Anselme
naît à Aoste, en Piémont, en 1033 ou 1034. Sa pieuse mère Ermengarde lui
apprit, de bonne heure, à aimer Dieu et la Très Sainte Vierge ; mais, privé
du soutien maternel vers l’âge de quinze ans, poursuivi dans sa vocation
religieuse par le père, Gandolfo, mondain et intraitable, il se laissa
entraîner par le monde.
Las
d’être la victime de son père, il s’enfuit en France, et se fixa comme
étudiant à l’abbaye du Bec, en Normandie. Là il dit à Lanfranc, chef de cette
célèbre école : « Trois chemins me sont ouverts : être religieux au Bec, vivre en
ermite, ou rester dans le monde pour soulager les pauvres avec mes richesses
: parlez, je vous obéis. » Lanfranc se prononça pour la vie
religieuse. Ce jour-là, l’abbaye du Bec fit la plus brillante de ses
conquêtes. Anselme avait vingt-sept ans.
Quand
bientôt Lanfranc prit possession du siège archiépiscopal de Cantorbéry, il
fut élu prieur de l’abbaye, malgré toutes ses résistances ; il était déjà non
seulement un savant, mais un saint. De prieur, il devint abbé, et dut encore
accepter par force ce fardeau, dont lui seul se croyait indigne.
Sa
vertu croissait avec la grandeur de ses charges. Le temps que lui laissait libre
la conduite du couvent, il le passait dans l’étude de l’Écriture Sainte et la
composition d’ouvrages pieux ou philosophiques. La prière toutefois passait
avant tout le reste ; l’aube le retrouvait fréquemment à genoux. Un jour le
frère excitateur, allant réveiller ses frères pour le chant des Matines,
aperçut dans la salle du chapitre, une vive lumière ; c’était le saint abbé
en prière, environné d’une auréole de feu.
Forcé
par la voix du Ciel, le roi d’Angleterre, Guillaume, le nomme archevêque de Cantorbéry
; Anselme refuse obstinément ; mais, malgré lui, il est porté en triomphe sur
le trône des Pontifes. Huit mois après, il n’était pas sacré ; c’est qu’il
exigeait comme condition la restitution des biens enlevés par le roi à
l’Église de Cantorbéry. Le roi promit
mais il manqua à sa parole, et dès lors Anselme, inébranlable dans le
maintien de ses droits, ne fut plus qu’un grand persécuté.
Obligé
de fuir, il traversa triomphalement la France, et alla visiter le Pape, qui
le proclama hautement « héros
de doctrine et de vertu ; intrépide dans les combats de la foi. »
Quand Anselme apprit la mort tragique de Guillaume dans une partie de chasse,
il s’écria en fondant en larmes : « Hélas ! J’eusse donné ma vie pour lui épargner
cette mort terrible ! » Anselme put revenir en Angleterre,
vivre quelques années en paix sur son siège, et il vit refleurir la religion
dans son Église.
Il meurt le 21 avril 1109 à
Cantorbéry où il attend la résurrection dans la célèbre cathédrale.
Pour approfondir, lire la catéchèse du pape Benoît
XVI :
Sources principales : viechretienne.catholique.org/ ; vatican.va (« Rév. x gpm »). |
SANT ANSELMO DAOSTA
VESCOVO E DOTTORE DELLA CHIESA / C
BENOÎT XVI
AUDIENCE GÉNÉRALE
Mercredi
23 septembre 2009
Saint Anselme
Chers frères et sœurs,
A Rome, sur la colline de
l'Aventin, se trouve l'abbaye bénédictine de Saint-Anselme. En tant que siège
d'un institut d'études supérieures et de l'abbé primat des Bénédictins
confédérés, c'est un lieu qui unit la prière, l'étude et le gouvernement, qui
sont précisément les trois activités qui caractérisent la vie du saint auquel
elle est dédiée: Anselme d'Aoste, dont nous célébrons cette année le ix
centenaire de la mort. Les multiples initiatives, promues spécialement par le
diocèse d'Aoste pour cette heureuse occasion, ont souligné l'intérêt que continue
de susciter ce penseur médiéval. Il est connu également comme Anselme du Bec et
Anselme de Canterbury en raison des villes auxquelles il est lié. Qui est ce
personnage auquel trois localités, éloignées entre elles et situées dans trois
nations différentes - Italie, France, Angleterre - se sentent particulièrement
liées? Moine à la vie spirituelle intense, excellent éducateur de jeunes,
théologien possédant une extraordinaire capacité spéculative, sage homme de
gouvernement et défenseur intransigeant de la libertas Ecclesiae, de la
liberté de l'Eglise, Anselme est l'une des personnalités éminentes du
Moyen-âge, qui sut harmoniser toutes ces qualités grâce à une profonde
expérience mystique, qui en guida toujours la pensée et l'action.
Saint Anselme naquit en 1033
(ou au début de 1034), à Aoste, premier-né d'une famille noble. Son père était
un homme rude, dédié aux plaisirs de la vie et dépensant tous ses biens; sa
mère, en revanche, était une femme d'une conduite exemplaire et d'une profonde
religiosité (cf. Eadmero, Vita s. Anselmi, PL 159, col. 49). Ce fut elle
qui prit soin de la formation humaine et religieuse initiale de son fils,
qu'elle confia ensuite aux bénédictins d'un prieuré d'Aoste. Anselme qui,
enfant - comme l'écrit son biographe -, imaginait la demeure du bon Dieu entre
les cimes élevées et enneigées des Alpes, rêva une nuit d'être invité dans
cette demeure splendide par Dieu lui-même, qui s'entretint longuement et
aimablement avec lui, et à la fin, lui offrit à manger "un morceau de pain
très blanc" (ibid., col. 51). Ce rêve suscita en lui la conviction
d'être appelé à accomplir une haute mission. A l'âge de quinze ans, il demanda
à être admis dans l'ordre bénédictin, mais son père s'opposa de toute son
autorité et ne céda pas même lorsque son fils gravement malade, se sentant
proche de la mort, implora l'habit religieux comme suprême réconfort. Après la
guérison et la disparition prématurée de sa mère, Anselme traversa une période
de débauche morale: il négligea ses études et, emporté par les passions
terrestres, devint sourd à l'appel de Dieu. Il quitta le foyer familial et
commença à errer à travers la France à la recherche de nouvelles expériences.
Après trois ans, arrivé en Normandie, il se rendit à l'abbaye bénédictine du
Bec, attiré par la renommée de Lanfranc de Pavie, prieur du monastère. Ce fut
pour lui une rencontre providentielle et décisive pour le reste de sa vie. Sous
la direction de Lanfranc, Anselme reprit en effet avec vigueur ses études, et,
en peu de temps, devint non seulement l'élève préféré, mais également le
confident du maître. Sa vocation monastique se raviva et, après un examen
attentif, à l'âge de 27 ans, il entra dans l'Ordre monastique et fut ordonné
prêtre. L'ascèse et l'étude lui ouvrirent de nouveaux horizons, lui faisant
retrouver, à un degré bien plus élevé, la proximité avec Dieu qu'il avait eue
enfant.
Lorsqu'en 1063, Lanfranc
devint abbé de Caen, Anselme, après seulement trois ans de vie monastique, fut
nommé prieur du monastère du Bec et maître de l'école claustrale, révélant des
dons de brillant éducateur. Il n'aimait pas les méthodes autoritaires; il
comparait les jeunes à de petites plantes qui se développent mieux si elles ne
sont pas enfermées dans des serres et il leur accordait une "saine" liberté.
Il était très exigeant avec lui-même et avec les autres dans l'observance
monastique, mais plutôt que d'imposer la discipline il s'efforçait de la faire
suivre par la persuasion. A la mort de l'abbé Herluin, fondateur de l'abbaye du
Bec, Anselme fut élu à l'unanimité à sa succession: c'était en février
1079. Entretemps, de nombreux moines avaient été appelés à Canterbury pour
apporter aux frères d'outre-Manche le renouveau en cours sur le continent. Leur
œuvre fut bien acceptée, au point que Lanfranc de Pavie, abbé de Caen, devint
le nouvel archevêque de Canterbury et il demanda à Anselme de passer un certain
temps avec lui pour instruire les moines et l'aider dans la situation difficile
où se trouvait sa communauté ecclésiale après l'invasion des Normands. Le séjour
d'Anselme se révéla très fructueux; il gagna la sympathie et l'estime générale,
si bien qu'à la mort de Lanfranc, il fut choisi pour lui succéder sur le siège
archiépiscopal de Canterbury. Il reçut la consécration épiscopale solennelle en
décembre 1093.
Anselme s'engagea
immédiatement dans une lutte énergique pour la liberté de l'Eglise, soutenant
avec courage l'indépendance du pouvoir spirituel par rapport au pouvoir
temporel. Il défendit l'Eglise des ingérences indues des autorités politiques,
en particulier des rois Guillaume le Rouge et Henri I, trouvant
encouragement et appui chez le Pontife Romain, auquel Anselme démontra toujours
une adhésion courageuse et cordiale. Cette fidélité lui coûta également, en 1103, l'amertume de l'exil
de son siège de Canterbury. Et c'est seulement en 1106, lorsque le roi Henri I
renonça à la prétention de conférer les investitures ecclésiastiques, ainsi
qu'au prélèvement des taxes et à la confiscation des biens de l'Eglise,
qu'Anselme put revenir en Angleterre, accueilli dans la joie par le clergé et
par le peuple. Ainsi s'était heureusement conclue la longue lutte qu'il avait
menée avec les armes de la persévérance, de la fierté et de la bonté. Ce saint
archevêque qui suscitait une telle admiration autour de lui, où qu'il se rende,
consacra les dernières années de sa vie en particulier à la formation morale du
clergé et à la recherche intellectuelle sur des sujets théologiques. Il mourut
le 21 avril 1109, accompagné par les paroles de l'Evangile proclamé lors de la Messe
de ce jour: "Vous êtes, vous, ceux qui sont demeurés constamment
avec moi dans mes épreuves; et moi je dispose pour vous du Royaume comme mon
Père en a disposé pour moi: vous mangerez à ma table en mon Royaume"
(Lc 22, 28-30). Le songe de ce mystérieux banquet, qu'il avait fait
enfant tout au début de son chemin spirituel, trouvait ainsi sa réalisation.
Jésus, qui l'avait invité à s'asseoir à sa table, accueillit saint Anselme, à
sa mort, dans le royaume éternel du Père.
"Dieu, je t'en prie, je
veux te connaître, je veux t'aimer et pouvoir profiter de toi. Et si, en cette
vie, je ne suis pas pleinement capable de cela, que je puisse au moins
progresser chaque jour jusqu'à parvenir à la plénitude" (Proslogion,
chap. 14). Cette prière permet de comprendre l'âme mystique de ce grand saint
de l'époque médiévale, fondateur de la théologie scolastique, à qui la
tradition chrétienne a donné le titre de "Docteur Magnifique", car il
cultiva un intense désir d'approfondir les Mystères divins, tout en étant cependant
pleinement conscient que le chemin de recherche de Dieu n'est jamais terminé,
tout au moins sur cette terre. La clarté et la rigueur logique de sa pensée ont
toujours eu comme fin d'"élever l'esprit à la contemplation de Dieu"
(ibid., Proemium). Il affirme clairement que celui qui entend
faire de la théologie ne peut pas compter seulement sur son intelligence, mais
qu'il doit cultiver dans le même temps une profonde expérience de foi.
L'activité du théologien, selon saint Anselme, se développe ainsi en trois
stades: la foi, don gratuit de Dieu qu'il faut accueillir avec
humilité; l'expérience, qui consiste à incarner la parole de Dieu dans
sa propre existence quotidienne; et ensuite la véritable connaissance,
qui n'est jamais le fruit de raisonnements aseptisés, mais bien d'une intuition
contemplative. A ce propos, restent plus que jamais utiles également
aujourd'hui, pour une saine recherche théologique et pour quiconque désire
approfondir la vérité de la foi, ses paroles célèbres: "Je ne tente
pas, Seigneur, de pénétrer ta profondeur, car je ne peux pas, même de loin,
comparer avec elle mon intellect; mais je désire comprendre, au moins jusqu'à
un certain point, ta vérité, que mon cœur croit et aime. Je ne cherche pas, en
effet, à comprendre pour croire, mais je crois pour comprendre" (ibid.,
1).
* * *
J’accueille avec joie ce matin
les pèlerins francophones. Je salue en particulier les séminaristes
d’Aix-en-Provence, accompagnés de l’Archevêque, Mgr Feidt, les paroisses de
Baie Saint-Paul, au Canada, de Saint-Jacques à Paris, et de Rodez. A l’exemple
de saint Anselme, aimez, vous aussi, l’Eglise du Christ, priez et travaillez
pour elle, sans jamais l’abandonner ou la trahir! Avec ma Bénédiction
apostolique!
©
Copyright 2009 - Libreria Editrice Vaticana
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