Dimanche 26 Juin 2016
Le visage de ma femme à mon éveil,
tourné vers moi, je n’en vois qu’en second plan une part du front, le trait de
la paupière close, et entre elle et moi, sa main, les doigts légèrement pliés,
souples, libres. J’entends son souffle. Le jour va être chaud, il est déjà
lumineux. Depuis plusieurs jours, je ressens – et m’en émerveille – que l’amour
est indicible et sans cause, la beauté, le sexe, l’affinité, les circonstances,
la durée, les éclats, nos comportements et impatiences, nos façons de
sollicitudes et de tendresse ne l’expliquent pas, ne le décrivent pas. Il est
intimement nous, il est manifestement notre élan, le vrai, le plus moteur et
protecteur de notre vie, il n’est ni instinct ni intelligence : il est
donné, en quoi nous sommes – effectivement – à l’image de notre Créateur. Notre
morphologie, le visage, la bouche, les yeux, les voies respiratoires, les
conduits digestifs, tout le règne des mammifères et de même modèle, la joie,
l’amour, la peur, l’attachement, nos animaux, contemporains de vie, les
éprouvent et en sont faits comme nous. Hier soir, la suite du débroussaillage,
les giclées de sève des ronces, elles respirent et vivent, les hortensias qui
ont survécu plusieurs années sous la broussaille, mes pieds de vigne à soigner,
à ériger cette année, les deux arbrisseaux repérés en vente jeudi et à planter,
je le souhaite, ici, de la vigne aussi. Les figuiers à secourir, les palmiers à
dégager. L’attente même des choses, une bibliothèque à ranger, à dépoussiérer
et si je la veux pour que ma fille se l’approprie en plus de ce qu’elle aura
constitué elle-même à la suite de ses livres et romans d’enfance (le règne
contemporain d’Harry Potter…), il faut qu’elle m’ait vu les lire.
Bienheureux anonymat des grandes
initiatives. Ce ne sera donc pas demain soir une proposition, ou une réflexion
franco-allemande. Même la réconciliation est devenue poussiéreuse. Si quelque
chose naît ces jours-ci, ces semaines-ci, ce sera vraiment le fruit et
l’expression d’une pensée commune, une véritable renaissance de l’opinion
publique en faveur de l’évidence et de notre seule solution, notre seul
remède : l’entreprise européenne, mais à reprendre en totalité. La
démocratie, je le répète et le ressasse, mais autant l’approfondissement des
intégrations, que la culture des libertés et des choix. Bonne application de ce
mouvement à deux faces : la fiscalité. Les recettes, la levée des impôts,
peut-être même les administrations et dispositifs de collecte seraient uniformes, mais en revanche, la plus
grande partie des affectations de ces ressources seraient à la discrétion des
choix nationaux et locaux, ceux des Etats, des collectivités et même des
associations. A terme, le même processus pour le social. La source identique,
analogue mais les affectations selon les génies de chacun. Evidence que la
France avait su faire de ses propres astreintes une occasion européenne :
ainsi le financement du développement africain au moment de notre décolonisation
avait été en bonne partie européanisé. Comment a-t-on pu depuis l’été de 1954
si peu avancer en armements européens ? comment parle-t-on en
« bilatéral » avec l’Angleterre depuis trente ans, de porte-avions
ensemble, et n‘en avoir fait aucun ? comment les deux Mistral qu’on ne
pouvait plus livrer à une Russie prédatrice (la Russie de POUTINE, ou plutôt la
Russie que nous avons donné aux plus mauvais héritages du système soviétique)
n’ont-ils pas été proposés à l’Union européenne en tant que telle pour
constituer le début d’une flotte commune aux Etats-membres ? La Belgique
et son année ou plus sans gouvernement… l’Espagne qui vote en ce moment, elle
aussi sans gouvernement… les révoltes aussi bien contre des flux migratoires
incompris que contre des austérités sans fruit… Les circonstances, la situation
européenne, l’instant et le siècle réclament ensemble l’imagination commune,
mais les développements courants demandent tout autant leur raison et une
direction, une orientation. Une pensée collective certes, mais il faut des
inspirateurs, il faut un effort d’intelligence, il faut des personnalités
libres et travailleuses. Les gouvernements ne sont plus que des communicants,
et ceux qui aspirent à en faire partie ou à les constituer, sont de même bois :
cela crevait les yeux hier soir au défilé de ces chefs de partis, montant au
perron de l’Elysée, la plupart physiquement en ruines.
Prier… vous avez été appelés à la liberté, mais que cette
liberté ne soit pas un prétexte pour votre égoïsme ; au contraire,
mettez-vous, par amour, au service les uns des autres. Merveilleux et immédiat saint Paul. Expérience presque quotidienne de
l’adéquation des textes proposés par l’Eglise à nos situations personnelles et
collectives. Cette rencontre du texte et du moment répond à ces deux dialogues
sur la foi, son mouvement et son contenu. J... cherchant à faire parler
Marguerite : qu’est-ce qui t’intéresse dans la vie, et les réponses de
notre fille, apparemment factuelles, concrètes, mettant en premier ce qui est
ludique, ou plus précisément encore ce qu’elle qu’elle construit elle-même par
plaisir et par émergence… mais en fait les réponses, plus creusées étaient des
interrogations, autant d’espérances. A-t-Il existé. Aller à Dieu en se posant
la question historique du Christ, quel chemin plus vrai. L’humanité a fait
l’expérience de Dieu, et sa rencontre par l’Histoire, et non par la nature ou
la simple contemplation du travail de l’horloger divin. Et hier S... :
je n’ai pas votre foi, sa solitude criante, sa souffrance tant physique
qu’affective. La foi n’est pas un soutien, l’espérance n’est pas une
illumination : de même que Dieu appelant Elie à L’entrevoir, à Le
percevoir n’était pas dans le déchainement des éléments. Les vertus théologales
sont des éléments, des signes donnés de la présence de Dieu en nous. Prier pour
que cette habitation, ou plutôt cette sensibilité à la présence divine se
répande en lui, en tous, que la perception de Dieu et l’impératif de Sa
suggestion : trouver en nous et par Lui le ressort de notre vie et le
salut. Va, ta foi t’a sauvé. Va, que tout se passe selon ta foi. La vie est une rencontre entre Dieu et
l’homme, entre les humains, entre tout le vivant et tout le vivant. La
fécondation, l’étreinte, la pollinisation.
Si vous vous mordez et vous dévorez les uns les autres, prenez
garde : vous allez vous détruire les uns les autres. [1]
Elie et Elisée, l’immédiateté de la vocation, le truchement de l’élu, car c’est
Dieu qui appelle Elisée quand tombe vers lui le manteau du Prophète, le manteau
qu’une ultime fois celui-ci jette du char qui l’emporte. Le Christ tel que
doivent l’entendre ceux qui Le rencontrent et sont allés à Lui, d’abord
superficiellement… Je te suivrai partout où tu iras… Réponse décourageante ? ou concrète ? aller ? mais
nulle part ou la totale errance, qui est alors disponibilité : le Fils
de l’homme n’a pas d’endroit où reposer la tête… Suis-moi… protestation, délais… Toi pars, et annonce le règne de Dieu. N’envie ni ne demande la foi d’un autre,
d’un de tes semblables en misère, cher S.... Sache et répands à ton tour, et
seulement que çà y est déjà, le règne de Dieu. L’ambition et le constat du bonheur,
aucune recette que la sensibilité au fait et au présent. Le fait de
Dieu, le présent de Dieu. Je te suivrai, Seigneur, mais laisse d’abord
faire mes adieux… Nicole et ensemble le
ratage de nos premières fiançailles à chacun : elle voulait faire ses
adieux à tous… cette expression naguère : enterrer sa vie de garçon. Mais
au contraire, c’était entrer dans la vie. Il y a cinquante ans. Quiconque
met la main à la charrue, puis regarde en arrière, n’est pas fait pour le
royaume de Dieu. Dialogue des dévouements
enthousiastes : Jacques et Jean, candidats aux meilleures places dans ce
royaume… dixit leur mère. Veux-tu que nous ordonnions qu’un feu tombe du
ciel et les détruise ? La même
incohérence que celle de Pierre au mont de la Transfiguration. Mais Jésus
se retournant, les réprimanda. La
compagnie du Seigneur, la marche avec Lui. Où va-t-Il ? et non pas, où
dois-je – moi – aller ? le discernement (Ignace et la formation jésuite…).
Il se dirigeait vers Jérusalem. La
Passion, la Rédemption¸la Résurrection, l’Eucharistie en testament et gage. Les
tendances de la chair s’opposent à l’Esprit, et les tendances de l’Esprit
s’opposent à la chair. En effet, il y a là une affrontement qui vous empêche de
faire tout ce que vous voudriez. Mais si vous vous laissez conduire par
l’Esprit, vous n’êtes pas soumis à la Loi.
Appel de Marguerite : venir la
reprendre chez son amie pour onze heures, alacrité et bonheur, ses vingt-quatre
heures en bande pour l’anniversaire d’Emma. Evocation d’un singulier
dessert : des schamallows (orthographe…) grillés. Etre à l’heure
prescrite.
Et si nous avons si peur d’accueillir
les autres, l’autre : la question des migrants, des arrivants et des
réfugiés devenue la question d’Europe, c’est que nous sommes nous-mêmes si peu
constitués. Nos maturités semi-manquées pour chacune de nos vies, notre Union
européenne si peu communautaire, si peu consciente de ses devoirs de solidarité
et d’invention vis-à-vis d’elle-même et des siens, comment s’ouvrir aux
arrivants, et s’ouvrir à quoi ? donner quoi ? si nous sommes
tellement peu productifs ? L’Eglise sait se convoquer en concile… les
Européens ? leurs dirigeants nationaux sont si peu reluisants. De bonne
volonté sans doute mais avec tout le cynisme des parvenus. Il est si difficile
aujourd’hui d’ « arriver ». Alors, le miracle ? Peut-être.
Les circonstances nous l’imposent, et le Brexit n’en est qu’une parmi d’autres
et sans doute la plus petite, la moins signifiante puisqu’elle nous dit ce
qu’est un entrainement vers le bas. Mais la manière dont les affaires d’Europe
ont été conduites depuis Maastricht n’était-elle pas déjà cette peur de la
novation et d’un avenir voulu. Les gargarismes des des interminables
communiqués européens, les agenda ceci et cela… au rebours du 9 Mai 1950 ou du
traité de l’Elysée… l’étreinte de DG à ADENAUER, la main de FM cherchant celle
de KOHL et la trouvant. Aujourd’hui, les causeries à la presse avec pupitres de
chefs d’orchestre, en parallèles. Communiquer… mais ni partition ni musique.
Berlin, demain, la probabilité de se
décider à refuser aux Britanniques tout délai. Alors que la question est
autre : que faire pour devenir vraiment l’Europe, Anglais compris, et
ainsi contribuer à changer le monde, offrir au monde un repère autre que les
noyades en Méditerranée, les camps, les ventes d’armes. En trente ans, depuis
Fontainebleau et « my money back », nous n’avons pas su convertir les
Anglais à un autre appétit. Là est le signe de notre pauvreté.
Hier
20 heures 25 + Des
« nouvelles » en allant d’une chaîne à l’autre. La soirée de lundi à
Berlin n’est pas à deux mais RIENZI et le président du Conseil européen, le
Polonais TUKCKS ou quelque chose comme cela, sont également invités. Dominance
formelle de l’Allemagne à moins qu’elle ait la présidence semestrielle. Défilé
des chefs de parti, Marine LE PEN compris, à l’Elysée. FH sort pour accueillir
NS qui vient seul. Grossi, montant avec quelque difficulté apparente les
marches qu’il a connues en maître, veston ouvert puis pas vraiment refermé pour
une poignée de main avec FH : ils sont liés l’un à l’autre au lieu d’être
de profil pour les photographes et se regarder l’un l’autre. Le referendum
réclamé par le Front national est refusé, MELENCHON donne l’alternative
évidente : ou changer l’Europe ou la quitter, mais y a-t-il une
alternative, il faut la changer. MERKEL en recul : les gens ne savent pas
ce que l’Europe fait pour eux. Assurances répétées par le gouverneur de la
Banque de France, par SAPIN, par MACRON : le Brexit n’entame pas les
prémisses de la croissance. En revanche, le chômage est reparti à la hausse. De
façon maladroite, CAMBADELIS, extraordinairement grossi, et AYRAULT inchangé,
réclament le départ immédiat de CAMERON et estiment que ce n’est plus à la
Grande-Bretagne de fixer les calendriers européens. Curieusement, BAN KI MOON
serait venu à Paris, et sans doute fait un tour des grandes capitales
européennes. Grotesque, le commentaire ou la précision : le Brexit
n’empêche pas la Grande-Bretagne de continuer de travailler avec les Nations
Unies.
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