samedi 7 avril 2012

le tombeau n'est pas vide - jour sans textes

Samedi Saint . 7 Avril 2012



Eveillé depuis la nuit encore, cinq-six heures… l’angoisse indistincte mais si totale, l’avenir de celles dont j’ai la responsabilité, la trésorerie au mois le mois, ma santé, je suis si faillible, sinon failli. Les épisodes d’hier, manque de charité par formatage aux seuls usages, réglementations et convenances ne faisant pas accueillir en totalité celui qui demande, et par pudeur et souci de dignité, ne supplie pas et même met à l’aise celui (celle en l’occurrence, de la part d’une femme, idée préconçue et trop masculine du genre féminin, le non-accueil ou la non-compréhension est reçue en pire, perçue pire) et manque aussi de discernement, de perspicacité, d’imagination, de curiosité de la part d’une « psychiâtre d’astreinte », ayant jeunesse, plutôt du charme et surtout blouse blanche et bureau. Je ne le réalise, avec tristesse plus pour mon interlocutrice ne m’ayant donc en rien facilité les choses, que pour moi qui me suis donc débrouillé par force. Habituel défaut français en presque toute chose, l’absence de suivi… l’orgueil de la compétence, du fournisseur, et puis… opération, couture de la plaie parfaites mais ensuite œdème, gênes diverses, passages éphémères des médecins, disparition plusieurs jours de l’opérateur, diagnostic hors discipline et café du commerce ou pièce de cent sous pas même avec le sourire à celui qui fait la manche : cela passera, patience, rien d’inquiétant… Et, ce matin, ce jour, pas de texte, l’Eglise au silence, elle aussi – dans son ensemble sauvé par quelques individualités à chaque génération (les saints ? ou les femmes et les hommes de bon sens autant que de compassion, pécheurs autant que les autres, sinon plus, vg. l’Abbé PIERRE, mais compassionnels, se scandalisant, « se bougeant » personnellement) – langue de bois. Lourdeur de la liturgie si elle n’est pas intimisée. Les émotions collectives certes et souvent, mais le fond. Aujourd’hui, seul le tombeau… et le Christ y est. L’Eglise incapable de textes, muette. Enfin, la vérité. Enseveli dans je ne sais quel livre de l’Ancien Testament, le récit d’une bataille où les Hébreux en dernier recours engagent l’Arche d’Alliance, elle-même… et celle-ci est prise… fuite et massacre.



La statuaire muette et expressive. La prière, la commune présence, mutuelle. A l’aube, les lumières de l’agglomération, un fond des collines de Meudon et de Clamart, la pleine lune endormie et disparue, les maisons en vrac comme les tombes dans certains cimetières du midi ou de l’est, sans plan, les parcs de stationnement de l’hôpital quasi-déserts, personne, les samedi-dimanche… l’immensité d’un vide où les dormants, les vivants ne se discernent, ni ne se voient, ni ne s’entendent. La balance du temps, la mort physique inéluctable avec ses répétitions et mises en scène auxquelles se prêtent les accidents de santé, mais plus encore ces nasses dans lesquelles ne se débattent plus qu’à peine celles et ceux que j’ai présents à l’esprit, à l’âme. Ainsi… fiasco de deux couples successifs, plaie d’argent à long terme et au jour le jour, le fils restant à charge n’ayant le sens du tragique qu’en composition écrite, la solitude de la chair, la joie absente et pas même en mémoire résiduelle, le banquier seul éphéméride… Ainsi, cette vierge non consacrée, contractant des amours de religieux, de prêtres, de père spirituel et cherchant comme tant un concentré de vacances, d’aventures, de possibles rencontres dans des récollections et exercices spirituels où de plus en plus aujourd’hui il faut payer et se faire coopter… Ceux et celles qui se battent, foi religieuse ou pas, mais spiritualité intime et force d’espérance certainement, ces battants politiques ou sociaux, ces livres dits d’un trait : totaux [1], ces tentatives de mouvement social… Le tombeau n’est pas vide. S’il l’était ce matin, ce ne serait pas la victoire demain. Près du lieu où Jésus avait été crucifié, il y avait un jardin, et dans ce jardin, un tombeau neuf dans lequel on n’avait encore mis personne. Jardin de l’agonie, jardin de l’arrestation sur trahison, jardin de l’Eden, jardin vers lequel court Marie-Madeleine dès la fin du sabbat. Jardin, tombeau. Extérieur, intérieur. Distance, proximité. Sainte Marie, mère de Dieu, priez pour nous, pauvres pécheurs, maintenant et à l’heure de notre mort. Amen.



[1] - Jean-Noël Jeanneney, l’Etat blessé (Flammarion . café Voltaire . Mars 2012 . 136 pages) … portrait précis, tranquillement exhaustif d’un chef de l’Etat, donnant l’histoire d’un mépris pendant cinq ans et les dégâts subis sans mot dire ni révoltes… mise en regard d‘un florilège du président sortant et candidat avec des citations de Clemenceau, Gambetta, de Gaulle, Bloch-Laîné, Badinter, Tocqueville, Briand, Fouché, Monge, Giscard d’Estaing, Monnet... produisant aussi les études et essais afférents depuis 2007 – table . I –Violences et dédains : les ministres humiliés, les contre-pouvoirs violentés, les fonctionnaires méprisés . II – Un certain débraillé : parler « comme les gens » ? , la République à tu et à toi, fascination de l’impudeur . III – Le syndrome du poisson rouge : tout n’est qu’apparence, la seule surface des choses, l’Histoire asservie . IV : l’Argent sans fard : le marché débridé, malheureux service public, la Culture ? allons donc ! . V – La laïcité offensée : le Latran : une mauvaise action, 1905 . une loi calomniée, dernières dérives . VI- Humiliations françaises : la planète goguenarde, chagrins en tout genre, l’obsession américaine – conclusion par des Remerciements anonymes . Je ne veux pas nuire, en les remerciant nommément, aux hauts fonctionnaires, dont les confidences souvent angoissées ont nourri cet ouvrage. Qu’ils sachent que je leur sais gré de leur confiance. Leur capacité, individuelle ou collective, au quotidien, de résistance, chacun à sa place, au mouvement de dégradation de l’Etat qui est ici dénoncé est une source, parmi d’autrees, d’espérance. Mise en cadre des indignations exprimés dans le Figaro par Surcouf, dans le Monde par Marly puis Calvignac, l’armée, la diplomatie, la préfectorale. Le statut des magistrats ayant permis à ceux qui le voulaient de commettre les démonstrations publiques ad hoc… mais la suite ? Malheur provisoire ou mutation durable ?


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