mardi 10 janvier 2017

saint Grégoire de Nysse, Père de l'Eglise . 335 + après 394



évêque, frère de saint Basile le Grand


Grégoire de Nysse naît autour de 335 ; sa formation chrétienne fut suivie en particulier par son frère Basile - qu'il définit comme « père et maître » (Ep 13, 4: SC 363, 198) - et par sa sœur Macrine. Il suivit ses études en appréciant particulièrement la philosophie et la rhétorique. Dans un premier temps, il se consacra à l'enseignement et se maria. Ensuite, il se consacra lui aussi entièrement, comme son frère et sa sœur, à la vie ascétique. Plus tard, il fut élu Évêque de Nysse, et se démontra un pasteur zélé, ce qui lui valut l'estime de la communauté. Accusé de malversations financières par ses adversaires hérétiques, il dut abandonner le siège épiscopal pendant une brève période, mais il y revint ensuite triomphalement (cf. Ep. 6: SC 363, 164-170), et il continua à se consacrer à la lutte pour défendre la vraie foi.

En particulier après la mort de Basile, recueillant presque son héritage spirituel, il coopéra au triomphe de l'orthodoxie. Il participa à divers synodes ; il chercha à résoudre les conflits entre les Églises ; il participa activement à la réorganisation ecclésiastique et, en tant que « pilier de l'orthodoxie », il fut l'un des acteurs du Concile de Constantinople de 381, qui définit la divinité de l'Esprit Saint. Il reçut diverses charges officielles de la part de l'empereur Théodose, il prononça d'importants discours et homélies funèbres, il se consacra à la rédaction de diverses œuvres théologiques.
En 394, il participa encore à un synode qui se déroula à Constantinople.

On ne connaît pas la date de sa mort.

Pour approfondir, lire les Catéchèses du Pape Benoît XVI :


Source principale : vatican.va (« Rév. x gpm »).



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BENOÎT XVI
AUDIENCE GÉNÉRALE
Mercredi 29 août 2007

Saint Grégoire de Nysse
Chers frères et sœurs!
Dans les dernières catéchèses, j'ai parlé de deux grands docteurs de l'Eglise du IV siècle, Basile et Grégoire de Nazianze, Evêque de Cappadoce, dans l'actuelle Turquie. Aujourd'hui, nous en ajoutons un troisième, le frère de Basile, saint Grégoire de Nysse, qui s'est révélé un homme au caractère réfléchi, avec de grandes capacités de méditation, et d'une vive intelligence, ouverte à la culture de son temps. Il s'est ainsi révélé comme un penseur original et profond dans l'histoire du christianisme.
Il naquit autour de 335; sa formation chrétienne fut suivie en particulier par son frère Basile - qu'il définit comme "père et maître" (Ep 13, 4:  SC 363, 198) - et par sa sœur Macrine. Il suivit ses études en appréciant particulièrement la philosophie et la rhétorique. Dans un premier temps, il se consacra à l'enseignement et se maria. Ensuite, il se consacra lui aussi entièrement, comme son frère et sa sœur, à la vie ascétique. Plus tard, il fut élu Evêque de Nysse, et se démontra un pasteur zélé, ce qui lui valut l'estime de la communauté. Accusé de malversations financières par ses adversaires hérétiques, il dut abandonner le siège épiscopal pendant une brève période, mais il y revint ensuite triomphalement (cf. Ep. 6:  SC 363, 164-170), et il continua à se consacrer à la lutte pour défendre la vraie foi.
En particulier après la mort de Basile, recueillant presque son héritage spirituel, il coopéra au triomphe de l'orthodoxie. Il participa à divers synodes; il chercha à résoudre les conflits entre les Eglises; il participa activement à la réorganisation ecclésiastique et, en tant que "pilier de l'orthodoxie", il fut l'un des acteurs du Concile de Constantinople de 381, qui définit la divinité de l'Esprit Saint. Il reçut diverses charges officielles de la part de l'empereur Théodose, il prononça d'importants discours et homélies funèbres, il se consacra à la rédaction de diverses œuvres théologiques. En 394, il participa encore à un synode qui se déroula à Constantinople. On ne connaît pas la date de sa mort.
Grégoire explique avec clarté la finalité de ses études, le but suprême auquel il aspire dans son travail de théologien:  ne pas employer sa vie en choses vaines, mais trouver la lumière qui permet de discerner ce qui est vraiment utile (cf. In Ecclesiasten hom. 1:  SC 416, 106-146). Il trouva ce bien suprême dans le christianisme, grâce auquel est possible "l'imitation de la nature divine" (De professione christiana:  PG 46, 244C). Avec sa vive intelligence et ses vastes connaissances philosophiques et théologiques, il défendit la foi chrétienne contre les hérétiques, qui niaient la divinité du Fils et de l'Esprit Saint (comme Eunomios et les Macédoniens), ou mettaient en doute la parfaite humanité du Christ (comme Apollinaire). Il commenta l'Ecriture Sainte, s'arrêtant sur la création de l'homme. Cela était pour lui un thème central:  la création. Il voyait dans la créature le reflet du Créateur et trouvait là le chemin vers Dieu. Mais il écrivit également un livre important sur la vie de Moïse, qu'il présente comme un homme en marche vers Dieu:  cette montée vers le Mont Sinaï devient pour lui une image de notre ascension dans la vie humaine, vers la vraie vie, vers la rencontre avec Dieu. Il a interprété également la prière du Seigneur, le Notre-Père, et les Béatitudes. Dans son "Grand discours catéchétique" (Oratio catechetica magna) - il exposa les lignes fondamentales de la théologie, non pas pour une théologie académique refermée sur elle-même, mais pour offrir aux catéchistes un système de référence dont tenir compte dans leurs instructions, comme un cadre dans lequel s'inscrit ensuite l'interprétation théologique de la foi.
En outre, Grégoire est célèbre pour sa doctrine spirituelle. Toute sa théologie n'était pas une réflexion académique, mais l'expression d'une vie spirituelle, d'une vie de foi vécue. En tant que grand "père de la mystique", il exposa dans divers traités - comme le De professione christiana et le De perfectione christiana - le chemin que les chrétiens doivent entreprendre pour atteindre la vraie vie, la perfection. Il exalta la virginité consacrée (De virginitate), et en proposa un modèle éminent dans la vie de sa sœur Macrine, qui est toujours restée pour lui un guide, un exemple (cf. Vita Macrinae). Il tint divers discours et homélies, et écrivit de nombreuses lettres. En commentant la création de l'homme, Grégoire souligne que Dieu, "le meilleur des artistes, forge notre nature de manière à la rendre adaptée au service de la royauté. A travers la supériorité établie de l'âme, et au moyen de la conformation même du corps, il dispose les choses de manière à ce que l'homme soit réellement adapté au pouvoir royal" (De hominis opificio 4:  PG 44, 136B). Mais nous voyons que l'homme, pris dans les mailles des péchés, abuse souvent de la création et n'exerce pas une véritable royauté. C'est pourquoi, afin d'exercer une véritable responsabilité envers les créatures, il doit être pénétré par Dieu et vivre dans sa lumière. En effet, l'homme est un reflet de cette beauté originelle qui est Dieu:  "Tout ce que Dieu créa était excellent", écrit le saint Evêque. Et il ajoute:  "Le récit de la création en témoigne (cf. Gn 1, 31). Parmi les choses  excellentes  se  trouvait  aussi l'homme, orné d'une beauté largement supérieure à toutes les belles choses. En effet, quelle chose pouvait être aussi belle que celui qui est semblable à la beauté pure et incorruptible?... Reflet et image de la vie éternelle, il était véritablement beau, et même très beau, comme le signe rayonnant de la vie sur son visage" (Homilia in Canticum 12:  PG 44, 1020C).
L'homme a été honoré par Dieu et placé au dessus de toute autre créature:  "Le ciel n'a pas été fait à l'image de Dieu, ni la lune, ni le soleil, ni la beauté des étoiles, ni aucune des choses qui apparaissent dans la création. Seule toi (anima umana) tu as été rendue l'image de la nature qui domine toute intelligence, ressemblance de la beauté incorruptible, empreinte de la vraie divinité, réceptacle de la vie bienheureuse, image de la véritable lumière; et lorsque tu la regardes, tu deviens ce qu'Il est, car à travers le rayon reflété provenant de ta pureté, tu imites Celui qui brille en toi. Aucune des choses qui existe n'est grande au point de pouvoir être comparée à ta grandeur" (Homilia in Canticum 2:  PG 44, 805D). Méditons cet éloge de l'homme. Voyons également à quel point l'homme est dégradé par le péché. Et cherchons à revenir à la grandeur originelle:  ce n'est que si Dieu est présent que l'homme arrive à sa véritable grandeur.
L'homme reconnaît donc en lui-même le reflet de la lumière divine:  en purifiant son cœur, il redevient comme il était au début, une image limpide de Dieu, Beauté exemplaire (cf. Oratio catechetica 6:  SC 453, 174). Ainsi, l'homme, en se purifiant, peut voir Dieu, comme les cœurs purs (cf. Mt 5, 8):  "Si, avec un style de vie diligent et attentif, tu effaces les choses laides qui se sont déposées sur ton cœur, alors resplendira en toi la beauté divine... En te contemplant toi-même, tu verras en toi celui qui est le désir de ton cœur et tu seras bienheureux" (De beatitudinibus, 6:  PG 44, 1272AB). Il faut donc laver les choses laides qui se sont déposées sur notre cœur et retrouver en nous-même la lumière de Dieu.
L'homme a donc comme objectif la contemplation de Dieu. Ce n'est qu'en celle-ci qu'il peut trouver sa réalisation. Pour anticiper, dans une certaine mesure, cet objectif déjà au cours de cette vie, il doit progresser sans cesse vers une vie spirituelle, une vie de dialogue avec Dieu. En d'autres termes - et telle est la leçon la plus importante que saint Grégoire de Nysse nous transmet -,  la  pleine réalisation de l'homme consiste dans la sainteté, dans une vie vécue dans la rencontre avec Dieu, qui devient ainsi lumineuse également pour les autres, et pour le monde. 
* * *
Je souhaite la bienvenue aux pèlerins de langue française, et je salue particulièrement les membres du groupe œcuménique, catholique et orthodoxe, venus d’Athènes, ainsi que les jeunes de Tarse-Mersin, en Turquie. A la suite de saint Grégoire, je vous invite tous à vous faire serviteurs de ce qu’il y a de beau et de noble dans le cœur de l’homme, pour qu’il puisse contempler Dieu. Avec ma Bénédiction apostolique.

Appel du Pape
Ces jours derniers, plusieurs régions géographiques ont été dévastées par de graves catastrophes:  je fais référence aux inondations dans certains pays orientaux, ainsi qu'aux incendies dévastateurs en Grèce, en Italie et dans d'autres pays européens. Devant des urgences aussi dramatiques, qui ont causé de nombreuses victimes et d'importants dégâts matériels, on ne peut qu'être préoccupés par le comportement irresponsable d'individus qui mettent en péril la sécurité des personnes et détruisent le patrimoine de l'environnement, bien précieux de l'humanité tout entière. Je m'unis à ceux qui, à juste titre, condamnent ces actions criminelles et j'invite chacun à prier pour les victimes de ces tragédies.

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BENOÎT XVI
AUDIENCE GÉNÉRALE
Mercredi 5 septembre 2007

Saint Grégoire de Nysse
Chers frères et sœurs!
Je vous propose quelques aspects de la doctrine de saint Grégoire de Nysse, dont nous avons déjà parlé mercredi dernier. En premier lieu, Grégoire de Nysse manifesta une conception très élevée de la dignité de l'homme. Le but de l'homme, dit le saint Evêque, est celui de devenir semblable à Dieu, et il atteint ce but avant tout à travers l'amour, la connaissance et la pratique des vertus, "rayons lumineux qui descendent de la nature divine" (De Beatitudinibus 6:  PG 44, 1272 C), dans un mouvement perpétuel d'adhésion au bien, comme le coureur qui est tendu en avant. Grégoire utilise, à ce propos, une image efficace, déjà présente dans la Lettre de Paul aux Philippiens:  épek-teinómenos (3, 13), c'est-à-dire "lancé vers l'avant", vers ce qui est plus grand, vers la vérité et l'amour. Cette expression appropriée indique une réalité profonde:  la perfection, que nous voulons trouver n'est pas une chose acquise pour toujours; la perfection est le fait de rester en chemin, c'est une disposition permanente à aller de l'avant, car l'on n'atteint jamais la pleine ressemblance avec Dieu; nous sommes toujours en chemin (cf. Homilia in Canticum 12:  PG 44, 1025d). L'histoire de chaque âme est celle d'un amour à chaque fois comblé et, dans le même temps, ouvert sur de nouveaux horizons, car Dieu étend sans cesse les possibilités de l'âme, pour la rendre capable de biens toujours plus grands. Dieu lui-même, qui a déposé en nous des germes de bien, et dont part toute initiative de sainteté, "modèle le bloc... En limant et en nettoyant notre esprit, il forme en nous le Christ" (In Psalmos 2, 11:  PG 44, 544B).
Grégoire se soucie de préciser:  "Ce n'est pas, en effet, notre œuvre, et ce n'est pas non plus la victoire d'une force humaine que de devenir semblables à la divinité, mais c'est le résultat de la munificence de Dieu, qui dès sa première origine a fait grâce à notre nature de la ressemblance avec Lui" (De virginitate 12, 2:  SC 119, 408-410). Donc, pour l'âme, "il ne s'agit pas de connaître quelque chose de Dieu, mais d'avoir Dieu en soi" (De beatitudinibus 6:  PG 44, 1269c). Du reste, remarque Grégoire avec acuité, "la divinité est pureté, est affranchissement des passions et disparition de tout mal:  si toutes ces choses sont en toi, Dieu est réellement en toi" (De beatitudinibus 6:  PG 44, 1272C).
Lorsque nous avons Dieu en nous, lorsque l'homme aime Dieu, par cette réciprocité qui est propre à l'amour, il désire ce que Dieu lui-même désire (cf. Homilia in Canticum 9:  PG 44, 956ac), et il coopère donc avec Dieu à modeler en lui l'image divine, si bien que "notre naissance spirituelle est le résultat d'un libre choix, et nous sommes d'une certaine façon les parents de nous-mêmes, en nous créant comme nous voulons être et en nous formant par notre volonté selon le modèle que nous choisissons" (Vita Moysis 2, 3:  SC 1bis, 108). Pour s'élever vers Dieu, l'homme doit se purifier:  "La voie qui reconduit au ciel la nature humaine, n'est autre que l'éloignement des maux de ce monde... Devenir semblable à Dieu signifie devenir juste, saint et bon... Si donc, selon l'Ecclésiaste (5, 1), "Dieu est au ciel" et si, selon le prophète (Ps 72, 28), vous "adhérez à Dieu", il s'ensuit nécessairement que vous êtes là où Dieu se trouve, du moment que vous êtes unis à Lui. Etant donné qu'il vous a ordonné, lorsque vous priez, d'appeler Dieu Père, il vous dit de devenir sans aucun doute semblables à votre Père céleste, avec une vie digne de Dieu, comme le Seigneur nous l'ordonne plus clairement ailleurs, en disant:  "Soyez parfaits comme votre Père céleste est parfait" (Mt 5, 48)" (De oratione dominica 2:  PG 44, 1145ac).
Sur ce chemin d'ascèse spirituelle, le Christ est le modèle et le maître, qui nous fait voir la belle image de Dieu (cf. De perfectione christiana, PG 46, 272a). Chacun de nous, en se tournant vers Lui, se retrouve être "le peintre de sa propre vie", qui possède la volonté pour exécuter le travail et les vertus comme des couleurs dont se servir (ibid.:   PG  46,  272b). Si l'homme est considéré digne du Christ, comment doit-il donc se comporter? Grégoire répond ainsi:  "[Il doit] toujours examiner au plus profond de lui ses pensées, ses paroles et ses actions, pour voir si celles-ci sont tournées vers le Christ ou si elles s'éloignent de lui" (ibid.:  PG 46, 284c). Et ce point est important en raison de la valeur qu'il attribue à la parole "chrétien". Le chrétien est quelqu'un qui porte le nom du Christ, et il doit donc s'assimiler à Lui également dans sa vie. A travers le Baptême, nous chrétiens, assumons une grande responsabilité.
Mais le Christ - rappelle Grégoire - est présent également dans les pauvres, c'est pourquoi ils ne doivent jamais être offensés:  "Ne méprise pas ceux qui gisent étendus, comme si pour cette raison ils ne valaient rien. Considère qui ils sont, et tu découvriras quelle est leur dignité:  ils représentent pour nous la  Personne du Sauveur. Et il en est ainsi:  car le Seigneur, dans sa bonté, leur prêta sa personne elle-même, afin que, à travers celle-ci, s'émeuvent ceux qui sont durs de cœur et ennemis des pauvres" (De pauperibus amandis:  PG 46, 460bc). Grégoire, avons-nous dit, parle de montée:  montée vers Dieu dans la prière, à travers la pureté du cœur; mais montée vers Dieu également à travers l'amour pour le prochain. L'amour est l'échelle qui conduit vers Dieu. Par conséquent, Grégoire de Nysse apostrophe avec vivacité chacun de ses auditeurs:  "Sois généreux avec ces frères, victimes du malheur. Donne à l'affamé ce que tu ôtes à ton ventre" (ibid.:  PG 46, 457c).
Avec une grande clarté, Grégoire rappelle que nous dépendons tous de Dieu, et c'est pourquoi il s'exclame:  "Ne pensez pas que tout vous appartienne! Il doit également y avoir une part pour les pauvres, les amis de Dieu. En effet, la vérité est que tout vient de Dieu, Père universel, et que nous sommes frères et appartenons à une même race" (cf. ibid.:  PG 46, 465b). Il faut alors que le chrétien s'examine, insiste encore Grégoire:  "Mais à quoi te sert-il de jeûner et de faire abstinence de la chair, si ensuite avec ta méchanceté tu ne fais rien d'autre que dévorer ton frère? Quel gain tires-tu, face à Dieu, du fait de ne pas manger ce qui est à toi, si ensuite, agissant injustement, tu arraches des mains du pauvre ce qui lui appartient?" (ibid.:  PG 46, 456a).
Nous concluons ces catéchèses sur trois grands Pères de Cappadoce en rappelant encore cet aspect important de la doctrine spirituelle de Grégoire de Nysse, qui est la prière. Pour progresser sur le chemin vers la perfection et accueillir Dieu en soi, porter en soi l'Esprit de Dieu, l'amour de Dieu, l'homme doit se tourner avec confiance vers Lui dans la prière:  "A travers la prière nous réussissons à être avec Dieu. Mais celui qui est avec Dieu est loin de l'ennemi. La prière est soutien et défense de la chasteté, frein de la colère, apaisement et domination de l'orgueil. La prière est conservation de la virginité, protection de la fidélité dans le mariage, espérance pour ceux qui veillent, abondance de fruits pour les agriculteurs, sécurité pour les navigateurs" (De oratione dominica 1:  PPG 44, 1124A-B). Le chrétien prie en s'inspirant toujours de la prière du Seigneur:  "Si nous voulons donc prier que descende sur nous le Royaume de Dieu, nous lui demandons cela à travers la puissance de la Parole:  que je sois éloigné de la corruption, que je sois libéré de la mort, que je sois dégagé des chaînes de l'erreur; que jamais la mort ne règne sur moi, que la tyrannie du mal n'ait jamais de pouvoir sur moi, que l'adversaire ne domine pas sur moi ni ne me fasse prisonnier à travers le péché, mais que ton Règne vienne sur moi, afin que s'éloignent de moi ou, mieux encore, que disparaissent les passions qui, à présent, me dominent et règnent en maîtres" (ibid., 3:  PG 44, 1156d-1157a).
Une fois sa vie terrestre terminée, le chrétien pourra ainsi s'adresser avec sérénité à Dieu. Parlant de cela, saint Grégoire pense à la mort de sa sœur Macrine, et écrit qu'à l'heure de sa mort, elle priait Dieu ainsi:  "Toi qui as sur la terre le pouvoir de remettre les péchés, "détourne de moi tes yeux, que je respire" (Ps 38, 14), et pour que je sois trouvée à tes côtés sans tâche, au moment où je suis dépouillée de mon corps (cf. Col 2, 11), de façon à ce que mon esprit, saint et immaculé (cf. Ep 5, 27), soit accueilli entre tes mains, "devant toi [...] comme un encens" (Ps 140, 2" (Vita Macrinae 24:  SC 178, 224). Cet enseignement de saint Grégoire demeure toujours valide:  non seulement parler de Dieu, mais porter Dieu en soi. Nous le faisons avec l'engagement de la prière et en vivant dans l'esprit de l'amour pour tous nos frères.

 

wikipédia à jour au 28 décembre 2016

Grégoire de Nysse

Grégoire de Nysse
Image illustrative de l'article Grégoire de Nysse
Grégoire de Nysse sur une fresque du XIVe siècle, église Saint-Sauveur-in-Chora, Istanbul
Naissance
entre 331 et 341
Néocésarée, Niksar Drapeau: Empire Romain
Décès
394  (60° ans)
Nationalité
Romaine
Vénéré par
Saint patron
Grégoire de Nysse, né entre 331 et 341 à Néocésarée (actuelle Niksar en Turquie), dans la province du Pont-Euxin, mort après 394, est un théologien et un mystique de grande envergure ; comme Père de l'Église, il est fêté le 10 janvier.

Sommaire

Biographie

Jeunesse et études

Grégoire naît entre 331 et 3411,Note 1. Il naît dans une famille chrétienne d'avocats et de rhéteurs de dix enfants2,3. Sa grand-mère, Macrine l'Ancienne, avait suivi l'enseignement de Grégoire le Thaumaturge2,3, qu'elle transmit à ses enfants. Deux de ses frères, Basile de Césarée, son aîné de cinq ans1; et Pierre de Sébaste furent évêques comme lui. Sa mère Emmélie, une fois veuve, et sa sœur, Macrine la Jeune, devinrent religieuses2. Son père tenait une école de rhétorique à Néocésarée. Il bénéficie de la très forte influence de sa sœur Macrine et davantage encore de celle de son frère Basile, qu'il appellera « un maître et un père » et « la merveille de l'univers ».
Il n'a pas suivi des études aussi complètes que son frère Basile de Césarée4. Au sujet de ses études, Grégoire affirmera qu'il « n'a rien de sensationnel à en dire »5. On n'a aucune indication sur ses professeurs, mais il est probable que son frère Basile fut l'un d'eux4,Note 2.
Grégoire se destina à la vie religieuse, et fut ordonné lecteur, mais il ne se jugea pas pour autant lié au service de l'Église4,6. Après le retrait de la loi scolaire de l'empereur Julien en 365, il devint maître de rhétorique. Grégoire se maria avec Théosébia. Sa jeune femme mourut quelque temps plus tard6. Il déplorera plus tard de ne pas avoir choisi la virginité. Grégoire de Nazianze lui écrira7 lui demandant d'avoir une vie plus fervente4. Grégoire de Nysse aura une vie plus chrétienne et ira vivre avec les moines : il fait de longs séjours au monastère de l'Iris de Basile4.

Épiscopat

Icône mosaïque de Grégoire de Nysse datant du XIe siècle.
En 371, Grégoire est nommé évêque de Nysse1, contre son gré, par Basile de Césarée4. Lui qui n'aspirait qu'à la vie spirituelle et intellectuelle se montra inapte à toute politique ecclésiastique ; on lui reprocha son manque de fermeté et les inexactitudes de sa comptabilité8. Quelques années après sa nomination en 374, un synode d'évêques ariens, opposés à la doctrine de Nicée défendue par Grégoire et Basile de Césarée, le dépose1,4, en affirmant qu'il avait dilapidé les biens de l'évêché6. L'empereur Valens favorisant l'arianisme1, Grégoire part alors en exil6.
En 378, l'empereur Valens étant mort, on fête son retour triomphal dans son diocèse1,4. De retour d'exil en 379, il est présent lors de la mort de sa sœur Macrine la Jeune9. Il écrit un dialogue développant, en s'inspirant du Phédon de Platon, ses conceptions de la vie après la mort et de l'âme9,10.
Il participe au Concile d'Antioche en 379, afin de mettre fin au schisme qui divisait la région d'Antioche. Il est alors chargé par des évêques du synode d'une mission en Arabie1, il en profite pour voir les lieux saints4.
En 380, nommé archevêque de Sébaste, il y fait nommer la même année son frère Pierre. Il est alors désigné comme évêque ordinaire de tout le diocèse du Pont.

Constantinople

Représentation du premier Concile de Constantinople.
Après la mort de Basile en 379, Grégoire de Nysse voit son rôle augmenter et deviendra l'homme de confiance du régime impérial de Théodose le Grand.
Il joue un rôle de première importance au concile de Constantinople en 381, convoqué contre l'arianisme ; ce concile complète la profession de foi de Nicée4. C'est lui qui prononce l'éloge funèbre de Mélèce Ier d'Antioche mort durant le Concile1. Il rédige un traité Contre Eunome, dans lequel il défend la foi de Nicée, et la nature divine de l'Esprit Saint10. Il est désigné par Théodose Ier comme l'un des prélats dont il faut partager la foi pour être orthodoxe4.
En 385, il donne les honneurs de la sépulture à « sa sœur Théosébie ». Il prononce l'éloge funèbre de l'enfant unique de l'empereur Théodose Ier, la princesse Pulchérie morte à l'âge de 6 ans, et peu après, celui de l'impératrice Flacilla1,4.
En 386, l'empereur qui résidait à Constantinople se fixe à Milan, ville où Saint Ambroise est évêque. Grégoire se trouve ainsi libéré et rentre alors à Nysse. Ici se situe sa période de production littéraire.
Vers 394, il donne des instructions spirituelles aux moines. Il aurait participé en 394 à la dédicace de l'église de Rufin, à Constantinople, et meurt peu après. On fixe la date de sa mort vers 394Note 3.

Doctrine

Gravure médiévale représentant saint Grégoire de Nysse.
La pensée de Grégoire de Nysse est plus pénétrante que celle de Basile de Césarée et de Grégoire de Nazianze. Les écrits de Grégoire, en grec, sont nombreux et variés. Le Discours catéchétique s'adresse aux catéchistes et traite de questions de la foi contestées par les hérétiques. La formulation de la foi, comme toujours, se précise dans la controverse. La Vie de Moïse constitue une première formulation de la doctrine spirituelle chrétienne, elle restera au long de tous les siècles qui suivront l'une des sources d'inspiration du christianisme intérieur, mystique.
Grégoire a en outre commenté dans des homélies divers passages bibliques, notamment l'Ecclésiaste, le Cantique des cantiques et les Béatitudes. La datation des œuvres est extrêmement difficile, car on a trop peu de détails sur la vie de Grégoire. La plus grande partie de l’œuvre fut écrite après la mort de Basile (379).

Sources profanes

Nous pouvons citer trois sources profanes qui eurent une certaine influence, au moins dans leur style, sur la doctrine de Grégoire de Nysse : ce sont Platon, Plotin et les stoïciens. Il faut faire une mention spéciale de Plotin (205-270), philosophe mystique néo-platonicien. La dépendance littéraire de Grégoire envers lui est évidente. Cependant, cette influence doit être mitigée : nous assistons dans son œuvre à une entière transformation du platonisme comme du néoplatonisme de Plotin. Nous pouvons suivre dans son jaillissement même et dans les difficultés qu'il rencontre le travail de transposition qui va permettre à la mystique chrétienne de se constituer. L'influence plotinienne, bien plus qu'une influence réelle dans la doctrine, consiste plutôt en « atavisme d'expression ». La nouveauté du christianisme, dans la recherche d'une formulation adéquate, se voit obligée d'acquérir la maîtrise de ce langage philosophique profane, mais en modifiant considérablement le sens11.

Le corpus

Les œuvres de Grégoire de Nysse sont dans le Clavis Patrum Græcorum 3135-3226.

Ouvrages dogmatiques

Depuis le De Principiis d'Origène, c'est le premier essai de théologie systématique, somme de doctrine chrétienne composée vers 386. Dans cette œuvre Grégoire fait la synthèse des principaux dogmes chrétiens: Trinité, Incarnation, Rédemption, Baptême, Eucharistie, et notamment sur la Transsubstantiation eucharistique9. Il développe en se fondant sur la métaphysique et non sur la seule autorité des Écritures9.
  • Le Dialogue sur l'âme et la résurrection.
De retour d'exil, Grégoire visita en 379 sa sœur aînée Macrine qui était mourante9. Le livre est un dialogue entre Grégoire et sa sœur Macrine qui, nous dit Grégoire, mourut le lendemain. Elle se situe après la mort de Basile en 379. Grégoire imitant le Phédon de Platon, développe, à travers ces dialogues prêtés à sa sœur, les idées sur l'âme et la résurrection9,10.
  • Contre Eunome
Ces quatre traités sont une réfutation de l'arianisme écrite entre 380 et 3829, défendant la divinité de l'Esprit-Saint et du Christ10. Les deux premiers furent lus au concile de Constantinople, en 381, devant Grégoire de Nazianze et Saint Jérôme. Grégoire de Nysse était en effet le chef théologique de l'assemblée. Basile de Césarée avait déjà écrit un ouvrage Contre Eunome10. Eunome avait répondu à Basile, Contre Eunome de Grégoire de Nysse sera une réponse à Eunome4. Grégoire est une défense de la pensée théologique de Basile9,10.
  • Les autres œuvres dogmatiques
Pour les autres œuvres dogmatiques, que nous ne citons pas toutes, voici un résumé des idées défendues :
Deux traités réfutent l'apollinarisme qui accusait l'Église de prétendre qu'il y avait deux Fils de Dieu. Grégoire insiste sur l'union des deux natures dans le Christ.
Quatre traités défendent la doctrine trinitaire : le Père, le Fils et l'Esprit sont trois modes d'être, trois relations d'un être un et identique.
Un de ces traités est la Lettre 189 de S. Basile de Césarée - donc faussement attribuée à Basile. Elle défend, comme une autre œuvre de Grégoire de Nysse (le Sermo de Spiritu Sancto), la divinité du Saint-Esprit.
Citons enfin un dialogue avec un philosophe païen contre le fatalisme astrologique : le Contra Fatum.

Ouvrages exégétiques

  • Deux ouvrages importants sur la Création : La Création de l'homme (De opificio hominis) et L'explication du récit des six jours (Explicatio apologetica in Hexameron) :
Le premier est un cadeau de Pâques à son frère Pierre dans lequel Grégoire complète l'Hexameron de Basile. « Que la gloire qui vient des disciples ne fasse pas défaut au maître », y dit Grégoire.
Le deuxième en est la suite directe. Comme Basile s'interdisait de s'écarter du sens littéral, Grégoire renonce ici à l'allégorie, présente partout ailleurs dans son œuvre.
Les autres œuvres sont toutes des œuvres ascétiques ou mystiques, sauf le petit écrit sur la sorcière d’Endor (De pythonissa) où Grégoire affirme que la sorcière ne vit pas Samuel lui-même mais un démon. il écrivit La Vie de Moïse, dans lequel Grégoire développe les vertus de Moïse et invite à les imiter12.
  • Sur les Inscriptions des psaumes : les cinq livres des psaumes représentent autant de degrés sur l'échelle vers la perfection et leurs titres ont une signification allégorique destinée à notre profit spirituel.
  • Huit homélies sur l’Ecclésiaste : le renoncement conduit les sens à un monde de paix. Ce livre est destiné à élever l'esprit au-dessus des sens.
  • Quinze homélies sur le Cantique des cantiques - éloge d'Origène et défense de son interprétation spirituelle. Le Cantique des cantiques figure l'union nuptiale entre Dieu et l'âme (Origène insistait davantage sur l'aspect ecclésial).
  • Sur l'oraison dominicale : cinq homélies. Le thème majeur est l'image divine dans l'âme humaine.
  • Sur les béatitudes : huit homélies sur les degrés ascendants des béatitudes.
  • Deux homélies sur la 1re Épître aux Corinthiens.

Ouvrages ascétiques ou monastiques

Nous sommes ici à la partie la plus importante, car elle est la plus personnelle de l’œuvre du grand mystique. Grégoire donne au monachisme une doctrine spirituelle, une profonde orientation religieuse. Grégoire est le « père du mysticisme » et en a forgé le vocabulaire chrétien.
De virginitate.
  • Le Traité sur la Virginité est la toute première œuvre de Grégoire, écrite peu après l'élection épiscopale de Basile (370) et avant la consécration épiscopale de Grégoire (371).
  • Du nom et de la profession des chrétiens : le christianisme est l'imitation de la nature divine, la restauration de l'image première.
  • Sur la perfection chrétienne : dédié au moine Olympius, ce traité est le commentaire des grands textes christologiques de saint Paul. La sainteté est l’œuvre du Christ dans l'âme. Les noms du Christ sont étudiés. La vraie perfection n'est jamais réalisée, mais elle est toujours en mouvement vers le mieux. La perfection n'est contenue par aucune limite. Telle est la conclusion de l'écrit.
  • La Vie de Macrine a été écrite à la requête du même moine Olympius, aussitôt après la mort de Macrine en décembre 379. Macrine y est présentée comme le modèle de la perfection chrétienne.
  • L'Hypotypose
Ce traité très important fut récemment découvert et édité par le grand érudit et helléniste Werner Jaeger qui le qualifie de « chef-d'œuvre caché pendant un millénaire à l'ombre des bibliothèques ». On n'en avait que de larges extraits sous le nom de De instituto christiano, Enseignements sur la vie chrétienne13. Le titre Hypotypose désigne au sens classique du grec ancien Ύποτύπωσις une ébauche. Suivant la coutume des Pères grecs qui protestent toujours avec humilité contre le trop grand honneur qu'on leur fait quand on leur demande un écrit, Grégoire répond par une modeste ébauche, en quelque sorte un “sous-écrit”, le préfixe hypo- marquant la subordination et la diminution. Le livre est écrit vers la fin de la vie de Grégoire, après 390, et donne la synthèse de toutes ses idées maîtresses. Il y dit, dans ce traité, son dernier mot sur la nature de l'ascétisme, comme ce qui tend à favoriser le développement de la vie mystique. Grégoire se cite lui-même, empruntant de larges extraits au Traité sur la Virginité et à la Vie de Moïse. Nous sommes ici au sommet de la pensée spirituelle de Grégoire.
Quel est le sujet précis du livre ? Dès le début, pour répondre aux ascètes qui l'avaient interrogé, Grégoire définit l'objet de son ouvrage :
« Vous désirez de nous une parole qui vous guide et vous conduise sans détours dans le voyage de la vie, vous montrant avec précision quel est le but de cette vie pour ceux qui y participent, quelle est la volonté de Dieu, bonne favorable et parfaite, quelle est la voie vers ce but, et comment doivent se comporter les uns envers les autres ceux qui la parcourent, comment les supérieurs doivent diriger le “chœur philosophique”Note 5, et quels labeurs doivent assumer ceux qui veulent parvenir au sommet de la vertu et préparer dignement leur âme à la venue de l'Esprit14. »
Écrit pour ceux « qui réalisent en commun la forme de vie apostolique », il cherche à dégager le but (en grec, le skopos) de la vie monastique et les moyens de l'atteindre. Le but de la vie monastique est de rendre l'homme spirituel adulte et cette croissance est l’œuvre commune de la grâce et de la liberté. La foi et le baptême ont rendu l'homme spirituel, ils sont principe d'une purification progressive par laquelle, libérée de la honte, l'âme accède à l'assurance confiante et est rendue capable de voir la lumière inintelligible. L'humilité seule l'assimile au Christ humble.
La seconde partie de l'ouvrage insiste sur la pratique de la vie commune où, dans le renoncement à soi-même et à toute volonté propre, chacun est au service de tous. Le cénobitisme est l'organisation même d'un service mutuel dans la joie et l'épanouissement de l'amour. On trouvera la route à suivre en prenant pour guide celui qui a mission de conduire la communauté des frères au port de la volonté divine.
La troisième partie est une défense ardente de la contemplation. Elle est l'apport le plus personnel de Grégoire. Parmi tous les « exercices d'ascèse » (en grec ancien, le ponos et le kopos) qui conduisent à la perfection, l'accent est mis sur la prière, sommet de l'échelle des vertus. Celui qui s'applique à la prière, ayant pris l'Esprit pour guide et soutien, brûle de l'amour du Seigneur et bouillonne de désir, ne trouvant pas de satiété à sa prière, mais s'enflammant toujours du désir du Bien. Les âmes d'oraison sont le fleuron du monastère, elles doivent être soutenues de toute manière. La prière donne la joie spirituelle, elle est le royaume de Dieu.
Le leitmotiv de toute l’œuvre est le texte de l'épître aux Philippiens 3,13 : « Je vais droit de l'avant, tendu de tout mon être, je cours vers le but ». Nous reconnaîtrons d'ailleurs dans cette épectase l'idée centrale de Grégoire.
L'influence de ce traité sur saint Jean Cassien est certaine. La Grande lettre de Macaire (texte du Ve siècle) en est une paraphrase directe. Dom Adalbert de Vogüé a étudié son influence sur la Règle de saint Benoît.

Discours, Sermons et Lettres

Un sermon sur l'Ascension est le premier témoignage d'une fête de l'Ascension distincte de celle de la Pentecôte, il date de mai 388. Le panégyrique sur son frère Basile ne contient aucun thrène. Basile est comparé à Jean-Baptiste et à Paul et Grégoire se préoccupe de lui établir une fête dans le martyrologe.
Et enfin, mentionnons encore les Lettres : Trente lettres sont conservées. La Lettre 25 décrit en détail un martyrion, sanctuaire cruciforme, et présente un grand intérêt pour l'histoire de l'art chrétien. Les Lettres 2 et 3 sur le pèlerinage de Jérusalem sont célèbres et furent très discutées. Elles protestent contre l'excessive estime des pèlerinages.
Changer de lieu n'apporte aucun progrès vers Dieu, mais, où que vous soyez, Dieu viendra à vous, si les chambres de votre âme se trouvent telles qu'il puisse habiter en vous. Mais si vous gardez votre être intérieur plein de mauvaises pensées, fussiez-vous sur le Golgotha, sur le mont des Oliviers, sur le rocher mémorial de la Résurrection, vous serez aussi éloignés de recevoir le Christ en vous qu'on peut l'être lorsqu'on n'a même pas commencé de le confesser.

Écrits

Grégoire de Nysse, moine et évêque, fut un théologien et un mystique, l'un des trois « pères cappadociens ».
« Il y a ici bien plus que Salomon »
« Le texte du Cantique des Cantiques de Salomon présente l'âme comme une fiancée, parée pour une union incorporelle, spirituelle et sans souillure avec Dieu. Celui qui « veut que tous les hommes soient sauvés et viennent à la connaissance de la vérité » (1Tm 2,4) expose là le moyen le plus achevé, le moyen bienheureux d'être sauvé, j'entends celui qui passe par l'amour. Certains peuvent aussi trouver le salut dans la crainte : à considérer les châtiments qui nous menacent dans la géhenne, nous nous gardons du mal. Il en est également qui mènent une vie de droiture et de vertu parce qu'ils espèrent le salaire réservé à ceux dont l'existence a été pieuse : ils agissent ainsi non par amour du bien, mais avec l'espoir d'être récompensés.
Or, pour s'élancer vers la perfection, on commence par chasser la crainte de son âme ; c'est éprouver un sentiment servile que de ne pas être attaché à son maître par amour... On aime « de tout son cœur, de toute son âme, de toutes ses forces » (Mc 12,30) non pas un des dons dont on est gratifié, mais celui-là même qui est la source de ces biens. Telle doit donc être l'âme d'après ce que dit Salomon...
Crois-tu que j'évoque Salomon, le fils de Bethsabée qui sur la montagne a offert mille bœufs et qui, sur les conseils de sa femme étrangère, a commis un péché ? Non. Je pense à un autre Salomon, qui est lui aussi né de la semence de David selon la chair ; il a pour nom « paix » (le nom de Salomon veut dire « homme de paix » (1 Ch 22,9)). Il est le vrai roi d'Israël, le bâtisseur du Temple de Dieu, le détenteur de la connaissance universelle. Sa sagesse est incommensurable ; mieux, il est par essence sagesse et vérité ; son nom et sa pensée sont parfaitement divins et sublimes. Il s'est servi de Salomon comme d'un instrument et, par sa voix, c'est lui qui s'adresse à nous, d'abord dans les Proverbes, ensuite dans l'Ecclésiaste, puis dans le Cantique des Cantiques. Il montre ainsi à notre réflexion, avec méthode et ordre, la façon de progresser vers la perfection »
— Homélie 1 sur le Cantique des Cantiques, trad. Migne, 1992, p. 40 rev.

Postérité

Notoriété ecclésiale

Compté au nombre des Pères de l'Église, Grégoire de Nysse est vénéré comme saint par l'Église catholique, l'Église orthodoxe, l'Église copte orthodoxe, les églises orientales orthodoxes et l'Église anglicane.
Sa date de mort n'est pas précisément connue, mais Grégoire de Nysse est inscrit au martyrologe romain le 9 mars, les orthodoxes l'honorent le 10 janvier4.

Notoriété théologique

Il est considéré avec Basile de Césarée et Grégoire de Nazianze comme l'un des trois « pères cappadociens ».
À l'occasion du deuxième concile de Nicée en 787, il est désigné comme « le père des Pères ». Il est parfois appelé « Saint Grégoire le mystique » ou encore « le prince des mystiques ».
Sa pensée influença notamment Dominique de Guzmán (saint Dominique), fondateur de l'ordre des Prêcheurs (o.p.), et Thomas d'Aquin, o.p., dans leur lutte intellectuelle contre le catharisme qui, influencé par le manichéisme, avait tendance à établir une certaine symétrie entre un principe du bien et un principe du mal. Thomas d'Aquin développa beaucoup l'argument et lui donna une forme systématique : aucune espèce de symétrie entre l'être et le néant, entre Dieu et le diable, entre la bonne action et le péché.
Le futur cardinal Hans Urs von Balthasar, l'un des plus grands théologiens catholiques du XXe siècle, lui consacra Présence et pensée. Essai sur la philosophie religieuse de Grégoire de Nysse en 1942. Le père Louis Bouyer le considère comme « l'un des penseurs les plus puissants et les plus originaux que connaisse l'histoire de l'Église, un des rares écrivains dont on puisse être sûr qu'il a lu intégralement les anciens et qu'il les a parfaitement assimilés15. »
Le cardinal Jean Daniélou lui a aussi consacré son ouvrage Platonisme et théologie mystique : doctrine spirituelle de saint Grégoire de Nysse, dans lequel il commente abondamment la doctrine du progrès spirituel chez Grégoire de Nysse, appelé épectase.
Certaines de ses expressions donnent lieu à un débat dans le cadre de l'apocatastase. Dieu sera restauré en tous à la suite du Jugement dernier. Certains y voient la possibilité d'une restauration des damnés, d'autres (chrétiens catholiques comme chrétiens orthodoxes) estiment que cette restauration sera pour chacun selon son mode : la jouissance ou la souffrance suivant que les personnes aient fait le choix de l'amour ou de la haine durant leur existence terrestre. Vlachos estime que, si Grégoire de Nysse devait être interprété dans le sens d'Origène, en ce qui concerne son eschatologie, il n'aurait pas bénéficié de cette vénération constante puisque la doctrine d'Origène a été clairement condamnée par l'Église16.

Notes et références

Notes

  1. Sa date de naissance est située entre 331 et 341. La connaissance de Grégoire de Nysse ne peut être faite que par ses écrits. Or, non seulement Grégoire n'a commencé sa carrière d'écrivain que tardivement, mais en outre, il nous a laissé peu d'informations intimes sur sa vie.
  2. Il le nomme « son père, son instructeur et son guide ».
  3. Aujourd'hui, la dernière date à laquelle l'on sait Grégoire de Nysse vivant est 394.
  4. (la) Oratio catechetica magna.
  5. Cette expression désigne les monastères.

Références

  1. a, b, c, d, e, f, g, h et i Wetzer et Welte 1870, p. 120.
  2. a, b et c Bricout 1926, p. 663.
  3. a et b Alfeyev 2006, p. 361.
  4. a, b, c, d, e, f, g, h, i, j, k, l, m et n Bricout 1926, p. 589.
  5. Lettre 13 de Grégoire de Nysse.
  6. a, b, c et d Palanque, Bardy, de Labriolle 1950, p. 425.
  7. Grégoire de Nazianze, Lettre 11.
  8. Voir les Lettres mécontentes de Basile de Césarée : 58, 59, 60 et 100.
  9. a, b, c, d, e, f, g et h Bricourt 1926, p. 590.
  10. a, b, c, d, e et f Wetzer et Welte 1870, p. 122.
  11. Alain Durel, Eros transfiguré. Variations sur Grégoire de Nysse, préface de Gérard Bensussan, éditions du Cerf, coll. La nuit surveillée, 2007.
  12. Wetzer et Welte 1870, p. 121.
  13. Grégoire de Nysse, Le but divin, Collection Les Maîtres de vie spirituelle, Éditions Pierre Téqui, 1986, p. 8.
  14. Grégoire de Nysse, Le but divin, Collection Les Maîtres de vie spirituelle, Éditions Pierre Téqui, 1986, p. 14-15.
  15. Louis Bouyer, La spiritualité du Nouveau Testament et des Pères, éditions Aubier, 1960.
  16. Hiérothée Vlachos, La Vie éternelle, Éditions L'Âge d'Homme, Paris. Voir aussi Jean-Claude Larchet, La Divinisation selon Maxime le Confesseur, Éditions du Cerf, Paris.

Bibliographie

Œuvres de Grégoire de Nysse en traduction française

  • Le but divin, Paris, Librairie Pierre Tequi, coll. « Les Maîtres de vie spirituelle », 1986, 78 p. (ISBN 2-85244-802-5) Document utilisé pour la rédaction de l’article
  • Les Béatitudes, Migne, 1990.
  • Contre Eunome (379-383), Cerf, 2010
  • La Création de l'homme (379-394), trad. J.-Y. Guillaumin, Desclée de Brouwer, 1982. [misericor.free.fr/gregoire_nysse.php]
  • Discours catéchétique (381), Cerf, coll. "Sources chrétiennes", 2000.
  • Écrits spirituels, Migne, 1990.
  • Éloge de Grégoire le Thaumaturge. Éloge de Basile, Cerf, coll. "Sources chrétiennes", 2014.
  • Homélies, in C. Bouchet et M. Canéver, Grégoire de Nysse, Cinq homélies pascales, Homélie sur l'Ascension, traité 'Quand le fils aura tout soumis' , Migne, Brepols, 1994.
  • Homélies sur le 'Cantique des cantiques' , trad. Jean Daniélou : La colombe et la ténèbre, Cerf, coll. "Trésors du christianisme", 2009.
  • Homélies sur l'Ecclésiaste, trad. Françoise Vinel, Cerf, coll. "Sources chrétiennes", 1996.
  • Lettres (380-385), trad. P. Maravl, Cerf, 1990.
  • Traité de la virginité (370), trad. M. Aubineau, Cerf, 1966.
  • Sur les titres des Psaumes (372-381), trad., Cerf, coll. "Sources chrétiennes", 2002.
  • Traité sur l'âme et la résurrection (383), trad. J. Terrieux, Cerf, 1995.
  • Vie de Grégoire le Thaumaturge (372-394), trad. Pierre Maraval, Cerf, 2014 [1] [archive]
  • Vie de Moïse (391-394), in Jean Daniélou, Vie de Moïse de Grégoire de Nysse, ou L'être de désir, Albin Michel, 1993 ; Cerf, 1942.
  • Vie de sainte Macrine (379-381), Cerf, 1971.

Études sur Grégoire de Nysse

  • (de) Margarete Altenburger und Friedhelm Mann, Bibliographie zu Gregor von Nyssa, Leyde, Brill, 1987, XXIII-363 p. (ISBN 90 04 07286 1)
  • Dr Wetzer et Dr Welte, Traduit de l'Allemand par I. Goschler, Dictionnaire encyclopédique de la Théologie Catholique, Paris, Gaume Frères et J. Duprey Éditeurs, coll. « Tome X », 1870 (réimpr. Troisième édition) Document utilisé pour la rédaction de l’article
  • J. Bricout, Dictionnaire pratique des connaissances religieuses, Paris, Librairie Letouzey et Ané, 1926, 1250 p. Document utilisé pour la rédaction de l’article
  • Jean-Rémy Palanque, Gustave Bardy et Pierre de Labriolle, De la paix constantinienne à la mort de Théodose, Paris, Librairie Bloud & Gay, coll. « Histoire de l'Église depuis les origines jusqu'à nos jours », 1950, 536 p. Document utilisé pour la rédaction de l’article
  • Mgr Hilarion Alfeyev, Traduit du Russe par Alexandre Siniakov, Le chantre de la Lumière : Introduction à la spiritualité de saint Grégoire de Nazianze, Paris, Édition du Cerf, coll. « Théologies », août 2006, 416 p. (ISBN 978-2-204-08031-6) Document utilisé pour la rédaction de l’article
  • Alain Durel et Gérard Bensussan, Eros transfiguré : Variations sur Grégoire de Nysse, Cerf, coll. « Nuit Surveillée », 2007 (ISBN 978-2204083645)

Articles connexes

Liens externes

Dernière modification de cette page le 28 décembre 2016, à 10:54.

 









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