mercredi 8 avril 2015

et les gens étaient frappés de stupeur et désorientés devant ce qu'il lui était arrivé... à vrai dire, des femmes de notre groupe nous ont remplis de stupeur ... - textes du jour

Mercredi 8 Avril 2015

Hier
Intensité aussi des changements dans notre société, dans notre vie politique, de l’ensemble du monde actuel, au point que je prends conscience de ce que mes expériences, mes raisonnements, toutes mes façons de voir et plus encore de projeter ne sont pas transposables. Je suis périmé. Et la vie aurait sa logique en abandonnant sa mise sur moi. Spirituel… mauvais terme comme s’il s’agissait d’une rubrique. La réalité est que la foi dont je sais bien qu’elle m’est donnée et peut sans condition ni préavis m’être retirée,me maintient, me fait vivre, me garantit. Tout ce qui m’importe : la relation avec mes aimées, mes projets politiques, mes souhaits d’écriture, je le vois et le vis avec cette certitude et aussi cette sensation d’être accompagné, béni.  

                      Ce matin
Singuliers rêves, dénuement et renouvellement. Situation de maintenant ? si déprimante… ainsi le prospectus de Franklin, mon ancien collège totalement « défiguré », exactement comme l’a été Sciences-Po. et sans doute l’est notre pays aujourd’hui, tel qu’il est mené. Soi-disant l’excellence, la première place par adaptation … l’inspiration unique d’aujourd’hui, en tout, c’est la comparaison, donc notre discontinuité !
Edith ne m’en veut pas de mon coucher si tôt hier soir, et ne s’en est pas inquiétée. Je ne saurai toujours jamais son « fonctionnement ». Hier, sa terreur : au pied de notre séche-linge dehors, une forme, un serpent, sa mûe.Elle me montre avec prudence ce qu’elle a vu le matin, hier soir … c’est la ceinture de ma robe de chambre tombée dans l’herbe. – Ecrire, commenter, suggérer. Art suprême de COLETTE… Il découvrait, non seulement le monde des émotions qu’on nomme, à la légère, physiques, mais encore la nécessité d’embellir, matériellement, un autel où tremble une perfection insuffisante. Il connaissait une naissante faim pour ce qui contente la main, l’oreille et les yeux, - les velours, la musique étudiée d’une voix, les parfums. Il ne se le reprochait pas, puisqu’il se sentait meilleur au contact d’un enivrant superflu… [1] Ou l’ingéniosité des situations avec des actions et des dénouements à peine suggérés mais immanquables [2], pas de COLETTE mais d’un oublié total, Catulle MENDES. Tous deux me sont tombés sous la main hier après-midi. Et maintenant copiant-collant les textes de l’Eglise pour aujourd’hui [3]et leurs commentaires, voici le fondateur de l’Opus Dei pour l’un des évangiles les plus parlants à toute sensibilité. Ce saint, si peu populaire et compris en dehors de sa propre maison, sinon de sa terrible époque, a le don paradoxal d’éteindre toute la flamme du texte, son affectivité et d’en glacer le récit. Suzanne P. à Vienne, ma jolie et excellente secrétaire, avait en permanence cette vêture de froideur. La brûlure intérieure du cœur est devenue blessure, et les deux disciples sont physiquement fatigués selon Escriva, alors que leur épuisement – car le trajet n’est pas long – est d’abord spirituel, psychique…
« Regarde-nous ! … de l’argent, de l’or, je n’en ai pas, mais ce que j’ai, je te le donne. Au nom de Jésus-Christ le Nazaréen, lève-toi et marche ! » … D’un bond, il fut debout et il marchait. Entrant avec eux dans le Temple, il marchait, bondissait et louait Dieu….  Jésus, lui-même s’approcha et il marchait avec eux…  Il entra donc pour rester avec eux…  Le don décisif et proportionné. Un homme, infirrme de naissance… alors, le prenant par la main droite, il le releva et, à l’instant même, ses pieds et ses chevilles s’affermirent… Et, partant de Moïse et de tous les Prophètes, il leur interpréta, dans toute l’Ecriture, ce qui le concernait.  Les deux disciples, du rang, du nombre pas privilégiés mais participant, ni au Thabor ni au Golgotha mais en espérance de tout, même à faux, comme tout le monde, le tout venant chrétien et des croyants de tous bords, attachés… nous.
Les disciples d’Emmaüs, très factuels mais les faits n’empêchent pas la perpelexité ils parlaient entre eux de tout ce qu’il s’était passé. Or, tandis qu’ils s’entretenaient et s’interrogeaient, Jésus lui-même s’approcha, et il marchait avec eux. Mais leurs yeux étaient empêchés de le reconnaître. Notre sensibilité, mon adolescence se sont régalés de ce récit, la proximité, la prévenance du Christ. Il y a des leçons qui vont au-delà de ce réconfort. Si le Christ de la Résurrection est méconnaissable pour les disciples, pour les Apôtres, pour Marie-Madeleine, c’est que leurs yeux étaient empêchés de le reconnaître… Alors, leurs yeux s’ouvrirent et ils le reconnurent … et comment le Seigneur s’était fait reconnaître par eux à la fraction du pain. Depuis Sa mort à notre vie et à notre mode actuel d’existence et par Sa résurrection (retour à l’éternité), le Christ ne peut être connu, « vu » de nous que selon Sa propre initiative. En pratique quotidienne, par les sacrements : cette fraction du pain, et par la lecture de Sa parole. Ce commentaire que Jésus fait à ses deux disciples : dans toute l’Ecriture, ce qui le concernait. Luc lie, par les « saintes femmes » l’ensemble de son récit des événements et enseignements suivant la Résurrection : les mêmes qui étaient avec Joseph d’Arimathie pour la descente de croix, la mise au tombeau, sont les premières à constater… déjà les deux anges leur rappellent les propres prédictions du Christ, ce qui échappe à Pierre… les disciples en route vers Emmaüs eux aussi sont mis au rappel de ces paroles du Christ, puis tous à la grande apparition collective : alors il leur ouvrit l’esprit à l’intelligence des Ecritures [1]. Notre foi se conclut par notre étonnement, notre émerveillement mais que tout se tienne ainsi dans notre vie comme dans l’ensemble de ce que nous recevons est un don. Il y a parfois la grâce – aujourd’hui mystique – du toucher et de la vue : voyez mes mains et et mes pieds ; c’est bien moi ! Touchez-moi et rendez-vous compte qu’un esprit n’a ni chair ni os, comme vous voyez que j’en ai… Avez-vous ici quelque chose à manger ? [2]mais le fond de notre psychologie, notre condition humaine par elle-même, entrave et chemin, restent réticents devant le miracle, devant la vie, devant la réalité vraie et totale (nous ne vivons quotidiennement qu’à demi ou au dixième, ce que d’ailleurs les sciences médicales attestent de plus en plus, atrophiés, n’usant pas de tous nos sens, nous réduisant même au plus élémentaires de nos outils de perception et de réflexion) : il s’en retourna chez lui, tout surpris de ce qui était arrivé… [3] dans leur joie, ils se refusaient à croire et demeuraient ébahis… [4] enfin la grâce, le dénouement de l’Ascension et la clarté, la consolidation, la force de la Pentecôte : paradoxe, après que leur Maître et Seigneur, tant qu’il les bénissait, se sépara d’eux et fut emporté au ciel, les voici pas du tout orphelins, qui revinrent à Jérusalem en grande joie [5].


[1] - évangile selon saint Luc XXIV 45

[2] - ibid. 39 & 41

[3] - ibid. 12

[4] - ibid. 41
[5] - ibid. 51.52



[1] - Colette, le blé en herbe (éd. le livre moderne illustré Ferenczi . 1952 . Avril 1954 . 125 pages) p. 85

[2] - Catulle Mendès, Lila et Colette (éd. Monnier . 1885 . 111 pages)  L’expérience, pp. 34 et 35

[3] -  Actes des Apôtres III 1 à 10 ; psaume CV ; évangile selon saint Luc XXIV 13 à 35

[4] - évangile selon saint Luc XXIV 45

[5] - ibid. 39 & 41

[6] - ibid. 12

[7] - ibid. 41
[8] - ibid. 51.52

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