mardi 19 avril 2011

fais-le vite - textes du jour

Mardi 19 Avril 2011


Prier… [1] du plus éloigné au plus intime. Ecoutez-moi, îles lointaines ! Peuples éloignés, soyez attentifs ! J’étais encore dans le sein maternel quand le Seigneur m’a appelé. Distance et chronologie, péché et mort aussi, abolis, absorbés en Dieu. Dieu fait homme, partageant et éprouvant nos émotions. Au cours du repas qu’il prenait avec ses disciples, il fut bouleversé au plus profond de lui-même… de mémoire, cette notation vécu ne revient qu’une autre fois dans cet évangile de Jean : devant Marthe, Lazare étant au tombeau, ou peut-être encore ailleurs. Vérifier. Et cette émotion de Jésus dest provoquée par ce qu’il devine de Judas. Lien – relevé par un apocryphe – entre le Christ et l’un de ses disciples, « agent du destin » ? approche de la Passion ? interrogation intellectuelle, la réalité est plus enveloppante et diffuse. Jésus est pris, remué, bouleversé, enlevé. Il s’est d’abord livré à la condition humaine. Partage physique, notamment avec Jean : il y avait à table, tout contre Jésus, l’un de ses disciples, celui que Jésus aimait. Les autres évangélistes ne présentent pas cette prédilection. Elle est attestée par Pierre qui passe par Jean pour interroger Jésus, qui emmène Jean ou qui est mandé par celui-ci pour aller vérifier au tombeau ce qui est rapporté par « les femmes ». L’identification du traître varie selon les évangélistes. Pour Matthieu, profondément attristés, ils se mirent à lui demander, l’un après l’autre : ‘’Serait-ce moi, Seigneur ?’’ ce qui complique les faits en les présentant de manière fatidique. Jean le donne en souveraineté du Christ qui – avant de faire les gestes de la première messe et de donner le mémorial – communie humainement Judas : il trempe la bouchée et la donne à Judas, fils de Simon l’Iscariote. Et ce qui passe par ce geste est une possession satanique : nous sommes au cœur de l’énigme de la prescience et de la toute-puissance divine, et pourtant. Et quand Judas eut pris la bouchée, Satan entra en lui. Jésus lui dit alors : ‘’Ce que tu fais, fais le vite’’. Mais à lire maintenant le texte, l’ordre donné – souverainement -, l’ordre qui « déclenche » tout, est-il donné à Judas, le disciple choisi et qui bouleverse son maître par avance ? ou à Satan ? celui dont, si souvent, pendant son ministère public, le Christ a eu raison, lui intimant de se taire puisqu’il connaît mieux que tous les hommes l’identité du Messie… Quand Judas eut pris la bouchée, il sortit aussitôt ; il faisait nuit. L’annonce du reniement de Pierre qui ne peut s’entendre qu’avec la scène effective, ici seulement prédite, est mineure face à l’intensité de ce qui met en scène Judas et de ce dialogue public où Judas, muet, est d’une éloquence implicite extraordinaire, l’éloquence des faits, l’éloquence d’une âme mise à nu par le Christ et possédée par Satan.

Réflexion sur la nécessité, le salut, le destin : Judas, Pierre, le Christ lui-même mûs, emportés ?


Une vie humaine ne suffirait pas à réfléchir et à énoncer ces interrogations, ce mystère.



[1] - Isaïe XLIX 1 à 6 ; psaume LXXI ; évangile selon saint Jean XIII 21 à 38 passim

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