Jérôme, en latin : Eusebius
Sophronius Hieronymus Stridonensis,
naît à Stridon (actuelle Croatie) vers 347 dans une famille
chrétienne, qui lui assura une formation soignée, l'envoyant également à Rome
pour perfectionner ses études. Dès sa jeunesse, il ressentit l'attrait de la
vie dans le monde (cf. Ep 22, 7), mais en lui prévalurent le désir et
l'intérêt pour la religion chrétienne. Après avoir reçu le Baptême vers 366,
il s'orienta vers la vie ascétique et, s'étant rendu à Aquilée, il s'inséra
dans un groupe de fervents chrétiens, qu'il définit comme un « chœur de bienheureux »
(Chron. ad ann. 374) réuni autour de l'Évêque Valérien. Il partit ensuite
pour l'Orient et vécut en ermite dans le désert de Calcide, au sud d'Alep
(cf. Ep 14, 10), se consacrant sérieusement aux études. Il perfectionna sa
connaissance du grec, commença l'étude de l'hébreu (cf. Ep 125, 12),
transcrivit des codex et des œuvres patristiques (cf. Ep 5, 2). La
méditation, la solitude, le contact avec la Parole de Dieu firent mûrir sa
sensibilité chrétienne. Il sentit de manière plus aiguë le poids de ses
expériences de jeunesse (cf. Ep 22, 7), et il ressentit vivement l'opposition
entre la mentalité païenne et la vie chrétienne: une opposition rendue
célèbre par la « vision »
dramatique et vivante, dont il nous a laissé le récit. Dans celle-ci, il lui
sembla être flagellé devant Dieu, car « cicéronien et non chrétien »
(cf. Ep 22, 30).
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En 382, il partit s'installer à Rome : là, le Pape Damase, connaissant
sa réputation d'ascète et sa compétence d'érudit, l'engagea comme secrétaire et
conseiller; il l'encouragea à entreprendre une nouvelle traduction latine des
textes bibliques pour des raisons pastorales et culturelles. Quelques personnes
de l'aristocratie romaine, en particulier des nobles dames comme Paola,
Marcella, Asella, Lea et d'autres, souhaitant s'engager sur la voie de la
perfection chrétienne et approfondir leur connaissance de la Parole de Dieu, le
choisirent comme guide spirituel et maître dans l'approche méthodique des
textes sacrés. Ces nobles dames apprirent également le grec et l'hébreu.
Après la mort du Pape Damase, Jérôme quitta Rome en 385 et entreprit un
pèlerinage, tout d'abord en Terre Sainte, témoin silencieux de la vie terrestre
du Christ, puis en Égypte, terre d'élection de nombreux moines (cf. Contra
Rufinum 3, 22; Ep 108, 6-14). En 386, il s'arrêta à Bethléem, où, grâce à la
générosité de la noble dame Paola, furent construits un monastère masculin, un
monastère féminin et un hospice pour les pèlerins qui se rendaient en Terre
Sainte, « pensant que Marie
et Joseph n'avaient pas trouvé où faire halte » (Ep 108, 14).
Il resta à Bethléem jusqu'à sa mort, en continuant à exercer une intense
activité : il commenta la Parole de Dieu ; défendit la foi, s'opposant avec
vigueur à différentes hérésies ; il exhorta les moines à la perfection ; il
enseigna la culture classique et chrétienne à de jeunes élèves ; il accueillit
avec une âme pastorale les pèlerins qui visitaient la Terre Sainte. Il
s'éteignit dans sa cellule, près de la grotte de la Nativité, le 30 septembre
419/420.
Pour approfondir, lire les Catéchèses du Pape Benoît XVI :
>>> Saint Jérôme (1)
[Allemand, Anglais, Croate, Espagnol, Français, Italien, Portugais]
>>> Saint Jérôme (2)
[Allemand, Anglais, Croate, Espagnol, Français, Italien, Portugais]
Source principale : vatican.va (« Rév. x gpm »).
BENOÎT
XVI
AUDIENCE GÉNÉRALE
Mercredi
7 novembre 2007
Chers frères et soeurs!
Nous porterons aujourd'hui
notre attention sur saint Jérôme, un Père de l'Eglise qui a placé la Bible au
centre de sa vie: il l'a traduite en langue latine, il l'a commentée dans
ses œuvres, et il s'est surtout engagé à la vivre concrètement au cours de sa
longue existence terrestre, malgré le célèbre caractère difficile et fougueux
qu'il avait reçu de la nature.
Jérôme naquit à Stridon vers
347 dans une famille chrétienne, qui lui assura une formation soignée,
l'envoyant également à Rome pour perfectionner ses études. Dès sa jeunesse, il
ressentit l'attrait de la vie dans le monde (cf. Ep 22, 7), mais en lui
prévalurent le désir et l'intérêt pour la religion chrétienne. Après avoir reçu
le Baptême vers 366, il s'orienta vers la vie ascétique et, s'étant rendu à
Aquilée, il s'inséra dans un groupe de fervents chrétiens, qu'il définit comme
un "chœur de bienheureux" (Chron. ad ann. 374) réuni autour de
l'Evêque Valérien. Il partit ensuite pour l'Orient et vécut en ermite dans le
désert de Calcide, au sud d'Alep (cf. Ep 14, 10), se consacrant
sérieusement aux études. Il perfectionna sa connaissance du grec, commença l'étude
de l'hébreu (cf. Ep 125, 12), transcrivit des codex et des œuvres patristiques
(cf. Ep 5, 2). La méditation, la solitude, le contact avec la Parole de
Dieu firent mûrir sa sensibilité chrétienne. Il sentit de manière plus aiguë le
poids de ses expériences de jeunesse (cf. Ep 22, 7), et il ressentit vivement
l'opposition entre la mentalité païenne et la vie chrétienne: une
opposition rendue célèbre par la "vision" dramatique et vivante, dont
il nous a laissé le récit. Dans celle-ci, il lui sembla être flagellé devant
Dieu, car "cicéronien et non chrétien" (cf. Ep 22, 30).
En 382, il partit s'installer
à Rome: là, le Pape Damase, connaissant sa réputation d'ascète et sa
compétence d'érudit, l'engagea comme secrétaire et conseiller; il l'encouragea à
entreprendre une nouvelle traduction latine des textes bibliques pour des
raisons pastorales et culturelles. Quelques personnes de l'aristocratie
romaine, en particulier des nobles dames comme Paola, Marcella, Asella, Lea et
d'autres, souhaitant s'engager sur la voie de la perfection chrétienne et
approfondir leur connaissance de la Parole de Dieu, le choisirent comme guide
spirituel et maître dans l'approche méthodique des textes sacrés. Ces nobles
dames apprirent également le grec et l'hébreu.
Après la mort du Pape Damase,
Jérôme quitta Rome en 385 et entreprit un pèlerinage, tout d'abord en Terre
Sainte, témoin silencieux de la vie terrestre du Christ, puis en Egypte, terre
d'élection de nombreux moines (cf. Contra Rufinum 3, 22; Ep 108, 6-14). En 386,
il s'arrêta à Bethléem, où, grâce à la générosité de la noble dame Paola,
furent construits un monastère masculin, un monastère féminin et un hospice
pour les pèlerins qui se rendaient en Terre Sainte, "pensant que Marie et
Joseph n'avaient pas trouvé où faire halte" (Ep 108, 14). Il resta à
Bethléem jusqu'à sa mort, en continuant à exercer une intense activité:
il commenta la Parole de Dieu; défendit la foi, s'opposant avec vigueur à
différentes hérésies; il exhorta les moines à la perfection; il enseigna la
culture classique et chrétienne à de jeunes élèves; il accueillit avec une âme
pastorale les pèlerins qui visitaient la Terre Sainte. Il s'éteignit dans sa
cellule, près de la grotte de la Nativité, le 30 septembre 419/420.
Sa grande culture littéraire
et sa vaste érudition permirent à Jérôme la révision et la traduction de
nombreux textes bibliques: un travail précieux pour l'Eglise latine et
pour la culture occidentale. Sur la base des textes originaux en grec et en
hébreu et grâce à la confrontation avec les versions précédentes, il effectua
la révision des quatre Evangiles en langue latine, puis du Psautier et d'une
grande partie de l'Ancien Testament. En tenant compte de l'original hébreu et
grec, des Septante et de la version grecque classique de l'Ancien Testament
remontant à l'époque pré-chrétienne, et des précédentes versions latines,
Jérôme, ensuite assisté par d'autres collaborateurs, put offrir une
meilleure traduction: elle constitue ce qu'on appelle la
"Vulgate", le texte "officiel" de l'Eglise latine, qui a
été reconnu comme tel par le Concile de Trente et qui, après la récente
révision, demeure le texte "officiel" de l'Eglise de langue latine.
Il est intéressant de souligner les critères auxquels ce grand bibliste s'est tenu
dans son œuvre de traducteur. Il le révèle lui-même quand il affirme respecter
jusqu'à l'ordre des mots dans les Saintes Ecritures, car dans celles-ci,
dit-il, "l'ordre des mots est aussi un mystère" (Ep 57, 5),
c'est-à-dire une révélation. Il réaffirme en outre la nécessité d'avoir recours
aux textes originaux: "S'il devait surgir une discussion entre les
Latins sur le Nouveau Testament, en raison des leçons discordantes des
manuscrits, ayons recours à l'original, c'est-à-dire au texte grec, langue dans
laquelle a été écrit le Nouveau Pacte. De la même manière pour l'Ancien
Testament, s'il existe des divergences entre les textes grecs et latins, nous
devons faire appel au texte original, l'hébreu; de manière à ce que nous
puissions retrouver tout ce qui naît de la source dans les ruisseaux" (Ep
106, 2). En outre, Jérôme commenta également de nombreux textes bibliques. Il
pensait que les commentaires devaient offrir de nombreuses opinions, "de
manière à ce que le lecteur avisé, après avoir lu les différentes explications
et après avoir connu de nombreuses opinions - à accepter ou à refuser -, juge
celle qui était la plus crédible et, comme un expert en monnaies, refuse la
fausse monnaie" (Contra Rufinum 1, 16).
Il réfuta avec énergie et
vigueur les hérétiques qui contestaient la tradition et la foi de l'Eglise. Il
démontra également l'importance et la validité de la littérature chrétienne,
devenue une véritable culture désormais digne d'être comparée avec la
littérature classique: il le fit en composant le De viris illustribus,
une œuvre dans laquelle Jérôme présente les biographies de plus d'une centaine
d'auteurs chrétiens. Il écrivit également des biographies de moines, illustrant
à côté d'autres itinéraires spirituels également l'idéal monastique; en outre,
il traduisit diverses œuvres d'auteurs grecs. Enfin, dans le fameux
Epistolario, un chef-d'œuvre de la littérature latine, Jérôme apparaît avec ses
caractéristiques d'homme cultivé, d'ascète et de guide des âmes.
Que pouvons-nous apprendre de
saint Jérôme? Je pense en particulier ceci: aimer la Parole de Dieu dans
l'Ecriture Sainte. Saint Jérôme dit: "Ignorer les Ecritures, c'est
ignorer le Christ". C'est pourquoi, il est très important que chaque
chrétien vive en contact et en dialogue personnel avec la Parole de Dieu qui
nous a été donnée dans l'Ecriture Sainte. Notre dialogue avec elle doit
toujours revêtir deux dimensions: d'une part, il doit être un dialogue
réellement personnel, car Dieu parle avec chacun de nous à travers l'Ecriture
Sainte et possède un message pour chacun. Nous devons lire l'Ecriture Sainte
non pas comme une parole du passé, mais comme une Parole de Dieu qui s'adresse
également à nous et nous efforcer de comprendre ce que le Seigneur veut nous
dire. Mais pour ne pas tomber dans l'individualisme, nous devons tenir compte
du fait que la Parole de Dieu nous est donnée précisément pour construire la
communion, pour nous unir dans la vérité de notre chemin vers Dieu. C'est
pourquoi, tout en étant une Parole personnelle, elle est également une Parole
qui construit une communauté, qui construit l'Eglise. Nous devons donc la lire
en communion avec l'Eglise vivante. Le lieu privilégié de la lecture et de
l'écoute de la Parole de Dieu est la liturgie, dans laquelle, en célébrant la
parole et en rendant présent dans le Sacrement le Corps du Christ, nous
réalisons la parole dans notre vie et la rendons présente parmi nous. Nous ne
devons jamais oublier que la Parole de Dieu transcende les
temps. Les opinions humaines vont et viennent. Ce qui est très moderne
aujourd'hui sera très vieux demain. La Parole de Dieu, au contraire, est une
Parole de vie éternelle, elle porte en elle l'éternité, ce qui vaut pour
toujours. En portant en nous la Parole de Dieu, nous portons donc en nous
l'éternel, la vie éternelle.
Et ainsi, je conclus par une
parole de saint Jérôme à saint Paulin de Nola. Dans celle-ci, le grand exégète
exprime précisément cette réalité, c'est-à-dire que dans la
Parole de Dieu, nous recevons l'éternité, la vie éternelle. Saint Jérôme
dit: "Cherchons à apprendre sur la terre les vérités dont la
consistance persistera également au ciel" (Ep 53, 10).
*
* *
Je salue cordialement les
personnes de langue française, particulièrement les pèlerins de la diaconie du
Var et les jeunes. À la suite de saint Jérôme, je vous invite à lire et à
méditer la Parole de Dieu, qui nous est donnée dans la Bible. Faites-en tous
les jours votre nourriture spirituelle ! Que Dieu vous bénisse et vous garde
dans l’espérance !
BENOÎT
XVI
AUDIENCE GÉNÉRALE
Mercredi
14 novembre 2007
Chers frères et sœurs,
Nous poursuivons aujourd'hui
la présentation de la figure de saint Jérôme. Comme nous l'avons dit mercredi
dernier, il consacra sa vie à l'étude de la Bible, au point d'être reconnu par
l'un de mes prédécesseurs, le Pape Benoît XV, comme "docteur éminent dans
l'interprétation des Saintes Ecritures". Jérôme soulignait la joie et
l'importance de se familiariser avec les textes bibliques: "Ne te
semble-t-il pas habiter - déjà ici, sur terre - dans le royaume des cieux,
lorsqu'on vit parmi ces textes, lorsqu'on les médite, lorsqu'on ne connaît ni
ne recherche rien d'autre?" (Ep 53, 10). En réalité, dialoguer avec Dieu,
avec sa Parole, est dans un certain sens une présence du Ciel, c'est-à-dire une
présence de Dieu. S'approcher des textes bibliques, surtout du Nouveau
Testament, est essentiel pour le croyant, car "ignorer l'Ecriture, c'est
ignorer le Christ". C'est à lui qu'appartient cette phrase célèbre, également
citée par le Concile Vatican II dans la Constitution Dei Verbum (n. 25).
Réellement
"amoureux" de la Parole de Dieu, il se demandait: "Comment
pourrait-on vivre sans la science des Ecritures, à travers lesquelles on
apprend à connaître le Christ lui-même, qui est la vie des croyants" (Ep
30, 7). La Bible, instrument "avec lequel Dieu parle chaque jour aux
fidèles" (Ep 133, 13), devient ainsi un encouragement et la source de la
vie chrétienne pour toutes les situations et pour chaque personne. Lire
l'Ecriture signifie converser avec Dieu: "Si tu pries - écrit-il à
une noble jeune fille de Rome -, tu parles avec l'Epoux; si tu lis, c'est Lui
qui te parle" (Ep 22, 25). L'étude et la méditation de l'Ecriture rendent
l'homme sage et serein (cf. In Eph., prol.). Assurément, pour pénétrer toujours
plus profondément la Parole de Dieu, une application constante et progressive
est nécessaire. Jérôme recommandait ainsi au prêtre Népotien: "Lis
avec une grande fréquence les divines Ecritures; ou mieux, que le Livre Saint
reste toujours entre tes mains. Apprends-là ce que tu dois enseigner" (Ep
52, 7). Il donnait les conseils suivants à la matrone romaine Leta pour
l'éducation chrétienne de sa fille: "Assure-toi qu'elle étudie
chaque jour un passage de l'Ecriture... Qu'à la prière elle fasse suivre la
lecture, et à la lecture la prière... Au lieu des bijoux et des vêtements de
soie, qu'elle aime les Livres divins" (Ep 107, 9.12). Avec la méditation
et la science des Ecritures se "conserve l'équilibre de l'âme" (Ad
Eph., prol.). Seul un profond esprit de prière et l'assistance de l'Esprit
Saint peuvent nous introduire à la compréhension de la Bible:
"Dans l'interprétation des Saintes Ecritures, nous avons toujours besoin
de l'assistance de l'Esprit Saint" (In Mich. 1, 1, 10, 15).
Un amour passionné pour les
Ecritures imprégna donc toute la vie de Jérôme, un amour qu'il chercha toujours
à susciter également chez les fidèles. Il recommandait à l'une de ses filles
spirituelles: "Aime l'Ecriture Sainte et la sagesse t'aimera;
aime-la tendrement, et celle-ci te préservera; honore-la et tu recevras ses
caresses. Qu'elle soit pour toi comme tes colliers et tes boucles
d'oreille" (Ep 130, 20). Et encore: "Aime la science de
l'Ecriture, et tu n'aimeras pas les vices de la chair" (Ep 125, 11).
Pour Jérôme, un critère de
méthode fondamental dans l'interprétation des Ecritures était l'harmonie avec
le magistère de l'Eglise. Nous ne pouvons jamais lire l'Ecriture seuls. Nous
trouvons trop de portes fermées et nous glissons facilement dans l'erreur. La
Bible a été écrite par le Peuple de Dieu et pour le Peuple de Dieu, sous
l'inspiration de l'Esprit Saint. Ce n'est que dans cette communion avec le
Peuple de Dieu que nous pouvons réellement entrer avec le "nous" au
centre de la vérité que Dieu lui-même veut nous dire. Pour lui, une
interprétation authentique de la Bible devait toujours être en harmonieuse
concordance avec la foi de l'Eglise catholique. Il ne s'agit pas d'une exigence
imposée à ce Livre de l'extérieur; le Livre est précisément la voix du Peuple
de Dieu en pèlerinage et ce n'est que dans la foi de ce Peuple que nous sommes,
pour ainsi dire, dans la juste tonalité pour comprendre l'Ecriture Sainte. Il
admonestait donc: "Reste fermement attaché à la doctrine traditionnelle
qui t'a été enseignée, afin que tu puisses exhorter selon la saine doctrine et
réfuter ceux qui la contredisent" (Ep 52, 7). En particulier, étant donné
que Jésus Christ a fondé son Eglise sur Pierre, chaque chrétien - concluait-il
- doit être en communion "avec la Chaire de saint Pierre. Je sais que sur
cette pierre l'Eglise est édifiée" (Ep 15, 2). Par conséquent, et de façon
directe, il déclarait: "Je suis avec quiconque est uni à la Chaire
de saint Pierre" (Ep 16).
Jérôme ne néglige pas, bien
sûr, l'aspect éthique. Il rappelle au contraire souvent le devoir d'accorder sa
propre vie avec la Parole divine et ce n'est qu'en la vivant que nous trouvons
également la capacité de la comprendre. Cette cohérence est indispensable pour
chaque chrétien, et en particulier pour le prédicateur, afin que ses actions,
si elles étaient discordantes par rapport au discours, ne le mettent pas dans
l'embarras. Ainsi exhorte-t-il le prêtre Népotien: "Que tes actions
ne démentent pas tes paroles, afin que, lorsque tu prêches à l'église, il
n'arrive pas que quelqu'un commente en son for intérieur: "Pourquoi
n'agis-tu pas précisément ainsi?" Cela est vraiment plaisant de voir ce
maître qui, le ventre plein, disserte sur le jeûne; même un voleur peut blâmer
l'avarice; mais chez le prêtre du Christ, l'esprit et la parole doivent
s'accorder" (Ep 52, 7). Dans une autre lettre, Jérôme réaffirme:
"Même si elle possède une doctrine splendide, la personne qui se sent
condamnée par sa propre conscience se sent honteuse" (Ep 127, 4). Toujours
sur le thème de la cohérence, il observe: l'Evangile doit se traduire par
des attitudes de charité véritable, car en chaque être humain, la Personne même
du Christ est présente. En s'adressant, par exemple, au prêtre Paulin (qui
devint ensuite Evêque de Nola et saint), Jérôme le conseillait ainsi:
"Le véritable temple du Christ est l'âme du fidèle: orne-le, ce
sanctuaire, embellis-le, dépose en lui tes offrandes et reçois le Christ. Dans
quel but revêtir les murs de pierres précieuses, si le Christ meurt de faim
dans la personne d'un pauvre?" (Ep 58, 7). Jérôme concrétise: il
faut "vêtir le Christ chez les pauvres, lui rendre visite chez les
personnes qui souffrent, le nourrir chez les affamés, le loger chez les sans-abris"
(Ep 130, 14). L'amour pour le Christ, nourri par l'étude et la méditation, nous
fait surmonter chaque difficulté: "Aimons nous aussi Jésus Christ,
recherchons toujours l'union avec lui: alors, même ce qui est difficile
nous semblera facile" (Ep 22, 40).
Jérôme, défini par Prospère
d'Aquitaine comme un "modèle de conduite et maître du genre humain"
(Carmen de ingratis, 57), nous a également laissé un enseignement riche et
varié sur l'ascétisme chrétien. Il rappelle qu'un courageux engagement vers la
perfection demande une vigilance constante, de fréquentes mortifications,
toutefois avec modération et prudence, un travail intellectuel ou manuel assidu
pour éviter l'oisiveté (cf. Epp 125, 11 et 130, 15), et surtout l'obéissance à
Dieu: "Rien... ne plaît autant à Dieu que l'obéissance..., qui est
la plus excellente et l'unique vertu" (Hom. de oboedientia: CCL
78,552). La pratique des pèlerinages peut également appartenir au chemin
ascétique. Jérôme donna en particulier une impulsion à ceux en Terre Sainte, où
les pèlerins étaient accueillis et logés dans des édifices élevés à côté du
monastère de Bethléem, grâce à la générosité de la noble dame Paule, fille
spirituelle de Jérôme (cf. Ep 108, 14).
Enfin, on ne peut pas oublier
la contribution apportée par Jérôme dans le domaine de la pédagogie chrétienne
(cf. Epp 107 et 128). Il se propose de former "une âme qui doit devenir le
temple du Seigneur" (Ep 107, 4), une "pierre très précieuse" aux
yeux de Dieu (Ep 107, 13). Avec une profonde intuition, il conseille de la préserver
du mal et des occasions de pécher, d'exclure les amitiés équivoques ou
débauchées (cf. Ep 107, 4 et 8-9; cf. également Ep 128, 3-4). Il exhorte
surtout les parents pour qu'ils créent un environnement
serein et joyeux autour des enfants, pour qu'ils les incitent
à l'étude et au travail, également par la louange et l'émulation (cf. Epp 107,
4 et 128, 1), qu'ils les encouragent à surmonter les difficultés, qu'ils
favorisent entre eux les bonnes habitudes et qu'ils les préservent d'en prendre
de mauvaises car - et il cite là une phrase de Publilius Syrus entendue à
l'école - "difficilement tu réussiras à te corriger de ces choses dont tu
prends tranquillement l'habitude" (Ep 107, 8). Les parents sont les
principaux éducateurs des enfants, les premiers maîtres de vie. Avec une grande
clarté, Jérôme, s'adressant à la mère d'une jeune fille et mentionnant ensuite
le père, admoneste, comme exprimant une exigence fondamentale de chaque
créature humaine qui commence son existence: "Qu'elle trouve en toi
sa maîtresse, et que sa jeunesse inexpérimentée regarde vers toi avec
émerveillement. Que ni en toi, ni en son père elle ne voie jamais d'attitudes
qui la conduisent au péché, si elles devaient être imitées. Rappelez-vous
que... vous pouvez davantage l'éduquer par l'exemple que par la parole"
(Ep 107, 9). Parmi les principales intuitions de Jérôme comme pédagogue, on
doit souligner l'importance attribuée à une éducation saine et complète dès la
prime enfance, la responsabilité particulière reconnue aux parents, l'urgence
d'une sérieuse formation morale et religieuse, l'exigence de l'étude pour une
formation humaine plus complète. En outre, un aspect assez négligé à l'époque
antique, mais considéré comme vital par notre auteur, est la promotion de la
femme, à laquelle il reconnaît le droit à une formation complète:
humaine, scolaire, religieuse, professionnelle. Et nous voyons précisément
aujourd'hui que l'éducation de la personnalité dans son intégralité,
l'éducation à la responsabilité devant Dieu et devant l'homme, est la véritable
condition de tout progrès, de toute paix, de toute réconciliation et
d'exclusion de la violence. L'éducation devant Dieu et devant l'homme:
c'est l'Ecriture Sainte qui nous indique la direction de l'éducation et ainsi,
du véritable humanisme.
Nous ne pouvons pas conclure
ces rapides annotations sur cet éminent Père de l'Eglise sans mentionner la
contribution efficace qu'il apporta à la préservation d'éléments positifs et
valables des antiques cultures juive, grecque et romaine au sein de la
civilisation chrétienne naissante. Jérôme a reconnu et assimilé les valeurs
artistiques, la richesse des sentiments et l'harmonie des images présentes chez
les classiques, qui éduquent le cœur et l'imagination à de nobles sentiments.
Il a en particulier placé au centre de sa vie et de son activité la Parole de
Dieu, qui indique à l'homme les chemins de la vie, et lui révèle les secrets de
la sainteté. Nous ne pouvons que lui être profondément reconnaissants pour tout
cela, précisément dans le monde d'aujourd'hui.
* * *
Je suis heureux de saluer les
francophones, notamment les jeunes prêtres de Belley-Ars, avec leur Évêque, Mgr
Bagnard. J’adresse un salut tout particulier aux pèlerins de France venus avec
les reliques de sainte Thérèse de l’Enfant Jésus et de la Sainte-Face,
accompagnés par Mgr Pican, Évêque de Bayeux et Lisieux. Nous nous souvenons
qu’il y a cent vingt ans, la petite Thérèse est venue rencontrer le Pape Léon
XIII, pour lui demander la permission d’entrer au Carmel malgré son jeune âge.
Il y a quatre-vingt ans, le Pape Pie XI la proclamait Patronne des Missions et,
en 1997, le Pape Jean-Paul II la déclarait Docteur de l’Église. Après
cette audience, j’aurai la joie de prier devant ses reliques, comme de nombreux
fidèles peuvent le faire pendant toute la semaine dans différentes églises de
Rome. Sainte Thérèse aurait voulu apprendre les langues bibliques pour mieux
lire l’Écriture. À sa suite et à l’exemple de saint Jérôme, puissiez-vous
prendre du temps pour lire la Bible de manière régulière. En devenant familiers
de la Parole de Dieu, vous y rencontrerez le Christ pour demeurer en intimité
avec lui. Avec ma Bénédiction apostolique.
©
Copyright 2007 - Libreria Editrice Vaticana
SAN GIROLAMO (O
GEROLAMO) SACERDOTE E DOTTORE DELLA CHIESA / -o Grolamo-v
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