samedi 27 avril 2013

il y a si longtemps que je suis avec vous, et tu ne me connais pas, Philippe ! - textes du jour

Samedi 27 Avril 2013

Qu’ai-je fait hier ? « Faire »… départ de mes aimées, laborieux, quatre-cinq jours après la date initialement prévue… mon journal vierge, alors qu’autrefois j’avais tant de facilité à l’écrire, sans doute parce que j’étais en pleine activité dite professionnelle et que noter hors cadre et pour moi-même était une respiration. Depuis des années maintenant, je cherche sans doute une autre respiration. Ce matin, le jour déjà clair, levé, avec son origine solaire, son silence de préparation d’une journée, une fraicheur humide et en quelques jours les arbres se sont habillés. – Hier qu’ai-je fait, sinon une énième défense et illustration d’un des multiples brigandages de notre époque (notre propriété à temps partagée, qui va nous être arrachée), des « lettres de château » pour mes hôtes de la veille soit une pratique des Français et des Africains. Le premier m’a inspiré l’évidence, que je vais maintenant écrire au principal responsable de cette dialectique et de cette possible renaissance, que la politique et que l’animation d’un pays ne sont ni une gestion, ni une pédagogie, ni une réforme de quoi que ce soit, mais tout bonnement une réponse à un appel – celui du 18-Juin n’a pas été du général de Gaulle, il a été une attente de beaucoup de Français souhaitant que la défaite militaire et morale ne soit pas acceptée, ne soit pas considérée comme définitive et irréparable, et c’est à cette attente qu’a répondu de GAULLE d’instinct et d’intelligence, réponse et non appel, appel d’un pays et réponse de quelqu’un qui d’un seul coup et par le fait-même est devenu son dirigeant et une référence pour trente ans. Cette manière de voir, de faire et de vivre montre surtout qu’aujourd’hui dans le désossement et la débandade, dans l’échec que nous vivons, la part du collectif, la part de cet acteur, mis en évidence dans notre histoire nationale par MICHELET : le peuple (écriture et réflexion contemporaines de la mise en forme bonapartiste de ce concept et de cette réalité), est considérable. Le politique d’en ce moment doit donc susciter le peuple, c’est-à-dire discerner et faire ressurgir ce qu’est notre entité collective. Je vais tenter de l’écrire au président régnant, du seul fait qu’il est celui en place. Sa psychologie et son parcours personnels, sont secondaires. C’est la fonction qui importe. Les seconds, donnant par leur disparate, la force et la faiblesse de nos « services », me font comprendre rétrospectivement que l’Afrique depuis l’intrusion des Européens, et surtout depuis le débnut du XXème siècle, a toujours été mécontente d’elle-même, en projection d’une identité et d’une vérité de vie, de société à émanciper du présent : présent de l’administration étrangère, puis aujourd’hui présent de dictatures abhorrées et déplacées…

Hier aussi, cette messe paroissiale en chapelle campagnarde, sol en terre battue, charpente dénudée d’une voûte factice, ferveur ou mœurs ? Notre recteur n’a pratiquement aucune éloquence car il ne sait pas dire ce dont il vit lui-même. C’est le problème de « l’intégrisme » en général et celui qu’on lui prête ici, si l’on est un peu extérieur à une mémoire collective qui ne se pose pas de question religieuse mais des questions sociale et morale. Tenir à l’extérieur, à l’expression, mais laisser le for intérieur sans visite puisqu’il est du ressort, très expropriant, de la providence, du salut des âmes, de la dialectique de l’enfer, du péché, et autres éléments de l’âge précédent de l’Eglise. A l’apéritif sur tréteaux, puis en route vers le dîner dans une longère pas encore réaménagée, dialogué avec Christophe T. sur le mariage pour tous, questionnement que j’ai repris avec mes vis-à-vis à table. Pour lui, qui manifeste régulièrement à Paris, il n’y a aucun débat, il est contre, et il me fait soudain saisir l’origine du clivage entre pour/contre. Ceux qui, du dehors forcément mais le témoignage des concernés n’est pas plus recueilli, dialogué et systématisé, publié, considèrent que l’homosexualité est une nature, et ceux qui, au contraire, la supposent aquise et d’ordre culturel. Dans le premier cas, la réponse est libertaire, égalitaire, fraternelle : chacun est bien libre de faire ce qu’il veut. Dans l’autre, il faut éviter une propagation contre-nature, pécheresse même… en empêchant toute structure proposant cette culture, ces espaces, etc… Pour lui donc l’homosexualité est pécheresse, diabolique, manque à un ordre divin assimilé à l’ordre de la nature. Vivant désormais à Paris, un frère et une sœur également célibataires… il a la culture générale de ma génération et de ma formation. A ma question sur les dirigeants de nos décennies, il répond ne s’être reconn dans aucun : CHIRAC, SARKOZY ou maintenant HOLLANDE, sans se définir de droite, il a de la considération pour MITTERRAND, personnage et culture, allure générale. Il est quant à lui monarchiste et là encore revient à des lois de nature, certains peuples qui… et que… nous en sommes un, faits pour la monarchie. Je lui ai promis mon illustration de 2005 sur la crise de légitimité et donnant mon analyse d’une instauration de l’hérédité dans notre Constitution actuelle. Curieusement ou paradoxalement, il n’a pas évoqué de GAULLE, plus détesté de son vivant à droite qu’à gauche (PETAIN et l’Algérie). Couple encore jeune de vendeurs en supermarché, que nous avons pratiqué il y a dix ans, quand nous tentâmes de clôturer un périmètre à ne pas quitter pour nos chiens : elle. Chacun peut faire ce qu’il veut, mais elle ne me demande pas ma propre opinion. Commensaux. Tous natifs d’ici, ascendants agricoles, diversification à leur génération, maintenant les soixante-dix ou quatre-vingt ans. A ma droite, a travaillé dans la maintenance des cabines d’avion, à Roissy. Des amis homosexuels du tonnerre, pas d’objection à la réforme. En face de moi, deux hommes, l’homosexualité contre-nature, à bannir absolument. Si mon fils avait été, etc… des gestes forts de dénégation, abandon, sanction. Les trois avec quarante ans de fidélité conjugale. Le travail trouvé hors de Bretagne en immigration intérieure, pour certains la fortune, pour d’autres l’engagement dans l’armée, la marine… le discours tout fait sur ceux qui ne f… rien, donc ne travaillent pas, en gros l’administration et les services publics, électricité et téléphone…et aussi la confidence : il y a trop d’étrangers maintenant. Ce n’est pas le racisme en définition de couleurs de peau, c’est une sensation, alors que dans notre village, et au chef-lieu du département, on n’est vraiment pas en population contrastée ou colorée. D’ailleurs dans ma journée parisienne, métro compris, et boulevard des maréchaux à pied dans la canicule, j’ai eu une sensation de calme et de convilialité, car ces « étrangers » sont maintenant autant chez eux parmi nous, que nous le sommes de naissance.

Je viens tranquillement à ce moment du matin, la lecture méditée des textes du jour. Le dialogue aujourd’hui de Philippe avec le Christ, qui m’a tant marqué.[1] Je le rapporte à celui qui a clos ma soirée d’hier. Trois quatre enfants dont un oré-adolescent que j’avise, seul à attendre le mouvement de la sortie, dehors. Assis sur un muret, survêtement bleu ciel, ni beau ni laid, expression verbale très moyenne. En vacances ici chez sa grand-mère oarents séparés, il vit avec sa mère à Grenoble, son père est gendarme à la Rochelle. J »’ai été saisi par une sorte de communication sans mots, sans phrases, sans geste. Il m’a d’une manière qui m’a pénétrée, dit une intense souffrance, sobre et pudique, sa solitude pour se construire, et donné une clé autant pour lui que pour beaucoup actuellement quand nous sommes en train – ma génération et celle qui est au « pouvoir » de – chercher comment transmettre du civisme du patriotisme, au fond une déduction dans les comportements et les perspectives de ce qu’est notre vécu collectif, notre héritage commun, notre solidarité obligée pour le futur proche et lointain. Littéraire, matheux ? non, mais l’histoire et la géographie. Il en est pasionné, et c’est précisément notre sujet. Sa famille, les grands parents, sortent. Je lui demande son prénom : Nicolas, lui dis le 6-Décembre à défaut de son saint patron, lui donne le mien, un évêque aussi mais je n’indique aps cetraut commun. L’assure que je vais penser à lui, lui envoyer des forces et lui glisse en viatique, peut-être que lui-même pense à Dieu, en rentrant en lui-même, en demandant… même s’il ne va pas à la messe etc… ce soir quand même… Il marchait déjà en groupe, mais encore un peu séparé pour que nous restions ensemble. Il y a si longtemps que je suis avec vous, et tu ne me connais pas, Philippe ! Celui qui m’a vu a vu le Père. Le Christ, sachant sa passion, sa mort si proches à cette heure-là répond à son disciple : Puisque vous me connaissez, vous connaîtrez aussi mon Père. Dès maintenant, vous le connaissez, et vous l’avez vu. – Seigneur, montre-nous le Père ; cela nous suffit. Splendide profession de foi, d’amour, d’affection du disciple : pourtant si attaché à son maître, il erst assez imbibé sans en avoir conscience pour aller vers une préférence pour le Père, mais Jésus le relève dans ce mouvement. Au contraire, allant d’âme vers le Père, comme le Christ en son corps qui va être torturé, en son esprit troublé et angoissé, va tout entier, d’âme aussi, vers le même Père, Philippe est totalement avec Celui qui dialogue à présent avec lui sur l’essentiel : croyez ce que je vous dis : je suis dans le Père et le Père est en moi. Les mots et les pensées humains sont inférieurs, maladroits pour rendre et dire cette réalité, même dans la bouche du Christ. Plus aisément, Jésus confirme : les paroles que je vous dis, je ne les dis pas de moi-même, mais c’est le Père qui demeure en moi, et qui accomplit ses propres œuvres. Nous sommes mûs, agis par Dieu, donc en création constante et permanente. Cette imbrication mutuelle du Père et du Fils, nous la vivons nous aussi, même si le vocabulaire, la conscience nous manquent. Jésus à la veille de mourir, comble désespérant de l’impuissance, assure pourtant : ce que vous demanderez en invoquant mon nom, je le ferai, afin que le Père soit glorifié dans le Fils. Si vous me demandez quelque chose, en invoquant mon nom, moi, je le ferai. Ai-je jamais rien demandé ? de mémoire, si. De souvenir que mes pleurs de prostrés. Mais maintenant, tout de suite ? Vous-mêmes ne vous jugez pas dignes de la vie éternelle, eh bien ! nous nous tournons vers les païens. La difficulté du texte, un des multiples fondements du jansénisme, et donc actuellement de « l’intégrisme » qui  doit être en cela respecté, car il a sa cohérence et nous pose une question littérale… tous ceux que Dieu avait préparés pour la vie éternelle, devinrent croyants. Prédestination ? liberté ? les autres ? le salut pas universel quoique l’annonce le soit… Je ne peux le résoudre qu’en rejoignant Philippe et qu’en adorant à genoux et en demande, son Seigneur et son Dieu, notre Seigneur et notre Dieu. Amen.


[1] - Actes des Apôtres XIII 44 à 52 ; psaume XCVIII ; évangile selon saint Jean XIV 7 à 14

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