie éternelle, la mort presque toujours qui vient anoblir leurs traits, engendre le processus d’une mémoire sélective qui permet de retenir les meilleurs de celui qu’on honore, tandis que le deuil dissimule les aspérités. Le genre littéraire de l’éloge funèbre est un genre convenu et relativement facile. La charité dans la vérité … Parler de l’oeuvre d’un vivant et rendre grâce pour cette œuvre nous oblige à éclaicir ces deux notions : la charité et la vérité l’une ne pas sans l’autre. Une de ses encycliques nous a invités à la caritas in veritate. La charité dans la vérité.

Quels sont donc les souvenirs que nous garderons de ce grand pontife ? Dans le message que j’adressais aux prêtres pour leur fare part de la renonciation de Benoît XVI et les inviter à cette messe, j’évoquais un pasteur humble et un théologien lumineux. De l’humilité, il en a fallu, il en falaliu en effet pour accepter de succéder à ce géant que fut Jean Paul II sans chercher à l’imiter ais ne restant soi-même. De l’humilité, il en a fallu, pour passer du statut du théologien à celui du pasteur universel donné aux foules, en spectacle aux uns et aux autres, et interdit de vie privée, ce qu’il a lui-même souligné à l’occasion de sa dernière audience publique. De l’humilité, il en a fallu pour être dans l’arène avec sa voix douce, plus habituée à persuader que convaincre, sa gestuelle timide jusqu’à paraître parfois un peu gauche. De l’humilité, il en a fallu pour passer du savoir au pouvoir en étant bien conscient que la vérité contemplée ne peut pas être imposée et qu’elle s’expose à l’incompréhension. Le style qu’il a donné à la papauté était très éloigné du panzer-pontife – priez pour moi afin que je ne tremble pas par peur devant l’ennemi ! De l’humilité qui a poussé celui qui s’est présenté le 19 Avril 2005 comme l’humble ouvrier, celui qui nous dit le 27 Février 2013, hier, la barque de l‘Eglise n’est pas la mienne, ni la nôtre, mais celle de Dieu. Il ne la laissera pas couler. Entre ces deux dates et ces deux citations, il a exercé le ministère pétrinien, comme un véritable service faisant passer la gloire du Maître avant celle du serviteur, nous invitant à nous tourner vers Dieu et non vers lui. I exepke nous a redit les paroles de Jean Baptiste évoquant le Messie : il faut que qu’il grandisse et que je diminue. Une humilité vécue au quotidien dans son exisutence comme dans son minostère qui lui confère aujourd’hui la grandeur que donne le renoncement. De l’humilité, il en a fallu, pour reconnaître ses limites pour dire : je ne peux plus, dans un monde qui glorifie la toute-puissance. De l’humilité, il en a fallu, pour. De l’humilité, il en a fallu pour reconnaître les outrages inexorables du temps dans une société qui se grise dans la recherche illusoire d’une éternelle jouvence sur fond de rejet de la nature humaine et des limites de sa condition. Il avait écrit en 2010 : si un pape se rend compte clairement qu’il n’est plus capable physiquement et psychologiquement ou spirituellement d’accomplir les tâches de sa fonction, il a le droit et, selon certaines circonstances, le devoir de démissionner. De l’humilité, il en a fallu pour pouvoir penser qu’un autre sera plus capable que soi d’affronter les nouvelles tempêtes au gouvernail de l’Eglise. De l’humilité, il en faut pour voir la vérité, pour l’admettre, et pour la traduire en acte, et c’est là que se joue la cohérence de celui qui fut tout à la fois un pasteur humble et un théologien lumineux.

Le ministère de Benoît XVI est marqué par le souci constant d‘ouvrir aux hommes le chemin de la vérité dans le contexte diifficile de la post-modernité. Après que la raison ait été adorée au XVIIIème et XIXème siècles, la fin du XXème a marqué son déclin, elle est entrée en crise et a été foulée aux pieds, elle a été détrônée par l’affectivité ou bien rétrécie et limitée au seul domaine des sciences et techniques. L’attente d’une vérité universelle semble avoir disparu, la pensée est émiettée sous le pilon du subjectivisme et du relativisme qui consistent à penser que tout se vaut et que chaque individu est à lui-même la mesure et la irle du beau, du vrai et du bien. Par son œuvre de théologien, Benoît XVI a mis en évidence la logique du christianimse, la logique l’accord entre la sgesse et la révélation. A notre monde marqué par le nihilisme, il a rappelé l’importance de la loi naturelle pour le respect de l’homme et de la création. A notre Eglise, marquée par la sécularisation, il a demandé de restaurer la transcendance du culte divin. En proclamant l’année de la foi, à l’occasion du cinquantenaire du concile et en poursuivant la nouvelle évangélisation commencée par son prédécesseur. La foi comme alternative après la faillite de l’expérience libértale ou l’expérience marxiste. Celui qui lors de son élection présenté comme un pape de transition, se révèle a posteriori comme un  prophète et son enseignement est fondateur pour l’Eglise du XXIème siècle qui devrait être assise sur des convictions solides et approfondies. La pensée théologique de Benoît XVI qui est souvent apparue comme un signe de contradiction, n’est pas un intellectualisme froid, elle est habitée par la contemplation mystique et des vérités qu’il énonce et elle s’achève dans l’adoration.

Aujourd’hui, comme il le révélait lors de son dernier angelus en commentant l’évangile de la Transfiguration, Dieu l’appelle sur la montagne mais il n’abandonne pas l’Eglise : si Dieu le lui demande, c’est pour la servir avec le même dévouement. A notre action de grâce, nous voulons joindre notre prière pour la personne du pape émérite et notre supplication confiante pour l’avenir de l’Eglise.

en lisant Tariq Ramadan pour son bilan de Benoît XVI


Je crois plus à la critique interne, au jugement d’une chose, d’un événement et surtout d’une personne, sans l’a priori de soi, en perdant autant que possible son point de vue d’observateur situé, contingent, précaire. Je crois à une évaluation des personnes selon ce qu’elles veulent être plus que selon ce qu’elles nous apparaissent. Le factuel pour l’humain ne se découvre que dans les conséquences et que dans le cœur des autres – haineux ou aimant.

Je ne crois donc pas au jugement de la foi des autres selon la foi de soi – qui a cependant été tellement la manière de l’Eglise, de l’Eglise humaine en ses expressions datées et contingentes, en ce sens Josef Ratzinger n’y manqua pas, notamment pour ses lectures de la « théologie de la libération » ou sa reprise du dialogue d’un empereur byzantin avec un musulman sans doute renommé (le dialogue d’époque fut certainement de qualité et n’a pas été le fond du pape régnant dans son discours si mal rçu, celui de Ratisbonne) – je crois à l’empathie qui fait comprendre, découvrir, exprimer les questions, prolonger les réponses. L’agnostique quand il est en défense de son agnosticisme en faisant du doute ou de son apathie intellectuelle, l’un estimable, l’autre regrettable, est aussi totalitaire que l’Islam jugeant le christianisme, que l’Eglise affirmant qu’hors elle, il n’y a point de salut, que les Juifs ne cherchant plus même à dialoguer mais pouvant convertir par présence, et donnant là d’ailleurs un chemin que les musulmans pratiquent mais les chrétiens, au moins selon ce que je cotoie ou entend en France, ne savent pas ou plus.

Bilan d’un pape ? par rapport à ce qu’il voulut ? Réputation antérieure à son élection, selon Tarik Ramadan. Un pape affirmatif, à qui est dénié tout rayonnement mais seulement concédé des qualités personnelles, il est vrai impressionnantes. Résumé cinglant de Tarif, à qui je reconnais – pour ne l’avoir vaguement, évasivement vu et écouté à la télévision – un talent de plume et une vigueur de pensée… « le Pape a ainsi incarné la cohérence fermée, et troublante, de l’esprit dogmatique ». Soit… mais aux chrétiens fermés et dogmatiques que je rencontre, je ne reconnais nullement une cohérence puisque le maître et fondateur dont se réclame le chrétien est au contraire un Dieu su ouvert, qu’il s’incarne, prend notre condition et même nos manières de parler et de réfléchir. Benoît XVI est christo-centré, il cherche et trouvé le Vchrist dans l’histoire, il excelle à donner le portrait et l’apport de chacun de nos pères, docteurs et saints de l’Eglise. Sa théologie est une théologie fo,ndée sur la connaissance des personnes, à commencer évidemment par celle de Jésus. Jean Paul II canonisait presque les vivants, en tout cas les contemporains, ce qui était une autre manière de prêcher par l’exemple, l’œuvre de Dieu chez son saint, ou vis-à-vis du sceptique le résultat du spirituel dans une vie humaine. Pie XII, Jean XXIII, Paul VI eurent surtout affaire à une époque historique, événementielle : la guerre mondiale, la guerre froide, la décolonisation, le développement économique, donc de la doctrine et de l’analyse du temps. Textes et présence inégaux de rayonnement mais obligation du contemporain. Jean Paul II ferma cette ère, et excellemment car il devint lui-même l’événement, rien que son élection du fait de sa nationalité, d’un pays particulièremenr symbolique du nazisme et du communisme. Mais quand s’ouvrit une tout autre étape de l’humanité – peut-être avec le 11-Septembre fondant ce manichéisme islamophobe et raciste dont on cherchait depuis l’implosion soviétique, l’intitulé sinon le fait, le besoin d’ennemi pour expliquer le monde et se justifier soi-même – étape d’une recherche mentale, morale avec les théories sur la fin de l’histoire et avec l’apparition d’une nouvelle dogmatique totalitaire : le libéralisme mondialiste, Jean Paul II fut moins sûr et moins reçu. Benoît XVI sut éviter la succession et choisit une autre voie, mais les questions éthiques, le poison manichéen, l’agression mutuelle à propos du sexe, de la famille, de la procréation, les péchés du prêcheur l’assaillirent et aucun des papes récents n’avait préparé l’Eglise à cet assaut dont – jusqu’à présent – les autres grandes religions, et les chefs spirituels ont été dispensés.

Pour moi, Benoît XVI c’est celui qui adresse la grande lettre au clergé et aux fidèles d’Irlande. Il ne s’agit pas de foi mais de monstruosité, et la monstruosité – chacun devrait en revivre l’exemple dans sa propre vie quand la tentation quel qu’en soit la matière ou le thème est là si astreignante et insidieuse, si démembrante – est évidemment que ce soit le prêcheur qui ait péché, et qui se soit ingénié, protégé par le système et par ses congénères, à le cacher.

Principe de Benoît de Nursie, hoc sit quod dicitur. Qu’il soit ce qu’il dit être, ce qu’il prétend être. Evaluer quelqu’un selon lui-même, mais que cette personne-là corresponde vraiment à ce qu’elle veut d’elle-même.

Un pape doit-il être celui des médias ? peut-être quand celles-ci furent à leurs débuts mais quand – incapables de discernement selon leur propre mécanique – elles imposent un déferlement continuel, sont un lieu de carrière et d’assouvissement de soi dans des rôles publics, à l’instar des politiques, sans la formation de l’acteur, de l’enseignant, du prêcheur, faut-il que le pape entre dans la cohorte des objets du journalisme et du commentaire simpliste ? Certainement pas. Un pape sans bureau,n cloîtré, homme de prière et de rareté, aurait un rayonnement plus aisé à produire et plus universel à recevoir que ces gens environnés de perches à son et de micros, que ces baladins du pupitre dialoguant impudiquement entre eux devant tout le monde et proférant des banalités sentencieuses qui atterrent.

Les racines religieuses de l’Europe, donc judaisme et Islam ? Il y a l’histoire, elle est à écrire entre peuples comme entre idées et entre religions, entre mouvements de l’esprit, entre guerres et paix. Les faits compartimentés par les nationalités ou les idéologies (les histoires marxistes ou le providentialisme chrétien ou l’obsession rétrospective de la persécution des juifs ou l’esprit de conquête déferlante des sarrasins… et des maures) ne permettent pas de lire l’actualité alors que celle-ci est de plus en plus confluante et mélangeante. Il faut écrire les échanges et le mouvement des relations entre des blocs que nos intelligences ont façonné mais que les populations et plus encore les idées n’ont pas vécu. Ecrire ces racines, les proclamer ? on en a discuté pour la Constitution en projet au début des années 2000, sous la présidence efficace et intelligence de Valéry Giscard d’Estaing. Il me semble qu’il faut laisser à chaque matière sa logique propre et son domaine. Une Constsitution n’est pas la construction d’une histoire ou d’une identité, elle est un mode de fonctionnement, une hiérarchie des normes, elle traduit une identité mais seule sa pratique peut marquer cette identité. L’Europe est mélange, recherche, elle aurait dû rester un accueil. Elle est chrétienne autant que gréco-latine, elle a incontestablement attiré les envahisseurs, elle a accueilli des diasporas. On peut énumérer, c’est peu utile, l’essentiel est de constater qu’elle est revenue à l’origine de toute ambition politique, elle cherche les moyens de se vouloir et de se gérer, et n’y arrive pas actuellement puisqu’elle est dominée par des dogmes et des usages qui la minorent, alors qu’il y a peu encore c’est elle qui donnait le la. Ne se trouvant pas elle-même, elle n’est plus guère accueillante, elle se communautarise, l’Allemagne a su faire avec son passé et se fonder nationalement une seconde fois, mais nous ne savons que faire de ce qui est conscience de soi plus encore que race ou religion : les Juifs, les Arabes, tels que ressentis par les Européens,l’Islam et le judaisme étant d’ailleurs dans leur rapport à la personne, à l’histoire, à l’actualité extrêmement différents de nature et de comportement. Dans cette complexité d’une Europe mourante et à renaître, dans ces différences de nature entre les grandes confessions, dans cette émergence d’obsessions qui sont toutes, à la réflexion, sécuritaires (sécurité pour lire l’histoire, sécurité pour vivre dans son quartier, sécurité des émoluments en fin de mois, sécurité du vieil âge et des premiers temps de la vie, sécurité d’une transmission et des communications), le chef nominal de l’Eglise doit-il être chef d’idées et même pourvoyeur de rencontres. C’est physiquement et mentalement impossible. Le point de vue en hauteur qu’il soit celui du service, ou qu’il soit celui d’une supériorité systémique peut permettre un discours général, mais cela ne le rend pas acceptable ni vivable. Benoît XVI a eu la prudence de ne pas s’y essayer et les reproches de Tarik Ramadan sur le tronqué d’une lecture ecclésiale des grands facteurs de l’Europe s’adressent davantage à l’ensemble d’une génération, bouleversée par l’après-guerre, l’après-communisme, l’après-impéralismes coloniaux et auquel aucune succession n’a été apportée qu’un mondialisme déviant, et non à un pape quelconque. Que les rencontres inter-religieuses – je n’ai pas étudié ni même vraiment su celles d’Assise – ou que les réflexions propres à l’Eglise sur elle-même : les synodes dont le dernier sur la ré-évangélisation, soient gâtées par des recensions de pratiques, et donc par des compétitions de comportements, voire de recettes, c’est évident, mais le même mal ronge les travaux constitutionnels des pays émergents ou du printemps arabe, ronge les rapports qui pleuvent pour la reconquête de la France par elle-même. Benoît XVI en est plus victime qu’auteur.

Problème avec la jeunesse ? Quelle institution au monde – et Benoît XVI a démontré que tout n’était pas le fait du charisme de Jean Paul II – peut assembler des centaines de milliers de gens de toutes origines comme au J.M.J ? qui pour des homélies ou apparitions d’adieux peut mettre place Saint-Pierre, deux fois à quinze jours d’intervalle, deux-cent mille, cent-mille personnes. Les régimes totalitaires naguère : oui ! La recette catholique est d’ailleurs telle, si c’en est une, que l’on en a abuse, ainsi les démonstrations purement politiques et très instrumentées contre le projet de loi sur le mariage et l’adoption ouverts aux personnes de même sexe. Dévoiement de la piété et de la foi, entraînement à la haine. Les croisades ont tellement eu cette ambiguité qu’elles marquent encore les populations qui en ont subi l’assaut, il y a dix siècles. Faut-il préciser un problème par les statistiques. Certes, peu d’enfants à la messe dominicale, pas d’adolescents, mais il y a de jeunes couples fréquemment dont la piété, parfois de posture excessive, est bien plus apparente que celle des vieillards. Il y a certainement aujourd’hui plus d’incroyance en fin de vie, alors que les débuts avaient été encore sociologiquement chrériens, que je n’en vois chez les dix-huit-vingt ans.

L’énumération des questions ou problèmes – irrésolus par les papes précédents le successeur de Benoît XVI (les questions du célibat des prêtres, de l’exclusion des femmes de la hiérarchie cléricale, de la reconnaissance du divorce, de l’usage possible des moyens contraceptifs) – est classique. Tout à mon sens se résoudra par un sens des réalités et une redécouverte des sources, y compris pour de qui est plus des habitudes que du fond, auxquels fait accéder la prière. Car ce que je retiens de Benoît XVI, plus explicite en cela que ses prédécesseurs, c’est l’exhortation et la conviction, l’expérience de la prière. Ses vertus pas seulement psychologiques et théologiques, la prière concourant à l’équilibre intime de al personne et à la connaissance de Dieu, non ! sa vertu fondamentale qui est le discernement, l’élan, la force. Les dons du Saint Esprit, chacun de ces dons. Je suis convaincus que ce qui passe pour des défis se règlera le plus simplement du monde. De même que Benoît XVI a contribué en banaliser la fonction pontificale par sa renonciation. La jurisprudence forcera sans doute la suite des papes à abandonner ce qui faisait, psychologiquement et sociologiquement, mais non en termes de foi, une sorte de supériorité et de disposition à quelque idolâtrie : le mandat viager. Pape serviteur, le Christ a créé le précédent.

Tarik Ramadan a une conclusion juste. Le monde entier, et toutes confessions, toute âme attendent quelque chose du Souverain Pontife, du chef de cette Eglise catholique romaine. Rester objet d’attente et d’espérance – il n’y a guère que les présidents américains qui incarnent cela quand ils sont candidats pour la première fois, les engouements pour Kennedy et pour Obama… c’est beaucoup et cela demeure intact. Mais pourquoi ? parce que l’on prête au pape un pouvoir sur une immensité de fidèles. Un pouvoir mental sur une statistique respectable : autant de catholiques aujourd’hui que de Chinois… ou à peu près. Je crois que le fondement du possible rayonnement pontifical est tout autre. L’Eglise ne vaut – en sus, bien évidemment de son fondateur – que par ses fidèles, leur assemblée, leur prière. La solution de tous les problèmes tant pratiques que missionnaires, tant de contagion que de compassion dans le monde tel qu’il devient, que l’on pose à l’Eglise, plus d’ailleurs qu’elle ne se les pose, est dans la vie de chacun des chrétiens.

Pour moi, Benoît XVI, différent de ses prédécesseurs comme chacun le fut du sien et des siens, est l’homme-cible qui a su demeurer volontaire, garder la parole et poser des questions, les bonnes.

L’avenir immédiat va être passionnant. Deux autorités religieuses et morales vont coexister pendant quelques années ou quelque temps. C’est le « pape émérite » qui a à construire, pour le bien commun, cette coexistence selon son comportement et sa communication. Je ne doute ni de l’un ni de l’autre. Je réitère mon vœu d’une habitation désormais à Jérusalem, lieu de tous, et non d’une institution.

il sera comme un arbre planté au bord des eaux - textes du jour

Jeudi 28 Février 2013

Hier soir
Mort de Stéphane HESSEL, quatre-vingt-quinze ans, cela ne me paraît vieux, puisque Jean-Marcel JEANNENEY ou notre grand-père maternel… France-Infos. et LEYMARIE donnent des fragments d’entretien très récents. Il restait, légitimement, étonné du succès de sa plaquette Idignez-vous… car à la lire, on est heureux de la sincérité, de la source (Résistance-Libération-droits de l’homme) mais c’est très sirtué à tous égards. Le succès a donc été en quelques lignes donnant le mouvement au lecture, l’objurgation a donné l’adjectif. Pas la révolte mais le conytraire de la tolérance et cela en éthique. La rue donc… Essai aussi important et caractérisant notre époque que ILLITCH et MARCUSE marquèrent 1968, et HUTTINGTON le 11-Septembre… L’Allemagne de sa naissance, analyse d’une bonne volonté allemande après le traité de Versailles que les Alliés et nous, d’effrayants engrenages et des crispations n’accueillirent pas. Et pourtant… cette histoire que je veuix écrire de Cinq Français et l’Allemagne . Je savais évidemment depuis nos entretiens que Jules et Jim ce fut son enfance, et aussi sa carrière, somme toute étouffée par de GAULLE, quoiqu’il ait été un de ses ralliés des premiers jours, puisqu’il n’arrive à une position (le cabinet d’ABELIN pour la Coopéraiton et l’ « affaire Claustre » qu’en 1974, ayant végété aux Nations Unies version Genève. Passage sur Israël et les solutions de conflits par le droit international. C’est très neuf et bien dit. Evidemment, Israël ne s’en porte pas bien. Pour moi, la leçon d’HESSEL dont je retrouverai pour demain les entretiens que j’ai eus avec lui… c’est que dans une vie tout a un sens qui ne se trouve qu’ensuite si l’on cherche la dialectique qui nous a été donnée, mais que l’immédiat est riche pour toujours de réminiscences de bonheur et même de succès. Evidemment et enfin une gloire tardive, une reconstitution de carrière une fois la notoriété venue selon une mystérieuse alchimie, puisque SH n’a fait il y a trois ans qu’une exploitation la plus simple de ses convictions, de son expérience et de sa biographie, mais que celles-ci n’avaient pas particulièrement appelé les projecteurs auparavant. Ses mémoires Danse avec le siècle n’ont certainement pas eu un grand succès de librairie, initialement. Effectivement, démonstration d’une santé physique et morale, d’une capacité humaine de rayonnement et – en creux – le besoin de plus en plus grand et de moins en moins assouvi… de notre époque : une icône, des icônes. Et lévidence oubliée : ce sont des femmes, des hommes, des enfants qui sont repères pour les autres et pour un moment d’humanité, pas les événements, pas les procédures ni les machines. Et plus que le discours, il y a la vie, la courbe, la trajectoire.

Ce matin
Je cherche mon entretien avec Stéphane HESSEL autour de ma rencontre de l’Abbé Pierre, l’été de 1996, des débats sur le pamphet de GARAUDY, sur l’antisémitisme… et ne le trouve pas, je n’en sais plus même la date ni l’époque, ne le rattachant qu’à mon enquête pour cette incône en perdition alors, et quand lui-même n’en était pas encore une… je m’aperçois de l’illisbilité et de l’impraticabilité de mon journal, tel que je le tenais à l’époque, et surtout tel que je le présentais typographiquement pratiquement sans donner de repères… nécessité d’en extraire nominativement les entretiens que j’ai eus. Ces années-là entre mes fiançailles manquées avec Hélène et ma lutte contre ma disgrâce et mon exclusion (la liste des refus, des suites attendues et jamais arrivées, l’efrayante répétition du refis, de la dénégation, de la mésestime)… j’ai jouxté longtemps la folie. C’était ma réponse, dérive qui pourtant ne m’a pas mené à la mort, j’ai été positivement, manifestement sauvé.
Mes carnets de terrain, la reconstitution de mes chronologies mensuelles, apparemment perdues pour tout l’antérieur à 2000, alors que j’ai commencé de les tenir en 1992 pour le Kazakhstan. Toutes mes archives informatiques, donc, à réorganiser et à me réapproprier. Tâche aussi lourde sans doute qu’en cartons et papiers à trier et classer. Probablement mes carnets de terrain à complètement ré-exploiter. Je réalise mon bonheur et la sérénité, malgré des accès de déprime, comme autant de tentattions, version la cardinal tentation de préférer la mort à la vie, ou de se laisser aller en complète inertie : relation entre le faire et l’être, en entretien et sitmulation mutuelles. Bonheur et sérénité depuis notre mariage, depuis la naissance de Marguerite, les grands équilibres trouvés d’une vie. Les avoir trouvés/reçus si tard dans ma vie, sensation de commenceent et de naissance à une vérité, qui s’appelle la vie.
Prier… action de grâce… union avec Benoît XVI quoique le mystère de son départ s’accentue (il y a ce rapport tenu secret et d’effet aussi dévastateur que celui sur les finances et malversations du Vatica, qu’aurait étudié Jean Paul Ier la nuti de sa mort – maintenant il s’agirait, énièmement, de la pédophilie, de l’homosexualité et des mœurs dans le clergé romain, voire des remontées du passé dans les biographies des participants au conclave…). Il n’est pas compris comme je l’ai compris, c’est-à-dire en termes d’appel à une réflexion d’ensemble sur l’Eglise par ses fidèles et pas seulement son encadrement ou sa hiérarchie, vg. ces frère et sœur venus de Vendée en stop, et retour itou…  uniquement l’affection, le souvenir des JMJ, parfait, mais est-ce opérant et exigeant ? structurant pour eux-mêmes sûrement… mais l’envoi en mission… réflexion sur l’Eglise, mais au-delà sur la responsabilité collective des religions révélées, sur le religieux et le spirituel à notre époque, telle qu’elle est et telle qu’elle a, à l’évidence, besoin d’être sauvée puisque ses dirigeants de tous ordres battent la campagne et sont prisonniers de ce dont ils ont hérités et des dogmes auxquels ils continuent de consentir. Si le monde paraît tant enmouvement, c’est qu’en réalité il a été figé, il s’est figé. – Paradoxalement, cette découverte de nouveaux chantiers, de nouveaux travaux pour pleinement disposer de ce que j’ai déjà fait ne m’abat pas ce matin. Quant à l’état du monde, sa friche m’encourage au travail. Peut-être doit-il en être ainsi pour ces passages nuageux, la dépression, ce qu’appelait hier mon cher JPD : la morpho-phobie, la haine de soi, ou l’impraticabilité de soi. Sortir…[1] le fossé, Lazare et le riche. Homonymie avec le miraculé, frère de Marthe et de Marie. Fossé du vivant des deux, fossé pour l’éternité. Justice distributive… Tu as reçu le bonheur pendant ta vie et Lazare, le malheur. Maintenant il trouve la consolation, et toi, c’est ton tour de souffrir. De plus, un grand abîme a été mis entre vous et nous, pour que ceux qui voudraient aller vers vous ne le puissent pas, et que, de là-bas non plus, on ne vienne pas vers nous. Texte très difficile, car il dit l’irréparable. Or toute la Bible et toute notre foi sont précisément qu’il peut y être porté remède : la rédemption, l’incarnation. Parabole avertissement ? ou parabole réalité, confirmation de la réalité, car entre Lazare et le riche, ce ne serait qu’inversion des situation mais toujours pas la tombée des murs de séparation. De là, l’interrogation, de quel côté suis-je ? et une dévotion, une piété qui ne serait que la « peur de l’enfer » pouvant cependant conduire au « zèle des âmes », en sauver à défaut de se sauver soi-même, ou se sauver en sauvant, etc… chaque époque se construit spirituelelment et psychologiquement. En juger est vain. C’est le présent que nous avons à vivre pour faire un aurre avenir que celui d’une perpétuité de nos erreurs et de nos manques. Au jugement, les méchants ne se lèveront pas, ni les pécheurs, au rassemblement des justes. Vient la route… début de la lumière. Le Seigneur connaît le chemin des justes, mais le chemin des mévhants se perdra. … Le cœur de l’homme est compliqué et malade ! Qui peut le connaître ? Moi, le Seigneur qui pénètre les cœurs et qui scrute les reins, afin de rendre à chacun selon ses actes, selon les fruits qu’il porte. Ce matin, l’humilité terre de toute espérance. Pensée priante pour tant et tant, pour tout et tout, tandis que se lève un nouveau jour, que mes aimées s’éveillent peut-être seulement à présent.


[1] - Jérémie XVII 5 à 10 ; psaume I ; évangile selon saint Luc XVI 19 à 31

mercredi 27 février 2013

dernière audience générale accordée par Benoît XVI - mercredi 27 février 2013

BENOÎT XVI
AUDIENCE GÉNÉRALE
Place Saint-Pierre
Mercredi 27 février
2013
 
Chers frères et sœurs,
En ce moment, je voudrais surtout rendre grâce à Dieu qui guide et fait grandir l’Église, qui sème sa Parole et nourrit ainsi la foi de son peuple. Je remercie toutes les personnes qui, avec générosité, m’ont aidé et m’ont été proches durant mon pontificat. Ces derniers mois, j’ai senti que mes forces avaient diminué et j’ai demandé à Dieu de m’éclairer pour prendre la juste décision pour le bien de l’Église. Je vous remercie pour le respect et la compréhension avec lesquels vous l’avez accueillie. Je continuerai à accompagner le chemin de l’Église par la prière et la réflexion. En cette Année de la foi, je vous invite à renouveler votre ferme confiance dans le Seigneur et à vous sentir aimés de Dieu qui nous a montré son amour infini. Il guide et soutient toujours son Église. Ne perdons jamais de vue cette vision de foi ! Que votre cœur soit rempli de la joyeuse certitude que le Seigneur est proche de nous et qu’il nous accompagne de son amour !
* * *
Je vous salue cordialement chers pèlerins de langue française, en particulier les personnes venant de France, de Belgique et des pays francophones qui ont voulu m’accompagner en étant présentes ici ou par la radio et la télévision. Je vous demande de vous souvenir de moi devant Dieu et de prier pour les Cardinaux appelés à élire un nouveau Successeur de l’Apôtre Pierre. Priez aussi pour que le Seigneur l’accompagne de la lumière et de la force de son Esprit ! Que Dieu vous bénisse ! Merci.

ci-dessus, version tronquée  mise en ligne aussitôt

BENOÎT XVI
AUDIENCE GÉNÉRALE
Place Saint-Pierre
Mercredi 27 février
2013
Vénérés frères dans l’épiscopat et dans le sacerdoce !
Autorités distinguées,
Chers frères et sœurs !


Je vous remercie d’être venus si nombreux à ma dernière Audience générale.

Merci de tout cœur ! Je suis véritablement ému et je vois l’Église vivante ! Et je pense que nous devons dire aussi merci au Créateur pour le beau temps qu’il nous donne maintenant encore dans l’hiver.
Comme l’apôtre Paul dans le texte biblique que nous avons écouté, moi aussi je sens dans mon cœur le devoir de remercier surtout Dieu, qui guide et fait grandir l’Église, qui sème sa Parole et ainsi alimente la foi de son Peuple. En ce moment, mon âme s’élargit et embrasse toute l’Église répandue dans le monde ; et je rends grâce à Dieu pour les « nouvelles » qu’en ces années de ministère pétrinien j’ai pu recevoir concernant la foi dans le Seigneur Jésus Christ, et la charité qui circule réellement dans le Corps de l’Église et le fait vivre dans l’amour, et dans l’espérance qui nous ouvre et nous oriente vers la vie en plénitude, vers la patrie du Ciel.

Je sens que je vous porte tous dans la prière, en un présent qui est celui de Dieu, où je rassemble chaque rencontre, chaque voyage, chaque visite pastorale. Je ramasse tout et tous dans la prière pour les confier au Seigneur : pour que nous ayons la pleine connaissance de sa volonté, en toute sagesse et intelligence spirituelle, et pour que nous puissions mener une vie digne de Lui, de son amour, en portant du fruit en toute œuvre bonne (cf. Col 1, 9-10).

En ce moment, il y a en moi une grande confiance, parce que je sais, nous savons tous, que la Parole de Vérité de l’Évangile est la force de l’Église, est sa vie. L’Évangile purifie et renouvelle, porte du fruit, partout où la communauté des croyants l’écoute et accueille la grâce de Dieu dans la vérité et dans la charité. Telle est ma confiance, telle est ma joie.

Quand, le 19 avril il y a presque 8 ans, j’ai accepté d’assumer le ministère pétrinien, j’ai eu la ferme certitude qui m’a toujours accompagné : cette certitude de la vie de l’Église par la Parole de Dieu. En ce moment, comme je l’ai déjà exprimé plusieurs fois, les paroles qui ont résonné dans mon cœur ont été : Seigneur, pourquoi me demandes-tu cela et que me demandes-tu ? C’est un poids grand celui que tu me poses sur les épaules, mais si tu me le demandes, sur ta parole, je jetterai les filets, sûr que tu me guideras, aussi avec toutes mes faiblesses. Et huit années après, je peux dire que le Seigneur m’a vraiment guidé, m’a été proche, j’ai pu percevoir quotidiennement sa présence. Cela a été un bout de chemin de l’Église qui a eu des moments de joie et de lumière, mais aussi des moments pas faciles ; je me suis senti comme saint Pierre avec les Apôtres dans la barque sur le lac de Galilée : le Seigneur nous a donné beaucoup de jours de soleil et de brise légère, jours où la pêche a été abondante ; il y a eu aussi des moments où les eaux étaient agitées et le vent contraire, comme dans toute l’histoire de l’Église, et le Seigneur semblait dormir. Mais j’ai toujours su que dans cette barque, il y a le Seigneur et j’ai toujours su que la barque de l’Église n’est pas la mienne, n’est pas la nôtre, mais est la sienne. Et le Seigneur ne la laisse pas couler ; c’est Lui qui la conduit, certainement aussi à travers les hommes qu’il a choisis, parce qu’il l’a voulu ainsi. Cela a été et est une certitude, que rien ne peut troubler. Et c’est pour cela qu’aujourd’hui mon cœur est plein de reconnaissance envers Dieu parce qu’il n’a jamais fait manquer à toute l’Église et aussi à moi sa consolation, sa lumière, son amour.

Nous sommes dans l’Année de la Foi, que j’ai voulue pour raffermir vraiment notre foi en Dieu, dans un contexte qui semble la mettre toujours plus au second plan. Je voudrais vous inviter tous à renouveler votre ferme confiance dans le Seigneur, à nous confier comme des enfants dans les bras de Dieu, sûrs que ses bras nous soutiennent toujours et sont ce qui nous permet de marcher chaque jour, même dans la difficulté. Je voudrais que chacun se sente aimé de ce Dieu qui a donné son Fils pour nous, et qui nous a montré son amour sans limite. Je voudrais que chacun sente la joie d’être chrétien. Dans une belle prière à réciter quotidiennement le matin, on dit : « Je t’adore mon Dieu et je t’aime de tout mon cœur. Je te remercie de m’avoir créé, fait chrétien… ». Oui, nous sommes heureux pour le don de la foi ; c’est le bien le plus précieux, que personne ne peut nous ôter ! Remercions le Seigneur de cela chaque jour, par la prière et par une vie chrétienne cohérente. Dieu nous aime, mais il attend que nous aussi nous l’aimions !
Mais ce n’est pas seulement Dieu que je veux remercier en ce moment. Un Pape n’est pas seul pour conduire la barque de Pierre, même si c’est sa première responsabilité. Je ne me suis jamais senti seul à porter la joie et le poids du ministère pétrinien ; le Seigneur a mis à mes côtés beaucoup de personnes qui, avec générosité et amour envers Dieu et envers l’Église m’ont aidé et m’ont été proches. Surtout vous, chers frères Cardinaux : votre sagesse, vos conseils, votre amitié ont été précieux pour moi ; mes collaborateurs, à commencer par mon Secrétaire d’État qui m’a accompagné avec fidélité durant ces années ; la Secrétairerie d’État et toute la Curie romaine, comme aussi tous ceux qui, dans les différents secteurs, prêtent leur service au Saint-Siège : ce sont de nombreux visages qui n’apparaissent pas, qui restent dans l’ombre, mais justement dans le silence, dans le dévouement quotidien, avec esprit de foi et humilité, ils ont été pour moi un soutien sûr et fiable. Une pensée spéciale à l’Église de Rome, mon diocèse ! Je ne peux oublier les frères dans l’épiscopat et dans le sacerdoce, les personnes consacrées et le Peuple de Dieu tout entier : dans les visites pastorales, dans les rencontres, dans les audiences les voyages, j’ai toujours perçu une grande attention et une profonde affection ; mais moi aussi je vous ai aimés tous et chacun, sans distinction, avec cette charité pastorale qui est le cœur de tout Pasteur, surtout de l’Évêque de Rome, du Successeur de l’apôtre Pierre. Chaque jour, j’ai porté chacun de vous dans la prière, avec le cœur d’un père.
Je voudrais que mon salut et mes remerciements parviennent ensuite à tous : le cœur d’un Pape s’élargit au monde entier. Et je voudrais exprimer ma gratitude au Corps diplomatique près le Saint-Siège, qui rend présente la grande famille des nations. Ici je pense aussi à tous ceux qui travaillent pour une bonne communication et que je remercie pour leur important service.

À ce point, je voudrais remercier aussi de grand cœur toutes les nombreuses personnes dans le monde entier, qui au cours des dernières semaines, m’ont envoyé des signes émouvants d’attention, d’amitié et de prière. Oui, le Pape n’est jamais seul, je l’expérimente à présent encore une fois d’une façon si grande qui touche le cœur. Le Pape appartient à tous et un très grand nombre de personnes se sentent très proches de lui. C’est vrai que je reçois des lettres des grands du monde – des chefs d’État, des responsables religieux, des représentants du monde de la culture, etc. Mais je reçois aussi énormément de lettres de personnes simples qui m’écrivent simplement avec leur cœur et me font sentir leur affection, qui naît du fait d’être ensemble avec le Christ Jésus, dans l’Église. Ces personnes ne m’écrivent pas comme on écrit par exemple à un prince, ou à un grand qu’on ne connaît pas. Elles m’écrivent comme des frères et des sœurs, ou comme des fils et des filles, avec le sens d’un lien familial très affectueux. Là on peut toucher du doigt ce qu’est l’Église – non pas une organisation, une association à des fins religieuses ou humanitaires, mais un corps vivant, une communion de frères et de sœurs dans le Corps de Jésus Christ, qui nous unit tous. Expérimenter l’Église de cette façon et pouvoir presque pouvoir toucher de la main la force de sa vérité et de son amour, est un motif de joie, en un temps où beaucoup parlent de son déclin. Mais nous voyons combien l’Église est vivante aujourd’hui !

Ces derniers mois, j’ai senti que mes forces étaient diminuées, et j’ai demandé à Dieu avec insistance, dans la prière, de m’éclairer de sa lumière pour me faire prendre la décision la plus juste non pour mon bien mais pour le bien de l’Église. J’ai fait ce pas en pleine conscience de sa gravité et aussi de sa nouveauté, mais avec une profonde sérénité d’âme. Aimer l’Église signifie aussi avoir le courage de faire des choix difficiles, douloureux, en ayant toujours à coeur le bien de l’Église et non soi-même.

Permettez-moi ici de revenir encore une fois au 19 avril 2005. La gravité de la décision a été vraiment aussi dans le fait qu’à partir de ce moment, j’étais engagé sans cesse et pour toujours envers le Seigneur.

Toujours – celui qui assume le ministère pétrinien n’a plus aucune vie privée. Il appartient toujours et totalement à tous, à toute l’Église. La dimension privée est, pour ainsi dire, totalement enlevée à sa vie. J’ai pu expérimenter, et je l’expérimente précisément maintenant, qu’on reçoit la vie justement quand on la donne. J’ai dit précédemment que beaucoup de personnes qui aiment le Seigneur aiment aussi le Successeur de saint Pierre et ont de l’affection pour lui ; que le Pape a vraiment des frères et des sœurs, des fils et des filles dans le monde entier, et qu’il se sent en sureté dans l’étreinte de votre communion ; parce qu’il n’appartient plus à lui-même, il appartient à tous et tous lui appartiennent.

Le « toujours » est aussi un « pour toujours » ‑ il n’y a plus de retour dans le privé. Ma décision de renoncer à l’exercice actif du ministère, ne supprime pas cela. Je ne retourne pas à la vie privée, à une vie de voyages, de rencontres, de réceptions, de conférences, etc. Je n’abandonne pas la croix, mais je reste d’une façon nouvelle près du Seigneur crucifié. Je ne porte plus le pouvoir de la charge pour le gouvernement de l’Église, mais dans le service de la prière, je reste, pour ainsi dire, dans l’enceinte de saint Pierre. Saint Benoît, dont je porte le nom comme Pape, me sera d’un grand exemple en cela. Il nous a montré le chemin pour une vie qui, active ou passive, appartient totalement à l’œuvre de Dieu.

Je remercie aussi tous et chacun pour le respect et la compréhension avec lesquels vous avez accueilli cette décision si importante. Je continuerai à accompagner le chemin de l’Église par la prière et la réflexion, avec ce dévouement au Seigneur et à son Épouse que j’ai cherché à vivre jusqu’à aujourd’hui chaque jour et que je voudrais vivre toujours. Je vous demande de vous souvenir de moi devant Dieu et surtout de prier pour les cardinaux, appelés à une tâche si importante, et pour le nouveau Successeur de l’apôtre Pierre : que le Seigneur l’accompagne de sa lumière et de la force de son Esprit.
Invoquons la maternelle intercession de la Vierge Marie Mère de Dieu et de l’Église pour qu’elle accompagne chacun de nous et la communauté ecclésiale tout entière ; nous nous remettons à elle, avec une profonde confiance.

Chers amis ! Dieu guide son Église, la soutient toujours aussi et surtout dans les moments difficiles. Ne perdons jamais cette vision de foi, qui est l’unique vraie vision du chemin de l’Église et du monde. Dans notre cœur, dans le cœur de chacun de vous, qu’il y ait toujours la joyeuse certitude que le Seigneur est à nos côtés, qu’il ne nous abandonne pas, qu’il nous est proche et nous enveloppe de son amour. Merci !
* * *
Je vous salue cordialement chers pèlerins de langue française, en particulier les personnes venant de France, de Belgique et des pays francophones qui ont voulu m’accompagner en étant présentes ici ou par la radio et la télévision. Je vous demande de vous souvenir de moi devant Dieu et de prier pour les cardinaux appelés à élire un nouveau Successeur de l’apôtre Pierre. Priez aussi pour que le Seigneur l’accompagne de la lumière et de la force de son Esprit ! Que Dieu vous bénisse ! Merci

carême et conclave - 8 -

ne faisons pas attention à ce qu'il dit - textes du jour

Mercredi 27 Février 2013

Prier comme en hâte… journée… au moment de monter à Jérusalem, Jésus prit à part les Douze et, pendant la route, il leur dit… C’est déjà le chemin des « pélerins » d’Emmaüs, mais avant les faits rien n’est compréhensible. Notre religion n’est pas une prophétie, elle n’est pas une parabole ou une anticipation, elle est factuelle et les faits se rapportent à une personne précise. Le Fils de l’homme sera livré aux chefs des prêtres et aux scribes, ils le condamneront à mort et le livreront aux païens pour qu’ils se moquent de lui, le flagellent et le crucifient, et, le troisième jour, il ressuscitera. Sas rien comprendre, à preuve la demande au bénéfice des fils de Zébédée par leur mère (Jacques et Jean archiprivilégiés par la Transfiguration), nous participons, les Douze participent : Voici que nous montons à Jérusalem. Mais comme dans la vie de l’Eglise, alors même que – comme maintenant – il y a tout à réfléchir et à repenser, ce sont les questins de grade et de chefferies qui occupent les disciples (que nous sommes). Réponse : le Fils de l’homme n’est pas venu pour être servi, mais pour servir et donner sa vie en rançon pour la multitude. … celui qui veut être le premier sera votre esclave. De fait, le Christ le fut. [1] Prière du Christ : Ils ont creusé une fosse pour me perdre. Souviens-toi que je me suis tenu en ta présence pour te parler en leur faveur et pour détourner d’eux ta colère. … Ils ont tenu conseil contre moi, ils s’accordent pour m’ôter la vie. Moi, je suis sûr de toi, Seigneur, je dis : » Tu es mon Dieu ! ». Mes jours sont dans ta main : délivre-moi des mians hostiles qui s’acharnent. Tragique de l’existence humaine, tragique de l’incarnation du Christ, et certitude de la foi reçue quand de tous côtés c’est l’épouvante. Par les adeptes et ceux qui se croient fidèles, mais à quoi et à qui ? banalisation, au détriment du vrai, de tout ce qui a sens et fondation originels, vg. l’Eglise, mais elle n’est pas seule à être rongé par les intégrismes et les autismes : Allons, montons un complot contre Jérémie. Les consultations sur la loi ne risquent pas de disparaître par manque de prêtre, ni le conseil par manque de sage, ni la parole par manque de prophète. Allons, attaquons-le par nos paroles, ne faisons pas attention à ce qu’il dit.


[1] - Jérémie XVII 18 à 20 ; psaume XXXI ; évangile selon saint Matthieu XX 17 à 28

mardi 26 février 2013

Tariq Ramadan et le "bilan" de Benoît XVI

mon commentaire en ligne demain mercredi - à la suite du texte


Le Pape Benoît XVI : comme un Bilan
lundi,  25 février 2013

Le Pape Benoît XVI n’aura pas marqué l’Histoire d’une façon aussi particulière que son prédécesseur, le Pape Jean-Paul II. Ce dernier restera connu pour sa volonté d’ouverture, de service de l’humanité et de dialogue avec les spiritualités et les religions du monde. Quand le Cardinal Ratzinger est élu Pape, il y a huit ans, on sait déjà qu’il va réaffirmer la centralité du dogme, des principes et des règles de l’Eglise catholique. On le connaît théologiquement rigoureux, strict sur le dogme et la pratique, et sans concession vis-à-vis des autres traditions chrétiennes et des religions. L’Eglise est la vérité et doit le réaffirmer avec plus de clarté et de courage. C’est avec le souci de cette réaffirmation qu’il semble avoir conçu sa fonction papale.
Il faut reconnaître au Pape, qui aujourd’hui renonce, une impressionnante connaissance théologique, une intelligence méditative réelle et sincère. Il est fondamentalement catholique, profondément convaincu, avec un souci permanent de cohérence. Les premières années de son pontificat révéleront d’ailleurs les défauts de ses qualités au gré des relations avec le monde de la communication et des médias. Benoît XVI pense de l’intérieur, s’exprime en théologien féru de textes et de traditions, et quelques-uns de ses propos publics seront marqués du double sceau de la cohérence catholique et de la maladresse médiatique. Il passera lui-même du temps, ainsi que ses conseillers et représentants, à redire, réexpliquer, contextualiser un propos, une formule, un discours. Il ne fut pas un Pape des médias, mais bien un Pape de l’Ecriture, fidèle aux normes à rappeler, bien davantage qu’interpellé par les défis contemporains à relever.
Sa scrupuleuse cohérence l’a mené à affirmer des positions qui ont choqué à l’intérieur même de la famille chrétienne. Pour lui, au fond, la Vérité, et le seul vrai Salut, ne pouvaient être envisagés hors de l’Eglise catholique. Le dialogue avec les protestants, les orthodoxes, ou autres Églises chrétiennes était certes nécessaire et positif mais il ne devait pas faire oublier cette vérité. De fait, le dialogue avec les traditions monothéistes juive et musulmane, et au-delà avec l’hindouisme et le bouddhisme, était abordé avec la même cohérence : ces spiritualités et ces religions peuvent bien receler une part de vérité, elles ne sont en aucun cas des voies pour le salut des âmes. Le dialogue peut donc avoir pour objectif de discuter de principes éthiques communs, des pratiques respectives, ou des réalités sociales mais il ne peut être question de relativiser le fondement de vérité que seule l’Eglise catholique possède et incarne. Une position somme toute cohérente en amont, et logiquement - et dogmatiquement - exclusiviste en aval. Le Pape a ainsi incarné la cohérence fermée, et troublante, de l’esprit dogmatique : le dialogue interreligieux en devenait naturellement biaisé, dénaturé, presque inutile sinon sous l’angle de la compétition missionnaire ou de la comparaison des bonnes ou mauvaises pratiques.
C’est à la lumière de ces dernières préoccupations qu’il faut comprendre son propos à l’université de Ratisbonne en 2006. Sa relecture de l’histoire de l’Europe est nourrie par ses craintes quant à l’époque contemporaine. Deux menaces hantent le Vieux continent selon lui : la sécularisation qui marginalise la religion - en tant que foi, règles et espérance - et l’installation des musulmans dont le nombre, la pratique et la visibilité grandissants apparaissent comme un défi majeur pour l’Eglise catholique. C’est avec force - et quelques maladresses et inexactitudes historiques - que le Pape Benoît XVI va affirmer que les racines de l’Europe sont grecques et chrétiennes. Cette volonté de relire le passé, de réduire les racines de l’Europe à la tradition rationaliste hellène et à la foi chrétienne, ont pour but de réaffirmer l’identité de l’Europe : celle-ci ne peut-être définie sans le mariage centenaire de la raison grecque et de la foi chrétienne et les autres traditions, et particulièrement l’islam, sont des éléments exogènes à cette identité. L’Europe peut bien désormais compter des millions de citoyens musulmans, ceux-ci restent étrangers à l’identité profonde de l’Europe qu’il faut aujourd’hui rappeler, défendre, protéger. La vérité historique est pourtant bien autre et l’islam, comme le judaïsme, ont participé à la formation de l’âme européenne par leurs penseurs, leurs philosophes, leurs architectes, leurs écrivains, leurs artistes et leurs commerçants. L’islam est historiquement et actuellement une religion européenne et le propos du Pape est à décrypter à travers le prisme de la crainte de la présence musulmane et animée par un souci de réaffirmation missionnaire au coeur de l’Europe même.
C’est à travers ce même prisme que Benoît XVI s’engageait dans le dialogue interreligieux. Lors de nos différentes rencontres, dont la dernière à Rome en 2009, il ne fut jamais vraiment possible d’engager un dialogue sur les fondements théologiques et les principes : les débats, très vite, s’orientaient vers les pratiques respectives, le traitement des minorités chrétiennes en Orient. On pouvait certes parfois mettre en avant les valeurs communes, mais l’axe du dialogue était souvent la comparaison, la réciprocité, voire la compétition sur le terrain. Il faut certes engager ce débat sur le traitement des minorités chrétiennes en Orient car des discriminations existent et les musulmans doivent y répondre avec clarté, mais cela ne doit pas être le prétexte à éviter le débat théologique de fond ou plus largement la contextualisation historique et politique. Car enfin si les droits des musulmans sont parfois mieux respectés dans l’Occident sécularisé ce n’est certainement pas grâce au seul christianisme et s’ils sont parfois discriminés dans les sociétés majoritairement musulmanes ce n’est évidemment pas exclusivement à cause de certaines interprétations de l’islam. On ne peut faire fi des contextes historiques et politiques qui vont bien au-delà du strict dialogue interreligieux. Confiner le dialogue - avec les autres religions en général et avec l’islam en particulier, à ces postures missionnaires (face à la menace de l’islam en Occident) et systématiquement critiques (en pointant du doigt les contradictions dans les sociétés majoritairement musulmanes) ne peut qu’en dénaturer la substance et n’avoir que peu d’impact sur une meilleure connaissance mutuelle et un vivre ensemble fructueux, proactif, respectueux et harmonieux.
Il faut regarder la réalité en face, l’Eglise a désormais un réel problème avec la jeunesse. Les dernières années du Pape Jean-Paul II et la renonciation, à 85 ans, de Benoît XVI se révèlent être comme des symboles de l’époque : l’Eglise apparaît frileuse, sur la défensive, loin du monde, arcqueboutée sur des principes que des millions entendent et que très peu appliquent. Les églises d’Europe et d’Occident se vident et les fidèles sont de plus en plus âgés. Il faut espérer que le prochain Pape aura cet atout de la jeunesse d’esprit mariant le sérieux et la compétence théologiques avec la compréhension des défis majeurs de l’époque au sein de l’Eglise comme au cœur des sociétés contemporaines. Offrir un message catholique plus serein, plus ouvert aux autres traditions, qui, s’il s’affirme naturellement comme "la vérité" des fidèles, ne néglige jamais le dialogue, le respect mutuel et l’affirmation déterminée d’un Occident désormais pluriel et inclusif au nom même du message catholique. La reconnaissance de la diversité interne (les autres traditions chrétiennes) et externe (les autres spiritualités et religions) doit s’ajouter à l’ouverture de vrais débats internes sur les règles et les pratiques. Les questions du célibat des prêtres, de l’exclusion des femmes de la hiérarchie cléricale, de la reconnaissance du divorce, de l’usage possible des moyens contraceptifs, ou encore des réponses éthiques de l’Eglise catholique aux défis scientifiques et technologiques contemporains, sont autant d’interrogations qui devraient être la priorité du nouveau Pape : non pas contre les principes catholiques mais avec la double exigence de la fidélité aux principes, de la relecture critique des textes et de la responsabilisation face à l’état de la planète.
Toutes les traditions religieuses et spirituelles ont besoin de ce travail critique et autocritique : il nécessite l’apport d’un Pape, de prêtres et de responsables religieux (rabbins et ulama) compétents, sereins et courageux qui refusent la posture défensive et savent que leur rôle premier est de questionner les intelligences et les cœurs sur le sens de la vie et de la mort, la dignité des êtres dans leur diversité et l’affirmation de valeurs et de finalités supérieures (et universelles car partagées) auxquelles aucune société ne peut déroger. L’Eglise attend ce message et ce pastorat, comme d’ailleurs toutes les spiritualités et les religions à travers le monde.

*
*        *

17 Messages de forum

Mashallah, tres belle route.
Vs dites pas ou plutôt vs oubliez que le pape avé par le passé fait des erreurs ms heureusement qu il a changé her positions Its so important for muslims
Votre internaute habitante de meknes à bab mansour
Pour ce qui connaissent pas c’est en face de plaisance meknes
Pout la photographie est sans en être jalouse c waw wonderful
Surtout in the Rif chez nous
Pensee a toutes et a tous
Merci, ici en algérie nous avons le même sentiment pour ce bilan
en revanche en tant que musulmane algérienne je ne vois pas très bien la différence entre un imam et un pape ?
merci de m’éclairer là dessus ?
thank you
merci pour cet article monsieur ramadan :-))
oui, c’est vrai que Jean Paul II est restée très longtemps quasiment un siècle.
Ainsi Benoît XVI est contraint de part sa santé d’abandonner seulement au bout de quelques jours.
Mais la vie est ainsi parfois pour ne pas que sa santé prenne des risques, il vaut mieux partir et quitter
la santé est plus importante que tout
Jean-Paul II était très malade les 8 à 10 dernières années de sa vie, entre autres il souffrait de la maladie de Parkinson ; mais les hauts plaçés du vatican l’ont fait résister très longtemps...
oui mais il a raison compte tenu de ce qu’il a subi (plusieurs malaises etc.)
il faut mieux qu’il quitte
au moins lui il est mieux que cet imam de Drancy dont je n’ose dire le nom tellement il est speace
mon dieu une vrai catastrophe
en tout cas l’article est très instructif et témoigne de la hauteur prise pour pouvoir apporter un jugement aussi objectif sur l’église ! le passage sur l’identité de l’Europe m’a particulièrement séduit car n’étant que pure vérité
Cela ne date pas de Jean-Paul II ou de Benoît XVI que les églises catholiques sont presque vides. L’histoire du vatican est beaucoup plus complexe que ça. Sachez que de nombreux catholiques n’approuvent pas du tout le fonctionnement de cet état qui pratique l’obscurantisme religieux depuis des siècles ; ces sbires du vatican qui ont entre autres changé des paragraphes de la Bible, qui ont décidé du célibat/abstinence des prêtres, qui ont autorisé à manger de la viande porc, qui ont décidé de faire stopper la circoncision etc etc etc. Sans parler de la banque du vatican, une colossale fortune, qui n’aide jamais personne dans les monde. Et surtout les nombreux religieux pédophiles ou homosexuels qui sévissent entre ses murs.
En tout cas et Allah me voit je ne vais pas mentir mais y a pas que le facebook du vatican qui est connu par plein de journalistes et qui montre la réalité. En tout cas le facebook ff short qui parle du pétrole est connu des journalistes venues ces derniers jours dire leur condiléance. Je le fait fi sabillilah et Allah sait que je ne retirz aussi et je dis mes vrais condoléances a nos voisins marocains.
je suis en tout cas d’accord avec vous sur tous les plans.
ça ressemble à ce qu’on pense vs savez sur les organisations de l’EGLISE CATHOLIQUE qui a non seulement et il faut le dire encouragé à manger de la viande de cochon alors que les vrais chrétiens selon la théologie chrétienne inchangé ne mangeaient pas de cochons. Et en arabie seoudite faut dire que c’est pour ça que les seoudiens croit au hadith ou au récit prophétique sur la viande des gens du livre...etc.
Mais ça va car le pape a de tout de même et il faut le dire changez les ou certains principes : il est parti selon sa décision sans même attendre sa mort qui de ce fait constitue la fin du régne du pape. pardon mais c’est quand même le changement du siècle et ça je pense qu’il faut juste pour ça féliciter le pape.
vs n’êtes pas tellement lucide fatna je ne comprend pas trop votre façon de voir et sur l’imam de Drancy franchement il est correcte avec le CRIF. Ainsi et vraiment je pense qu’il faut plus préciser et s’appliquer compte à votre argumentation. Merci à vs.
meknasiyyya (maroc)
ce n’est pas bien de dire cochons ma soeur, ce n’est pas très poli . Il faut faire un effort...
puis tu es pas obligé de mettre des majuscules à certains endroits. Enfin comment peux-tu défendre les sionistes, ce sont vraiment des gens qui ne respecte pas le droit palestinien. J’ai une soeur elle a été en palestine et qu’est-ce qu’elle a pleuré de voir autant et autant de morts, d’injustice, mon Dieu c’était un cauchemard. Oui un vrai cauhemard. Le Crif compte à lui fait partie intégrante de cette idéologie d’ailleurs l’imam de drancy il est tombé dans le piège. mon autre soeur connaissait bien le système pour avoir été marié un autre imam (Dieu merci il était pas de la même idéologie que l’imam de Drancy) mais au moins connaissant les conseils des imams de France et ce qui se passe, on a découvert que même le Crif y participe, vous voyez un peu les intérêts qu’il a.
Pour la photographie il ne faut pas être jalouse, c’est donné à tout le monde.
Enfin mon frère de paris IV de quels facebook tu parles ? je ne vois pas du tout les facebook sur le pape. A ma connaissance le pape Benoît XVI en a pas, que veut dire le h ?
je ne comprend pas ? compte aux journalistes je n’ai pas entendu un quelconque problème dans la presse. Peut-être que j’ai manqué un evénement sur le pape car je n’ai pas suivi toute l’actualité.
Merci à vous frères et soeurs
Je vous quitte car j’ai beaucoup à faire
Je voulais simplement transmettre mes condoléances pour ce savant marocain que j’ai toujours aimé avec ma famille
méditer sur ce hadith que j’apprécie bien de sunnan : | سُنَن
قال يحيى بم معاذ - رحمه الله - : القلوب كالقدور فى الصدر تغلى بما فيها , ومغارفها ألسنتها , فانتظر الرجل حتى يتكلم فإن لسانه يغترف لك ما فى قلبه من بين حلو وحامض وعذب وأجاج
comme dit ma Mimi " notre cerveau utilisons le"
pensée à toi Lamia Islam
Bonjour / Salam A§a c’est sA"r
Je suis du même avis concernant la démission de Benoît XVI, c’est courageux. Je pense que Benoît XVI démissionne car il est profondément dégoûté et las des activités obscures du vatican. Il paraît qu’en l’an 1229 il y eut un pape démissionnaire pour les mêmes raisons...
Personnellement, je ne pense pas que l’avenue d’un nouveau pape plus « souple », comme l’espèrent beaucoup de gens, puisse changer quoi que ce soit dans les relations entre les différentes religions. L’église a beaucoup perdu de terrain, au point elle n’arrive plus à décider son propre sort. De ce fait, je reste assez dubitatif devant un tel évènement.
waw j’ai vu les facebooks sur le pape h
y’en a plein mais y’en a qui date d’une date avant même qu’on connait le pape
mais on connait tous la tactique lol pour créer des facebooks à une date ultérieur
mais ça reste du hram ce qu’elles font les journalistes
vous parlez du pape h méchament mais sérieux le pape h s’en fou des facebooks crées pour lui faire du tort
calomnier c’est hram pour arriver à transmettre une vision qui existe que dans certaines esprits journalistiques
que Dieu nous protège de la haine
la justice risque de donner raison à tout pour le pape h
le pape h il est heureux du côté spirituel
son honneteté avec Dieu y a rien à dire
pour moi c’est le plus important
c’est abusé je croyais pas au début mais là c’est fort ça dépasse tout
y a même la ville natal de ses parents comme info

ça me regarde pas après tout mais comme on dit aujourd’hui le fil blanc c’est la justice
merci monsieur ramadan
mes condoléances pour cheikh Yassine
le meilleur deuil je pense c’est de ne pas beaucoup en parler car Dieu pourrai penser qu’on aime pas son départ mais on peut pas le refuser car c’est le chois de Allah . Le silence c’est le meilleur deuil.
bon bilan aussi pour le pape.
dans les journaux d’alger ce matin en achetant un j’ai lu exactement la même chose avec jihad
" A 85 ans, Benoît XVI, de son vrai nom Joseph Ratzinger, a indiqué qu’il n’avait "plus les forces". En plus de la fatigue, le souverain pontife souffre d’une violente arthrose à la hanche. Derrière cette explication, d’autres raisons ont pu pousser le pape à prendre cette décision rarissime. Le scandale Vatileaks ou les affaires de pédophilie sont pointés du doigt, même si pour Antoine-Marie Izoard, journaliste au Vatican contacté par francetv info, l’état de santé du pape reste bien la première cause de cette démission"
Pourquoi c’est important
L’un des derniers hommes arabes vivant encore dans la ville de Tombouctou, Ali, 70 ans, a été violemment emmené jeudi 14 février par des soldats maliens, appréhendé juste après avoir donné une simple interview à un politologue belge. Le politologue en question, Pierre Piccinin da Prata, avait questionné Ali sur sa sécurité en tant qu’Arabe vivant à Tombouctou, et celui-ci l’avait rassuré, malheureusement à tort. Il était l’un des seuls parmi une poignée de familles arabes à être resté à Tombouctou, des centaines d’autres ayant fui, craignant la violence des militaires maliens. En effet, ceux-ci procèdent à de nombreuses arrestations et sont hautement suspectés de mettre en œuvre une épuration ethnique des Arabes et Touaregs du Nord du Mali depuis que la région a été libérée des islamistes d’Al-Qaïda par les armées française et malienne. Des témoins ont affirmé que les mains du vieil homme étaient liées et qu’il tremblait quand il a été poussé à l’arrière du pick-up des militaires. Ceux qui ont protesté ont été verbalement menacés de mort. Tout porte donc à croire que sans votre aide, citoyens du monde, Ali ne sera pas rendu vivant à sa famille. Aidez à la libération d’Ali ! Aidez sa famille à le retrouver en vie ! Dîtes non à l’épuration ethnique au Mali !
La pétition sera remise le 6 mars prochain, nous avons donc seulement quelques jours pour tout donner, signer, partager cette pétition et contacter les médias. Ali et sa famille compte sur vous !
http://www.avaaz.org/fr/petition/Sa...