Hier
Un peu avant midi, la chambre funéraire à Muzillac. Sept femmes, dont une nettement plus jeune, assises, s’entretiennent autour du gisant. Après m’être recueilli et avoir photographié notre cher frère, le Père Zacharie, je les interroge. Trois mois seulement échangés avec lui il y a six semaines, mais le choc, l’onde de choc de sa mort, mercredi. Peuvent-elles me parler de lui. C’est alors l’hymne de l’Afrique, l’hymne de Dieu, de l’Afrique et de leurs prêtres. L’Europe a porté au reste du monde le pire et le meilleur est sans doute l’évangélisation, l’évangile et voici qu’en retour nous sommes gratifiés et aidés à nous sauver. La conversation, quand j’arrivais et dont elles ont craint que j’en sois fâché, portait sur les relations familiales étroites en Afrique alors que chez nous, arrivée d’une sœur, perte du nièce,. La première témoigne, elle nous avait accueillis tous les trois pour le parcours Alpha, ou bien étions-nous à la même table, Thérèse. Le groupe qu’animait Zacharie, échange et lecture d’évangile, saint Luc, avec lui, une fois par mois. En deux ans, pas la moitié, la préparation et le soin qu’il y mettait mais surtout son observation constante : parlez lentement, je n’ai pas compris, et puis écouter, pas autant de choses à faire, l’essentiel. L’expérience, pas identifiée ainsi mais… celle de Marthe et de Marie. Mouvement donc de femmes, l’évangile mais aussi leur vie. Je demande : et en couple, prier en couple, l’évangile. Thérèse répond qu’elles sont quatre dont trois veuves et une divorcée ; La mort : l’amour continue, il se passe des choses, et il n’y a plus d’obstacle. Une autre, que je sollicite pour sa physionomie : sa jovialité, au Père Zacharie. Un homme joyeux, et gai. Uine autre encore l’accueil, et aussi le plaisir de la vie, après nos échanges mensuels, un petit quelque chose, il y avait plaisir. Encore une autre, cette fois à ma gauche, l’expérience du silence qui est encore plus une présence que la parole. Il y tenait beaucoup. Sa bienveillance, l’accueil par la bienveillance. Elle est profonde, donne la sensation d’une vie entière exprimée par ce qu’elle dit. La plus jeune, deux filles au moins, l’une baptisée par le Père Zacharie en milieu d’année. Il est venue nous voir, il ne partait plus. Il demande et fait répéter le prénom, est-ce ainsi qu’on dit, et est-ce bien. Toujours : ne pas parler trop vite. Le baptême proprement dit, le parrain verse quelques gouttes sur le front : non, versez tout. Thérèse reprend : le baptême par immersion, un ou une adulte à Pâques, l’installation qui fut physiquement difficile à réaliser. J’ai rappelé le geste si lent et tellement significatif de la divine et mystérieuse présence, de ce prêtre africain étudiant à Strasbourg qui célébrait à Ambon, au temps de notre cher Denis M. : l’élévation donc très lente, très lente et durable. Rappelé aussi : vous êtes la lumière du monde, homélie à la cathédrale. Encore un de nos prêtres africains : il commence, s’interrompt, va à l’autel, se saisit d’un des très gros cierge, le place sur sa tête, tout allumé, donne l’homélie et conduit la récitation du Credo, avec toujours la lumière du monde sur le haut du crâne… retour à la jeune famille de la nouvelle baptisée. Peu auparavant, décès de la grand-mère, mère de celle qui parle : les entretiens et la préparation avec la messe de funérailles. J’ai écouté comme jamais, ne retenant pas tout, mais vivant ce que nous donne celui qui vient de mourir, et puis – attendu pour le déjeuner par mes aimées – dû partir mais j’ai embrassé chacune de ces dames, les remercier de ce qu’elles venaient de me transmettre.
Hier soir, le souper de Beaucaire, mais au Boucanier de Port-Navalo. Pas tant un diagnostic de la France
actuellement, pas
non plus habituelles tirades sur les Français refusant les
réformes, pas même
sur celles-ci nécessaires dans leur contenu ou déjà
légiférées par l’actuel
mandat présidentiel, mais entre cousins, la discussion sur
Emmanuel MACRON.
Nous sommes cinq, plus Marguerite. L’ancien ministre, que je
considère commpe
un bateleur, intéresse positivement, trois d’entre nous,
parce qu’il tranche
sur le reste et sur le paysage. Mais aucun ne semble décidé
à voter pour lui.
Pierre le voit s’organiser avec l’U.D.I. mais lui-même
souhaite JUPPE, moi je
ne le vois qu’à la banque, d’où il arrivait quand il fut
nommé à l’Elysée en
début de quinquennat. Je conteste une compatibilité entre
l’impétrant et l’U.D.F.
résiduelle dans sa partie démocrate-chrétienne. Quant à
JUPPE, j’en ai autant
une pratique personnelle très défavorable, que je sois en
place ou en disgrâce,
que la mémoire des « événements » de Novembre-Décembre 1995…
Jusqu’il
y a peu je voyais Marine LE PEN l’emportait et pas que ce
soit une catastrophe.
Au contraire, un progrès de la démocratie et du contrôle des
pouvoirs publics
constitutionnels, puisque la nouvelle présidente ne peut
avoir de majorité à
l’Assemblée, faute de temps pour changer le mode de scrutin,
mais même avec la
représentation proportionnelle, je ne crois pas qu’elle
l’emporterait jamais.
Donc, un gouvernement formé par consensus des partis
représentés au Parlement
et impose à l’Elysée. On pourra s’opposer à une, deux, trois
formules, mais
pas davantage. Démission, et l’on est débarrassé.
Acceptation ? contrôle
mutuel et entrée du Front national dans le jeu politique
classique. Je ne crois
plus à la victoire de Marine LE PEN et en revanche, je crois
bine que FH sera
réélu, quelle que soit son impopularité. Le commentaire et
les éphémérides de
notre vie nationale montrent une montée des périls en tous
genres :
économiques, sociaux, sécuritaires. Y ajouter les risques
d’une personnalité
sans aucune expérience du pouvoir et au programme
potentiellement totalitaire
et certainement isolationniste est peu stimulant. FH est
parvenu jusqu’à
présent à satisfaire aux formes actuellement à la mode : les
primaires,
sans s’engager en rien puisqu’il n’est pas candidat proclamé
à ces primaires.
En revanche, il a obtenu un calendrier très favorable
puisqu’il saura qui
affronter à droite. A gauche, il n’a manifestement aucun
compétiteur de poids.
Et le jeu de MACRON, changeant tout l’échiquier et toutes
les règles, je n’y
crois pas. Que quelqu’un ayant un très grand passé joue
solo, fort de son
prestige, la France en a l’habitude, mais actuellement elle
n’en a pas le héros.
A aucun moment, il n’y a eu de pitié pour ce que nous
devenons ni d’analyse des
éléments de notre décrépitude, la conversation portant
surtout – en dehors du
« cas Macron » – sur l’éducation nationale, les carrières de
diplômés, selon les recherches de Jean-François et
l’expérience de ma chère
femme.s échanges montrent surtout que la
politique n’a
plus prise sur ce qu’il y a à gérer, elle produit du
spectacle, elle fait
disparaître toute responsabilité tant chez les dirigeants
que dans le peuple
qui tolère cette perte de conscience du devoir d’état.
09 heures 13 + Le temps est à la pluie. Nous
accueillerons Zoé, sa mère et sa petite sœur pour la messe
de onze heures. Prier… [1]
21 heures 54 + La messe paroissiale, en
trinité, et Zoé,
partageant pour leur deuxième année d’internat, la même
chambre à Saint-François-Xavier,
sa mère et sa petite sœur sont là. Etapes et fidélités vers
le baptême :
nous allons les vivre ensemble, mais mûe de sa mère qui
vient de trouver un
compagnon, en substitut d’un mari parti et d’un père
évanescent. Un jeune
Marocain, de quinze ans son cadet, sans permis de séjour,
musulman. Le coup de
foudre, la conscience d’elle cependant que par respect de la
dignité de cet
homme, elle ne peut l’entretenir, il lui faut donc une
promesse d’embauche, il
a des capacités diplômées en métallerie. Les deux religions,
ils en discutent,
évidemment le même Dieu. Elle le conduit à la mosquée le
vendredi et vient donc
avec ses filles à la messe le dimanche, sensible à notre
accueil tous trois,
pour elle et et ses filles, elle est en confiance avec nous.
Mais quelle
complexité ! et évidemment un tableau que les tiers auront
de la peine à
comprendre. Mise en évidence des deux lacunes qui
particularisent la
pénétration des immigrants et des musulmans. Nos églises se
vident, même si
pour notre paroisse à quatre clochers, elles sont pleines ;
le recul de la
pratique et de la foi chrétiennes, un vide donnant de
l’espace à la pitié sinon
à la conquête musulmanes, tant redoutées et dénoncées
maintenant par les
intégristes chrétiens. Et… les hommes volages, les foyers en
décomposition et
recomposition les femmes trouvent donc leur compagnon, des
égards et de la
tendresse, de l’amour ailleurs que dans leur nationalité et
leur milieu
naturel. Maintenant, le synchrétisme ? non. Mais la tendance
sera forte
avec les années si ce nouveau couple tient. Je ne l’apprends
qu’à la sortie de
la messe.
Lecture des textes, le sens psychologique aigü
du livre de la
Sagesse, l’indifférence au statut social mais la fraternité
et l’égalité entre
tous les hommes (l’exhortation de Paul à Philémon ayant à
ré-accueilir en frère
son esclave Onésime, comme s’il s’agissait du retour de Paul
lui-même), enfin
l’exigence extrême de la page d’évangile. Celui d’entre vous qui ne renonce pas à
tout ce qui lui
appartient ne peut pas être mon disciple. … Celui qui ne porte
pas sa croix
pour marcher à ma suite ne peut pas être mon disciple… Ce à quoi le Christ nous appelle c’est au choix, à
la préférence, à la
hiérarchie. C’est au fond un mouvement aussi, devant Dieu,
aussi logique que la
prévoyance du bâtisseur ou le chef de guerre évaluant ses
forces et celles de
l’adversaire. Mouvement de lucidité, de réalisme : l’homme
devant Dieu reconnaît
son Créateur. Et qui aurait connu ta volonté ; si tu
n’avais do,nné
la Sagesse et envoyé d’en haut ton Esprit Saint ? Nous ne sommes pas conviés à l’impossible, mais à la
mise en œuvre de
toutes nos facultés. La réalité n’est pas celle de nos
perceptions, de nos
sens. Les réflexions des mortels sont incertaines, et
nos pensées,
instables ; car un corps périssable appesantit notre âme, mais l’Esprit Saint, le
Christ parmi nous
tel que le rapportent les évangiles nous font apprendre la
volonté divine. Et
c’est cette lucidité surnaturelle qui nous fait opérer ces
choix si radicaux.
La transformation de nos infirmités, l’élévation de notre
liberté jusqu’à
l’amour et à la communion bien indiquées par Paul traitant
de l’esclavage qui
n’entame pas, par lui-même, l’égalité native des hommes
entre eux, et qui au
contraire incline à la fraternité et à la communion. Que
nos cœurs
pénètrent la sagesse,
conclut le
psalmiste. – A reprendre les textes avant de
les quitter, il m’apparaît
bien que ces renoncements, ces choix, celui d’Onésime
reconsidérant son esclave
(il ne lui est pas demandé de l’émanciper, mais
spirituellement, mentalement
bien davantage qu’un changement de statut) sont le véritable
aboutissement d’une
vie : la tour bâtie, la paix obtenue selon les deux
paraboles dont le
dénouement nous appartient : au choix.
[1]
- Sagesse IX 13 à 18 ; psaume XC ; Paul à Philémon 9
à 17 ;
évangile selon saint Luc XIV 25 à 33
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