Prier… je commencerai seulement
ce soir de tirer des conclusions ou de dire ce que
m’inspire notre rassemblement de samedi dernier, nous
les anciens de Saint-Louis-de-Gonzague, l’un des
collèges de la Compagnie de Jésus en France (y en a-t-il
eu seulement treize ?). Amenant notre fille jusqu’à son
cours de danse, bouchons et embouteillages inusités, je
me fis la remarque à moi-même sur le cours de ma vie,
maintenant dans sa dernière partie. Combien cet énième
âge ressemble à mon adolescence : la mission, pas le
sens de la vie par rapport aux autres, par rapport à
Dieu, la transcendance, la mortalité, mais une recherche
d’utiliser l’existence reçue et présentement prolongée,
en ayant « quelque chose » à y faire. Un état de vie,
sans doute, très questionné à mon adolescence, mais pour
répandre et la foi chrétienne et l’apport acquis et à
venir de notre pays, les deux, d’ailleurs historiquement
liés, et liés dans ma vie comme la suite l’a montré, et
ces années-ci surtout ces mois-ci, transmettre, autre
forme de la même mission. J’ai donc du mal à concevoir
et plus encore à expliquer notre époque comme une époque
ou un monde de ruptures ou en rupture. Je nous crois au
contraire en continuité, voire en reproduction. Ce titre
du Monde, la « guerre
froide » en Syrie, ce qui est oublier qu’elle sévit
aussi aux frontières terrestres de l’Union européenne :
Géorgie, Crimée et Ukraine, Syrie maintenant, peut-être
Turquie. Même si sur d’autres plans, la différence
paraît criante avec le passé, même récent, je crois que
la seule différence, c’est qu’auparavant manquait une
dimension : la sincérité, l’intériorité. Ainsi une
Eglise de société, de convenance, au moins en France, en
pays rural ou en « certains milieux » disparaît, mais
ce n’est pas l’Eglise en tant que telle, et ce qui se
cherche c’est une Eglise plus intérieure, moins
« raciste » (cette sorte de pitié pour ceux qui
n’auraient pas la foi, ou qui ne connaîtraient pas,
etc..), une Eglise où pratique, prière, gestes de
solidarité ne feront qu’un en chaque personne. Une
Eglise plus consciente sans doute d’elle-même,
consciente aussi qu’elle peut contribuer à la paix entre
les hommes, et entre l’humanité et le reste du vivant.
Ses dimensions temporelles sont, à mon sens, bien plus
fortes qu’aux derniers siècles, car elle se présente et
est ressentie pour elle-même, servante de foi, de sens.
Ses possibilités sont de plus en plus considérables dans
une époque relativiste et selon les nécessités de la
laïcité entendue comme une tolérance et une estime
mutuelle quelles que soient les références et contenus
de la foi ou de l’agnosticisme ou de l’humanisme de
chacun ou de peuples entiers, car elle est universelle
et non spécialisée, que de plus en plus elle déborde son
berceau social, ethnique et géographique initiale. Il en
va de même pour l’idéal démocratique : ce ne peut plus
être des mots ou des apparences, le décalage entre les
campagnes présidentielles en cours chez nous, ou les
assauts du racisme en Europe et aux Etats-Unis, en
convainquent. Il faut une pratique, c’est le seul remède
contre les extrêmismes racistes, et aussi face aux
immenses dictatures russe et chinoise.
Aujourd’hui, l’enseignement de
la prière par le Christ-même. A la demande de ses
disciples, nostalgiques ou envieux de ce que certains
ont reçus du Précurseur, c‘est la leçon de Luc [1],
ou proprio motu par Jésus frappé de l’ostentation de
tous ceux qui, parmi ses contemporains, se veulent les
champions de la piété, c’est le discours retenu par
saint Matthieu [2].
Enseignement aussi d’un texte, le Notre Père… littéralement
retenu et sans ajout, sans composition par les Apôtres.
Le Je vous salue Marie, est au contraire
une « compilation » des dialogues rapportés par Luc,
puis un développement du dogme disputé pendant les
premiers siècles de nos origines chrétiennes : Marie,
mère de Dieu, puisque d’un Fils qui est Dieu (libellé du
catéchisme de mon enfance). Manière fréquente de Jésus,
nous serons jugés et traités selon notre attitude envers
autrui, la parabole des débiteurs. Le Notre Père commence donc par un
concours de l’homme à la reconnaissance de la divinité,
puis se développe en trois demandes : le pain quotidien,
le matériel… la miséricorde… la protection et
l’accompagnement en ce monde. Jésus en un certain
lieu, était en prière. Quand il eut terminé (l’exercice a sa
temporalité, il n’est pas un penchant auquel le divin
Maître, puis nous essayant de rester à Sa suite, se
laissent aller : c’est un acte de tout l’être), un
de ses disciples lui demanda : « Seigneur apprends-nous à
prier, comme Jean le Baptiste, lui aussi, l’a appris à ses
disciples ». Question
d’une curiosité d’enfant que je n’ai qu’à présent : qui
fut ce disciple ? et qu’apprenait donc aux siens le
cousin du Christ ? sinon de les envoyer à Celui-ci ? Les
origines de l’Eglise ne sont pas une légende, mais de
l’Histoire précise, ainsi Paul date son adoubement et sa
reconnaissance, son champ d’apostolat, de la seizième
année de sa conversion sur la route de Damas. Accompagné
de Tite et de Barnabé, Paul est de nouveau
monté à Jérusalem… ayant reconnu la grâce qui m’a été
donnée, Jacques, Pierre et Jean, qui sont considérés comme
les colonnes de l’Eglise, nous ont tendu la main, à moi et
à Barnabé, en signe de communion, montrant par là que nous
sommes, nous, envoyés aux nations, et eux, aux circoncis. Sens de
l’organisation et de la répartition des champs et
compétences ? ainsi l’institution des diacres. Oui, en
un sens, mais selon Dieu. Si l’action de Dieu a
fait de Pierre l’Apôtre des circoncis, elle a fait de moi
l’Apôtre des nations païennes. Pour autant Pierre et
Paul se retrouveront à Rome pour y témoigner ultimement,
et selon des exécutions romaines. Je persiste dans ma
proposition et ma « vision » d’une Eglise dont le chef
reviendrait résider à Jérusalem, le plus simplement
possible, les bureaux restant à Rome. Car c‘est à
Jérusalem que se convertiraient/convertiront les Juifs
et les Musulmans parce qu’ils y accueillerait le pape
des catholiques, des chrétiens… Deux notations
décisives, leçons mutuelles de Pierre à Paul et de Paul
à Pierre. Ils nous ont seulement demandé de nous
souvenir des pauvres, ce que j’ai pris le plus grand soin
de faire… Je dis à Pierre devant tout le monde : « Si toi
qui es Juif, tu vis à la manière des païens et non des
Juifs, pourquoi obliges-u les païens à suivre les coutumes
juives ? ». La
paroisse cathédrale, à Vannes, Saint-Pierre, propose une
série de six soirées d’examen ensemble des Actes des
Apôtres, comme bréviaire de l’évangélisation
aujourd’hui, en nous accompagnant de l’exhortation
apostolique : la joie d’évangéliser. J’essaierai de n’en
manquer aucune. Son amour envers nous s’est montré
le plus fort : éternelle est la fidélité du Seigneur.
[1]
- Paul aux Galates II 1
à 14 passim ; psaume CXVII ; évangile selon saint Luc
XI 1 à 4
[2]
- Matthieu VI 7 à 14
5 Lorsque
vous priez, ne soyez pas comme les hypocrites, qui
aiment à prier debout dans les synagogues et aux
coins des rues, pour être vus des hommes. Je vous le
dis en vérité, ils reçoivent leur récompense. 6 Mais
quand tu pries, entre dans ta chambre, ferme ta
porte, et prie ton Père qui est là dans le lieu
secret; et ton Père, qui voit dans le secret, te le
rendra.
7 En
priant, ne multipliez pas de vaines paroles, comme
les païens, qui s'imaginent qu'à force de paroles
ils seront exaucés. 8 Ne leur
ressemblez pas; car votre Père sait de quoi vous
avez besoin, avant que vous le lui demandiez.
9 Voici
donc comment vous devez prier : Notre Père qui es
aux cieux ! Que ton nom soit sanctifié; 10 que ton
règne vienne; que ta volonté soit faite sur la terre
comme au ciel. 11 Donne-nous
aujourd'hui notre pain quotidien; 12 pardonne-nous
nos offenses, comme nous aussi nous pardonnons à
ceux qui nous ont offensés; 13 ne nous
induis pas en tentation, mais délivre-nous du malin.
Car c'est à toi qu'appartiennent, dans tous les
siècles, le règne, la puissance et la gloire. Amen !
14 Si
vous pardonnez aux hommes leurs offenses, votre Père
céleste vous pardonnera aussi; 15 mais si
vous ne pardonnez pas aux hommes, votre Père ne vous
pardonnera pas non plus vos offenses.
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