En
fin de nuit, tout à l’heure, à mon premier lever, de paysage que sonore, la
rumeur du vent et de la mer, sans qu’ils se distinguent l’un de l’autre,
seulement. Notre fille,encore endormie, si enfant, nouveau née ou presque, le
visage, le profil, tandis qu’en voiture, au cinéma, ou me conseillant sur la
conduite à tenir quand sa mère est un peu brusque ou fatiguée, ou opinant sur de
nouvelles adoptions animales : chiens, chèvres, c’est une partenaire, une
adulte, ravie de surcroît que je l’interroge sur la genèse et la manière de
réaliser les deux films d’animation produits cet été, avec son amie Fanny. Elle
était venue pour cet « entretien », me dictant ainsi son journal que
pour l’instant et depuis sa conception, je tiens à sa place, donc seulement
de visu audituque. A présent, le jour sans soleil. Auparavant, la lune en
premier croissant, couchée en lévitation sur des nuages sans couleur. – L’Arabie
saoudite tentant d’interdire une édition tchèque des Versets sataniques, comme si c’était la première. La grande
peur, au moins en France, au point qu’un tract était distribué et que ce fut
commenté à Notre Dame de Paris au moins, mais sans doute partout ailleurs (je n’ai
jamais été partout, quoique j’apprécierais d’avoir la collection du fameux Je
suis partout, pour voir s’il y eut vraiment matière à pousser un écrivain de
premier rang au poteau d’exécution, à pas trente cinq ans…) : Da Vinci code… question
récurrente, le Christ et Marie Madeleine… Marguerite m’a demandé, il y a peu :
un enfant ? ma réponse : cela n’a aucune importance. Le certain c’est
que Marie Madeleine aimait Jésus. J’ai
prié et le discernement m’a été donné. l[1] Tous les biens me
sont venus avec elle et, par ses mains, une richesse incalculable. Qui est-elle ? qui est-Il : l’esprit
de la Sagesse est venu en moi. Dissolution
ou précession du masculin/féminin en Dieu, ce qui est un des aspects peu commentés mais
extraordinairement innovant et éclairant de la pensée, de la théologie de
Thérèse de Lisieux, et explique, légitime aussi son désir du sacerdoce, pas universel,
mais particulier, ministériel. Elle est vivante, la parole de Dieu et plus
coupante qu’une épée à deux tranchants. Notre
discernement ne peut être au parfait que celui de Dieu. Le « jeune homme »
riche l’éprouve. Tout est nu devant elle, soumis à son regard…Jésus posa son
regard sur lui, et il l’aima. Alors, le
tranchant : Une seul chose te ma que : va, vends ce que tu as et
donne-le aux pauvres. Il n’entend pas :
alors, tu auras un trésor au ciel. Il
ne se rend pas compte qu’il est aimé (notre cher Frère Claude, l’aumônier de la
clinique où il commença d’agoniser : il se savait aimé). Mais lui, à ces mots, devint tout
sombre et s’en alla tout triste. Tristesse
d’une conditionnalité impossible à remplir ? ou tristesse d’une prise de
conscience : incapacité d’aimer, d’aller jusqu’au bout, de se confier. Pour
les hommes, c'est impossible, mais pas pour Dieu, car tout est possible à Dieu.
Suit la leçon un peu terre-à-terre pour
répondre à Pierre et à la question des ritualistes, des échangistes :
faire des sacrifices pour… je crois parce que…propter retributionem… en ce
temps déjà, le centuple… avec des persécutions, et, dans le monde à venir, la
vie éternelle. Pas possible de réciter le
chapelet, même d’évoquer quelque image que ce soit d’un « mystère lumineux »,
la bêche à la main en replantant des arbres à papillon ou du houx. Jardinage et
prière, ce doit être possible, puisqu’à Dieu… mais faut-il être conscient de « sa »
prière ? évidemment non. Portance de Dieu. Deux petits pins, chétifs
depuis des années, que nous avait donnés Jean-le-bon (notre ami, car il y a
aussi « le bon pape Jean »), les voici qui ont démarré. Ma femme dit
que le jour de sa mort, le 21 Septembre, le premier automne qu’il manque pour
son propre jardinage, c’est lui non ses plantes que nous avons mis en terre,
elle était juste à les libérer des herbes les étouffant. Jean mourait de
suffocation. Un de mes frères m’a mis en spam depuis une date qu’il ne m’a pas
dit, m’apprenant seulement le fait, et ne m’a pris au téléphone de tout l’été
et jusqu’à ces jours-ci, mon numéro de portable s’affichant : motif
rétrospectif, j’évoque la mémoire de nos parents non seulement à ma génération
dans notre fratrie, mais à la seconde génération que je sais en manque total d’ascendance
et de précédents. Cela m’a fait souffrir. Il s’est trouvé que pour la première
fois depuis la mort de notre père, j’ai ouvert son portefeuille, je ne l’avais
jamais fait, me l’a-t-on donné, Maman ? ou l’ai-je pris, mais certainement
avec le consentement de tous : dedans ses papiers d’identité, deux photos
de Maman, format identité, à des âges différents, et une photo plus grande, la
seule du genre : lui et moi, quand il m’a visité à Munich, le Jardin
anglais, trois mois avant sa mort, nous ne nous étions plus revus depuis douze
ans, sauf à l’apercevoir à Notre Dame ou en déambulatoire de l’église
paroissiale pour le mariage d’une de mes sœurs. Nous nous écrivions, c’est une
histoire profonde que celle de cet homme et moi, ou de moi avec mon père, à qui
je ressemble tant physiquement et de tout mon parcours et sans doute plus
encore d’une certaine quête sinon mystique (lui, l’était) du moins spirituelle,
vitale. A mon aveu d’une interrogation sur une vocation religieuse, que je fis
à mes quinze ans, à mes parents, leur grande chambre, leur silence, mon père
répondit : les parents sont des mendiants d’amour. Je le comprends
vraiment depuis que je suis père, mais – lui – je n’ai jamais cessé de le
comprendre (et de l’aimer) ce qu’il savait. De le connaître autant que je me
connais. Sans doute, est-ce pour cela que je suis en spam. – Communion rétrospective,
la plus belle, toujours, la dernière Cène que nous allons une fois encore
commémorer et revivre. Cet ami, souffrant physiquement et affectivement, les
photos. parfois annexées à mon « envoi » quotidien. Oui, ce ciel de
mardi, il l’avait lui aussi, lui surtout, raccompagnant à l’autocar de « ramassage »
scolaire, celle de ses filles qui continue de le voir, visiter et demain
spécialement pour son anniversaire… ce ciel, il l’avait vu, admiré avec elle,
avec sa fille.
[1] - Sagesse VII 7 à 11 ; psaume XC ; lettre aux Hébreux IV 12.13 ;
évangile selon saint Marc X 17 à 30
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire