06 heures 49 + Je me suis
effondré de sommeil sur ce clavier, enregistrant au hasard des dépêches d’agence,
présentées brutes et simples, il y a quelques années, englouties aujourd’hui
dans la publicité, les photos. Embarqué dans ce corrigé d’une œuvre de
débutante qui m’apporte tant, aussi bien l’intrigue peut-être d’un récit à
triple héroïne mais à unique étoffe d’illusion, celle qui délivre la vérité, la
vérité de nous-mêmes. Le gaspillage apparent de tout ce qui est censé m’être
donné ou m’appartenir, temps et énergie, vie ? j’écris du ressenti et du
témoignage, pas tant du raisonné et de l’élaboré, mon échec éditorial permanent
vient-il de là ? ou est-ce amasser pour lier et brandir une gerbe ? au
moins, la laisser à qui la prendra. A mon éveil, la chair et la vie, le corps
et le souffle de ma femme à mes côtés. Mon corps et mon souffle pour elle ?
notre amour mutuel, son mystère de plus en plus. Notre pays et ses fantoches,
ceux que nous secrétons, NS et Nabila, ces passions de la notoriété que nous
laissons nourrir par d’autres devenant les représentants de notre inanité
nationale quand ce n’est que devanture. Notre tréfonds est autre, il y a cette matrice
des événements et la présence alors de nos âmes, la matrice de ce l’histoire et
de la géographie, chaque peuple allant de son éparpillement à sa constitution
et retour. Je ne crois pas que le néant ni la folie l’emportent jamais, ni dans
l’histoire, ni dans la dialectique du cosmos, ni dans nos vies. Je vais tâcher
de l’écrire pour l’armistice de 1918. Et il y a ces chocs bienheureux des
dialogues et de la signification de l’autre par ses mots et son regard. Hier
soir, JPJ en quelques lettres, puisse-t-il tenir dans le désarroi ! l’évanescence
possible de son chef et des entourages et que de l’épreuve sorte enfin la
consistance. Hier soir et ce matin, ce camarade d’adolescence, à l’intelligence
magnifique et dont pourtant le propos, la présence, la véritable image qui me
demeurent ne sont pas son visage à notre revoir en » promotion »
quoique ce visage avait encore beaucoup d’enfance, mais le mime de la pensée,
ce thème qu’il avait choisi pour notre classe de mime et d’expression. Rarement,
le témoignage d’une pensée et d’une synthèse ne me paraît quand je le reçois
ainsi qu’hier et ce matin, aussi différent de ce que je conçois et pense moi-même
et cependant aussi convergent avec tout ce que j’en tire. – Battue « administrative ».
Je demande que les assassins probables
de cinq de nos chiens, tirer sur un animal familier de l’homme, étonné et curieux
de la rencontre, et qui n’a pas le temps de s’épouvanter de ce que face à face,
à touche-touche, un soi-disant humain lui inflige, la mort dans l’absolu de la
non-tendresse… que ces « êtres », dits humains, si limités qu’ils en
sont inaccessibles, soient écartés de cette chasse qu’on nous inflige au
prétexte de protéger, en fait de venger, quelques semis dans notre alentour. Je
demande aussi qu’on ne tire pas chez nous, mais en dehors de nos limites :
symbole du refuge qu’est chez nous, mais dérisoire ? sauf à changer le
monde entier. Hier, quatre animaux « prélevés » sans un coup de feu,
je ne peux l’expliquer que par un massacre, les sangliers déchirés et dépecés
vifs par les chiens. Quelques rares grognements et cris, que je pouvais
confondre, très proches de notre maison, dans la sapinière épaisse, avec des
manifestations de chiens. Je ne sais.
Ce matin, j’arrange la vie, il fait
pluie et encore nuit, nos chiens éveillés, attentifs, les deux habitués de ma
place au lit quand je la cède, le thé à apporter à ma chère femme qui continue
de sommeiller, la visite d’amour à notre fille pleinement endormie, et tous les
autels ainsi préparés pour le début de ce jour, j’arrive à la synthèse, à la
démarche qui m’amène à bien plus que l’essentiel, introibo ad altarem Dei,
qui laetificat juventutem meam. A
certains messes, je sanglote d’âme dans la mémoire de certains de ceux qui sont
morts dans le drame de leur vie, selon le peu que j’en sais ou que je
reconstitue.
Le texte d’aujourd’hui sur l’honneur
– Isaac le Syrien en commentaire – est saisissant d’adéquation avec ce que nous
vivons, ce que je ressens (« les nouvelles » et le grand pantomime). Dis leur de mener une vie sainte, de ne
pas dire du mal des autres… Mets ta joie dans le Seigneur : il comblera
les désirs de ton cœur, il connaît les jours de l’homme intègre qui recevra un
héritage impérissable. Quand le Seigneur conduit les pas de l’homme, ils sont
fermes et sa marche lui plaît. [1] Le constat du psalmiste, le conseil de l’Apôtre,
tous deux si pratiques, complets : fais confiance au Seigneur, agis
bien. Et le résultat ? apparemment
paradoxal : rien… quand vous aurez fait tout ce que Dieu vous a
commandé, dites-vous : « Nous sommes des serviteurs quelconques,
nous n’avons fait que notre devoir ». Mais
cette humilité, signe absolu de notre docilité et de notre foi, est alors notre
joie, l’ineffable arrivée à la conclusion de notre destin. Jésus donne les deux
portraits, la sobriété qui fait voir et comprendre : lequel d’entre
vous, quand son serviteur vient de labourer ou de garder les bêtes, lui dira à
son retour des champs : « Viens vite à table » ? Ne lui
dira-t-il pas au contraire ? … Sera-t-il reconnaissant envers ce serviteur
d’avoir exécuté ses ordres ? qui
étaient : prépare-moi à dîner, mets-toi en tenue pour me servir, le
temps que je mange et que je boive. Ensuite, tu pourras manger et boire à ton
tour. C’est après que le Christ soit mort
et ressuscité, que nous vivons. Il s’est donné pour nous afin de nous
racheter de toutes nos fautes pour faire de nous son peuple, un peuple ardent à
faire le bien. Ainsi soit-il.
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