mardi 7 janvier 2014

textes du jour...



Témoigner par analogie
Communiquer pour communier


Mon envoi du matin, dont je n’ai pas encore recherché la première date, est un fragment de journal. Il est de plus en plus intimiste par un ramassement soit de notes de la veille, sans relation avec les textes de la messe du jour – ceux-ci étant pourtant le principal –, soit du résumé des circonstances déterminant mon « état d’âme » au moment de monter à l’autel.                                                    

soir du vendredi 3 janvier 2014

Il s’assortit aussi de pièces jointes, écrits politiques et critiques des démarches dans notre pays ou de notre pays, regards et suggestions pour notre monde et pour l’Eglise catholique romaine que je reconnais pour mienne, mais qui est une société humaine avec en son sein les volontés de puissance et les tendances à l’endogamie. Je communique enfin ce que je reçois, religieux ou politiques et qui me touche, mention particulière pour l’Islam, tellement frère. Et encore des compositions anciennes, littéraires et autres.

C’est envoi était initialement un partage avec ma femme, que nous soyons éloignés l’un de l’autre par des habitats différents ou que seulement les horaires de lever et la disposition de nos ordinateurs respectifs appellent la communication pour la communion. Partage d’une lecture libre des textes de la messe du jour, en première activité de la journée, quelles que soient nos sensibilités, notre foi, nos croyances, nos aboulies et inconstances.

Ce dont je veux témoigner, c’est que ces lectures, surtout quand elles amènent à prier ou à prendre conscience de la possibilité de prier, nous prennent où nous sommes, tels que nous sommes, dans le moment précis, personnel et particulier de notre vie. Ce n’est pas un commentaire à l’avance ou professionnel, c’est celui d’une intelligence tâchant de nourrir une âme triste ou de situer humblement une âme enthousiaste, c’est celui d’une inspiration, imprévisible avant de monter à cet autel. Chaque jour ou presque, elle fait s’opérer une rencontre étonnante pour moi (et qui peut l’être pour d’autres, selon chacun, d’où cet envoi…) : un état d’âme, une récapitulation des astreintes de toute existence humaine avec les attaches, les obsessions, les affections, le ressenti des responsabilités sont accueillis et confirmés, en constat et en moyen de fécondite ou d’émancipation, par des écrits séculaires, déjà priés et médités par des générations et des personnalités modestes ou illustres, sans nombre.  La prière peut commencer ou s’arrêter là : le secours et le sens ont été donnés.

Depuis que j’ai entrepris cette communication pour la communion, avec ma femme, puis avec des rencontres de hasard, ou des familiarités collectives d’enseignant, de colloques, de camaraderies d’enfance, des adresses aussi de grandes notorités ou d’étrangers qui acceptent ou qui ne refusent pas cette apparition régulière à leur écran… j’ai cru rejoindre ce que j’aimerais recevoir : pas forcément en retour ni la pareille, quelle qu’en soit l’expression, mais l’expérience d’autres… mr sortant de moi-même ou me confirmant ce que je ne peux a priori ni en besoin ni en souhait. Peut-être des diversités de confiances en une transcendance minimale, en ce qui paraît des concidences entre le particulier, le personnel et l’universel. Car la réalité du vivant quand il se communique, une fois venu au monde, est certainement cette universalité d’appels et de réceptions, de dialogues sans scenarii, sans propos, sans textes. Parfoiss, j’en reçois explicitement. Il y a aussi, davantage provoqués mais involontairement, lors d’interruptions forcées, notamment à cause d’incidents informatiques ou de l’inaccessibilité temporaire de mon « carnet » d’adresses viruelles, des messages venant aux nouvelles. Des signaux et balises. Il y a enfin des mots chaleureux, des vœux et des pensées compassionnelles quand je témoigne du précipice que je longe mais que d’autres longent aussi.

Ce qui est personnel, même crû, il me semble que cela peut servir à soi, quand nous le retenons, l’apprivoisons, à autrui quand nous lui disons combien le fond et le fonds sont communs. J’en entends par bribes presque chaque jour, sans liminaire.

Une journée sans recueillement sur la ligne de départ pour la course, une semaine dont le dimanche n’est que légalement chômée (et par par tous… ces gens de mon village, sortant de la boulangerie, quand sonnent les cloches et qui tournent le dos à l’église dont ils frôlent les murs pour s’en éloigner), une année où Noël graille et se dédouble en minuit d’un millésime à un autre ? Ce n’est pas la foi qui m’étonne, mais le fonctionnement de celles et ceux qui n’en ont aucune. Mais qui n’en a aucune ?

Ma proposition, cette proposition ne sont que parmi d’autres. La vie en donne tant, que son apparence soit heureuse, malheureuse, fortuite, lourde ou effleurante.                                              

matin du mardi7 janvier 2014


à chacune et chacun des destinataires de l’envoi quotidien d’une lecture personnelle des textes de la messe du jour dans l’Eglise catholique


Toute ma vie – jusqu’à présent du moins, car le juste peut devenir méchant à l’article-même de sa mort et le méchant se convertir – j’ai été pieux mais souvent tiraillé entre mes comportements de fortune et une foi qui n’a évolué que comme mon corps ou mes capacités intellectuelles. Assistance heureuse à la messe dès ma petite enfance, pratique de ce qui s’appelait « l’action de grâces » après la communion, lecture de la Bible en désordre dès mon adolescence (initiations poétique et érotique, apprentissage d’une intense cohérence, lecture de Jean d’affilée à mes vingt ans sous un baobab sénégalais, puis de nouveau à mes quarante ans dans la grotte de l’Apocalypse à Patmos, l’autobiographie de Thérèse de Lisieux lue à Samothrace cernée par la tempête égéenne, deux fois une lecture partagée et intégrale en cent semaines, notée à mesure). Foi reçue, s’il en est. Ni cherchée ni acquise. Quand commencèrent mes notes quotidiennes ? vite transmises à ma chère femme d’une autre manière de croire et prier que la mienne mais certainement encore plus vraie, personnelle, parfois douloureuse, toujours aimante. Nos deux ordinateurs à quelques mètres l’un de l’autre, mais le décalage de l’éveil, l’ouverture de nos messageries, plus discontinue de sa part. De quand date la communication à un, puis quelques tiers ?

J’aime lire. J’aimerais recevoir chaque jour – précisément sur les textes que je cherche à appliquer – d’autrui, d’inconnus ou de personnes chères la suggestion de leur propre manière de comprendre ou de prier. Evidemment pudeur, discrétion, incapacité ou peur d’écrire sont des remparts. Je les comprends. Une ligne ou une parole proposent parfois bien davantage par une vérité et une exceptionnalité que n’ont pas les flots et déversements. Les recueils commodes donnant les textes de l’Eglise ne sont pas cette communion – les méditations adjacentes sont, par force (l’imprimeur, la poste), composées à l’avance et probablement à la queue-leu-leu en quelques heures pour un mois entier (que me pardonne la rédaction trop souriante en photo. de Prions en Eglise et avec laquelle j’aurai aimé une relation) : c’est un outil de partage, pas le partage. La présence mutuelle est au présent, dans l’instant. En objet, en temps, ce qui dit bien la foi éprouvée ensemble. Reçue de nouveau.

Voilà, la genèse de cet envoi. Je n’ai pas bien compté. Probablement deux cents jusqu’à cette Pentecôte. Nous repartons – je n’ai pas encore compté – probablement à quelques cinquante. Par construction, l’augmentation de notre nombre ne se fera que par des nouveaux venus, et peut-être quelques revenants.                                                     Pentecôte 2012 – dimanche 27 Mai
voici les présentations successives de cet envoi quotidien
que j’avais déjà envisagées mais sans les diffuser, pensant préciser et ajouter…

Chaque matin – parfois en retard dans la journée ou avec des interruptions dûes aux aléas informatiques – vous recevez un message de moi. Vous êtes environ deux cent, mais je vous ai rencontrés chacun par hasard, d’enfance, de fratrie ou seulement par correspondance. Vous ne faites pas partie d’une « liste » transférée. A volonté, vous pouvez ne plus me recevoir.

Ces messages sont de vie, ils ont une évolution : pas une explication de textes par quelqu’un de consacré, vivant en communauté ou pas, préparant à l’avance quelque édition périodique des textes de la liturgie catholique quotidienne. Un moment de vie, au lever, récapitulant forcément la journée de la veille et déjà habitée par le programme du jour. L’instant d’avant le recueillement qui ne peut s’écrire ni ne se dire : la prière.

Pas volontairement, c’est parfois impudique parce qu’indiscret vis-à-vis de moi-même, donc quelque chose d’imposé peut-être ou narcissique. Pièces jointes souvent : un témoignage reçu, une note de lecture, une réflexion politique ou des photos. Ma femme, initialement première destinataire, et notre fille sont présentes. Parfois, je suis long parce qu’enthousiaste – de ce que je vis ou du texte – et trop souvent, je ne me relis pas : fautes de saisie fréquentes que je vous demande d’excuser.

Dans la foi et pour la prière, nous sommes tous « amateurs », religieux éprouvés, enfants à la veille de recevoir un sacrement décisif, femme ou homme en dépression, en déshérence, responsable politique ou d’une entreprise ou d’un diocèse, croyants en Dieu unique mais selon une révélation reçue différemment (nos frères musulmans, juifs). Je ne suis pas non plus écrivain, quoique j’écrive beaucoup. Ce que vous recevez n’est donc qu’un bout de papier poussé de mon coin de table vers vous, avec timidité et souvent avec hésitation selon ce que je viens de vivre et d’avouer, aussi elliptiquement que possible.
                                                                      mardi 20 Décembre 2011

Comment le dire, l’écrire, maintenant que c’est vécu, que c’est devenu pour moi et pour chacun de ceux et celles qui reçoivent le courriel circulaire – destinataires masqués par discrétion pour eux – une habitude, une structure. Pour moi, souvent, c’est la seule d’un jour échevelé, sans consistance, sans œuvre ou le point de lucidité dans une ambiance d’excitation, de joie, de dépression. Pour ceux qui reçoivent cet envoi, je ne sais que peu. Ce qui m’est parfois adressé en retour, pas toujours des mêmes. Une phrase, un mot ont touché. Lesquels ? Beaucoup plus évocateurs, les rejets et les refus. Le plus souvent mal articulés : l’encombrement des messageries et le temps perdu à trier pour supprimer, cela me vient (je ne dis plus que c’est un paradoxe) de professionnels et des dévôts : plate-bandes sur lesquelles je marche ? harrassement d’une monotonie d’exercices que n’irriguent plus étonnement ou foi – je caricature, suppose et ne sais… ou de personnes rencontrées à quelque sainte occasion que je crus fraternelle. Ma fratrie de chair et sang manifeste – à deux exceptions tandis que le peuple des neveux et nièces est plus accueillant – que l’enfance et l’éducation ensemble donnent les uns sur les autres les préjugés du droit, de la hiérarchie et surtout de la connaissance intime d’autrui, ou bien le partage d’émotions ou de réflexions paraît impudique ou exhibitionniste. Je le comprends – de tous – car initialement internet me répugna presque : envoyer certes, mais recevoir, être pénétré, violé… s’afficher, par adresse électronique, disposé à cela ?

De toute ma vie, je n’ai jamais fait l’expérience personnelle de l’absence de foi, quelle que soit la dénomination qui puisse se donner à l’incroyance, à l’agnosticisme, au désespoir ou à l’indifférence. La distraction vis-à-vis de Dieu (et des autres) tant est forte, multiforme notre carapace autiste, je l’éprouve sans cesse : ce n’est pas l’absence de foi, c’est le peu de prière.

Foi et prière sont toujours allées de soi, aussi loin que je me souvienne. La lecture de la Bible, pratiquée avec bonheur à ma toute première adolescence, dans une ambiance créée par une instruction religieuse – sans doute bien faite et attrayante, remuante – dès mon tout jeune âge. Une interrogation sur une éventuelle vocation religieuse et/ou sacerdotale me fit chercher dans la prière et la lecture spirituelle – pas seulement la fréquentation de la Bible chrétienne, c’est-à-dire en deux Testaments – une orientation de vie. Recherche de l’état auquel j’étais appelé, qui est devenu ces années-ci appel à fructifier, à répondre de ce qui m’est confié. Responsabilité de mes aimées en couple et en famille, mais aussi responsabilité vis-à-vis de celles et ceux qui reçoivent ce message quotidien.

Lecture quotidienne, non préparée, non destinée à être publiée, communiquée, même partagée, lecture personnelle au saut du lit, à l’ouverture de l’écritoire, commencement. Destinataire – quand fut le premier matin ? même question pour la Genèse – ma femme, avant notre mariage, que nous habitions le même lieu ou que nous soyons séparés puisque nous avons d’abord eu chacun notre résidence. Aujourd’hui encore quoique nos ordinateurs soient physiquement distants de pas trois mètres. Je précède l’envoi erga omnes d’un courriel de salutation amoureuse. Je suis humain, marié, bientôt septuagénaire, j’écris à notre fille – de maintenant six ans – le journal de sa conception puis de sa petite enfance, elle le recevra édité – vierge de toute lecture par un tiers – quand je sentirai qu’elle est prête (désireuse ?) pour les premiers volumes. Prière de toujours, écriture de presque toujours, communication fréquente.

En mentionnant la destination à ma chère femme, j’ai étendu la diffusion à quelques-uns, explicitement, puis l’anonymat des destinataires, y compris de l’unique réceptrice initiale devint nécessaire. Aucun envoi n’a été ni ne sera en liste reçue d’ailleurs. Chaque nom évoque un visage, parfois une histoire. Peu dans ma famille de sang, des étudiants, des rencontres dans le métro., dans la rue, dans des lieux publics, des hasards, des religieux – quand même – des politiques, deux anciens ministres du général de Gaulle, des musulmans, sans doute des juifs, des gens de grande réussite et d’autres très simples de société et de culture.

Je n’ai aucun but. Cette lecture quotidienne – dont je n’ai pas encore cherché les premiers écrits en chronologie quoique le journal intime que je tiens depuis 1964 témoigne de la place de la Bible et de la prière dans ma vie – est un acte. Si je le produis à d’autres, c’est que j’aimerai le recevoir d’autres. Non pas des effusions ou des études ou des commentaires écrits d’avance, à la suite l’un de l’autre, sans le poids et les circonstances de chaque jour à son commencement selon nos calendriers et nos horloges, pas des recueils apologétiques ou des prières composées. Seulement, quelques minutes de vie – entre Dieu et d’autres que je rassemble dans la prière surgissant de la lecture – et le bouquet naturellement puisqu’il m’a été intimement offert, que je n’aurai pas su le composer, le voir de moi-même… peut aller à d’autres.

                                                                 Immaculée conception – 2010

En amours adolescents et ne vit-on pas ainsi toute l’existence humaine, même (sinon surtout) en couple, consacré par le mariage ? j’ai toujours guetté en l’autre le signe… de même que, par profession autant que par amour de mon pays, j’ai guetté (et suscité de plus en plus systématiquement) l’image portée de la France à l’étranger, et souvent chez mes compatriotes… de même depuis une vingtaine d’années, je guette (et provoque, de plus en plus) l’aveu de Dieu chez ceux que je rencontre ou celles dont j’ai la responsabilité, ma chère femme, notre fille (mariage le 18 Juin 2004 et naissance le 22 Novembre 2004, comme le général de Gaulle à dix minutes et cent quatre ans près).

          dimanche 6 Février 2011 – l’évangile du sel et de la lumière

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