Jusqu'à
ces derniers temps, saint Cyrille (son nom de baptême était Constantin) et
saint Méthode n'étaient honorés qu'en certains lieux, surtout aux divers pays
slaves, qu'ils avaient évangélisés, et à Rome. Le pape Léon XIII (Vincenzo Gioacchino
Pecci, 1878-1903) étendit leur culte à
toute l'Église.
Ces
deux nobles frères, nés à Thessalonique, allèrent s'instruire à Constantinople.
Après de profondes études, Méthode se fit moine ; Cyrille reçut de
l'impératrice Théodora la mission de christianiser certains peuples voisins de
la Grèce ; de là, il fut appelé avec son frère à l'évangélisation de la
Moravie, où leur zèle produisit des merveilles de conversions.
Ils
traduisirent la Bible en langue slave, langue qui leur doit sa formation
régulière. Leur renommée les fit appeler à Rome par le pape Nicolas Ier ; ils y
arrivèrent porteurs des reliques du pape saint Clément Ier, que Cyrille avait
découvertes dans la Chersonèse.
Revenus
à leur apostolat, ils furent accusés d'employer la langue slave dans les
cérémonies liturgiques ; mais ils se défendirent victorieusement auprès du pape
Adrien II. Cyrille étant mort à Rome, dans la force de l'âge, eut son tombeau
auprès de celui de saint Clément ; son frère évangélisa la Pannonie, la
Bulgarie, la Dalmatie, la Carinthie.
Accusé
de nouveau à Rome, il se justifia si bien qu'il revint à son apostolat revêtu
du caractère épiscopal. Après avoir prêché l'Évangile à la Bohême et à la Pologne,
il alla mourir en Moravie, chargé de mérites et de gloire.
Pour approfondir, lire la Catéchèse du Pape Benoît XVI :
©Evangelizo.org
BENOÎT
XVI
AUDIENCE GÉNÉRALE
Mercredi
17 juin 2009
Saints Cyrille et Méthode
Chers frères et sœurs,
Je voudrais parler aujourd'hui
des saints Cyrille et Méthode, frères de sang et dans la foi, appelés apôtres
des slaves. Cyrille naquit à Thessalonique, du magistrat de l'empire Léon en
826/827: il était le plus jeune de sept enfants. Dans son enfance, il
apprit la langue slave. A l'âge de quatorze ans, il fut envoyé à Constantinople
pour y être éduqué et fut le compagnon du jeune empereur Michel iii. Au cours
de ces années, il fut initié aux diverses matières universitaires, parmi
lesquelles la dialectique, ayant comme maître Photios. Après avoir refusé un
brillant mariage, il décida de recevoir les ordres sacrés et devint
"bibliothécaire" auprès du Patriarcat. Peu après, désirant se retirer
dans la solitude, il alla se cacher dans un monastère, mais il fut bientôt
découvert et on lui confia l'enseignement des sciences sacrées et profanes, une
fonction qu'il accomplit si bien qu'elle lui valut le surnom de
"philosophe". Entre-temps, son frère Michel (né aux alentours de
815), après une carrière administrative en Macédoine, abandonna le monde vers
850 pour se retirer dans la vie monastique sur le mont Olympe en Bithynie, où
il reçut le nom de Méthode (le nom monastique devait commencer par la même
lettre que le nom de baptême) et devint higoumène du monastère de Polychron.
Attiré par l'exemple de son
frère, Cyrille aussi décida de quitter l'enseignement et de se rendre sur le
mont Olympe pour méditer et prier. Quelques années plus tard, cependant (vers
861), le gouvernement impérial le chargea d'une mission auprès des khazars de
la Mer d'Azov, qui demandèrent que leur soit envoyé un homme de lettres qui
sache dialoguer avec les juifs et les sarrasins. Cyrille, accompagné de son
frère Méthode, s'arrêta longuement en Crimée, où il apprit l'hébreu. Là, il
rechercha également le corps du Pape Clément i, qui y avait été exilé. Il
trouva sa tombe, et lorsque son frère reprit le chemin du retour, il porta avec
lui les précieuses reliques. Arrivés à Constantinople, les deux frères furent
envoyés en Moravie par l'empereur Michel iii, auquel le prince moldave Ratislav
avait adressé une requête précise: "Notre peuple - lui avait-il dit
- depuis qu'il a rejeté le paganisme, observe la loi chrétienne; mais nous
n'avons pas de maître qui soit en mesure de nous expliquer la véritable foi
dans notre langue". La mission connut très vite un succès insolite. En
traduisant la liturgie dans la langue slave, les deux frères gagnèrent une
grande sympathie auprès du peuple.
Toutefois, cela suscita à leur
égard l'hostilité du clergé franc, qui était arrivé précédemment en Moravie et
qui considérait le territoire comme appartenant à sa juridiction ecclésiale.
Pour se justifier, en 867, les deux frères se rendirent à Rome. Au cours du
voyage, ils s'arrêtèrent à Venise, où eut lieu une discussion animée avec les
défenseurs de ce que l'on appelait l'"hérésie trilingue":
ceux-ci considéraient qu'il n'y avait que trois langues dans lesquelles on
pouvait licitement louer Dieu: l'hébreu, le grec et le latin. Bien sûr,
les deux frères s'opposèrent à cela avec force. A Rome, Cyrille et Méthode
furent reçus par le Pape Adrien ii, qui alla à leur rencontre en procession,
pour accueillir dignement les reliques de saint Clément. Le Pape avait
également compris la grande importance de leur mission exceptionnelle. A partir
du milieu du premier millénaire, en effet, les slaves s'étaient installés en
très grand nombre sur ces territoires placés entre les deux parties de l'Empire
romain, orientale et occidentale, qui étaient déjà en tension entre elles. Le
Pape comprit que les peuples slaves auraient pu jouer le rôle de pont,
contribuant ainsi à maintenir l'union entre les chrétiens de l'une et l'autre
partie de l'Empire. Il n'hésita donc pas à approuver la mission des deux Frères
dans la Grande Moravie, en acceptant l'usage de la langue slave dans la
liturgie. Les livres slaves furent déposés sur l'autel de Sainte-Marie de
Phatmé (Sainte-Marie-Majeure) et la liturgie en langue slave fut célébrée dans
les Basiliques Saint-Pierre, Saint-André, Saint-Paul.
Malheureusement, à Rome,
Cyrille tomba gravement malade. Sentant la mort s'approcher, il voulut se
consacrer entièrement à Dieu comme moine dans l'un des monastères grecs de la
Ville (probablement près de Sainte-Praxède) et prit le nom monastique de
Cyrille (son nom de baptême était Constantin). Il pria ensuite avec insistance
son frère Méthode, qui entre-temps avait été consacré évêque, de ne pas
abandonner la mission en Moravie et de retourner parmi ces populations. Il
s'adressa à Dieu à travers cette invocation: "Seigneur, mon Dieu...,
exauce ma prière et conserve dans la fidélité le troupeau auquel tu m'avais
envoyé... Libère-les de l'hérésie des trois langues, rassemble-les tous dans
l'unité, et rends le peuple que tu as choisi concorde dans la véritable foi et
dans la droite confession". Il mourut le 14 février 869.
Fidèle à l'engagement pris
avec son frère, Méthode revint en 870 en Moravie et en Pannonie (aujourd'hui la
Hongrie), où il retrouva à nouveau la violente aversion des missionnaires
francs qui l'emprisonnèrent. Il ne perdit pas courage et lorsqu'il fut libéré
en 873, il se prodigua activement dans l'organisation de l'Eglise, en suivant
la formation d'un groupe de disciples. Ce fut grâce à eux si la crise qui se
déchaîna à la mort de Méthode, qui eut lieu le 6 avril 885, put être
surmontée: persécutés et mis en prison, certains de ces disciples furent
vendus comme esclaves et conduits à Venise, où ils furent rachetés par un
fonctionnaire constantinopolitain, qui leur permit de repartir dans les pays
des slaves balkaniques. Accueillis en Bulgarie, ils purent poursuivre la
mission commencée par Méthode, en diffusant l'Evangile dans la "terre de
la Rus'". Dieu, dans sa mystérieuse providence, utilisait ainsi la
persécution pour sauver l'œuvre des saints frères. De cette dernière, il reste
également la documentation littéraire. Il suffit de penser à des œuvres telles
que l'Evangéliaire (épisodes liturgiques du Nouveau Testament), le Psautier,
différents textes liturgiques en langue slave, auxquels travaillèrent les deux
frères. Après la mort de Cyrille, on doit à Méthode et à ses disciples, entre
autres, la traduction de toute l'Ecriture Sainte, le Nomocanon et le Livre des
Pères.
Voulant à présent résumer
brièvement le profil spirituel des deux frères, on doit tout d'abord remarquer
la passion avec laquelle Cyrille aborda les écrits de saint Grégoire de
Nazianze, apprenant à son école la valeur de la langue dans la transmission de
la Révélation. Saint Grégoire avait exprimé le désir que le Christ parle à
travers lui: "Je suis le serviteur du Verbe, c'est pourquoi je me
mets au service de la Parole". Voulant imiter Grégoire dans ce service,
Cyrille demanda au Christ de vouloir parler en slave à travers lui. Il
introduit son œuvre de traduction par l'invocation solennelle:
"Ecoutez, ô vous tous les peuples slaves, écoutez la Parole qui vint de
Dieu, la Parole qui nourrit les âmes, la Parole qui conduit à la connaissance
de Dieu". En réalité, déjà quelques années avant que le prince de Moravie
ne demande à l'empereur Michel iii l'envoi de missionnaires dans sa terre, il
semble que Cyrille et son frère Méthode, entourés d'un groupe de disciples,
travaillaient au projet de recueillir les dogmes chrétiens dans des livres
écrits en langue slave. Apparut alors clairement l'exigence de nouveaux signes
graphiques, plus proches de la langue parlée: c'est ainsi que naquit
l'alphabet glagolithique qui, modifié par la suite, fut ensuite désigné sous le
nom de "cyrillique" en l'honneur de son inspirateur. Ce fut un
événement décisif pour le développement de la civilisation slave en général.
Cyrille et Méthode étaient convaincus que chaque peuple ne pouvait pas
considérer avoir pleinement reçu la Révélation tant qu'il ne l'avait pas
entendue dans sa propre langue et lue dans les caractères propres à son
alphabet.
C'est à Méthode que revient le
mérite d'avoir fait en sorte que l'œuvre entreprise avec son frère ne soit pas
brusquement interrompue. Alors que Cyrille, le "Philosophe", avait
tendance à la contemplation, il était plutôt porté vers la vie active. C'est
grâce à cela qu'il put établir les présupposés de l'affirmation successive de
ce que nous pourrions appeler l'"idée cyrillo-méthodienne":
celle-ci accompagna les peuples slaves pendant les diverses périodes
historiques, favorisant le développement culturel, national et religieux. C'est
ce que reconnaissait déjà le Pape Pie xi dans la Lettre apostolique Quod
Sanctum Cyrillum, dans laquelle il qualifiait les deux frères:
"fils de l'Orient, byzantins de patrie, grecs d'origine, romains par leur
mission, slaves par leurs fruits apostoliques" (AAS 19 [1927] 93-96). Le
rôle historique qu'ils jouèrent a ensuite été officiellement proclamé par le
Pape Jean-Paul ii qui, dans la Lettre apostolique Egregiae virtutis viri,
les a déclarés copatrons de l'Europe avec saint Benoît (AAS 73 [1981] 258-262).
En effet, Cyrille et Méthode constituent un exemple classique de ce que l'on
indique aujourd'hui par le terme d'"inculturation": chaque
peuple doit introduire dans sa propre culture le message révélé et en exprimer
la vérité salvifique avec le langage qui lui est propre. Cela suppose un
travail de "traduction" très exigeant, car il demande
l'identification de termes adaptés pour reproposer, sans la trahir, la richesse
de la Parole révélée. Les deux saints Frères ont laissé de cela un témoignage
significatif au plus haut point, vers lequel l'Eglise se tourne aujourd'hui
aussi, pour en tirer son inspiration et son orientation.
* * *
Je suis heureux d’accueillir les pèlerins de
langue française. Je salue particulièrement les paroisses et les jeunes ainsi
que les étudiants de Nice. Que le témoignage des saints Cyrille et Méthode soit
pour vous une source de lumière et d’espérance afin que vous demeuriez fidèles
à la foi que vous avez reçue. Avec ma Bénédiction apostolique!
©
Copyright 2009 - Libreria Editrice Vaticana
SAN CIRILLO MONACO
APOSTOLO DEGLI SLAVI / P
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