vendredi 3 janvier 2014

nous serons semblables à Lui parce que nous Le verrons tel qu'Il est - textes du jour

Vendredi 3 Janvier 2014



Hier soir, le plus grand chagrin de ma vie. La réaction, la posture immédiate de notre trésor : et où est Vanille ? – Il a été tué, il est mort, mon trésor – Ne pas pleurer, surtout ne pas pleurer, être joyeux, continuer, ne pas pleurer. Un enfant atrophie son affectivité ? il s’y force pour ne pas mourir de douleur, de chagrin, de cette amputation décisive qu’est la mort de qui l’on aime, et l’innocence absolue de l’animal, plus encore sa vulnérabilité et son préjugé de proximité bienveillante, quand il est de la famille. Malheur à celui par qui… et pourtant miséricorde et compassion universels… le pauvre type qui, au fusil, a tué trois de nos chiens, à bout portant, à pas cent mètres de notre maison … Vie qui est la nôtre : aimer rend responsable, je ne peux déserter de rien. Il n’y a pas d’alternative à l’amour. Haine ou ou indifférence ne sont que néant.
Je prie par ce que je vis et ce que nous vivons. Quant à notre pays, il n’a jamais été aussi mal gouverné depuis les catastrophiques années 30 quand les gouvernements étaient une commission parlementaire aux manettes pour six mois de palabres. Aujourd’hui, le pays est déjà exproprié de ses actifs, de ses acquis, de son expérience de lui-même, est maintenant exproprié des chances que lui donne parfois la conjoncture. Ajoutant l’incitation à la haine en son sein comme entre tous acteurs politiques, l’opposition offre un modèle aussi désespérant que le vide brouillon des pouvoirs publics auxquels en son temps, elle n’avait rien apporté… cette opposition dogmatique et copieuse du pire chez ses chefs et bien-pensante chez ses adeptes est encore plus minable que le gouvernement : syndrome de Sigmaringen pour celui-ci, querelles constantes de cheffaillons auto-proclamés pour l’autre. Pleure, ô pays bien aimé !
Je tremble pour nous et je ne peux qu’envelopper de mon pauvre amour celles qui me sont confiées. Expérience quotidienne de l’impuissance en tout, sinon compatir et aimer. Essayer, tenter de protéger, d’édifier. Guetter d’où vient, peut venir la lumière… Oui, j’ai vu, et je rends ce témoignage : c’est lui le Fils de Dieu.[1] Jésus, Dieu fait homme, l’inconnu, même pour son cousin qui avait été sensible à sa venue quoique chacun soit encore en gestation. Une connaissance de Dieu, une identification de Celui-ci qui ne peut nous être donnée que par Lui-même. Je ne le connaissais pas… Je ne le connaissais pas. L’inspiration et le signe. Déchiffrement de nos propres circonstances. L’événement : voici l’Agneau de Dieu, qui enlève le péché du monde. Le mal, c’est le péché et nous sommes pécheurs, malfaisants pour autruio, pour nous-mêmes, pour toute la création. Mystère que nous soyons ainsi nuisibles, face à Dieu. Sommes-nous lucides si nous péchons, si aveugles pour que nous péchions ? je ne sais, c’est la question de ma vie spirituelle, mais elle ne m’obsède pas, elle est presque intellectuelle, elle ests en faut hors sujet, et hors vie spirituelle : celle-ci ne peut être que consentement vécu et prié à la présence de Dieu en moi. Nos limites, mes limites, qu’y pouvons-nous sinon courir dans les bras de Qui nous en délivre. Ce qu’il nous appartient d’être et de faire, c’est d’aimer et cela suppose de nous donner. Ce qui est sans cesse à refaire et à reprendre tant nos mouvements, nos regards et nos actions sont repliés vers nous-mêmes, nous projetons sans cesse sur la création et sur autrui notre petitesse. Lorsque le Fils de Dieu paraîtra, nous serons semblables à Lui parce que nous Le verrons tel qu’il est. Et voici l’anticipation : le Précurseur désigne et identifie, authentifie Celui qui vient. Dès maintenant, nous sommes enfants de Dieu, mais ce que nous serons ne paraît pas encore clairement. Ma détresse et mon souci de qui j’aime a la dimension-même de l’espérance qui m’est donnée, celle-ci d’autant plus grande que je ne vois rien. De loin en loin, ces mois-ci, quelques pépites et étincelles de lumière par la parole ou le geste de qui j’aime, par la constance de vie et d‘intensité de vie, que je peux croire bonheur de vivre, celle de notre fille. Du moins y a-t-il une dialectique… tandis que ces enterrés-vifs dans le désert d’une affectivité qui n’a plus ni sujet ni objet, alors le désespoir n’est plus même un manque et n’a aucun mot. Deux ou trois visages me sont ici présents, et ce que je sais ou ce qu’ils me disent de leur existence en parcours et en l’état. Lassitude somnambulique des inassouvis qui n’ont pu que vieillir sans avoir apparemment avancé et qui croient n’avoir jamais rien reçu ?. Dieu veuille nous bénir : pays et humains amputés, atrophiés mais encore assez vivants pour recevoir si advenait… alors, à la vue de quelques-uns dont la foi est consciente car Dieu leur donne la grâce de la maintenir en eux…il y a cela que « placarde » l’Apôtre … puisque vous savez que Dieu est juste (qu’en pense et qu’en vit notre fille ? elle n’a pas récriminé hier soir, nous avons prié pour notre chien comme pour ma belle-mère, comme pour ma chère femme, le monde et nous-mêmes faisant un dans notre peu de paroles et notre très humble récitation)  reconnaissez aussi que tout homme qui vit selon la justice de Dieu est vraiment né de Lui. La Genèse, non plus le récit et la parabole, non plus l’explication, non plus un commencement imagé mais d’autant plus mystérieux, simple et si incommensurable… mais la réalité quotidienne pour chacun de nous : vraiment né de Lui.
Me relisant pour relever les fautes de « frappe », j’ai envie d'écrire ce que je sais : nous sommes sauvés parce que nous nous aimons les uns les autres. Sauvés de nous-mêmes, des circonstances, enlevés de nos impasses, débarrassés de nos lourdeurs. Oui, Seigneur, je crois, nous croyons. Si douloureuse soit la souffrance et la mort imposées à deux innocences, notre animal et la petite fille, grandissant en âge et en sagesse, si forte déjà, lucide, aimante, enfant pourtant et primesautière… qui s’était attaché à ce rejeton d’une chienne si affectionnée et qu’on nous a empoissonné. Oui, Seigneur, je te prie, nous Te prions, nous Vous prions.


[1] - 1ère lettre de Jean II 29 à III 6 ; psaume XCVIII ; évangile selon saint Jean I 29 à 34

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