lundi 14 juillet 2008

aimer - textes du jour

Lundi 14 Juillet 2008

Hier . . . feu d’artfice. Je regrette de n’avoir pas mon magnétophone, commentaire de notre fille. C’est beau… mais aussi : est-ce qu’il y aura du chocolat à la fin d’artifice ? et, trace de condensation d’un avion passant « sous » la lune : la lune a raté l’avion…

Ce prélat polonais, vagabond de la mission qui donne l’homélie hire à Damgan, chaqpelle-hangar au début du bourg, seul endroit suffisant, m’assure Denis M. pour célébrer la messe avec les estivants, bien plus nombreux que les paroissiens. Les deux thèmes oubliés de l’Eglise actuelle, tout entière, au Vatican, crispée sur l’éthique biologique, et dans les diocèses sur la crise des vocations – au moins en France – et le mal-être de beaucoup de prêtres : le premier, est le piétinement et maintenant l’obsolescence de la critique économique et sociale, tolérance jusqu’à la complicité pour la pratique capitaliste d’aujourd’hui et la réduction du travail salarié à un simple poste au bilan, le plus vulnérable et le plus fongible. Le second, que j’oubliais moi-même : les persécutions. Il y a eu les pays de l’Est, il y a, qui affleure, la traque des chrétiens en pays musulmans quand ils sont de souche, l’Islam de certains et les politique ne peuvent que l’encourager pour faire preuve de leur « identitarisme », sont traqués, vg. l’Algérie, où ils sont une dizaine de mille. Quant à l’Irak… Homélie donnée hier qui m’a frappé non par son contenu ou sa chaleureuse insistance, mais parce qu’effectivement, autant dans les années 1950, nous étions habités par l’Eglise du silence (et la puissante attitude de Pie XII – peut-être Humani generis, la première encyclique que j’ai jamais lue et j’avais pas quizne ans), autant aujourd’hui nous sommes touchés par la misère matérielle, mais guère par les autres…– Les manières de notre frère spirituel peuvent paraître terre-à-terre. Ainsi ses « consultations » de Dieu, semble-t-il mentalement par oui ou non, un peu comme je me confie à l’esprit de Maman, mais sans ces locutions binaires. Il entend une réponse, et me donnait au téléphone hier une application qu’il m’avait déjà racontée : le choix d’une voiture par une relation du moment, la voiture bleue fut finalement la seule à propos de quoi il lui avait « dit » oui. Saint Dominique et la pluie... Saint Benoît et la hache perdue... Soit… et puis la Bible au hasard pour des versets d’application. Ainsi, hier, tandis qu’il nous attendait, émerveillé par la TOB (sa Bible, sans doute d’entrée au monastère, est usée, elle a quarante ans), les Proverbes, vers le 33 en XV pour lui : la tentation de l’orgueil, il y est donc sujet plus que d’autres et le ressent… bravo (La crainte de Yahvé est discipline de sagesse, avant la gloire, il y a l'humilité). Et pour moi, en XVI le 3 ou le 4 : les plans et actions devant le Seigneur (Recommande à Yahvé tes oeuvres, et tes projets se réaliseront). Reste la leçon : tout faire et vivre devant Dieu. Je suis rejoint par la vie, mon goût et ma « manie » d’écrire sont aujourd’hui mon seul outil, éventuellement lucratif, et ce qui me semblait une vocation religieuse, tout autant sensible et vivante en moi qu’empêchée et interdite. Et me voici à devoir mobiliser tous mes manuscrits et tous mes chantiers, me voici surtout – et merveilleusement accompagné par ma chère femme, à sa manière propre et très objective, lucide – au sein de débats d’âme et de questions où importe le plus un plan divin. – Comme si notre adorable petite fille avait vraiment réalisé mon admonestation (et aussi ma menace de la filmer en scène…), Marguerite a été sage, mise au lit bien avant le feu d’artifice, son joli pyjama vert lui allant mieux que jamais, ses boucles d’or brun. Béni le Seigneur, ô mon âme, n’oublie aucun de ses bienfaits… et je me suis pourtant éveillé avec un sentiment de totale précarité pour tout. Les mises en scène politiques et diplomatiques d’hier au Grand-Palais, comme « la nuit des artistes », les couples qui souffrent et se défont, les ressacs et venues de l’affectivité, de la libido, de la mémoire, les comptes en banque… seule la foi tient, mais la mienne – dernière calamité possible – a-t-elle jamais été éprouvée ?

Maintenant.
Prier… il est question d’amour. Curieusement, le Christ et Yahvé enseignent à prier, curieusement les commandements et instructions de comportement sont multiples et développées dans nos Ecritures, mais qu’est-ce qu’aimer et comment aimer ? Qui aimer, c’est dit, démontré et rerspecté. Aimer plus que soi et à donner sa propre vie ? c’est dit aussi, les martyrs, les apôtres, nos grands saints, surtout les contemporains qui ne frappent nos esprits que par leur charité, leur oubli de soi, leur sacrifice, les autres touchent peu ou sont contestés. Mais comment aimer quotidiennement ? [1] sans doute en recevant, en acceptant de recevoir d’aimer (un des enseignements ou « tics » de Dom R…), en demandant d’aimer, en admettant ne pas savoir aimer… car l’enseignement du Christ est par rapport à Lui-même. Qui veut garder sa vie pour soi la perdra ; qui perdra sa vie à cause de moi la gardera. Non plus soi, mais l’autre. Et Dieu est l’autre : absolument. La communion entre tous la réalisation du Corps mystique, totale nostalgie imprégnant tout le vivant et structurant toute l’histoire de la création jusqu’à son accomplissement (et ses retrouvailles avec elle-même et en Dieu) est au prix de ce mystérieux troc, nous nous oublions nous-mêmes en nous aimant les uns les autres. Tout compte, rien n’est dimensionnel ou quantitatif. Les affections les plus naturelles et légitimes paraissent remises en place mais en Dieu nous retrouvons tout, et Jésus donne sa vie pour ses disciples : les plus proches, ceux qui dorment au moment où il va être arrêté et n’en peut plus d’angoisse. Nous sommes le Christ, nous sommes appelés à l’être. Cet enseignement est si dense, si exigeant, à méditer mot par mot, que Jésus laisse là les Douze – sans doute épuisés et ahuris – puis il partit de là pour enseigner et prêcher dans les villes du pays. Jésus en route, sur la montagne, sur le lac, dans les villes, au désert mais il ne s’arrête pas dans des maisons isolées ou en plein champ… Paradoxe, le message d’amour est belliciste et engendre conflits, séparations surtout… à réfléchir et à prier ; je suis au cœur des comportements de foi, de vérité. Apprenez à faire le bien. Nos propres rites, idées, actions ne valent rien quand ils ne partent que de nous-mêmes. Je mets cela sous tes yeux et je t’accuse… Vos nouvelles lunes et vos solennités, je les déteste. Elles me sont un fardeau et je suis las de le porter… vous avez beau multiplier les prières, je n’écoute pas : vos mains sont pleines de sang. La référence à Dieu emporte tout et elle est la qualité suprême d’autrui à nos yeux et de nous aux yeux de l’autre : celui qui donnera à boire, même un simple verre d’eau fraîche, à l’un de ces petits en sa qualité de disciple, amen, je vous le dis : il ne perdra pas sa récompense. Mon Dieu, je Vous aime, non pour une récompense, mais pour Vous et pour ceux que Vous me donnez et me confiez d’aimer. Je Vous aime parce que c’est Vous et que Vous seul savez me l’inspirer avec une constance qui m’émerveille et fait ma seule contintuité personnelle. Je suis à Vous. Qui offre le sacrifice d’action de grâce, celui-là me rend gloire : sur le chemin qu’il aura pris, je lui ferai voir le salut de Dieu. Ainsi soit-il !

Ma chère femme, sous le saule pleureur de l’étang d’Yvonne-Aimée, plus belle que jamais. Avant-hier, siestant, et songeant diversement... , je compris soudain que la beauté est une relation prédatrice. Nous sommes pris et nous sommes inspirés violemment de vouloir prendre. Et toute ma vie qui fut course à la beauté jusqu’à mon mariage, était prédatrice et donc captivité. Aimer est tout autre, et cela fait apparaître plus objectivement que de toute autre façon de voir, la beauté. Ainsi, ne puis-je voir la beauté d’autrui, de ma femme, que parce que je l’aime, et à proportion que je l’aime ; prosaïquement, que les bébés soient toujours si beaux (pour leurs parents) a là son début d’explication. Reste qu’objectivement, E. parlant et heureuse de parler à notre ami religieux, de l’écoûter et de le regarder, était illuminée de l’intérieur, son visage avait des contours donnant un cadre à son regard, à son âme, elle jaillissait tranquille et définitive de cet arrière plan de ciel, de feuillages et de jeux d’ombres et de scintillements. Et j’en fus heureux. Dans ma vie, à longueur de vie, j’aurais pu tout être et je voulais tout prendre : me voici rassemblé. La grâce y a été pour tout.


[1] - Isaïe I 11 à 17 ; psaume L ; évangile selon saint Matthieu X 34 à XI 1

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