jeudi 19 novembre 2009

au désert ? - textes du jour

Jeudi 19 Novembre 2009



La prière nue. [1] Alors beaucoup de ceux qui recherchaient la justice et la loi s’en allèrent vivre au déser. Hier soir, le compte-rendu d’une pièce de Michel Onfray, ce philosophe, cinquante ans environ, qu’affectionne ma femme depuis une semi-lecture, celle qui ensemence : sa tentation monastique, la cabane au fond du jardin selon Démocrite, par horreur du monde contemporain. Je ne pense pas que ce soit l’attitude juste même s’il y a l’exil des congrégations, celui-là forcé, après la loi de 1905 chez nous, même s’il y a eu Londres. Nous devons rester dans le monde, protester et lutter. Ou bien une stratégie de reconquête ? de l’extérieur. A cette vue, Matatthias s’enflamma d’indignation et frémit jusqu’au fond de lui-même : il laissa monter en lui une légitime colère, courut à l’homme, et l’égorgea sur l’autel. Quant à l’envoyé du roi, qui voulait contraindre à offrir le sacrifice, Mattathias le tua à l’instant même, et il renversa l’autel. Il s’enflamma d’ardeur pour la Loi… Je ne sais… sinon la révolte contre la laideur et la bêtise de l’ensemble de ce que je vois, et la conscience de ma propre faiblesse pas du tout pour renverser les idoles, mais simplement subir et supporter les conséquences de mes imprévoyances, de mes insuffisances, la souffrance de celles qui me sont chères, tandis que malades ou déprimés d’autres ont mal bien plus encore que nous. S’il y a un lien, entre la société et nous, c’est que nous ne composons pas celle-ci assez bien, et que celle-ci aggrave nos mal-êtres, nos maladies physiques et morales et qu’au total on va en venir aux aberrations que la mort serait plus digne que l’existence… sans préjudice d’éventuelles protestations, mal informées et mal dirigées contre des projets de législations ou des jurisprudences : nous sommes si mal placés parce que pas assez saints, pas assez complets. Nous ne pouvons guère que dire, auprès du Christ : si toi aussi, tu avais reconnu en ce jour ce qui peut te donner la paix ! Mais hélas, cela est resté caché à tes yeux… parce que tu n’as pas reconnu le moment où Dieu te visitait. Détresse du Christ devant sa ville, devant son époque, devant l’humanité, et, nous, maintenant et à cette heure (conclusion du Je vous salue, Marie…), ne pas manquer de voir, écarquiller les yeux, dilater notre âme car Dieu dans l’obscurité de nos détresses et au fond de mon impasse, arrive, est là : invoque-moi au jour de détresse : je te délivrerai, et tu me rendras grâce. Le désert est autre qu’un repli, il est combat et discernement. Non contre autrui ou le monde, mais vis-à-vis de nous-mêmes, il est chemin, rencontre. Dialogue d’il y a vingt cinq ans, au Mont-Athos, deux de mes jeunes VSN, Macaire d’origine française, le monachisme et son évocation de centaines de milliers de moines passés là depuis deux mille ans et à faire et vivre quoi : lutter contre les passions. On s’aperçoit que la plus grande communication, c’est le silence et la méditation. La communication n’est pas un moteur, elle est une preuve de normalité. … La charité ? L’amour, le désir de sacrifice et d’union, un sens d’amour qui croît pour les gens qu’on ne rencontre jamais. Une sorte d’embrasement croissant de tout l’univers. … Une immolation, un sens de la communauté. Mais le sens de l’Esprit, c’est la prière qui se fait principalement seul dans sa cellule. La prière au sens large : la lecture de l’Ecriture sainte. Principalement, la prière simple. La vie mystique est tellement riche, la prière de Jésus. … L’office liturgique est une science, pour se lier au mouvement du temps, et l‘ouvrir sur une autre dimension, la transfiguration, lui faire porter un reflet de l’éternité. Par exemple, dans le monde, on compte les jours du matin au soir. En liturgie, on les compte du soir au matin. En effet, dans le monde extérieur, on passe de la lumière aux ténèbres alors que dans la liturgie, monde transfiguré, on passe des ténèbres à la lumière. Notes que je retrouve hier soir par « hasard ». 10 Juin 1984… quelques semaines plus tard, une tempête m’enferme dans l’île de Samothrace, inaccessible trois jours au bateau du retour, dans mon sac à dos je n’ai – « hasard – que l’exemplaire de ma grand-mère de l’histoire d’une âme, édition avec cul-de-lampe et « expurgée ». – Voici notre fille qui s’éveillée, monte me dire qu’elle a peur, la porte de la salle-de-bains ouverte, je la redescends à son lit, dans mes bras, et lui ai montré qu’hier sor en l’embrassant comme elle dormait déjà, j’avais fermé cette porte. C’est, à l’heure byzantine, à peine le début de la messe concluant l’office commencé à minuit, à la seule lueur des bougies, pour des chants que le profane en grec de Chrysostome, ne peut comprendre. Je continue de ne me souvenir de ne m’être jamais ennuyé ces nuits-là, ni d’avoir eu quelque mal à retser éveillé. Le jour se levait, ces étés-là, au canon de la messe et au Notre-Père, alors, nous du monde extérieur, nous retrouvions nos repères et la langue de nos chemins, tout avait conflué. Société… et le premier cri de la chouette, deux fois bien tranquilles. – Ce qui n’empêche pas de mourir, et la mort n’empêche pas d’espérer en elle et au-delà d’elle, jusqu’à elle.

[1] - 1er livre des Martyrs II 15 à 29 ; psaume L ; évangile selon saint Luc XIX 41 à 44

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