samedi 18 septembre 2010

car tu m'as délivré de la mort et tu préserves mes pieds de la chute - textes du jour

Samedi 18 Septembre 2010


Evidence, la chance que j’ai eue de cette fidélité réciproque à qui je dois l’essentiel de ma compréhension du siècle et dont je reçus les dernières années des marques évidentes d’affection et d’estime si gratifiantes. Je crois lui avoir apporté, alors qu’il était devenu le témoin le plus autorisé, le plus ancien et le plus abondant d’une de nos plus grandes périodes françaises, alors qu’il vivait dans l’affection et l’entourement d’enfants et petits-enfants presque tous d’exceptionnelle réussite, le rythme de conversations, de questionnements et de cheminements qui lui faisaient plaisir : nous avons échangé. C’est ce que j’ai couriellé aussitôt aux siens [1]. – Prier… action de grâces pour les grandes vies, contagieuses et structurantes, bénéfiques, et à Celui qui les donne, même à ceux qui sans L’exclure de possible existence, n’en ont d’idée que d’intelligence et sans doute de désir inavouable (pour eux). Transparence que nous donne la mort. Et disponibilité. Précisément, ceux qui sèment, ne le savent qu’à peine et qui sont si féconds. [2] La parabole du semeur, qui est davantage celle des diversités d’accueil et de terrain. Ses disciples lui demandaient quel était le sens de cette parabole. Il leur déclara : ‘A vous, il est donné de connaître les mystères du royaume de Dieu, mais les autres n’ont que le paraboles’. Jésus définit paiblement les vies de chacun, accomplissement, stérilité, divagation, mais les itinéraires et les causes ne sont pas dits : le démon survient et enlève de leur cœur la Parole, pour les empêcher de croire et d’être sauvés… ils croient pour un moment et au moment de l’épreuve, ils abandonnent…ils ne parviennent pas à maturité…ayant entendu la Parole dans un cœur bon et généreux, ils portent du fruit par leur persévérance. Deux clés donc, le terrain mais aussi la durée, la persvérance. Tu ne sèmes pas le corps de la plante qui va pousser, tu sèmes une graine toute nue : du blé ou autre chose. Observation si fine et juste de tout enseignement, de tout magistère, de tout exercice de responsabilités, de toute paternité ou maternité (montrant d’ailleurs que la paternité spirituelle, dont Paul est le modèle : Tite et Timothée, est la plus complète de toutes). Nous ne produisons pas une reproduction de nous-mêmes ou de qui que ce soit, mais une liberté et une compréhension nouvelles, tout autre, commençantes. De reproduction que celle du Christ. De même que nous sommes à l’image de celui qui est pétri de terre, de même nous serons à l’image de celui qui vient du ciel. Image, aboutissement, mais liberté, identité qui nous sont propres. La création est individuelle, personnelle, c’est ce qui fait l’immensité et toute la dialectique du collectif, de l’ensemble, du vivant, de l’œuvre divine.

[1] - … je n'apprends que maintenant...
Votre père est l'homme qui dans la durée (depuis Janvier 1970) m'a le plus formé intellectuellement et à la réflexion politique. La confiance et l'affection dont il m'a très vite honoré me bouleversait de plus en plus. Chacune de nos conversations et sa permanente alacrité, son merveilleux sourire, son optimisme malgré sa lucidité très structurante avaient, à chacun de nos revoirs, le don dont je profitais avidement, de presque tout renouveler mais dans les termes les plus simples et sobres quel que soit le sujet ou le souvenir que nous abordions.
J'essaierai de mieux vous écrire - non ce que je ressens - mais ce que j'ai reçu. Votre père, une lumière, la générosité d'idées, de propositions d'analyses et aussi d'accueil, d'attention à autrui : chance insigne que j'ai eue en le connaissant, en l'approfondissant et en m'étant laissé approfondir par lui. Il était exigeant et voulait le meilleur de ce dont il sentait que son interlocuteur était capable. Ai-je entendu plus pénétrant que lui ? sur ce que fut de Gaulle, l'homme - l'intelligence - les défauts, lacunes et lassitudes de de Gaulle. Non, à la fois par la durée de sa propre relation au Général, par le redoublement de cette relation via votre grand-père et par une très grande liberté de regard et d'évaluation que donnent la lucidité et la fidélité.

Chaude affection et communion, avec aussi ceux qu'il rejoint et évoquait : votre frère Claude et votre chère Maman.
Tristesse, ferveur, dette de reconnaissance.
P S Je me permets de vous donner la dépêche AFP au cas où vous ne l'auriez pas recueillie.

Je commence de réaliser... beaucoup de chagrin, un appui immense et constant, une référence, oui la bonne et chaude lumière d'un regard de suprême intelligence et de bonté. Une joie surnaturelle émanait de lui autant qu'une exhortation à la rigueur. Et il était chaleureusement affectueux. Capable autant de se scandaliser que d'excuser.
Avec lui, avec vous. Avec les vôtres, les siens.

[2] - 1ère lettre de Paul aux Corinthiens XV 35 à 37 à 49 passim ; psaume LVI ; évangile selon saint Luc VIII 4 à 15

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