Monseigneur, mon Père,
j'espère ne pas vous avoir importuné ou encombré par la
communication, en destinataire caché, de mes récents courriels à
l'Elysée : je m'y efforçais d'y faire lire le texte que vous aviez
introduit dans Le Monde, le soir-même du premier débat de
primaires pour la prochaine élection présidentielle. Peut-être y
êtes-vous - vous-même - parvenu plus directement et en avez-vous
reçu un écho ?
Merci à vous-même, au Conseil permanent dont
j'aurais voulu connaître l'adresse internet de chacun des membres pour
les remercier aussi, et à l'ensemble de vos Frères dans l'épiscopat.
Depuis le 28 Octobre 1972 (pour une pratique chrétienne de la politique), vos prédécesseurs nous ont enseigné à la suite notamment de Paul VI (14 Mai 1971 - lettre apostolique pour une société humaine)
comment discerner en politique et comment contribuer, en cela, à la vie
de notre pays, à l'amélioration de notre société. Cette fois-ci, votre
apport est décisif, d'abord que vous vous situez vous-même - non plus en
magistère - mais en contribution civique, et que vous ne vous pas seulement aux Français mais à tous les habitants avec nous de notre territoire.
Ensuite, parce que vous prenez la parole par défaut. De fait, aucune
personnalité, aucun mouvement, aucun parti dans la "classe politique",
ni aucun commentateur ou essayiste, n'a présenté de manière si crûe et
si pressante la situation dans laquelle - d'âme et d'esprit - notre pays
se trouve : structures, "charpente" écrivez-vous, discernement du bien
commun semblent avoir disparu, pas seulement de la pratique nationale,
mais de la conscience de chacun.
Vous proposez avec instance - le questionnaire à la fin de
votre adresse et avant le rappel de votre première "sensibilisation",
celle du 20 Juin dernier - l'engagement personnel de chacun, des
chrétiens, des catholiques dont vous supposez qu'ils vous écoutent les
premiers, et le dialogue de tous avec tous.
Tendu et sobre comme il est, votre texte sous-entend que sans
cette réflexion - cet arrêt intérieur de chacun en lui-même et pour
notre pays - les différents processus habituels de la politique et de
l'économie seront encore plus inopérants que ces dernières années. A
commencer par la prochaine élection présidentielle. Combien j'en suis
personnellement d'accord, qui milite par écrit vers l'Eysée (le
secrétaire général par internet ou le Président lui-même par la poste)
depuis bientôt dix ans pour une prise de conscience, laquelle fait
forcément surgir les ressorts encore intacts souvent qui doivent être
tendus.
L'effet d'annonce a été parfait, exceptionnel, correspondant
très bien au texte. Votre entretien dans le Monde, particulièrement
précis et vibrant. Succès tel que le premier tirage a été épuisé en
moins d'une semaine.
C'est la suite, maintenant, qui importe.
Il apparaît que votre adresse est immédiatement comprise des
incroyants ou des indifférents parce que vous vous posez en citoyens,
préoccupés de notre avenir commun. Et il apparaît tout autant que
beaucoup de fidèles pratiquants dans notre Eglise de France sont de plus
en plus éloignés d'une entrée en eux-mêmes et d'un dialogue avec tous,
librement et sans a priori, s'il s'agit du politique. Considérant la
politique, avec autant de simplisme que de conviction, comme un mal et
une erreur, ne la distinguant pas, précisément, du politique, beaucoup
se sentent en état de siège face à des gouvernements considérés comme
illégitimes : la Manif.pour tous et les combattants de la bio-éthique,
quand ce n'est pas une analyse anti-Islam sommaire. Autrement dit,
l'engagement et la réflexion - selon ce que votre adresse inspire,
suggère et attend - n'est pas, actuellement, immédiat. Et le clergé -
qui n'a jamais été formé jusqu'à présent, au moins en tant que clergé -
au discernement pratique du politique et de son bien-fondé, ne semble
pas s'engager à faire s'engager. Je ne sais si cette sensation que j'ai
dans les paroisses de l'est du Morbihan (la Bretagne du sud) est trop
pessimiste ou subjective, ou si elle peut être la tendance nationale.
Se saisir du politique et y contribuer est nouveau, c'est accueilli avec
faveur et même admiration en dehors de l'Eglise, c'est reçu avec
contre-sens par la "classe politiqe" (l'exposé de François Fillon vous
remerciant de votre texte, en plaçant ses analyses et ses projets comme
démonstration que lui-même est déjà au point... le pharisien et le publicain au Temple), c'est craint parmi les fidèles et dans le clergé.
Je vais tenter pour ma part de susciter des réunions de lecture
puis de commentaire et mises en perspective, soit dans les paroisses
que je connais, soit erga omnes dans des enceintes publiques.
Voici d'ailleurs mes notes de lecture, développant vos paragraphes ou dialoguant avec eux.
Il me semble que - comme en politique, surtout internationale -
un "comité de suivi" au sein de votre Conseil permanent serait
nécessaire pour
1° recueillir les échos retour de la diffusion de votre adresse
: échos de presse, mais surtout échos selon la vie de chaque diocèse
2° zéler les diocèses pour qu'ils pressent les paroisses les
composant afin que le texte soit réfléchi à plusieurs, commenté et sorte
aussi des enceintes exclusivement catholiques
3° porter cette urgence et ce souci à divers responsables : les
autorités religieuses dans des fois qui nous sont soeurs, l'Islam,
l'Eglise réformée, le judaïsme. Cela peut se faire à la base dans chaque
diocèse, mais aussi par vous-même - les chefs politiques, syndicaux et
des groupements patronaux.
Naturellement, fils de France, elle-même fille aînée de
l'Eglise, je suis, Monseigneur, mon Père, à votre disposition, comme à
celle de "mon" évêque, l'évêque de Vannes.
Recevez, mon Père, l'hommage et l'assurance de mes sentiments
filiaux et fraternels, et de nouveau l'expression de mon admiration pour
le moment et le contenu de votre adresse.
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