vendredi 29 janvier 2010

un homme - textes du jour

Vendredi 29 Janvier 2010



L’adultère de David, le vol pur et simple, charme romanesque du récit [1]. A la fin d‘un après-midi, après avoir pris son repos, il se promenait sur la terrasse du palais, il aperçut une femme en train de se baigner. Cette femme était très belle. David fit demander qui elle était, et on lui répondit : « C’est Bethsabée, fille d’Eliam, la femme d’Ourias le Hittite ». Alors David l’envoya chercher. Elle vint chez lui et il dormit avec elle. La femme conçut, et elle fit savoir à David : « Je suis enceinte ». Or, on est en temps de guerre, David était resté à Jérusalem. La suite du récit est un suspense, toutes les ruses et manigances du roi pour faire endosser l’enfant à Ourias échouent, il fait alors tuer au front celui qui n’est même pas son rival, même pas son gêneur, mais simplement le mari l’empêchant de vivre avec celle dont il s’est épris. Le grand David, le fondateur, le psalmiste est un assassin et pour la raison la plus basse, d’abord la peur d’être découvert, puis le simplisme et la panique de tout criminel sans solution alternative. L’histoire a-t-elle donné lieu à film, romans, etc… je ne sais, cela en vaut la peine, mais la leçon spirituelle est évidente, tout le monde pèche, convoite, s’approprie, et le péché, l’égoïsme sont d’autant plus grands que la sainteté et le plan de Dieu sur quelqu’un sont manifestes (le reniement de Pierre…). Paraboles de la semence, de ce qui croît sans proportion avec ce qui est au départ. Dont la première est l’enseignement aux disciples, gens fort quelconques, comme avaient été Saül et David à l’origine de leur grande aventure. Ce matin, simplement, n’être que terre, graine, semence. Les contemplations depuis la terrasse d’une nudité enviable, les regards et les visages dans les réunions mondaines ou autres, les rencontres qui déclenchent la décision de conquête et la dépendance vis-à-vis de l’autre, et plus encore vis-à-vis de soi, j’ai connu et n’y tomberai sans doute plus, mais le vertige devant l’échec, devant la vieillesse, devant la dureté et le cynisme de l’époque et de la socété contemporaines me guettent et me happent. Vis-à-vis de Dieu, c’est le même péché, celui de regarder ailleurs que ver Lui. La même mort spirituelle, le même désastre de vie et d’âme. Alors que comme David, d’âme, je suis comblé et veillé humainement et spirituellement. Mais les textes apportent davantage. Dans l’aventure criminelle, la victime est un étranger, le généralissime de David qui, au contraire de sa propre jeunesse, n’est plus à la tête de ses troupes. Et c’est une personnalité attachante, maîtresse d’elle-même, il n’ira pas cuver dans le lit conjugal le vin qu’on lui a fait boire de force, il a une éthique alors même qu’il n’est pas coreligionnaire du fondateur de la généalogie du Christ, et c’est ce dernier qui manque. Quant aux paraboles du Royaume des cieux, elles suggèrent aussi de regarder leur début, le semeur, un homme qui jette le grain dans son champ. Anonyme, banal, de métier, avec sa propriété, son champ. Ce n’est pas le souverain d’une autre parabole, celle des divers accueils et terrains pour la semence, souverain qu’est le Christ, Dieu fait homme appelant tous les hommes. C’est un agent de la vie et du destin, la semence germe et grandit, il ne sait comment. Cet homme respire la tranquillité, il est au-delà de toute confiance ou de toute anxiété, il est dans l’ordre naturel. David au contraire transgressant cet ordre, va de désordre en désordre. Son angoisse et sa détresse ne seront dites qu’à la mort de l’enfant. Il n’est ici que l’usurpateur de Dieu, il prétend maîtriser les événements, en être leur agent. Il n’en est que coupable. Le néant et la moisson. – Il y a enfin une question d’époque, l’histoire d’Ourias assassiné parce que sa femme est belle, que le roi la convoite a lieu au retour du printemps, à l’époque où les rois reprennent la guerre et celle du semeur a pour conclusion le temps de la moisson. Epoques de la vie, saisons qui nous sont données, étapes de nos chemins et travaux. Le regard du printemps, commencement ou feu destructeur, captatif. Temps de la moisson, harrassant, torride ou lumineux du succès.


[1] - 2ème Samuel XI 1 à 17 ; psaume LI ; évangile selon saint Marc IV 26 à 34

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