MESSAGE DU PAPE FRANÇOIS
POUR LA LIe JOURNÉE MONDIALE
DE PRIÈRE POUR LES VOCATIONS
POUR LA LIe JOURNÉE MONDIALE
DE PRIÈRE POUR LES VOCATIONS
11 MAI
2014 - IV DIMANCHE DE PÂQUES
Les
vocations, témoignage de la vérité
Chers frères et sœurs !
1. L’Évangile raconte que « Jésus parcourait toutes les villes et tous les villages... Voyant les foules, Jésus fut saisi de compassion envers elles parce qu’elles étaient désemparées et abattues comme des brebis sans berger. Alors il dit à ses disciples : “La moisson est abondante, mais les ouvriers sont peu nombreux. Priez donc le Maître de la moisson d'envoyer des ouvriers pour sa moisson” » (Mt 9, 35-38). Ces paroles nous surprennent, car nous savons tous qu’il faut d’abord labourer, semer et cultiver pour pouvoir ensuite, le moment venu, moissonner une récolte abondante. Jésus affirme en revanche que « la moisson est abondante ». Mais qui a travaillé pour que le résultat soit tel ? Il n’y a qu’une seule réponse : Dieu. Évidemment, le champ dont parle Jésus est l’humanité, c’est nous. Et l’action efficace qui est à l’origine du « beaucoup de fruit » est la grâce de Dieu, la communion avec lui (cf. Jn 15, 5). La prière que Jésus sollicite de l’Église concerne donc la demande d’accroître le nombre de ceux qui sont au service de son Royaume. Saint Paul, qui a été l’un de ces “collaborateurs de Dieu”, s’est prodigué inlassablement pour la cause de l’Évangile et de l’Église. Avec la conscience de celui qui a personnellement expérimenté à quel point la volonté salvifique de Dieu est insondable, et l’initiative de la grâce est à l’origine de toute vocation, l’apôtre rappelle aux chrétiens de Corinthe : « Vous êtes le champ de Dieu » (1 Co 3, 9). C’est pourquoi naît tout d’abord dans notre cœur l’étonnement pour une moisson abondante que Dieu seul peut accorder ; ensuite la gratitude pour un amour qui nous précède toujours ; enfin, l’adoration pour l’œuvre qu’il a accomplie, qui demande notre libre adhésion pour agir avec lui et pour lui.
2. Bien des fois nous avons prié avec les paroles du Psalmiste : « Il nous a faits et nous sommes à lui, nous son peuple, son troupeau » (Ps 100, 3) ; ou encore : « C'est Jacob que le Seigneur a choisi, Israël dont il a fait son bien » (Ps 135, 4). Eh bien, nous sommes la “propriété” de Dieu non pas au sens de la possession qui rend esclaves, mais d’un lien fort qui nous unit à Dieu et entre nous, selon un pacte d’alliance qui demeure pour l’éternité « car éternel est son amour » (Ps 136). Dans le récit de la vocation du prophète Jérémie, par exemple, Dieu rappelle qu’il veille continuellement sur chacun, afin que sa Parole se réalise en nous. L’image adoptée est celle de la branche d’amandier qui fleurit avant tous les autres, annonçant la renaissance de la vie au printemps (cf. Jr 1, 11-12). Tout provient de lui et est don de lui ; le monde, la vie, la mort, le présent, l’avenir, mais — rassure l’apôtre — « vous êtes au Christ, et le Christ est à Dieu » (1 Co 3, 23). Voilà expliquée la modalité d’appartenance à Dieu : à travers le rapport unique et personnel avec Jésus, que le baptême nous a conféré dès le début de notre renaissance à une vie nouvelle. C’est donc le Christ qui nous interpelle sans cesse par sa Parole afin que nous mettions notre confiance en lui, en l’aimant « de tout notre cœur, de toute notre intelligence et de toute notre force » (cf. Mc 12, 33). C’est pourquoi chaque vocation, malgré la pluralité des voies, demande toujours un exode de soi-même pour centrer sa propre existence sur le Christ et sur son Évangile. Que ce soit dans la vie conjugale, que ce soit dans les formes de consécration religieuse, que ce soit dans la vie sacerdotale, il faut dépasser les manières de penser et d’agir qui ne sont pas conformes à la volonté de Dieu. C’est un exode « qui nous conduit à un chemin d’adoration du Seigneur et de service à lui dans nos frères et sœurs » (Discours à l’Union internationale des supérieures générales, 8 mai 2013). C’est pourquoi nous sommes tous appelés à adorer le Christ dans nos cœurs (cf. 1 P 3, 15), pour nous laisser rejoindre par l’impulsion de la grâce contenue dans la semence de la Parole, qui doit croître en nous et se transformer en service concret de notre prochain. Nous ne devons pas avoir peur : Dieu suit avec passion et habileté l’œuvre sortie de ses mains, à chaque saison de la vie. Il ne nous abandonne jamais ! Il a à cœur la réalisation de son projet sur nous, mais il entend cependant l’obtenir avec notre assentiment et notre collaboration.
3. Aujourd’hui aussi, Jésus vit et chemine dans les réalités de la vie ordinaire pour s’approcher de tous, à commencer par les derniers, et nous guérir de nos infirmités et de nos maladies. Je m’adresse à présent à ceux qui sont bien disposés à se mettre à l’écoute de la voix du Christ qui retentit dans l’Église, pour comprendre quelle est leur vocation propre. Je vous invite à écouter et à suivre Jésus, à vous laisser transformer intérieurement par ses paroles qui « sont esprit et sont vie » (Jn 6, 63). Marie, la Mère de Jésus et la nôtre, nous répète à nous aussi : « Tout ce qu’il vous dira, faites-le » (Jn 2, 5). Cela vous fera du bien de participer avec confiance à un chemin communautaire qui sache libérer en vous et autour de vous les meilleures énergies. La vocation est un fruit qui mûrit dans le champ bien cultivé de l’amour réciproque qui se fait service mutuel, dans le contexte d’une authentique vie ecclésiale. Aucune vocation ne naît toute seule ou ne vit pour elle-même. La vocation jaillit du cœur de Dieu et germe dans la bonne terre du peuple fidèle, dans l’expérience de l’amour fraternel. Jésus n’a-t-il peut-être pas dit : « À ceci tous reconnaîtront que vous êtes mes disciples : si vous avez de l'amour les uns pour les autres » (Jn 13, 35) ?
4. Chers frères et sœurs, vivre cette « haute mesure de la vie chrétienne ordinaire » (cf. Jean-Paul II, Lett. apost. Novo millennio ineunte, n. 31), signifie parfois aller à contre-courant et comporte de rencontrer également des obstacles, en dehors de nous et en nous. Jésus lui-même nous avertit : la bonne semence de la Parole de Dieu est souvent volée par le Malin, bloquée par les difficultés, étouffée par des préoccupations et des séductions mondaines (cf. Mt 13, 19-22). Toutes ces difficultés pourraient nous décourager, en nous faisant nous replier sur des voies apparemment plus commodes. Mais la véritable joie des appelés consiste à croire et à faire l’expérience que le Seigneur, lui, est fidèle, et qu’avec lui nous pouvons marcher, être des disciples et des témoins de l’amour de Dieu, ouvrir notre cœur à de grands idéaux, à de grandes choses. « Nous chrétiens nous ne sommes pas choisis par le Seigneur pour de petites bricoles, allez toujours au-delà, vers les grandes choses. Jouez votre vie pour de grands idéaux ! » (Homélie lors de la messe pour les confirmations, 28 avril 2013). À vous évêques, prêtres, religieux, communautés et familles chrétiennes, je demande d’orienter la pastorale des vocations dans cette direction, en accompagnant les jeunes sur des itinéraires de sainteté qui, étant personnels, « exigent une vraie pédagogie de la sainteté qui soit capable de s'adapter aux rythmes des personnes. Cette pédagogie devra intégrer aux richesses de la proposition adressée à tous les formes traditionnelles d'aide personnelle et de groupe, et les formes plus récentes apportées par les associations et par les mouvements reconnus par l'Église » (Jean-Paul II, Lett. apost. Novo millennio ineunte, n. 31).
Disposons donc notre cœur à être une “bonne terre” pour écouter, accueillir et vivre la Parole et porter ainsi du fruit. Plus nous saurons nous unir à Jésus par la prière, la Sainte Écriture, l’Eucharistie, les Sacrements célébrés et vécus dans l’Église, par la fraternité vécue, plus grandira en nous la joie de collaborer avec Dieu au service du Royaume de miséricorde et de vérité, de justice et de paix. Et la récolte sera abondante, proportionnée à la grâce qu’avec docilité nous aurons su accueillir en nous. Avec ce vœu, et en vous demandant de prier pour moi, je donne de tout cœur à tous ma Bénédiction apostolique.
Du Vatican, le 15 janvier 2014
MESSAGE DU PAPE FRANÇOIS
POUR LA 52e JOURNÉE MONDIALE
DE PRIÈRE POUR LES VOCATIONS
POUR LA 52e JOURNÉE MONDIALE
DE PRIÈRE POUR LES VOCATIONS
Thème
: L’exode, expérience fondamentale de la vocation
Chers frères et sœurs,
Le quatrième dimanche de Pâques nous présente l’icône du Bon Pasteur qui connaît ses brebis, les appelle, les nourrit et les conduit. En ce dimanche, depuis plus de 50 ans, nous vivons la Journée mondiale de prière pour les Vocations. Elle nous rappelle chaque fois l’importance de prier pour que, comme a dit Jésus à ses disciples, « le maître de la moisson envoie des ouvriers pour sa moisson » (cf. Lc 10, 2). Jésus exprime ce commandement dans le contexte d’un envoi missionnaire : il a appelé, outre les douze apôtres, soixante-douze autres disciples et il les envoie deux par deux pour la mission (Lc 10, 1-16). En effet, si l’Église « est par sa nature missionnaire » (Conc. Œcum. Vat. II Décret Ad gentes, n. 2), la vocation chrétienne ne peut que naître à l’intérieur d’une expérience de mission. Aussi, écouter et suivre la voix du Christ Bon Pasteur, en se laissant attirer et conduire par lui et en lui consacrant sa vie, signifie permettre que l’Esprit-Saint nous introduise dans ce dynamisme missionnaire, en suscitant en nous le désir et le courage joyeux d’offrir notre vie et de la dépenser pour la cause du Royaume de Dieu.
L’offrande de sa vie dans cette attitude missionnaire est possible seulement si nous sommes capables de sortir de nous-mêmes. En cette 52ème Journée mondiale de prière pour les Vocations, je voudrais donc réfléchir sur cet “exode” particulier qu’est la vocation, ou, mieux, notre réponse à la vocation que Dieu nous donne. Quand nous entendons la parole “exode”, notre pensée va immédiatement aux débuts de la merveilleuse histoire d’amour entre Dieu et le peuple de ses enfants, une histoire qui passe à travers les jours dramatiques de l’esclavage en Égypte, l’appel de Moïse, la libération et le chemin vers la Terre promise. Le livre de l’Exode – le second livre de la Bible –, qui raconte cette histoire, représente une parabole de toute l’histoire du salut, et aussi de la dynamique fondamentale de la foi chrétienne. En effet, passer de l’esclavage de l’homme ancien à la vie nouvelle dans le Christ est l’œuvre rédemptrice qui advient en nous par la foi (Ep 4, 22-24). Ce passage est un “exode” véritable et particulier, c’est le chemin de l’âme chrétienne et de l’Église entière, l’orientation décisive de l’existence tournée vers le Père.
À la racine de chaque vocation chrétienne, il y a ce mouvement fondamental de l’expérience de foi : croire veut dire se laisser soi-même, sortir du confort et de la rigidité du moi pour centrer notre vie en Jésus Christ ; abandonner comme Abraham sa propre terre en se mettant en chemin avec confiance, sachant que Dieu indiquera la route vers la nouvelle terre. Cette “sortie” n’est pas à entendre comme un mépris de sa propre vie, de sa propre sensibilité, de sa propre humanité ; au contraire, celui qui se met en chemin à la suite du Christ trouve la vie en abondance, en se mettant lui-même tout entier à la disposition de Dieu et de son Royaume. Jésus dit : « Celui qui aura quitté, à cause de mon nom, des maisons, des frères, des sœurs, un père, une mère, des enfants, ou une terre, recevra le centuple, et il aura en héritage la vie éternelle » (Mt 19, 29). Tout cela a sa racine profonde dans l’amour. En effet, la vocation chrétienne est surtout un appel d’amour qui attire et renvoie au-delà de soi-même, décentre la personne, amorçant « un exode permanent allant du je enfermé sur lui-même vers sa libération dans le don de soi, et précisément ainsi vers la découverte de soi-même, plus encore vers la découverte de Dieu » (Benoît xvi, Lett. enc. Deus caritas est, n.6).
L’expérience de l’exode est un paradigme de la vie chrétienne, en particulier de celui qui embrasse une vocation de dévouement particulier au service de l’Évangile. Il consiste en une attitude toujours renouvelée de conversion et de transformation, dans le fait de rester toujours en chemin, de passer de la mort à la vie ainsi que nous le célébrons dans toute la liturgie : c’est le dynamisme pascal. Au fond, depuis l’appel d’Abraham à celui de Moïse, depuis le chemin pérégrinant d’Israël dans le désert à la conversion prêchée par les prophètes, jusqu’au voyage missionnaire de Jésus qui culmine dans sa mort et sa résurrection, la vocation est toujours cette action de Dieu qui nous fait sortir de notre situation initiale, nous libère de toute forme d’esclavage, nous arrache à nos habitudes et à l’indifférence et nous projette vers la joie de la communion avec Dieu et avec les frères. Répondre à l’appel de Dieu, donc, c’est le laisser nous faire sortir de notre fausse stabilité pour nous mettre en chemin vers Jésus Christ, terme premier et dernier de notre vie et de notre bonheur.
Cette dynamique de l’exode ne concerne pas seulement l’appel particulier, mais l’action missionnaire et évangélisatrice de toute l’Église. L’Église est vraiment fidèle à son Maître dans la mesure où elle est une Église “en sortie”, sans être préoccupée d’elle-même, de ses structures et de ses conquêtes, mais plutôt capable d’aller, de se mouvoir, de rencontrer les enfants de Dieu dans leur situation réelle et de compatir à leurs blessures. Dieu sort de lui-même dans une dynamique trinitaire d’amour, écoute la misère de son peuple et intervient pour le libérer (Ex 3, 7). L’Église est aussi appelée à cette manière d’être et d’agir : l’Église qui évangélise sort à la rencontre de l’homme, annonce la parole libératrice de l’Évangile, prend soin avec la grâce de Dieu des blessures des âmes et des corps, relève les pauvres et ceux qui sont dans le besoin.
Chers frères et sœurs, cet exode libérateur vers le Christ et vers les frères représente aussi le chemin vers la pleine compréhension de l’homme et pour la croissance humaine et sociale dans l’histoire. Écouter et accueillir l’appel du Seigneur n’est pas une question privée et intimiste qui peut se confondre avec l’émotion du moment ; c’est un engagement concret, réel et total, qui embrasse notre existence et la met au service de la construction du Royaume de Dieu sur la terre. Par conséquent, la vocation chrétienne, enracinée dans la contemplation du cœur du Père, pousse en même temps à l’engagement solidaire en faveur de la libération des frères, surtout des plus pauvres. Le disciple de Jésus a le cœur ouvert à son horizon immense, et son intimité avec le Seigneur n’est jamais une fuite de la vie et du monde mais, au contraire, « se présente essentiellement comme communion missionnaire » (Exhort. Apost. Evangelii gaudium, n. 23).
Cette dynamique d’exode vers Dieu et vers l’homme remplit la vie de joie et de sens. Je voudrais le dire surtout aux plus jeunes qui, en raison de leur âge et de la vision de l’avenir qui s’ouvre devant leurs yeux, savent être disponibles et généreux. Parfois, les inconnues et les préoccupations pour l’avenir et l’incertitude qui entache le quotidien risquent de paralyser leurs élans, de freiner leurs rêves au point de penser qu’il ne vaut pas la peine de s’engager et que le Dieu de la foi chrétienne limite leur liberté. Au contraire, chers jeunes, n’ayez pas peur de sortir de vous-même et de vous mettre en chemin ! L’Évangile est la Parole qui libère, transforme et rend plus belle notre vie. Comme il est beau de se laisser surprendre par l’appel de Dieu, d’accueillir sa Parole, de mettre les pas de votre existence dans les pas de Jésus, dans l’adoration du mystère divin et du dévouement généreux aux autres ! Votre vie deviendra chaque jour plus riche et plus joyeuse !
La Vierge Marie, modèle de toute vocation, n’a pas craint de prononcer son “fiat” à l’appel du Seigneur. Qu’elle vous accompagne et qu’elle vous guide. Avec le courage généreux de la foi, Marie a chanté la joie de sortir d’elle-même et de confier à Dieu ses projets de vie. Nous nous adressons à elle pour être pleinement disponibles au dessein que Dieu a sur chacun de nous ; pour que grandisse en nous le désir de sortir et d’aller, avec sollicitude, vers les autres (cf. Lc 1, 39). Que la Vierge Mère nous protège et qu’elle intercède pour nous tous !
Du Vatican, le 29 mars 2015
Dimanche des Rameaux
Franciscus
MESSAGE DU PAPE FRANÇOIS
POUR LA 53e JOURNÉE MONDIALE
DE PRIÈRE POUR LES VOCATIONS
POUR LA 53e JOURNÉE MONDIALE
DE PRIÈRE POUR LES VOCATIONS
L’Église,
mère des vocations
Chers frères et sœurs,Comme je voudrais, au cours du Jubilé extraordinaire de la Miséricorde, que tous les baptisés puissent expérimenter la joie d’appartenir à l’Église ! Puissent-ils redécouvrir que la vocation chrétienne, ainsi que les vocations particulières, naissent au sein du peuple de Dieu et sont des dons de la miséricorde divine. L’Église est la maison de la miséricorde, et constitue le « terreau » où la vocation germe, grandit et porte du fruit.
Pour cette raison, je vous invite tous, en cette 53ème Journée Mondiale de Prière pour les Vocations, à contempler la communauté apostolique, et à être reconnaissants pour le rôle que joue la communauté dans le parcours vocationnel de chacun. Dans la Bulle d’indiction du Jubilé extraordinaire de la Miséricorde, j’ai fait mémoire des paroles de saint Bède le Vénérable concernant la vocation de saint Matthieu : « Miserando atque eligendo » (« Jésus regarda Matthieu avec un amour miséricordieux, et le choisit ») (Misericordiae Vultus, n. 8). L’action miséricordieuse du Seigneur pardonne nos péchés et nous ouvre à la vie nouvelle qui se concrétise dans l’appel à sa suite et à la mission. Toute vocation dans l’Église a son origine dans le regard plein de compassion de Jésus. La conversion et la vocation sont comme les deux faces d’une même médaille et elles se rappellent sans cesse à nous, dans notre vie de disciple missionnaire.
Dans son Exhortation Apostolique Evangelii nuntiandi, le Bienheureux Paul VI a décrit les étapes du processus d’évangélisation. L’une d’entre elles est l’adhésion à la communauté chrétienne (cf. n. 23), dont on reçoit le témoignage de la foi et la proclamation explicite de la miséricorde du Seigneur. Cette incorporation communautaire comprend toute la richesse de la vie ecclésiale, particulièrement les sacrements. Et l’Église n’est pas seulement un lieu où l’on croit, mais elle est aussi objet de notre foi ; pour cela, dans le Credo, nous disons : « Je crois en l’Église… ».
L’appel de Dieu nous arrive à travers la médiation de la communauté. Dieu nous appelle à faire partie de l’Église et, après un certain temps de maturation en elle, il nous donne une vocation spécifique. Le parcours vocationnel se fait avec les frères et les sœurs que le Seigneur nous donne : c’est une con-vocation. Le dynamisme ecclésial de l’appel est un antidote à l’indifférence et à l’individualisme. Il établit cette communion dans laquelle l’indifférence a été vaincue par l’amour, parce qu’il exige que nous sortions de nous-mêmes, en mettant notre existence au service du dessein de Dieu et en faisant nôtre la situation historique de son peuple saint.
En cette journée consacrée à la prière pour les vocations, je désire exhorter tous les fidèles à prendre leurs responsabilités dans le souci et le discernement des vocations. Quand les apôtres cherchèrent quelqu’un pour remplacer Judas Iscariote, saint Pierre rassembla cent-vingt frères (cf. Ac 1,15) ; et, pour le choix des sept diacres, tout le groupe des disciples fut convoqué (cf. Ac 6,2). Saint Paul donna à Tite des critères spécifiques pour le choix des Anciens (Tt 1,5-9). Également aujourd’hui, la communauté chrétienne est toujours présente à la germination des vocations, à la formation de ceux qui sont appelés et à leur persévérance (cf. Exhort. Ap. Evangelii gaudium, n. 107).
La vocation naît dans l’Église. Dès le début de l’éveil d’une vocation, un ‘sens’ adéquat de l’Église est nécessaire. Personne n’est appelé uniquement pour une région déterminée, ou pour un groupe ou un mouvement ecclésial, mais pour l’Église et pour le monde. « Un signe clair de l’authenticité d’un charisme est son ecclésialité, sa capacité de s’intégrer harmonieusement dans la vie du peuple saint de Dieu, pour le bien de tous » (ibid., n. 130). En répondant à l’appel de Dieu, le jeune voit s’élargir son horizon ecclésial ; il peut découvrir les multiples charismes et réaliser ainsi un discernement plus objectif. De cette manière, la communauté devient la maison et la famille où naît la vocation. Le candidat regarde alors, dans la gratitude, cette médiation communautaire comme un élément auquel il ne peut renoncer pour son avenir. Il apprend à connaître et à aimer ses frères et sœurs qui parcourent un chemin différent du sien ; et ces liens renforcent en tous la communion.
La vocation grandit dans l’Église. Durant le processus de formation, les candidats aux diverses vocations ont besoin de connaître toujours mieux la communauté ecclésiale, en dépassant la vision limitée que nous avons tous au départ. À cette fin, il est opportun de faire des expériences apostoliques en compagnie d’autres membres de la communauté, par exemple : communiquer le message chrétien aux côtés d’un bon catéchiste ; faire l’expérience de l’évangélisation des périphéries avec une communauté religieuse ; découvrir le trésor de la contemplation en passant un temps dans un monastère ; mieux connaître la mission ad gentes (« aux nations ») au contact de missionnaires ; et, avec des prêtres diocésains, approfondir l’expérience de la pastorale en paroisse et dans le diocèse. Pour ceux qui sont déjà en formation, la communauté ecclésiale demeure toujours le milieu éducatif fondamental, objet de toute notre gratitude.
La vocation est soutenue par l’Église. Le parcours vocationnel dans l’Église ne s’arrête pas après l’engagement définitif, mais il continue dans la disponibilité au service, dans la persévérance et par la formation permanente. Celui qui a consacré sa vie au Seigneur est disposé à servir l’Église là où elle en a besoin. La mission de Paul et de Barnabé est un exemple de cette disponibilité ecclésiale. Envoyés en mission par l’Esprit Saint et par la communauté d’Antioche (cf. Ac 13,1-4), ils retournèrent dans cette même communauté et racontèrent ce que le Seigneur avait fait par eux (cf. Ac 14,27). Les missionnaires sont accompagnés et soutenus par la communauté chrétienne qui demeure une référence vitale, en tant que patrie visible offrant sécurité à ceux qui accomplissent leur pèlerinage vers la vie éternelle.
Parmi les opérateurs pastoraux, les prêtres revêtent une importance particulière. À travers leur ministère, se rend présente la parole de Jésus qui a dit : « Je suis la porte des brebis […] Je suis le bon pasteur » (Jn 10, 7.11). Le souci pastoral des vocations est une part fondamentale de leur ministère pastoral. Les prêtres accompagnent ceux qui sont à la recherche de leur vocation, comme aussi ceux qui ont déjà offert leur vie au service de Dieu et de la communauté.
Tous les fidèles sont appelés à prendre conscience du dynamisme ecclésial de la vocation, afin que les communautés croyantes puissent devenir, à l’exemple de la Vierge Marie, ce sein maternel qui accueille le don de l’Esprit Saint (cf. Lc 1, 35-38). La maternité de l’Église s’exprime par la prière persévérante pour les vocations et par l’action éducative et l’accompagnement de ceux qui perçoivent l’appel de Dieu. Elle se réalise aussi dans le choix fait avec soin des candidats au ministère ordonné et à la vie consacrée. Enfin, l’Église est mère des vocations par son soutien continu de ceux qui ont consacré leur vie au service des autres.
Demandons au Seigneur d’accorder une profonde adhésion à l’Église à toutes les personnes qui sont en cheminement vocationnel ; et que l’Esprit Saint renforce chez les pasteurs et chez tous les fidèles la communion, le discernement, ainsi que la paternité et la maternité spirituelles.
Père de miséricorde, qui as donné ton Fils pour notre salut et qui nous soutiens sans cesse par les dons de ton Esprit, donne-nous des communautés chrétiennes vivantes, ferventes et joyeuses, qui soient sources de vie fraternelle et qui suscitent chez les jeunes le désir de se consacrer à Toi et à l’évangélisation. Soutiens-les dans leur application à proposer une catéchèse vocationnelle adéquate et différents chemins de consécration particulière. Donne la sagesse pour le nécessaire discernement vocationnel, afin qu’en tous resplendisse la grandeur de ton Amour miséricordieux. Marie, Mère et éducatrice de Jésus, intercède pour chaque communauté chrétienne, afin que, rendue féconde par l’Esprit Saint, elle soit source de vocations authentiques au service du peuple saint de Dieu.
Du Vatican, le 29 novembre 2015.
Premier dimanche de l’Avent
Franciscus
MESSAGE DU PAPE FRANÇOIS
POUR LA 54e JOURNÉE MONDIALE
DE PRIÈRE POUR LES VOCATIONS
POUR LA 54e JOURNÉE MONDIALE
DE PRIÈRE POUR LES VOCATIONS
Poussés
par l'Esprit pour la mission
Chers frères et sœurs,
Au cours des années passées, nous avons eu l’occasion de réfléchir sur deux aspects qui concernent la vocation chrétienne : l’invitation à ‘‘sortir de soi’’ pour se mettre à l’écoute de la voix du Seigneur et l’importance de la communauté ecclésiale en tant que lieu privilégié où l’appel de Dieu naît, s’alimente et s’exprime.
À présent, à l’occasion de la 54ème Journée Mondiale de Prière pour les Vocations, je voudrais m’arrêter sur la dimension missionnaire de l’appel chrétien. Celui qui s’est laissé attirer par la voix de Dieu et s’est mis à la suite de Jésus découvre bien vite en soi l’irrésistible désir de porter la Bonne Nouvelle à ses frères, à travers l’évangélisation et le service de la charité. Tous les chrétiens sont constitués missionnaires de l’Évangile ! Le disciple, en effet, ne reçoit pas le don de l’amour de Dieu pour une consolation privée ; il n’est pas appelé à porter lui-même ni à défendre les intérêts d’une entreprise ; il est simplement touché et transformé par la joie de se sentir aimé de Dieu et il ne peut pas garder cette expérience pour lui-même : « La joie de l’Évangile qui remplit la vie de la communauté des disciples est une joie missionnaire ». (Exhort. ap. Evangelii gaudium, n. 21)
L’engagement missionnaire, par conséquent, n’est pas quelque chose qu’on va ajouter à la vie chrétienne, comme s’il s’agissait d’un ornement, mais au contraire, il est situé au cœur de la foi même : la relation avec le Seigneur implique le fait d’être envoyé dans le monde comme prophète de sa parole et témoin de son amour.
Même si nous expérimentons en nous beaucoup de fragilité et que nous pouvons parfois nous sentir découragés, nous devons élever la tête vers Dieu, sans nous laisser écraser par le sentiment d’inadéquation ou sans céder au pessimisme, qui fait de nous des spectateurs passifs d’une vie fatiguée et routinière. Il n’y a pas de place pour la crainte : c’est Dieu lui-même qui vient purifier nos ‘‘lèvres impures’’, en nous rendant aptes pour la mission : « Ta faute est enlevée, ton péché est pardonné. J’entendis alors la voix du Seigneur qui disait : ‘‘Qui enverrai-je ? qui sera notre messager ?’’ Et j’ai répondu : ‘‘Me voici : envoie-moi !’’ » (Is 6, 6-8).
Chaque disciple missionnaire sent dans son cœur cette voix divine qui l’invite à ‘‘passer’’ au milieu des gens, comme Jésus, ‘‘en guérissant et faisant du bien’’ à tous (cf. Ac 10, 38). J’ai déjà eu l’occasion de rappeler, en effet, qu’en vertu du baptême, chaque chrétien est un ‘‘christophe’’, c’est-à-dire ‘‘quelqu’un qui porte le Christ’’ à ses frères (cf. Catéchèse, 30 janvier 2016). Cela vaut de manière particulière pour ceux qui sont appelés à une vie de consécration spéciale et également pour les prêtres, qui ont généreusement répondu : ‘‘Me voici, Seigneur, envoie-moi !’’. Avec un enthousiasme missionnaire renouvelé, ils sont appelés à sortir des enceintes sacrées du temple, pour permettre à la tendresse de Dieu de déborder en faveur des hommes (cf. Homélie de la Messe chrismale, 24 mars 2016). L’Église a besoin de prêtres ainsi : confiants et sereins pour avoir découvert le vrai trésor, anxieux d’aller le faire connaître à tous avec joie (cf. Mt 13, 44) !
Certes, nombreuses sont les questions qui surgissent lorsque nous parlons de la mission chrétienne : que signifie être missionnaire de l’Évangile ? Qui nous donne la force et le courage de l’annonce ? Quelle est la logique évangélique dont s’inspire la mission ? À ces interrogations, nous pouvons répondre en contemplant trois scènes de l’Évangile : le début de la mission de Jésus dans la synagogue de Nazareth (cf. Lc 4, 16-30) ; le chemin que parcourt le Ressuscité aux côtés des disciples d’Emmaüs (cf. Lc 24, 13-35) ; enfin, la parabole de la semence (cf. Mc 4, 26-27).
Jésus est oint par l’Esprit et envoyé. Être disciple missionnaire signifie participer activement à la mission du Christ, que Jésus lui-même décrit dans la synagogue de Nazareth : « L’Esprit du Seigneur est sur moi parce que le Seigneur m’a consacré par l’onction. Il m’a envoyé porter la Bonne Nouvelle aux pauvres, annoncer aux captifs leur libération, et aux aveugles qu’ils retrouveront la vue, remettre en liberté les opprimés, annoncer une année favorable accordée par le Seigneur » (Lc 4, 18-19). C’est aussi notre mission : être oints par l’Esprit et aller vers nos frères annoncer la Parole, en devenant pour eux un instrument de salut.
Jésus se joint à notre chemin. Face aux questions qui émergent du cœur de l’homme et aux défis qui surgissent de la réalité, nous pouvons éprouver une sensation d’égarement et sentir un manque d’énergies et d’espérance. Il y a le risque que la mission chrétienne apparaisse comme une pure utopie irréalisable ou, en tout cas, comme une réalité qui dépasse nos forces. Mais si nous contemplons Jésus ressuscité, qui marche aux côtés des disciples d’Emmaüs (cf. Lc 24, 13-15), notre confiance peut être ravivée ; dans cette scène évangélique, nous avons une authentique ‘‘liturgie de la route’’, qui précède celle de la Parole et du Pain rompu et nous fait savoir que, à chacun de nos pas, Jésus est à nos côtés ! Les deux disciples, blessés par le scandale de la Croix, sont en train de retourner chez eux en parcourant la voie de l’échec : ils portent dans leur cœur une espérance brisée et un rêve qui ne s’est pas réalisé. En eux, la tristesse a pris la place de la joie de l’Évangile. Que fait Jésus ? Il ne les juge pas, il parcourt la même route qu’eux et, au lieu d’élever un mur, il ouvre une nouvelle brèche. Lentement, il transforme leur découragement, il rend brûlants leurs cœurs et ouvre leurs yeux, en annonçant la Parole et en rompant le Pain. De la même manière, le chrétien ne porte pas seul l’engagement de la mission, mais dans les fatigues et dans les incompréhensions, il fait aussi l’expérience que « Jésus marche avec lui, parle avec lui, respire avec lui, travaille avec lui. Il ressent Jésus vivant avec lui au milieu de l’activité missionnaire » (Exhort. ap. Evangelii gaudium, n. 266).
Jésus fait germer la semence. Enfin, il est important d’apprendre de l’Évangile le style de l’annonce. Souvent, en effet, même avec les meilleures intentions, il peut arriver de céder à une certaine frénésie du pouvoir, au prosélytisme ou au fanatisme intolérant. L’Évangile, au contraire, nous invite à rejeter l’idolâtrie du succès et de la puissance, la préoccupation excessive pour les structures, et une certaine anxiété qui répond plus à un esprit de conquête qu’à l’esprit du service. La semence du Royaume, bien que petite, invisible et parfois insignifiante, grandit silencieusement grâce à l’œuvre incessante de Dieu : « Il en est du règne de Dieu comme d’un homme qui jette en terre la semence : nuit et jour, qu’il dorme ou qu’il se lève, la semence germe et grandit, il ne sait comment » (Mc 4, 26-27). Voilà notre première confiance : Dieu dépasse nos attentes et il nous surprend par sa générosité, en faisant germer les fruits de notre travail au-delà des calculs de l’efficacité humaine.
Par cette confiance évangélique, nous nous ouvrons à l’action silencieuse de l’Esprit, qui est le fondement de la mission. Il ne peut jamais y avoir de pastorale vocationnelle ni de mission chrétienne sans la prière assidue et contemplative. En ce sens, il faut alimenter la vie chrétienne par l’écoute de la Parole de Dieu et, surtout, prendre soin de la relation personnelle avec le Seigneur dans l’adoration eucharistique, ‘‘lieu’’ privilégié de la rencontre avec Dieu.
C’est cette intime amitié avec le Seigneur que je désire vivement encourager, surtout pour implorer du ciel de nouvelles vocations au sacerdoce et à la vie consacrée. Le peuple de Dieu a besoin d’être guidé par des pasteurs qui consacrent leur vie au service de l’Évangile. C’est pourquoi je demande aux communautés paroissiales, aux associations et aux nombreux groupes de prière présents dans l’Église : contre la tentation du découragement, continuez à prier le Seigneur d’envoyer des ouvriers à sa moisson et de nous donner des prêtres amoureux de l’Évangile, capables d’être proches de leurs frères et d’être, ainsi, un signe vivant de l’amour miséricordieux de Dieu.
Chers frères et sœurs, aujourd’hui encore, nous pouvons retrouver l’ardeur de l’annonce et proposer, surtout aux jeunes, la sequela du Christ. Face à la sensation répandue d’une foi fatiguée ou réduite à de purs ‘‘devoirs à accomplir’’, nos jeunes ont le désir de découvrir l’attrait toujours actuel de la figure de Jésus, de se laisser interroger et provoquer par ses paroles et par ses gestes et, enfin, de rêver, grâce à lui, d’une vie pleinement humaine, joyeuse de se consacrer à l’amour.
La Très Sainte Marie, Mère de notre Sauveur, a eu le courage d’embrasser ce rêve de Dieu, en mettant sa jeunesse et son enthousiasme dans ses mains. Que son intercession nous obtienne la même ouverture de cœur, la diligence à professer notre ‘‘Me voici’’ à l’appel du Seigneur et la joie de nous mettre en route (Lc 1, 39), comme elle, pour l’annoncer au monde entier.
Du Vatican, le 27 novembre 2016
Premier dimanche de l’Avent
François
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