Silence et temps laiteux, humide. Cette nuit, dernier
croissant tombant à l’horizon quand nous sommes rentrés du gala de danse, 2ème
édition, de notre chère fille, celle-ci très à l’aise pour les claquette, race,
joliesse, évidemment je la distingue, téléobjectif. Deux gros astres bien en
conjonction avec Séléné, ciel profond de cette nuit-là. – Danse, étude du corps, étude des membres du
corps, les ensembles, autre étude, la simultanéité, le rythme, une parabole de
la beauté qui n’est ni groupe, ni analogie, ni copie mutuelle, sensation non d’une
addition mais d’un autre être. Aux jumelles, ce sont les visages qui disent,
crient l’effort. Ou bien le sourire, qui est l’intense reflet de l’intérieur de
ce qui est bien plus le corps, plus que l’âme, l’entier d’‘une personne donné à
un exercice particulier, qui se sourit à elle-même, à l’éternité, à cette
surrection de soi en forme de beauté suprême. Silhouette que je trouve
instantanément, celle de la plus jolie, de la plus belle, parmi cinq ou dix ou
vingt. Et toujours, toujours le même type de femme, certain profil, certain
sourire offert à l’éternité. Ma vie a peu d’images, mais elles sont parentes,
splendides. Elles disent la même chose, le bonheur, la beauté est la forme
physique du bonheur, en tout cas la forme physique d’une affirmation décisive,
le bonheur existe. Donc, la marche tranquille, paisible à l’éternité. – Lens saints…
celui de mon enfance, Louis de GONZAGUE, le gratin de l’époque, la sienne,
celle de notre collège des »Bons Pères », sa réponse à la question,
vous allez mourir dans cinq minutes, que faites-vous ? Je continue de
jouer à la balle. Ceux de maintenant, que de martyrs dans nos deux siècles, ce
prêtre mexicain. Et nous avons l’honneur de recevoir le martyre des chrétiens d’Orient.
Nous y restons deux fois insensibles. Pas plus d’effort pour les sauver qu’en
1944-1945 pour libérer par anticipation les camps de la mort (stratégie des
Allemands que ces camps, mais pas celle des Alliés). Et ce tribut à nos frères
d’Asie proche ? nous ne le payons pas en accueillant nombre pour nombre
ces migrants. Je suis hanté par notre déshonneur, manifesté, assumé depuis qu’en
Juillet 2010, nous avons publiquement assumé le traitement infligé aux Roms et
aux migrants. Les boucs émissaires, les expressions de notre peur de « petit
blanc » fou d’angoisse d’être « submergés ». Nous laissons
pécher la France en notre nom. Le plus mauvais de nos âmes, parfaitement
indigne de celle que des générations et notre mariage avec l’Histoire ont manifesté
au monde et à nous-mêmes, nous gouverne depuis quelques décennies. Pis que des remugles,
la trahison, voulue par certains, et pour beaucoup de nous l‘inconscience par
indifférence. Il n’y a pas de cris, que ceux des victimes.
La tempête apaisée. La submersion et son angoisse. Texte
médité mercredi dernier à six ou sept… Dieu et la mer, Dieu et nos angoisses,
Dieu et nos pertes de pied.. Gala hier, c’est le pied qui fait le sol tandis
que les jambes nues et tendues, doucement hèlent le vent figuré par la musique
qui leur donne rythme et ensemble. Un sublime, délicieux remuement de jambes,
une vie primordiale, anonyme, claire et douce, les corps oubliés, les visages
impossibles, les silhouettes disparues, absorbées par l’horizontal du sol.
Et je dis (Dieu commandant à la mer,
à notre psychologie, à nos empêtrements) : « Tu viendra jusqu’ici !
Tu n’iras pas plus loin, ici s’arrêtera l’orgueil de tes flots ». Le commandement d’un seul : l’amour
du Christ nous saisit quand nous pensons qu’un seul est mort pour tous, et qu’ainsi
tous ont passé par la mort. … Un monde ancien s’en est allé, un monde nouveau
est déjà né…. Dans leur angoisse, ils ont crié vers le Seigneur, et lui les
a tirés de la détresse, réduisant la tempête au silence, faisant taire les vagues.
Prophétie accomplie dans le détail… Il menaça le vent et dit à la mer : « Silence,
tais-toi ! ». Le vent tomba, et il se fit un grand calme. Evangile
très scénique. Jésus ayant mis fin à l‘exercive d’une journée épuisante d’enseignement :
passons sur l’autre rive, laisse l’initiative
aux disciples. Ils emmenèrent Jésus, comme il était, dans la barque, et d’autres
barques l’accompagnaient. Lui, pas les
disciples. Lui, comme un paquet, inerte : lui dormait sur le coussin à
l’arrière. C’est à notre demande qu’il
prend l’initiative, relaie notre impuissance, nous sauve. Maître, nous sommes
perdus ; cela ne te fait rien ? La
souveraineté de Dieu, autant dans le commandement que dans cette indifférence à
la catastrophe menaçante, physique. Dialogue sans réponse… les deux questions,
celle de Dieu : n’avez-vous pas encore la foi ? et celle des disciples, passé du naturel, la
fatigue, la tempête, l’incapacité de faire face par eux-mêmes pourtant dans
leur métier, leur élément, et qui découvrent le surnaturel, sans l’élucider
pourtant : qui est-il donc, celui-ci, pour que même le vent et la mer
lui obéissent ? [1]Jésus familier, Jésus enseignant et Jésus
maintenant inconnu. Parce qu’Il les sauve ? parce qu’Il nous sauve ?
Inconnu, et proche, même alors que lui dormait sur le coussin à l’arrière. Nos deux peurs, le physique, les éléments,
la nature, ce dont nous sommes faits et ce qui est fait, peur de la création et
du vivant, de la vie… nous sommes perdus. Peur du spirituel, les disciples ont obtenu ce qu’ils voulaient, le
salut… pourtant ils sont saisis d’une grande crainte. Ce que Matthieu ne notait pas dans la tempête, il le relève devant
cette irruption du mystère : qui est-il donc ? l’intelligence et le mental dépassés, cette
fois submergés par le miracle, par une personnalité dépassant tout, et
dépassant bien plus que nous-mêmes et les éléments.
[1] - Job XXXVIII 1 à 11 passim ; psaume CVII ; 2ème lettre
de Paul aux Corinthiens V 14 à 17 ; évangile selon saint Marc IV 35 à 41
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