lundi 11 juillet 2016

saint Benoît de Nursie, père des moines d’Occident . 480 + 547



Benoît naît, autour de l’an 480, dans une petite ville des montagnes de l'Ombrie, d'une des plus illustres familles de ce pays. Le pape saint Grégoire assure que le nom de Benoît lui fut providentiellement donné comme gage des bénédictions célestes dont il devait être comblé.
Craignant la contagion du monde, il résolut, à l'âge de quatorze ans, de s'enfuir dans un désert pour s'abandonner entièrement au service de Dieu. Il parvint au désert de Subiaco, à quarante milles de Rome, sans savoir comment il y subsisterait ; mais Dieu y pourvut par le moyen d'un pieux moine nommé Romain, qui se chargea de lui faire parvenir sa frugale provision de chaque jour.
Le jeune solitaire excita bientôt par sa vertu la rage de Satan ; celui-ci apparut sous la forme d'un merle et l'obséda d'une si terrible tentation de la chair, que Benoît fut un instant porté à abandonner sa retraite ; mais, la grâce prenant le dessus, il chassa le démon d'un signe de la Croix et alla se rouler nu sur un buisson d'épines, tout près de sa grotte sauvage. Le sang qu'il versa affaiblit son corps et guérit son âme pour toujours. Le buisson s'est changé en un rosier : de ce buisson, de ce rosier est sorti l'arbre immense de l'ordre bénédictin, qui a couvert le monde.
Les combats de Benoît n'étaient point finis. Des moines du voisinage l'avaient choisi pour maître malgré lui ; bientôt ils cherchèrent à se débarrasser de lui par le poison ; le saint bénit la coupe, qui se brisa, à la grande confusion des coupables. Cependant il était dans l'ordre de la Providence que Benoît devînt le Père d'un grand peuple de moines, et il ne put se soustraire à cette mission ; de nombreux monastères se fondèrent sous sa direction, se multiplièrent bientôt par toute l'Europe et devinrent une pépinière inépuisable d'évêques, de papes et de saints.
Parmi ses innombrables miracles, citons les deux suivants : un de ses moines avait, en travaillant, laissé tomber le fer de sa hache dans la rivière. Benoît prit le manche de bois, le jeta sur l'eau, et le fer, remontant à la surface, revint prendre sa place. Une autre fois, cédant aux importunes prières d'un père qui le sollicitait de ressusciter son fils, Benoît se couche sur l'enfant et dit : « Seigneur, ne regardez pas mes péchés, mais la foi de cet homme ! » Aussitôt l'enfant s'agite et va se jeter dans les bras paternels.

Pour approfondir, lire la Catéchèse du pape Benoît XVI :
>>> Saint Benoît de Nursie
[Allemand, Anglais, Croate, Espagnol, Français, Italien, Portugais]

Sources principales : Abbé L. Jaud -Vie des Saints...- (« Rév. x gpm »).



 





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BENOÎT XVI
AUDIENCE GÉNÉRALE
Mercredi 9 avril 2008
 
Saint Benoît de Nursie
Chers frères et sœurs,
Je voudrais parler aujourd'hui de saint Benoît, fondateur du monachisme occidental, et aussi Patron de mon pontificat. Je commence par une parole de saint Grégoire le Grand, qui écrit à propos de saint Benoît:  "L'homme de Dieu qui brilla sur cette terre par de si nombreux miracles, ne brilla pas moins par l'éloquence avec laquelle il sut exposer sa doctrine" (Dial. II, 36). Telles sont les paroles que ce grand Pape écrivit en l'an 592; le saint moine était mort à peine 50 ans auparavant et il était encore vivant dans la mémoire des personnes et en particulier dans le florissant Ordre religieux qu'il avait fondé. Saint Benoît de Nursie, par sa vie et par son œuvre, a exercé une influence fondamentale sur le développement de la civilisation et de la culture européenne. La source la plus importante à propos de la vie de ce saint est le deuxième livre des Dialogues de saint Grégoire le Grand. Il ne s'agit pas d'une biographie au sens classique. Selon les idées de son temps, il voulut illustrer à travers l'exemple d'un homme concret - précisément saint Benoît - l'ascension au sommet de la contemplation, qui peut être réalisée par celui qui s'abandonne à Dieu. Il nous donne donc un modèle  de  la  vie  humaine  comme ascension vers le sommet de la perfection. Saint Grégoire le Grand raconte également dans ce livre des Dialogues de nombreux miracles accomplis par le saint, et ici aussi il ne veut pas raconter simplement quelque chose d'étrange, mais démontrer comment Dieu, en admonestant, en aidant et aussi en punissant, intervient dans les situations concrètes de la vie de l'homme. Il veut démontrer que Dieu n'est pas une hypothèse lointaine placée à l'origine du monde, mais qu'il est présent dans la vie de l'homme, de tout homme.
Cette perspective du "biographe" s'explique également à la lumière du contexte général de son époque:  entre le V et le VI siècle, le monde était bouleversé par une terrible crise des valeurs et des institutions, causée par la chute de l'Empire romain, par l'invasion des nouveaux peuples et par la décadence des mœurs. En présentant saint Benoît comme un "astre lumineux", Grégoire voulait indiquer dans cette situation terrible, précisément ici dans cette ville de Rome, l'issue de la "nuit obscure de l'histoire" (Jean-Paul II, Insegnamenti, II/1, 1979, p. 1158). De fait, l'œuvre du saint et, en particulier, sa Règle se révélèrent détentrices d'un authentique ferment spirituel qui transforma le visage de l'Europe au cours des siècles, bien au-delà des frontières de sa patrie et de son temps, suscitant après la chute de l'unité politique créée par l'empire romain une nouvelle unité spirituelle et culturelle, celle de la foi chrétienne partagée par les peuples du continent. C'est précisément ainsi qu'est née la réalité que nous appelons "Europe".
La naissance de saint Benoît se situe autour de l'an 480. Il provenait, comme le dit saint Grégoire, "ex provincia Nursiae" - de la région de la Nursie. Ses parents, qui étaient aisés, l'envoyèrent suivre des études à Rome pour sa formation. Il ne s'arrêta cependant pas longtemps dans la Ville éternelle. Comme explication, pleinement crédible, Grégoire mentionne le fait que le jeune Benoît était écoeuré par le style de vie d'un grand nombre de ses compagnons d'étude, qui vivaient de manière dissolue, et qu'il ne voulait pas tomber dans les mêmes erreurs. Il voulait ne plaire qu'à Dieu seul; "soli Deo placere desiderans"  (II  Dial.  Prol. 1). Ainsi, avant même la conclusion de ses études, Benoît quitta Rome et se retira dans la solitude des montagnes à l'est de Rome. Après un premier séjour dans le village d'Effide (aujourd'hui Affile), où il s'associa pendant un certain temps à une "communauté religieuse" de moines, il devint ermite dans la proche Subiaco. Il vécut là pendant trois ans complètement seul dans une grotte qui, depuis le Haut Moyen-âge, constitue le "coeur" d'un monastère bénédictin appelé "Sacro Speco". La période à Subiaco, une période de solitude avec Dieu, fut un temps de maturation pour Benoît. Il dut supporter et surmonter en ce lieu les trois tentations fondamentales de chaque être humain:  la tentation de l'affirmation personnelle et du désir de se placer lui-même au centre, la tentation de la sensualité et, enfin, la tentation de la colère et de la vengeance. Benoît était en effet convaincu que ce n'était qu'après avoir vaincu ces tentations qu'il aurait pu adresser aux autres une parole pouvant être utile à leur situation de besoin. Et ainsi, son âme désormais pacifiée était en mesure de contrôler pleinement les pulsions du "moi" pour être un créateur de paix autour de lui. Ce n'est qu'alors qu'il décida de fonder ses premiers monastères dans la vallée de l'Anio, près de Subiaco.
En l'an 529, Benoît quitta Subiaco pour s'installer à Montecassino. Certains ont expliqué ce déplacement comme une fuite face aux intrigues d'un ecclésiastique local envieux. Mais cette tentative d'explication s'est révélée peu convaincante, car la mort soudaine de ce dernier n'incita pas Benoît à revenir (II Dial. 8). En réalité, cette décision s'imposa à lui car il était entré dans une nouvelle phase de sa maturation intérieure et de son expérience monastique. Selon Grégoire le Grand, l'exode de la lointaine vallée de l'Anio vers le Mont Cassio - une hauteur qui, dominant la vaste plaine environnante, est visible de loin - revêt un caractère symbolique:  la vie monastique cachée a sa raison d'être, mais un monastère possède également une finalité publique dans la vie de l'Eglise et de la société, il doit donner de la visibilité à la foi comme force de vie. De fait, lorsque Benoît conclut sa vie terrestre le 21 mars 547, il laissa avec sa Règle et avec la famille bénédictine qu'il avait fondée un patrimoine qui a porté des fruits dans le monde entier jusqu'à aujourd'hui.
Dans tout le deuxième livre des Dialogues, Grégoire nous montre la façon dont la vie de saint Benoît était plongée dans une atmosphère de prière, fondement central de son existence. Sans prière l'expérience de Dieu n'existe pas. Mais la spiritualité de Benoît n'était pas une intériorité en dehors de la réalité. Dans la tourmente et la confusion de son temps, il vivait sous le regard de Dieu et ne perdit ainsi jamais de vue les devoirs de la vie quotidienne et l'homme avec ses besoins concrets. En voyant Dieu, il comprit la réalité de l'homme et sa mission. Dans sa Règle, il qualifie la vie monastique d'"école du service du Seigneur" (Prol. 45) et il demande à ses moines de "ne rien placer avant l'Œuvre de Dieu [c'est-à-dire l'Office divin ou la Liturgie des Heures]" (43, 3). Il souligne cependant que la prière est en premier lieu un acte d'écoute (Prol. 9-11), qui doit ensuite se traduire par l'action concrète. "Le Seigneur attend que nous répondions chaque jour par les faits à ses saints enseignements", affirme-t-il (Prol. 35). Ainsi, la vie du moine devient une symbiose féconde entre action et contemplation "afin que Dieu soit glorifié en tout" (57, 9). En opposition avec une réalisation personnelle facile et égocentrique, aujourd'hui souvent exaltée, l'engagement premier et incontournable du disciple de saint Benoît est la recherche sincère de Dieu (58, 7) sur la voie tracée par le Christ humble et obéissant (5, 13), ne devant rien placer avant l'amour pour celui-ci (4, 21; 72, 11) et c'est précisément ainsi, au service de l'autre, qu'il devient un homme du service et de la paix. Dans l'exercice de l'obéissance mise en acte avec une foi animée par l'amour (5, 2), le moine conquiert l'humilité (5, 1), à laquelle la Règle consacre un chapitre entier (7). De cette manière, l'homme devient toujours plus conforme au Christ et atteint la véritable réalisation personnelle comme créature à l'image et à la ressemblance de Dieu.
A l'obéissance du disciple doit correspondre la sagesse de l'Abbé, qui dans le monastère remplit "les fonctions du Christ" (2, 2; 63, 13). Sa figure, définie en particulier dans le deuxième chapitre  de  la Règle, avec ses qualités de beauté spirituelle et d'engagement exigeant, peut-être considérée comme un autoportrait de Benoît, car - comme l'écrit Grégoire le Grand - "le saint ne put en aucune manière enseigner différemment de la façon dont il vécut" (Dial. II, 36). L'Abbé doit être à la fois un père tendre et également un maître sévère (2, 24), un véritable éducateur. Inflexible contre les vices, il est cependant appelé à imiter en particulier la tendresse du Bon Pasteur (27, 8), à "aider plutôt qu'à dominer" (64, 8), à "accentuer davantage à travers les faits qu'à travers les paroles tout ce qui est bon et saint" et à "illustrer les commandements divins par son exemple" (2, 12). Pour être en mesure de décider de manière responsable, l'Abbé doit aussi être un personne qui écoute "le conseil de ses frères" (3, 2), car "souvent Dieu révèle au plus jeune la solution la meilleure" (3, 3). Cette disposition rend étonnamment moderne une Règle écrite il y a presque quinze siècles! Un homme de responsabilité publique, même à une petite échelle, doit toujours être également un homme qui sait écouter et qui sait apprendre de ce qu'il écoute.
Benoît qualifie la Règle de "Règle minimale tracée uniquement pour le début" (73, 8); en réalité, celle-ci offre cependant des indications utiles non seulement aux moines, mais également à tous ceux qui cherchent un guide sur leur chemin vers Dieu. En raison de sa mesure, de son humanité et de son sobre discernement entre ce qui est essentiel et secondaire dans la vie spirituelle, elle a pu conserver sa force illuminatrice jusqu'à aujourd'hui. Paul VI, en proclamant saint Benoît Patron de l'Europe le 24 octobre 1964, voulut reconnaître l'œuvre merveilleuse accomplie par le saint à travers la Règle pour la formation de la civilisation et de la culture européenne. Aujourd'hui, l'Europe - à peine sortie d'un siècle profondément blessé par deux guerres mondiales et après l'effondrement des grandes idéologies qui se sont révélées de tragiques utopies - est à la recherche de sa propre identité. Pour créer une unité nouvelle et durable, les instruments politiques, économiques et juridiques sont assurément importants, mais il faut également susciter un renouveau éthique et spirituel qui puise aux racines chrétiennes du continent, autrement on ne peut pas reconstruire l'Europe. Sans cette sève vitale, l'homme reste exposé au danger de succomber à l'antique tentation de vouloir se racheter tout seul - une utopie qui, de différentes manières, a causé dans l'Europe du XX siècle, comme l'a remarqué le Pape Jean-Paul II, "un recul sans précédent dans l'histoire tourmentée de l'humanité" (Insegnamenti, XIII/1, 1990, p. 58). En recherchant le vrai progrès, nous écoutons encore aujourd'hui la Règle de saint Benoît comme une lumière pour notre chemin. Le grand moine demeure un véritable maître à l'école de qui nous pouvons apprendre l'art de vivre le véritable humanisme.
* * *
Je suis heureux de vous accueillir chers pèlerins francophones. Je salue en particulier le groupe de la Vallée de l’Andelle dans le diocèse d’Évreux ainsi que les jeunes venus notamment de Neuilly, de Rueil-Malmaison et de Pontivy. A l’exemple de saint Benoît, donnez une place importante à la prière et à la contemplation du visage du Christ ressuscité présent et agissant dans votre vie! Bon temps pascal!
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wikipédia . lundi 11 juillet 2016

Benoît de Nursie


Benoît de Nursie
Image illustrative de l'article Benoît de Nursie
Saint Benoît de Nursie
Saint, fondateur d’ordre, abbé
Naissance
Décès
550-560 
Ordre religieux
Vénéré à
Vénéré par
Fête
Le 11 juillet de nos jours
Au Moyen Âge, le 21 mars en Occident et le 14 mars en Orient
Attributs
On représente généralement saint Benoît avec l'habit bénédictin (coule noire), une crosse d'abbé, ainsi qu'un livre
Saint patron
Europe, Moines, Scouts d’Europe, agriculteurs, architectes, cavaliers, conducteurs de machines, des réfugiés, des spéléologues
Patriarche des moines d'Occident
Benoît de Nursie (né vers 480 / 490 à Nursie – mort en 543 ou 547 dans le monastère du Mont - Cassin1 ; en latin Benedictus de Nursia), saint Benoît (en latin Sanctus Benedictus de Nursia) pour les catholiques et les orthodoxes, est le fondateur de l'ordre des Bénédictins et a largement inspiré le monachisme occidental ultérieur.
Il est considéré par les catholiques et les orthodoxes comme le patriarche des moines d'Occident, grâce à sa Règle qui a eu un impact majeur sur le monachisme occidental et même sur la civilisation européenne médiévale. Il est souvent représenté avec l'habit bénédictin (coule noire), une crosse d'abbé, ainsi qu'un livre.
Saint Benoît est fêté le 11 juillet, date de la célébration de la translation de ses reliques à l'abbaye de Saint-Benoît-sur-Loire.

Sommaire

Biographie

Enfance

Benoît naît vers 480-490, issu d'une famille noble romaine de Nursie (Norcia, à 110 km au NNE de Rome), en OmbrieB 1,C 1. Son père Eutrope, fils de Justinien Probus, de la gens Anicia, est consul et capitaine général des Romains dans la région de Nursie, sa mère Abbondanza Claudia de' Reguardati di Norcia appartient à la famille Reguardati, des comtes de Nursie. Il a une sœur, ScholastiqueNote 1. Il naît dans une famille chrétienne qui le nomme Benoît, prénom chrétien signifiant bénédictionC 1.
Son enfance se déroule à Nursie, où il vit avec ses parents et reçoit une bonne instruction. À cette époque, les enfants de l'aristocratie sont placés sous la direction d'un esclave particulièrement instruit, ce qui fut sans doute le cas de BenoîtC 2. Nursie possède alors deux églises où le culte de deux saints est déjà développé : saint Eutychius et saint FlorentiusC 2. Arrivé à l'âge de l'adolescence, Benoît quitte sa famille, comme la majorité des enfants de la noblesse italienne, pour faire des études libéralesC 3. Il part pour Rome, sans doute afin d'y étudier le droit et les lettres classiques, études obligées des jeunes destinés aux responsabilités administrativesA 1.
Benoît part avec sa gouvernante et arrive à Rome vers l'an 495C 3. La tradition précise qu'ils s'installent sur la rive droite du Tibre, près de l'Aventin, dans ce qui deviendra plus tard l'église Saint-BenoîtC 3.
Rome est une ville de plus d'un million d'habitants, la paix et la politique intérieure de Théodoric le Grand favorisent l'activité des artistes et des administrateurs romainsC 3. L'empereur cherche à embellir et restaurer la ville, et de nombreuses fêtes font de Rome une ville dynamiqueC 4. Le mode de vie romain et le désordre moral où sombrent ses compagnons choquent rapidement Benoît, qui décide de fuir avec Cyrilla afin de pouvoir se consacrer entièrement à la Bible. Son départ est motivé par la peur de " tomber dans l'abîme des vices, de l'ambition et de la sensualité "A 2. Il choisit « la science du non-savoir et la docte ignorance »2. C'est son fond profondément religieux qui pousse Benoît à quitter Rome et la carrière qui lui était promiseB 1,Note 2.
Ils quittent la ville par la Porte Tiburtine et marchent vers le sud. Ils s'arrêtent3 à Enfide, où ils trouvent refuge dans l'église San PietroC 4. Enfide (actuellement Affile) est une localité située à 50 kilomètres de Rome, sur le versant des monts ErniciB 2. C'est dans cette localité qu'aurait eu lieu le premier miracle de Benoît : sa servante ayant par maladresse cassé en deux un crible emprunté à une voisine, Benoît prie et l'ustensile se répare sans présenter de trace de fêlureA 3. Ce miracle conduit à sa soudaine popularité, il décide alors de fuir tout son entourage pour « aller dans le désert » dans la localité voisine de Subiaco et y mener une vie érémitiqueA 3. Dans le récit de Grégoire le Grand, Benoît ne part plus pour fuir le vice, mais « plus avide de souffrir les maux de ce monde que de jouir de ses louanges, d'endurer les travaux pour Dieu plutôt que de s'élever par les faveurs de la vie »A 3. Le départ pour la vie érémitique est une quête de DieuA 4.

Vie érémitique

Un certain jour, alors qu'il est seul, Benoît commence à penser à une femme très belle qu'il a rencontrée lors de son séjour à Rome. Face à cette tentation de retourner dans le monde, il se roule tout nu dans un buisson d’épines et d’orties et s'immunise ainsi contre toute tentation ultérieureC 5,3.
Représentation de Benoît de Nursie dans la grotte
Dans sa quête de solitude, qui ressemble à celle d'Antoine le Grand, Benoît rencontre à Subiaco un moine, nommé Romain, à qui il demande de lui indiquer un lieu peu visible et difficilement accessibleC 6. Ce moine lui montre une grotte, au pied d'une falaise, où Benoît s'installeC 6. La grotte sera baptisée plus tard la Sacro Speco, la Sainte GrotteA 4.
L'amitié entre le moine et Benoît se concrétise par une aide matérielle : le moine lui apporte régulièrement de la nourriture ainsi que des textes à l'aide d'un panier accroché à une corde et une clochetteC 6. C'est ce même moine romain qui donne à Benoît ses premiers habits religieux, le recevant ainsi dans les ordres mineursC 7. Benoît suit alors le mode de vie des anachorètes, inauguré par Paul de Thèbes et poursuivi par Antoine le Grand, Jérôme de Stridon, Basile de Césarée, assez courant dans le monde romain depuis le IIIe siècleC 7.
La vie érémétique de Benoît s'arrête au bout de trois ans4, quand le moine Romain ne vient plus le visiter, peut-être pour cause de décèsC 7. C'est au cours de la nuit de Pâques, alors que Benoît a perdu toute notion de calendrier, qu'un curé de campagne est incité en songe à lui apporter de la nourriture. Il écoute la voix du songe et, peu après, parle de Benoît autour de lui. La renommée de Benoît croît et de nombreuses personnes des alentours lui rendent visiteC 8.
Peu de temps après, des moines ayant perdu leur supérieur demandent à Benoît de devenir leur abbéC 5. Après avoir décliné une première fois l'invitation, il se laisse finalement convaincre et décide alors de quitter sa grotte pour VicovaroC 5.

Premier abbatiat à Vicovaro

C'est vers 510, que Benoît devient abbé pour la première fois. Très vite il se rend compte que sa communauté de Vicovaro ne respecte pas rigoureusement la règle de saint Pacôme qui avait organisé les premières communautés religieusesC 9. Benoît cherche à y restaurer l'ordre, en rétablissant l'autorité et les pénitences. Très vite les moines regrettent de l'avoir élu abbéA 5. Ils cherchent alors à l'empoisonner en mélangeant des herbes vénéneuses à son vinC 10. Lors du bénédicité, Benoît fait un signe de croix et sa coupe de vin se briseC 10,A 5. Sans violence, il décide de partir et de retrouver la solitude de sa grotteC 10,A 6.
Benoît semble soulagé de retourner à sa retraite : « Il revint alors au lieu de sa chère solitude et, seul sous le regard de Celui qui voit d'en-haut, il habita avec lui-même »5.

Fondation des premiers monastères

Alors qu'il vit retiré dans sa grotte, il voit venir à lui quantité de disciples désireux de « servir avec lui le Dieu tout-puissant »C 11. Il quitte sa grotte et décide de s'installer avec ses disciples en bordure d'un lac, à SubiacoC 12, où il restera entre vingt et trente ans6.
La fondation d'un monastère est régie depuis le concile de Chalcédoine par l'autorisation de l'évêque. Benoît a donc sans doute reçu l'approbation de l'évêque du lieu pour fonder cette communautéC 12.
Pour tout ce monde, il construit douze maisons, avec - pour chacune - douze moines et un abbé. Lui-même, Benoît, demeure dans une treizième maison, se chargeant d'y former les jeunes recrues. Parmi les jeunes gens venus se présenter, il y en a « de bonne espérance » : Maur, qui devient rapidement son auxiliaire, et le tout jeune Placide3.
Chaque nouvelle maison, ou petit monastère, est confiée au patronage d'un saintC 13. Benoît s'inspire en grande partie de l'exemple de Sabas le SanctifiéC 13. Mais il refuse les dérives des communautés cénobitiques d'Orient, car il est opposé à leurs pénitences excessives. Il insiste sur la nécessité de l'humilité plutôt que sur les mortificationsC 14.
Dans Dialogues, Livre II, Grégoire le Grand rapporte quelques prodiges survenus sur le site de Subiaco :
  • au chapitre V : Trois des petits monastères, situés au haut d’une montagne, manquent d’eau. Les occupants désirent changer d’emplacement, mais Benoît leur recommande de frapper le sol à l'endroit qu'il a marqué de trois pierres, et le lendemain en jaillit une source abondante ;
  • au chapitre VI : Un Goth attiré par la vie monastique, pauvre d’esprit mais acharné au travail, occupé à débroussailler sur le bord du lac, frappe si fort de sa faucille que le fer se détache et tombe dans l’eau profonde. Informé de l'incident, Benoît s’approche du lac, prend le manche de l’outil et le dépose dans l’eau: la lame remonte des profondeurs et se réajuste sur le manche ;
  • au chapitre VII : Le petit Placide, en puisant l’eau du lac, y tombe et est entraîné très loin du rivage. Benoît, de sa cellule, voit la chose et ordonne à Maur de courir au secours de l’enfant. Maur s’en va en hâte et court sur l’eau ; après coup seulement il se rend compte du miracle, miracle que Benoît attribue à l’obéissance de son disciple, tandis que celui-ci l’attribue à l’ordre de son abbé. Placide, quant à lui, attribue le prodige à Benoît car, « au moment où j’ai été tiré de l’eau, j’ai vu au-dessus de ma tête le manteau de l’abbé, et j’avais l’impression que c’était lui qui me tirait de l’eau »7.
Sa piété et sa renommée attirent de plus en plus de personnes auprès de Benoît, au point qu'un des prêtres de la région, Florentius, jaloux de son influence, cherche à en diminuer l'éclat : il calomnie Benoît, puis interdit à ses paroissiens d'aller le voir. Il envoie à Benoît un pain empoisonné, destiné à être béni et partagé, pratique chrétienne appelée eulogieC 15. Benoît, soupçonnant la malveillance de Florentius, présente le pain à un corbeau apprivoisé et lui ordonne d'emporter au loin le funeste cadeauC 15. Après avoir évité la tentative d'empoisonnement par le vin, Benoît déjoue le complot d'empoisonnement par le pain. Enfin, Florentius envoie sept femmes païennes nues danser aux abords des monastères, afin de réveiller le désir sexuel des jeunes moinesC 15,B 3.
Devant l'hostilité de Florentius, Benoît, accompagné de quelques moines, décide de quitter Subiaco, laissant au frère Maur la charge des moines restantsC 16. Au moment de son départ, Benoît apprend que le père Florentius vient juste de décéder dans l'écroulement de sa maison et pleure cependant la mort de son ennemi. Il ne modifie pas sa décision de quitter ce lieu hostile, craignant pour la vie de ses moinesB 3,8.

Occupation du Mont Cassin

Représentation d'un miracle de Benoît lors de la construction du Mont-Cassin, Luca Giordano, 1680
De Subiaco, Benoît et ses compagnons partent (en 529 ?) vers un bourg au flanc d'une montagne, dans une région plus aride et alors moins christianisée, pour s'installer au lieu-dit Cassino, le Mont CassinC 17,B 4. Ce lieu avait été un camp de la légion romaineC 18.
Dans un bois des environs, vit un moine ermite prénommé Martin. Pour résister à l'attrait du monde, il vit attaché à un arbre. Arrivé sur place, Benoît le convainc de détacher ses chaînes afin de vivre pour Dieu par amour, et non par crainte du mondeC 19. L'ermite accepte et devient l'un de ses moines. Par ailleurs, les moines diffusent le Christianisme auprès des habitants des alentoursC 20.
Certains bois sont des lieux de culte et de dévotion aux anciens dieux et, lors de la construction de l'abbaye, des murs s'effondrent à plusieurs reprises, « poussés par les démons » disent les biographes. Ces lieux avaient abrité un ancien temple d'Apollon et de JupiterB 4. Selon les biographies orales sur saint Benoît, les manifestations démoniaques cessent après la découverte et la destruction des idoles trouvées sur placeC 21,B 5. Avec les anciennes pierres des temples, les moines élèvent une chapelle dédiée à saint Martin de Tours, et un oratoire est placé sous la protection de saint Jean le BaptisteC 22. Le récit de la vie de Benoît le montre faisant face aux difficultés et aux manifestations démoniaques par la prièreB 6.

Construction du monastère de Terracine

Un homme pieux demande à Benoît d'envoyer des moines pour ériger un monastère dans son domaine situé près de la ville de Terracine, dans le Latium. Accédant à sa demande, Benoît forme une délégation de frères conduite par un Père et son second, avec pour mission de concrétiser le projet. Avant leur départ, Benoît leur promet d'être auprès d'eux, un jour donné, pour désigner l'emplacement de chacune des pièces du monastère. La nuit précédant le jour promis, Le Père et son second reçoivent en songe - avec beaucoup de détails et une étonnante précision - tous les renseignements attendus. Peu convaincus de la fiabilité de leur vision, ils attendent cependant la présence physique de Benoît9.
« Ne vous suis-je pas apparu à l'un et à l'autre pendant votre sommeil et ne vous ai-je pas désigné chaque endroit ? ». Ce fut le dernier monastère à la construction duquel participa Benoît.

Miracles, prodiges et prophéties

Voir à la section 'Liens externes', "De la vie et des miracles du saint abbé Benoît", Dialogues, livre second, par saint Grégoire le Grand.
Les Dialogues de Grégoire10 relatent que durant la construction du monastère du Mont-Cassin, le démon rend une pierre tellement lourde que les frères ne parviennent pas à la déplacer, jusqu'à ce que la prière de Benoît intervienne. C'est encore le démon qui, dans la cuisine où l'on a déposé une idole trouvée en terre, donne l'illusion d'un incendie; la prière de l'abbé guérit les frères victimes de cette hallucination. Le diable fait s'écrouler un mur sur un jeune moine; la victime est bien mal en point, mais Benoît accourt, prie, et le moine peut se remettre aussitôt au travail.
Ces mêmes Dialogues relatent qu'au cours des années qui suivent, la vie de Benoît est marquée par une perception surnaturelle et le don de prophétie. À plusieurs reprises, il a la connaissance mystérieuse d'une infraction aux règles, celle d'un moine qui aurait conservé des dons, oubliant de ce fait le vœu de pauvreté, celle d'un autre moine qui a oublié de jeûner, etcB 7.
La réputation de prophète de Benoît incite le roi ostrogoth Totila à vouloir le rencontrer. Mais le jour venu, il envoie à sa place son écuyer Rigo, revêtu des habits royaux et entouré d'une escorte royale. Dès que Benoît aperçoit Rigo, il lui crie de loin « Mon fils, laisse là ce que tu portes : ce n'est pas à toi. » Tout penaud, Rigo rapporte la chose à son maître, lequel alors rencontre Benoît, qui lui reproche vivement sa cruauté lors de ses combats et prophétise son règne de neuf ans et sa mort la dixième annéeB 8,11. Le récit décrit de nombreuses prophéties de Benoît notamment sur le Mont-Cassin et sa future destructionB 9.
Grégoire rapporte12 que Benoît avait assuré à l'évêque de Canosa que Rome ne serait pas anéantie par les Barbares, mais ébranlée par les tempêtes, les cataclysmes, les cyclones et les tremblements de terre. Autre prophétie13 que Benoît fit un jour « Tout ce monastère que j'ai construit,(...) a été livré aux païens par un jugement de Dieu tout-puissant. À peine ai-je pu obtenir que les vies me soient concédées. » Dans la destruction, en 589, du Mont-Cassin par les Lombards, pas un moine n'a été tué14.
Enfin, l'année de son trépas (547), il prédit à quelques frères le jour de sa mort. Six jours avant, il fait ouvrir sa tombe. Quand la fièvre le prend, il se fait porter à l'oratoire, communie, puis appuyant ses membres affaiblis sur les bras de ses disciples, se met debout, les mains levées au ciel et, dans un dernier souffle, murmure des prières. Ce jour-là, deux frères ont une vision identique : celle d'une voie jonchée de tapis et brillant d'innombrables feux qui, droit vers l'orient, va de la cellule de Benoît jusqu'au ciel. Benoît sera enseveli dans l'oratoire de Saint-Jean-Baptiste qu'il avait fait ériger sur le Mont-Cassin, à l’emplacement du temple d’Apollon15.

Réminiscences bibliques

Au cours du séjour de Benoît à Subiaco et au Mont-Cassin, nombre de miracles relatés par Grégoire le Grand ne sont en réalité que la répétition de miracles analogues de l'Ancien et du Nouveau Testament, en particulier des miracles attribués aux prophètes Élie et Élisée. Quelques exemples illustrent ce constat.
Le départ de Benoît pour plaire à Dieu, rappelle le départ d'Abraham16 qui quitte sa terre et sa familleB 10.
Le premier miracle mentionné dans la vie de Benoît et qui survient à Enfide, rappelle le premier miracle17 de Jésus aux noces de Cana : Jésus débute la série de miracles par compassion pour une femme, sa mère. Dans cet épisode, Benoît commence de même ses miracles par compassion pour sa nourrice, qui est comme une mère pour lui. Benoît, à travers ce miracle, ressemble au ChristB 11.
La source jaillissant à l'endroit marqué de trois pierres par Benoît, pour alimenter en eau trois monastères, renvoie à Moïse dans le désert, qui, lors de l'exode, fait jaillir de l'eau18 du rocher d'HorebB 12,Note 3.
La tentative d'empoisonnement perpétrée par le prêtre Florentius rappelle la trahison de Judas IscarioteB 13 : le baiser, censé être un signe d'affection et d'amitié, est le signe de la traîtrise de JudasNote 4. Dans le récit de la vie de Benoît, ce baiser est remplacé par l'offrande du pain. De même la présence du corbeau obéissant à Benoît rappelle19 la vie du prophète Élie, qui reçoit dans le désert le pain d'un corbeauB 13,20.
Le prodige de Maur, délégué par Benoît pour sauver de la noyade le petit Placide, renvoie au récit biblique de Jésus marchant sur les eaux21 du lac de Génésareth et invitant Pierre à faire de même.
Benoît prédit l'avenir et prévoit les futures catastrophes, comme Élie22 et Élisée23
Le jour de son trépas, deux frères observent une traînée lumineuse allant de la cellule de Benoît, droit vers l'orient jusqu'au ciel. Ce phénomène rappelle la montée au ciel d'Élie24 dans un char de feu.
Benoît se roule tout nu dans les orties et les épines pour chasser le souvenir d'une femme très belle et neutraliser la tentation de la chair, rappelant ainsi la fuite de Joseph devant la femme de Putiphar25.
Le Christ épingle le geste d'amour de Marie-Madeleine au banquet chez Simon26, thème mis en relation avec l'épisode Benoît démasque le faux Totila et reconnaît le vrai. L'épisode de la lame de faucille réunie miraculeusement à son manche renvoie27 au prophète EliséeB 14,28.
Benoît ayant la connaissance mystérieuse d'infractions aux règles, révèle des fautes cachées comme le fait le prophète Élisée29

Règle bénédictine et vie religieuse

Saint Benoît donnant sa Règle à son disciple saint Maur
Article détaillé : Règle de saint Benoît.
Benoît interpelle un frère qui porte une lampe, l'un des services au sein de la communauté. Ce moine d'origine aristocratique et qui aurait trouvé ce service indigne de son rang, est vivement réprimandé par Benoît qui y voit de l'orgueilB 7. La règle de saint Benoît prévoit ainsi de retirer sa fonction à une personne, si cela fait rejaillir son orgueilB 7.
Au monastère du Mont Cassin, Benoît organise progressivement la vie des moines, insistant pour qu'elle soit tournée vers Dieu : « Qu'on ne mette rien, absolument rien, avant le Christ qui daigne nous conduire à la vie éternelle »C 22.
Vers 540, il établit à leur intention une règle de vie, appelée ensuite la Règle bénédictine, dont l'expansion sera immense et qui sera par la suite reprise et codifiée par saint Benoît d'Aniane. Inspirée de l'Écriture sainte, elle recommande aux moines, qui vivent en communautés dirigées par un abbé, de respecter quatre principes essentiels :
  1. la modération, (discretio, en latin) qui est présente dans les usages quotidiens de la nourriture, de la boisson et du sommeil
  2. la gravité qui a pour corollaire le silence
  3. l'austérité qui implique l'éloignement du monde et le renoncement à la possession
  4. la douceur faite de bonté, d'amour évangélique, d'hospitalité exercée envers les humbles
Astreints à la lecture et au travail manuel, les moines doivent se consacrer au service de Dieu qui culmine dans l'office divin. La vie monastique est répartie d’une façon rigoureuse, tout en laissant place à l’indulgence envers les limites individuelles. Elle comprend des temps de prière, de lecture et de travail manuel. L’organisation de la vie cénobitique est rythmée par l'alternance de tâches régulières et quotidiennes et de célébration des offices. Ainsi les trois pôles de la vie monastique, la prière, le travail, et la lecture, deviennent un moyen pour se consacrer au service de Dieu. D'où la célèbre devise bénédictine, qui n'apparaît pourtant pas dans la Règle : Ora et labora (Prie et travaille, en latin).

Héritage spirituel

Saint Benoît aux côtés de Jean le Baptiste, Grégoire le Grand et saint Laurent, sur un détail du retable de San Zeno à Vérone

La vie monastique chrétienne

Article détaillé : Règle de saint Benoît.
Son influence est considérable sur le monachisme en Occident et dans le monde, ainsi que sur toute la vie intellectuelle du Christianisme, surtout grâce à la Règle de saint Benoît. Cette règle propose, en même temps qu'un cheminement vers Dieu, un idéal de vie en collectivité. Elle est parfois prise comme exemple pour l'organisation en entreprise30.
La règle est reprise par Benoît d'Aniane au IXe siècle, avant les invasions des Vikings : il la commente, et est à l'origine de son expansion dans toute l'Europe carolingienne, à travers notamment les ordres de Cluny et de Cîteaux. Chacun des Ordres qui suivent la Règle de saint Benoît en a sa propre interprétation: l’ordre de Cîteaux insiste sur le travail manuel, l’ordre de Cluny sur la liturgie, les Congrégations de saint Vanne et de saint Maur, sur le travail intellectuel. Aujourd'hui encore, la Règle est vécue différemment par les héritiers de saint Benoît : mais ils sont fidèles en cela à la pensée du fondateur qui, dans sa Règle, laisse une part prépondérante aux décisions de chaque abbé, en fonction de la situation de chaque communauté.
Après la suppression de l'Ordre en France à la Révolution, Dom Guéranger fait renaître l'ordre bénédictin à Solesmes en 1833. L’abbaye de Saint-Benoît-sur-Loire, quant à elle, a pu à nouveau accueillir une communauté en provenance de l’abbaye de la Pierre-Qui-Vire, fondée au XIXe siècle dans le Morvan.

Les psaumes et la liturgie des Heures

Le Livre des Psaumes, que la tradition hébraïque attribue à David, a une place importante dans la liturgie et la prière des moines. En Orient, certains ermites mettent un point d'honneur à réciter les 150 psaumes tous les joursC 23. Face à ces excès, Benoît répartit la récitation des psaumes non pas dans la journée, mais dans la semaine. Les moines pourront en réciter plus s'ils le souhaitent mais sans l'imposer aux autres.
Cette réforme, conduisant à la division du psautier, a de nombreuses conséquences : elle permet de ventiler la récitation des psaumes selon les différents moments de la journée. Les psaumes qui parlent de la résurrection sont récités le matin, et les psaumes concernant le sommeil ou la nuit, lors des complies (Psaume 4, Psaume 130)C 24. Par ailleurs, le fait de ne pas réciter tous les psaumes dans la journée mais au cours de la semaine, permet de donner une place plus importante à la récitation de chaque psaume, donc au développement des chants et notamment, au cours des offices des moines, le chant grégorienC 24.
Cette division du psautier a inspiré la Liturgie des Heures, la prière commune de l'Église catholique romaine.

Sources de la biographie de Benoît

La seule authentique biographie de saint Benoît qui nous est parvenue, figure dans les 38 chapitres du livre II des Dialogues sur la vie et les miracles des Pères italiens et sur l'éternité des âmes, texte hagiographique de Grégoire le Grand qu'il faut manipuler avec précaution31 de saint Grégoire le GrandB 15,A 7.
Grégoire le Grand, né en 506, fonde différents monastères puis prend l'habit monastique à son tour : ce furent, selon lui, les plus belles années de sa vie. Appelé par le pape Pélage II, il est nommé évêque et, après une mission à Constantinople, revient dans son monastèreB 16. À la mort du pape Pélage II, en 590, il est à son tour élu pape. Entre juillet 593 et novembre 594, il se consacre à l'écriture de la vie de saints italiens à travers les quatre livres qui composent les DialoguesB 17. La rédaction des Dialogues s'inspire de récits recueillis par les Chrétiens sur la vie des saints. Grégoire le Grand cherche à diffuser parmi le peuple l'exemple édifiant des nombreux saints du passé. Les livres I et III résument la vie de cinquante saints, mais la biographie de Saint Benoît est particulièrement importante et étoffée : le deuxième livre des Dialogues lui est entièrement consacréB 18.
Grégoire le Grand écrit la vie de Benoît plus de quarante ans après sa mort, à partir de nombreux témoignages et sourcesC 25. Grégoire s'appuie sur le témoignage de quatre abbés, dont deux seront ses successeurs : Constantin, qui lui succède comme abbé du Mont-Cassin et Simplicius, troisième abbé du Mont-CassinC 25, Valentinien, un ancien moine de Benoît de Nursie devenu abbé du Latran à Rome, et enfin Honorat - le seul à être encore en vie au moment où Grégoire écrit2-, abbé de SubiacoB 19,C 25.
L'unique biographie de Benoît de Nursie échappe cependant aux canons de l'historiographie actuelle : le récit de Grégoire le Grand donne à la figure de Benoît de Nursie une dimension quasi biblique, mettant l'accent sur les prodiges, les miracles, les prophétiesB 10. Il veut donner au récit biographique de Benoît une dimension plus spirituelle qu'historiqueC 26. Lorsqu'on passe aux miracles, au merveilleux, aux "diableries", il importe d'être réservé32.
Les sources iconographiques elles aussi sont lacunaires, aucun portrait de Benoît de Nursie n'existant de son vivant. Les représentations postérieures ne donnent pas d'indication sur sa corpulence, ou sur les traits de son visageC 26.

Saint Benoît dans les arts plastiques

33
La fécondité de l'ordre de saint Benoît et la prodigieuse diffusion de ses monastères expliquent tant la grande quantité des images du saint que leur répartition sur tout le continent européen. Elle n'aurait pu l'être à ce point sans la longue biographie (hagiographie) qui remplit tout le Livre II des Dialogues de Grégoire le Grand. C'est pourquoi la personne, la vie et l'activité de Benoît de Nursie constituent l'un des ensembles les plus riches de l'iconographie des saints de l'Occident. Les nombreuses merveilles que Grégoire lui a tressées, ont offert aux siècles suivants une matière favorable à la création artistique. Les moines font appel aux meilleurs artistes de leur temps, il s'ensuit que du point de vue purement artistique, les œuvres d'art inspirées par le saint sont souvent d'une valeur exceptionnelle34.

Peinture

Saint Benoît porte le plus souvent la coule noire des bénédictins et parfois la blanche cistercienne. Il tient quelquefois en main un goupillon, mais porte le plus souvent sa Règle et une crosse d'abbé. Un corbeau tenant dans son bec un morceau de pain, un calice avec des serpents, un bâton sont d'autres attributs iconographiques du saint.

Sculpture

Gravure

Postérité

Dévotion et patronage

Patronages, titres et rôles dans la foi populaire

Anne d'Autriche et ses fils priant devant saint Benoît et sainte Scolastique, par Philippe de Champaigne.
Saint Benoît est le patron des ingénieurs civils35, des fermiers et des ouvriers agricoles, des spéléologues35, des mourants36 et des moines.
Benoît est encore invoqué comme protecteur des écoliers (les patriciens romains lui confiaient leurs fils), des hommes de guerre, des dinandiers et chaudronniers et aussi du bétail. En France, il était également le protecteur des Capétiens37.
Il a été proclamé patron de toute l'Europe (patronus totius Europae)38 le 24 octobre 196439 par le pape Paul VI, qui lui a aussi attribué les titres de messager de la paix (pacis nuntius), architecte de l'unité (unitatis effector), maître de la culture et de la civilisation (civilis cultus magister), héraut de la foi chrétienne (religionis christianae praeco) et fondateur du monachisme occidental (monasticae vitae in occidente auctor). Comme patron de l'Europe et de par les principes qu'il a édictés dans sa règle, il est le saint patron des Scouts d'Europe.
Il est invoqué traditionnellement par les catholiques contre les piqûres d'orties, le poison, l'érésipèle, la fièvre, les tentations, les maladies inflammatoires, la gravelle, et la maladie de la pierre40.

Dates de fête

Jusqu'au Concile de Vatican II, saint Benoît était vénéré deux fois dans l'année en Occident : le 11 juillet (fête), date anniversaire de la translation de ses reliques à l'Abbaye de Saint-Benoît-sur-Loire, et le 21 mars (mémoire), anniversaire de sa mort. Lorsque le calendrier romain fut remanié par le pape Paul VI dans la suite du concile, c'est la date du 11 juillet qui a été retenue. En Orient, saint Benoît est fêté le 14 mars.

Reliques

Les reliques de saint Benoît sont conservées dans la crypte de l'Abbaye de Saint-Benoît-sur-Loire, près d'Orléans, et de Germigny-des-Prés, où se trouve une église carolingienne, dans le centre de la France.

Médaille de saint Benoit

Les deux faces de la Médaille de Saint Benoit
La médaille de saint Benoît est, depuis le Moyen Âge, gage de la protection du saint à qui la porte avec vénération.
Prière de st Benoit: CSPB: Crux Sanctis Patris Benedicti (Croix du saint Pere Benoit)
CSSMI: Crux Sacra Sit Mihi Lux (Que la Croix Sainte Soit Ma Lumière )
NDSMD: Non Dacro Sit Mihi Dux ( Que le démon ne soit pas mon chef)
VRS: Vade Retro Satana (Arrière satan )
NSMV: Non Suave Mihi Vana (Ne me persuade pas des choses mauvaises)
MQL: Sunt Mala Quae Libas (Ce que tu représente est mauvais)
VB: Ipse Venena Bibas ( Bois toi même tes poisons )
Article détaillé : Médaille de saint Benoît.

Hommages

De nombreux papes ont choisi le nom de règne de Benoît en hommage à Benoît de Nursie. Benoît XVI a choisi son nom de règne en s'inspirant de saint Benoît et de Benoît XV.

Voir aussi

Œuvre de Benoît de Nursie

  • la Règle de saint Benoît (latin / français), Desclee de Brouwer, 1997, (ISBN 9782220040868)

Bibliographie

  • Adalbert de Vogüé, Autour de saint Benoît, Éditions Abbaye de Bellefontaine, coll. « Vie Monastique, n° 4 », 1975
  • Dom Ildefons Herwegen, Saint Benoît : pour le 1500e anniversaire de la naissance saint Benoît, Desclée de Brouwer, 1980
  • Adalbert de Vogüé, Saint Benoît : Homme de Dieu, Paris, Les Éditions de l'atelier, coll. « Mémoire d'homme mémoire de foi », 1993, 63 p. (ISBN 2-7082-3023-9)
  • Bénédicte Demeulenaere, Saint Benoît, Paris, Editions du Rocher, coll. « Régine Pernoud », 1996, 150 p. (ISBN 2-268-02361-3)
  • Pierre Chavot, Saint Benoît, Paris, Flammation, coll. « les petits livres des Saints », 2001, 63 p. (ISBN 2080104160)
  • Claude Jean-Nesmy, Saint Benoît : et la vie monastique, Paris, Seuil, coll. « Point Sagesses », 2001, 170 p. (ISBN 2-02-040765-5)
  • Alain Boureau (sous la dir.), Jacques de Voragine, La Légende dorée, Gallimard, coll. Bibliothèque de la Pléiade, 11 mars 2004, (ISBN 9782070114177)
  • Victor Dammertz, Saint Benoît père de l'Occident : Benoît-Patron de toute l'Europe, t. Titres de Benoît, Anvers, Fonds Mercator, 1980, 477 p.
  • Maur Standaert, Saint Benoît père de l'Occident : La vie et la règle de saint Benoît, t. Chapitre 1, Anvers, Fonds Mercator, 1980, 477 p.
  • Jan Karel Steppe, Saint Benoît père de l'Occident : Saint Benoît dans les arts plastiques, t. Chapitre 2, Anvers, Fonds Mercator, 1980, 477 p.
  • Jean Décarreaux, Saint Benoît père de l'Occident : Esquisse historique du monachisme bénédictin, t. Chapitre 3, Anvers, Fonds Mercator, 1980, 477 p.
  • Léo Moulin, Saint Benoît père de l'Occident : La vie bénédictine quotidienne hier et aujourd'hui, t. Chapitre 4, Anvers, Fonds Mercator, 1980, 477 p.

Ouvrages spirituels sur saint Benoît

  • Émilie Bonvin, Manuel des prières à Saint Benoît, Éditions Cristal, 2007, (ISBN 9782848950327)
  • Émilie Bonvin, Saint Benoît, prières et neuvaines, collection poche, Éditions Exclusif, 2011, (ISBN 9782848910918)

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