11 heures 54
+ Tu kiffes toujours, ta petite life, Papa ? Je réponds
toujours :
oui. Eveil de ce matin : je réponds non. Jérémie, Jonas…
trop fatigante
la vie, trop de combats, tout le temps, et puis la
vieillesse, le genou qui traîne,
le pain quotidien et la bourse plate… Le vrai retour n’est
pas aux choses ici,
ni aux murs, ni à la maison : les choses nous quittent une à
une autant qu’il
nous en vient, et surtout bien avant notre mort. Elles
vivent par nous, la
relation que nous avons avec elles : livres, bibliothèques,
gravures, très
vécus à certaines époques de ma vie, tandis que maintenant
pas la place pour la
collection des rois, des reines, et celle des cartes
anciennes, ou bien peu, et
ma bibliothèque, celle de ma mère attendent le travail que
je veux faire avec
elles deux, depuis longtemps. Non, c’est dehors, ce matin au
lever du soleil,
les sumacs rouges, les chênes rouillés orange, les figuiers
jaunes et quelque
fruits minuscules mais bons, alors que je ne délivre pas mes
arbres des ronces
qui les étreignent depuis des années. Les retrouvailles,
c’est l’odeur, le
vent, la rumeur surtout de la mer, le lever du jour par
lavis horizontaux,
bandes blanches, livides, et bandes rouges ou orangées, feu.
La rumeur de l’océan.
J’irai au bord de la mer ce soir ou demain.
Tous les
temps « morts » (je découvre la justesse de l’expression),
tous
ces temps où je me laissais aller, surtout au volant… la
dizaine de chapelet. J’avais
déjà entrepris cette occupation autre et donc cette
concentration presqu’involontaire
que produit la récitation et l’accrochage par tel mot ou
phrase, elles sont
brèves et simples dans le Pater comme dans l’Ave, en, changeant d’eau les poissons rouges de notre
fille : près de
deux heures de travail, vider ou presque, nettoyer,
re-remplir.
Me voici à
pied d’œuvre pour une fin d’année productive et organisée.
Prier [1]…
17 heures 48
+ Recherché, à partir d’une condamnation globale mais brève
et peu travaillée
de Civitas, l’ensemble des documents du Vatican. Pas encore
le trexte-même du
synode, mais le moto proprio sur les procès en annulation
d’un mariage : c’est
la recommandation de la sérénité, de la détente à laquelle
l’Eglise-institution
doit contribuer quand un couple est en rupture. Je n’ai pas
tout lu, mais on
sent chez notre pape une grande maîtrise des nerfs et le don
de la compassion,
de la pénétration psychologique de notre temps : les
personnes et l’époque…
le discours de clôture, l’homélie à la messe sont de même
facture. Ce ne sont
pas des textes en défense. A partir de là, on peut marcher.
Je le vis tous les
jours : l’union d’un couple est une grâce, la précarité, la
rupture sont
toujours sur le seuil, quaerentes quem devoret. Les deux
mémoires de saints
aujourd’hui sont d’une autre époque. Je ne crois pas qu’il
faille opposer les
unes aux autres les époques et les circonstances de
l’humanité, il y a des
moments de crispation, peut-être même de folie si on les
considère à partir de
nous et à partir d’aujourd’hui : ainsi la perfection par la
souffrance, la
sainteté comme objectif de vie. Il me semble qu’à présent
nous cherchons –
légitimement – Dieu comme compagnon, comme aide au
discernement, comme donneur
de nos repères en tous domaines pour chacun de nous et pour
nos sociétés. Il se
peut que demain – Dieu parlant toujours notre langage et
s’appropriant nos
circonstances pour mieux nous rejoindre et nous mettre ou
remettre en route –
les façons de dire et de croire changent. Mais
fondamentalement la ligne est la
même : la prière de demande (Abraham, Tobie et Sarah, Jésus
au jardin des
Oliviers…), l’écoute de la volonté divine qui est toujours
une mise en
mouvement, et sans doute, quels que soient les drames et
atrocités dans le
monde actuel ou dans nos guerres mondiales ou
post-coloniales, la sollicitude
divine, révélation et foi selon l’Ancien Testament, preuve
et garantie par l’Incarnation
rédemptrice.
Le fiasco de
la raison – quand elle est malintentionnée, sciemment
hostile à ce qu’il est
proposé d’examiner, d’entendre, quand elle s’oppose à
Dieu-même : et
ils furent incapables de trouver une réponse…
Est-il permis, oui ou non, de faire une guérison le jour du
sabbat ? Ce qui n’est
pas accessoire dans l’énième « accrochage »
du Christ avec les ritualistes et les intégristes, c’est une
nouvelle définition
de la médecine… elle n’est pas l’art de guérir, elle est
urgentiste, elle est
le traitement d’une priorité absolue. Si l’un de vous a
un fils ou un bœuf qui
tombe dans un puits, ne va-t-il pas aussitôt l’en retirer,
même le jour du sabbat ?
Les pleurs de Jésus pour Jérusalem qu’il n’a
pu convertir et pour Paul, dans le cœur une grande
tristesse, une douleur
incessante… Les
intégristes : ils
sont en effet israëlites, ils ont l’adoption, la gloire, les
alliances, la
législation, le culte les promesse de Dieu… l’Apôtre
ne conclut pas… nous, non plus. Silence du soir en train de
nous recueillir.
[1]
- Paul aux Romains IX 1 à 5 ; psaume CXLVII ;
évangile selon
saint Luc XIV 1 à 6
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