lundi 28 novembre 2011

chez personne en Israël, je n'ai trouvé une telle foi - textes du jour

Lundi 28 Novembre 2011

Nuit très sombre, encore comble. Les nuages semblent bas, compacts. Me vient à l’esprit cette figuration du retour du Christ, comme l’éclair du couchant au lever, tout l’horizon illuminé soudainement. Anniversaire de la mort de Maman [1]. Yves N. ne pouvant venir à notre réunion d’anciens évoque la sienne, cent cinq ans, toute sa tête, un peu handicapé par une frature l’an dernier du col du fémur. Pensées pour toutes les mères du monde du « point de vue » de leur fils. L’un des mystères féminins étant inacessible ou presque à l’homme version masculine : la relation fille-mère.– Prier… douceur de la confiance conjugale au réveil. Il nous enseignera ses chemins egt nous suivrons ses sentiers. Isaïe « la joue collectif » [2]. Le Notre Père ne nous a pas été donné et ne se récite pas, à la première personne du singulier, mais du pluriel ; c’est le Je vous salue, Marie ! qui est à deux versants : priez pour nous, dès que nous la rencontrons dans sa figure d’éternité et dans son rôle pour notre rédemption, tandis que nous la saluons dans sa destinée humaine, à l’Annonciation. Venez, famille de Jacob, marchons à la lumière du Seigneur… Venez, montons à la montagne du Seigneur, au temple du Dieu de Jacob. … Jérusalem, te voici dans tes murs : ville où tout ensemble fait corps ! C’est là que montent les tribus, les tribus du Seigneur… Appelez le bonheur sur Jérusalem. Comment ne pas comprendre qu’un Etat, qu’un peuple fondé sur de telles paroles soit peu enclin au partage et ne soit pas endogamique et autiste ? il en est de même pour nous chrétiens, les intégristes et crispés de toute sortes, les anti-autres, les chantres d’une vérité n’appartenant qu’à eux, mais d’heure en heure, chaque jour ne suis-je pas a priori fermé et pris dans mon point de vue, mon parcours, ma situation, moi… moi… Isaïe, le proto-évangéliste est pourtant aussi clair que le Maître qu’il anticipe : tout le monde à table ! Jérusalem est à tout le monde : Toutes les nations afflueront vers elle, des peuples nombreux se mettront en marche… il sera le juge des nations, l’arbitre de la multitude des peuples. De leurs épées ils forgeront des socs de charrue, et de leurs lances des faucilles [3]. Il était devenu dogmatique, il y a trente ans, que la « conversion » du monument marxiste-léniniste (ou l’effondrement de l’U.R.S.S., du communisme à la soviétique, d’un matérialisme athée) ne puisse jamais survenir, il est vrai que la véritable mûe humaine et démocratique, respectueuse des droits de l’homme se fait toujours à Moscou, et plus encore à Pékin… mais est-il inenvisageable qu’Israël référence de tout esprit religieux, tête du cortège historique de l’humanité vers le Dieu unique, se convertisse à la paix et en soit, là où son peuple se trouve en géographie et en histoire contemporaines, le signe, l’agent, le propagandiste. Je le crois possible, je crois à la sainte alliance de tous les croyants pour faire repère dans le monde de maintenant. Je crois à l’harmonie de tous les hommes et de toutes nations. A cause de mes frères et de mes proches, je dirai : « Paix sur toi ! » Dans l’évangile, chambre d’écho de l’Ancien Testament, ce ne sont plus les peuples qui viennent, mais le Christ – à domicile. Réponse de l’homme, un païen… Seigneur, je ne suis pas digne que tu entres sous mon toit, mais dis seulement une parole et mon serviteur sera guéri… A ces mots, Jésus fut dans l’admiration… Chez personne en Israël, je n’ai trouvé une telle foi. Naturellement, je regarde ici Israël comme toute Eglise installée, comme toute âme déjà repue, comme moi me croyant... Beaucoup viendront de l'orient et de l'occident et prendront place avec Abraham, Isaac et Jacob au festin du Royaume des cieux. Toute religion, toute bonne volonté, omnes quod spirat.



[1] - le dix-neuvième anniversaire de la mort de Maman. Il me reste tout d’elle, les anecdotes, les attitudes, les souvenirs d’une intimité qui était échange de récits, partage du présent, du passé, de l’avenir. Aisance de nos propos, certitudes de l’amour mutuel, un amour que je ne sais définir qui était proteceteur de part et d’autre. Nous étions mutuellement inquiets de ce que ferait de nous la foule… la hantise d’un piétinement. Au figuré, cela nous arriva presque à chacun, elle quand elle ne pouvait tout me dire mais m’en livrait beaucoup, quand ce fut autre et que j’étais en force de l’assurer vis-à-vis d’elle-même, les autres ayant perdu prise, ou s’étant lassés, sauf ses enfants mes sœurs et frères, persistant si souvent à la méconnaître ou à refuser maintenant sa mémoire, la mémoire qu’ils ont d’elle et ne savent pas, occupés qu’ils furent à se faire eux-mêmes et croyaient-ils contre elle. Et moi, peu après sa mort, mais elle l’avait prévu et, me voyant monter une nouvelle fois, prophétisait parfois, les derniers mois, dont beaucoup de moments furent nôtres, une ruine qui d’avance l’épouvantait. Elle ne la vit pas, elle ne connut pas non plus ma résurrection contrairement aux apparences des biographies habituelles qui sont chronologie de fonctions, parfois de publications ou de décorations, rarement enquête intime, d’ailleurs comment s’y prendrait-on sauf attention extrême demandant temps et présence, au moins d’esprit. Elle me connaissait intensément, elle était reconnaissante de moi, et moi d’elle. Ma résurrection a beaucoup d’elle puique ma chère femme a beaucoup de ma mère en explosivité, en rancune putative et que sans en avoir le regard aux longues tendresses ou au reproche d’autant plus fort qu’il était muet, elle a ses yeux et sa bouche pour avoir des sourires et des émerveillements conjugaux, amoureux, affirmatifs. C’est peu de dire que le caractère féminin m’a davantage été donné à éprouver par ma mère que par les successives femmes de mon existence. Notre fille a sa capacité d’attention, son don pour décorer, son goût de lire, sa vulnérabilité aux gestes et jugement des autres. J’arrête là l’écrit de ma reconnaissance qui double le souvenir et est bien plus alerte. Je n’ai que quelques sentences de mon père, j’en ai de très nombreuses de ma mère, pas répétitives, nouvelles à leur époque et très souvent dans ma mémoire. Ma mère n’a craint ni mon bonheur ni mon malheur, pas que je souffre non plus, elle a découvert dans mes cahiers, dans mes propos une amertume dès la fin de mon enfance, si tant est que j’en sois jamais sorti ; elle n’a redouté que mes infidélités à moi-même, c’est-à-dire ses espérances indistinctes sur mes aboutissements et mon établissement. Elle serait certainement comblée depuis mon mariage quoique socialement je ne suis rien. Elle-même était grandissime quand les circonstances la prenait hors des maximes d’une éducation reçue, rigueur d’un mimétisme imaginé par ma grand-mère probablement en réaction à l’héroisme pieux et tranqille de mon arière-grand-mère dont la vie fut une aventure sans qu’elle le sût. Ma mère a aimé que je devine ces destins putatifs dont elle me donna beaucoup de pièces mais qu’elle se retenait d’assembler. Nous étions inépuisables de conversation, de confiance et d’entreprise. Et pourtant je ressens que nous n’avons pas échangé ou fait le dixième, le centième de ce qu’il nous était possible de vivre et de nous donner. Mère-fils… j’en ai quelque idée, mais incomplète car notre « couple » a commencé tard, a coincidé avec la crise puis le déchirement du couple conjugal, celui de mes parents, qu’enfin j’étais un de neuf. Ceux qui sont tôt orphelins, ceux dont la blessure d’une mort est toute récente, toujours incomparable, pas d’analogie en amour, surtout quand il n’est pas de sexe. Ceux qui se sont fait vider de chez eux, puisque chez nos parents nous sommes chez nous : génie heureux de l’appropriation par notre fille de tout ce que nous sosmmes et de tout ce que nous avons et qu’elle voit, matérialité pas de la possession mais de l’objet d’accoutumance, d’attachement, d’identification. Une correspondante chère, une cousine proche, une amie mon aînée, une autre de mon âge et adoptée par un religieux ayant compris sa détresse. Repoussé par ses parents… rien qu’à ressentir la détresse sur le moment de notre fille quand elle est grondée et qu’elle expérimente quelque chose de la séparation… Calme, ordre, solidité auprès de ma mère jusqu’à sa mort. Dépourvue parfois de tout et vivant sur nos tirelires, elle ne m’a jamais cependant parue démunie : elle était elle-même, debout, vaillante, certaine de son droit, travaillant à retrouver l’avenir et y étant parvenue. - La suite, maintenant, ne se dit ni ne s'inscrit. Elle vit et sourit en moi et en d'autres. Comme toute mère. Tristesse marquante, tue ou dite,de qui n'a pas connu ou compris la sienne. Acceptation de mon père que son fils soit venu de sa femme et de la différence. Merveille… vie sans mort. Nous. Parabole mutuelle entre générations des maternité et paternité, du couple qui veille et regarde le nouveau-né, l’enfant, l’adolescent, si vite partenaire et ami. Ma mère fut ma meilleure et plus grande amie, les affinités à mesure, elle m’apprit à lire, à écrire, elle m’enseigna le respect de soi et l’ambition de dignité : exemple peu imitable, humilité sans pareille dont l’orgueil n’était pas de soi mais de ce qu’elle avait reçu et donnait.

[2] - Isaïe II 1 à 5 ; psaume CXXII ; évangile selon saint Matthieu VIII 5 à 11

[3] - Ce psaume des degrés était certainement chanté par les pélerins qui affluaient à Jérusalem lors des fêtes de pèlerinage. Ils chantaient plus précisément la gloire de Jérusalem, siège de la ‘Maison de Dieu’, ville ‘harmonieuse’ ou de ‘l’unité’ où les 12 tribus se retrouvauent pur rendre ‘hommage à Dieu’ ; c’est ici aussi que siégeaut le grand sahédrin, tribunal suprême, symbole de la justice, nécessaire à la paix de Jérusalem. A cette lecture passéiste de ce psaume, doit cependant se superposer une lecture au présent perpétuel. Il s’agit alors de n’importe quel juif qui ‘se réjouit’ quand on dit de lui qu’il va à la synagogue ou à la maison d’étude, qui rêve de voir la restauration de Jérusalem, dans sa splendeur d’antan, vraiment ‘unifiée’, sans contestation ; ville dans laquelle les tribus exilées se rassembleront. Avec le rétablissement du sanhédrin, le Machia’ descendant de David pourra se manifester inaugurant une ère ‘de paix et de bonheur’ où les hommes s’appelleront ‘mes frères, mes amis’, unis dans la ‘Maison de l’Eternel notre Dieu’ - Rabbin Claude BRAHAMI, op. cit. – lecture passionnante car aux antipodes de celle d’un chrétien. Préférence marquée pour une institution, ce tribunal qui condamnera à mort le Christ, plutôt qu’une ville-lumière. Le vœu légitime de la réunification, le mouvement du monde entier vers un pôle, pourquoi Israël ne le partagerait-il pas avec l’immense treizième tribu, celle du centurion de Capharnaüm ? Une religion qui exclut n’en est pas une, le christianisme comme le judaïsme ou l’islam sont liens ou parjures. Lien entre les hommes, entre tout le vivant, ou parjure devant un Dieu invoqué à tort. Prions ensemble.

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