Prier [1]… Fils de David, Jésus, prends soin de moi – Appelez-le. –
Confiance. Lève-toi ; il t’appelle – Que veux-tu que je fasse pour
toi ? – Maître, que je recouve la vue ! – Va, ta foi t’a sauvé. L’aventure de Bartimée, un aveugle qui
mendiait… aussitôt l’homme recouvra la vue et il suivait Jésus sur son chemin. Scène très mouvementée : Jésus
sortait… l’aveugle jeta son manteau, bondit et courut vers Jésus… et il suivait
Jésus le chemin. Pas de dialogue, pas
d’enseignement, pas de commentaire. La foi opère à deux degrés : le Christ
miracule, guérit et cette guérison est constaté, authentifiée d’abord par
Dieu-même. Le fait est brut. Il accomplit les Ecritures : comme toutes
ses œuvres son attirantes, jusqu’à la plus petite étincelle qu’on peut
apercevoir ! Tout cela vit et demeure à jamais, remplit son office et lui
obéit. Le texte du Siracide semble avoir
été l’inspirateur, principal ou de hasard, de VOLTAIRE rédigeant Candide…
il a confirmé l’excellence d’une chose par l’autre. Avec une véritable thèse, avancée philosophique. La dyade : tout
va par deux, l’un correspond à l‘autre, il n’a rien fait de défectueux, il a
confirmé l’excellence d’une chose par l’autre. Le couple, la dualité ne sont pas des antagonistes, pas non plus une
complémentarité pour la reproduction. C’est d’abord la Création elle-même
justifiant continuellement et structurellement l’œuvre du Créateur et
l’évaluant éthiquement et esthétiquement. Ampleur cosmogonique d’une évocation
de la puissance divine tandis que le Christ, immergé dans le milieu humain,
Fils de l’homme, est à notre portée. Quand il entendit que c’était Jésus de
Nazareth… à notre disposition
personnelle, quoiqu’en pensent les autres, si bien intentionnés ou si bien formés.
Au vu de tant de choses et d’événements
annonciateurs, le flot des courriels de résistance aux comportements
gouvernementaux, les élections en Pologne, en Espagne, les échéances grecques,
le verrouillage du congrès PS, la séquence depuis quelques semaines de titres
du Monde, très inspiré et d’une fidélité remarquable à ce qui l’a fondé à
l’hiver 1944, moyennant des adaptations, actualisations et remodelages de
présentation depuis, couriellé lapidairement à JPJ [2] – Il
y a à repenser complètement les formes de la politique et du gouvernement, au
moins chez nous, il y a le même effort de synthèse et d’imagination pour la
politique « extérieure », chacun des thèmes et chacun des acteurs
dans les relations internationales et pour les réalités des pays étrangers
Hier soir, conférence donc de Lytta BASSET. Je crois avoir l’un de ses livres, commencé
d’en entendre parler dans la série consacrée par Le Monde aux grandes
religions, que présente un fidèle ou un hiérarque pour chacune, ainsi Dom
Robert pour le catholicisme, et elle pour le protestantisme. Une notoriété, j’y
suis allé pour cela. La salle du premier étage au Palais des Arts à Vannes.
Remplie aux deux tiers, donc certainement trois ou quatre cent personnes au
moins. D’emblée, je trouve l’exposé médiocre d’énoncé en forme très relâchée et
en fond. Arrivé en retard, j’entends un commentaire du livre de Job. Elle me semble très loin de ce que selon
mon expérience d’entretiens psycho-thérapeutiques, j’ai découvert dans ce
livre. Job n’aurait pu « s’en sortir » s’il avait monologué. Au
contraire, il est sans cesse relancé par des intervenants très précis et
d’ailleurs mieux que neutres, hostiles ce que n’est pas le psy. dont on attend
que la validation ou le rebond. Le patient ne doit surtout pas culpabiliser, Job
proclame constamment la vérité première : il n’a pas péché. L’explication
de son malheur n’est pas celle d’une punition, mais celle d’une épreuve. LB a
cependant bien vu, citant un praticien dont le nom m’échappe, que le but de
l’entretien est d’ « équiper » le patient, le solide, les
issues, c’est lui et personne d’autre qui peut les trouver et plus encore se
les administrer. J’ai été déçu, globalement, par la conférencière que j’aurais
d’ailleurs cru plus âgée : beaucoup d’égotisme dans le cours de l’exposé,
de référence à soi (ce qu’elle dit à des tiers, voire à son mari, décide et
fait le réconfort ou la clarté) même si elle met constamment en garde contre
les généralisations, s’agissant de sujets si intimes et douloureux, le deuil
d’un être cher qui nous a quittés par suicide. Mais surtout une pratique je
n’ai pas aimée. Une évaluation à haute voix des témoignages et prises de
parole, comme si un examen scolaire était passé par le/la questionnant, le
demandeur. Enfin, et paradoxalement, puisqu’elle est pasteur et enseignante en
faculté de théologie, elle n’a jamais évoqué que des rencontres avec des tiers
refaisant pour l’endeuillé et le dolant du « lien », et le lien
donnant du « qens », ce genre de termes et surtout d’application du
terme, comme les « valeurs de la République » ont fait florès depuis
vingt ans, sans nous faire beaucoup avancer car ils ne sont pas définis en leur
contenu, s’ils en ont vraiment un. Or, au moins dans ma propre expérience, il y
a ces secours inopinés, ces visitations de notre être et de nos circonstances
par Dieu. Nous ne sommes pas seuls entre humains, il y a le Tiers décisif et
créateur, Dieu en trinité. Ces secours sont à déchiffrer par chacun qui en
bénéficie. Je les ai éprouvés. Les discerner, évidemment, fait beaucoup avancer
dans le moment, et plus encore rétrospectivement. La nuit où je désespérai de
jamais obtenir le cœur de Laurence de L. en ce monde-ci à l’évidence et dans
l’autre, si j’anticipais d’y aller en me suicidant…et le téléphone au matin de
sa grand-mère. – Cependant, de nombreux apports, mais plus ponctuels. Des dires
sobres et à peine plus qu’allusifs sur la relation conjugale en tous temps et
plus encore en période de difficile et donc de deuil. Une observation
forte : la perte de ce qui est cher n’est pas uniquement celle d’un
humain, ce peut être un animal (nous en avons su plus que quelque chose, tous
les trois, les réactions de ma chère femme, celle admirable de Marguerite
faisant augurer de toute sa vie, je crois, une telle force d’âme à huit ans),
voire un bien, quelque chose. Un rapprochement offert : comment elle-même
s’en est tirée, est revenue au goût de vivre, et comment depuis vingt ans, au
rythme d’échecs successifs, d’exclusion et de refus essuyés de la société et
des représentants que mes demandes et offres, lui donnaient, je ne suis pas
mort, bien au contraire. Et enfin, LB m’a été l’occasion de comprendre et de
rencontrer des souffrances dont je n’avais pas le précédent dans ma vie, sauf
le pleur ancien d’Edith pour son cher Hubert… et encore plus intense mais plus
pudiquement tu, celé, les deux deuils affreux de mon cher aîné. Le témoignage
final d’un agriculteur, le fils pendu il y a deux mois au-dessus des vaches et
dans l’étable faisant son lot, après répartition d’une donation entre vifs
( !), la maladresse atroce de l’enquête en gendarmerie. L’abord de ces
deux femmes si fraternelles et ressemblantes l’une à l’autre, mère et fille, un
fils suicidé lui aussi il y a encore moins de deux mois. Monique que j’embrasse
sur la joue, félicite pour son eau de toilette, et élément pratique aussitôt
d’une future résurrection : non, un parfum.
Le véritable apport de LB – qui ne sait pas
se lire elle-même complètement, puisqu’exposant à la fois une première et très
grave dépression à ses douze-treize ans et une un « travail » de près
de quinze ans, à partir de ses trente, sur l’ensemble de sa petite enfance,
elle donne à rapprocher, selon moi et au moins chronologiquement, sa mise à
flot enfin et tardive avec le début du mal-être de son fils, de Samuel – ce
véritable apport est dans la qualification du suicide : décision propre,
liberté de choix et véritablement choix de la vie, si paradoxal que cela
paraisse, car le suicidant veut davantage de la vie. Observation à la clé, la
Bible ne censure pas le suicide ni dans les exposés qu’elle fait de plusieurs
cas, ni en morale.
J’aurais voulu lui dire tout cela. Je vais
lui écrire, et il me faut évidemment lire son livre. – Parlant ensuite à des
auditeurs et à des organisateurs, il m’est précisé qu’il ne pouvait s’agir d’un
cercle de prises de paroles, que le temps était forcément limité. Je vois aussi
que le thème n’est pas le suicide en soi ou celui qui s’administre la mort,
tant de conversations récentes, ont implicitement pour moi tourné autour de cette
isue, ainsi Sylvain avant-hier, d’issue logique que celle-là : souffrance
physique et séparation strangulante d’avec ses deux filles… Une des
tables-présentoirs, deux jeunes filles et un protecteur : pompes funèbres
générales, une entreprise privée donc, mais aux employés particulièrement
formés, dialogue plus particulier avec l’une des deux, elle assure recevoir
beaucoup des endeuillés, des circonstances ainsi partagées.
Sans me laisser déborder, sans voyeurisme non
plus, je vais sans doute fréquenter deux fois par mois, ces groupes de paroles,
de même que j’aimerais être visiteur de prison. – Le vrai choc hier a été plus
simple que tout ce que j’ai entendu et vécu. Au premier degré, ce couple pas
encore âgé, en retard plus que moi, s’asseyant non loin mais devant moi,
l’homme chemise bleu ciel, dos large, sans doute bien bâti, se courbait,
s’affaissait de buste de plus en plus à mesure que continuait la conférence, et
l’épouse posait la main à plat sur ce dos tellement expressif, pathétique, puis
lui a caressé la nuque, doucement, brièvement comme on administre un signe de
présence, et enfin, l’une après l’autre, lui a massé un peu chaque épaule. Ils
sont partis vite. J’ai ressenti que cette réunion ne pouvait être un débat,
qu’elle jouxtait le sacré.
[1] - Ben Sirac le sage XLII 15 à 25 ; psaume XXXIII ; évangile
selon saint Marc X 46 à 52
Sujet :
|
la mûe
|
Date :
|
Thu, 28 May 2015 08:37:37
+0200
|
De :
|
Bertrand Fessard de Foucault
|
Pour :
|
Jean-Pierre Jouyet,
secrétaire général de l'Elysée
|
Sans que cela prenne déjà corps, tout appelle et
prépare une mûe. Extrêmement profonde.
Si les politiques classiques, si les dirigeants du moment - en France le Président et vous - n'en prennent pas conscience et n'opèrent pas un changement total, bien plus que d'orientation en politique économique et sociale, ils seront balayés. Comme les têtes couronnées le furent en quelques étapes, rapprochées et brèves entre 1789 et 1920, comparées à la durée millénaire de leur emprise. Après cent cinquante ans de politique élective et déléguée, la faillite et l'autisme : les résultats et les comportements, ont séparé complètement la direction nominale des choses et des gens, de la réalité de ces choses et de la conscience, de la volonté de ces gens.
Prenez-y garde.
Pensées et voeux en ce sens, cher ami, ce matin et pour des suites rapidement.
Cf. la collection des unes du Monde depuis quelques semaines, les élections générales ici et là, le papier de ce Nobel japonais en 1994 que publiait le journal daté des dimanche-lundi derniers.
Si les politiques classiques, si les dirigeants du moment - en France le Président et vous - n'en prennent pas conscience et n'opèrent pas un changement total, bien plus que d'orientation en politique économique et sociale, ils seront balayés. Comme les têtes couronnées le furent en quelques étapes, rapprochées et brèves entre 1789 et 1920, comparées à la durée millénaire de leur emprise. Après cent cinquante ans de politique élective et déléguée, la faillite et l'autisme : les résultats et les comportements, ont séparé complètement la direction nominale des choses et des gens, de la réalité de ces choses et de la conscience, de la volonté de ces gens.
Prenez-y garde.
Pensées et voeux en ce sens, cher ami, ce matin et pour des suites rapidement.
Cf. la collection des unes du Monde depuis quelques semaines, les élections générales ici et là, le papier de ce Nobel japonais en 1994 que publiait le journal daté des dimanche-lundi derniers.
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