Homélie de Saint Jean-Paul II
(Mercredi 8
décembre 2004)
1. « Réjouis-toi,
comblée de grâce, le Seigneur est avec toi ! »
(Lc 1, 28).
À
travers ces paroles de l'Archange Gabriel, nous nous adressons à la Vierge Marie
plusieurs fois par jour. Nous les répétons aujourd'hui avec une joie fervente,
en la solennité de l'Immaculée Conception, en rappelant la date du 8 décembre
1854, lorsque le bx Pie IX (Giovanni Maria Mastai Ferretti, 1846-1878)proclama
cet admirable dogme de la foi catholique précisément dans cette
Basilique vaticane [...]
2. Combien est grand le mystère de l'Immaculée
Conception, que nous présente la liturgie d'aujourd'hui ! Un mystère qui
ne cesse d'attirer la contemplation des croyants et qui inspire la réflexion
des théologiens. Le thème du Congrès qui vient d'être rappelé -« Marie
de Nazareth accueille le Fils de Dieu dans l'histoire »- a permis un
approfondissement de la doctrine de la conception immaculée de Marie comme
présupposé pour l'accueil en son sein virginal du Verbe de Dieu incarné,
Sauveur du genre humain.
« Pleine
de grâce », «κεχαριτωμενη» :
c'est à travers cette appellation, selon l'original en grec de l'Évangile de
Luc, que l'Ange s'adresse à Marie. Tel est le nom avec lequel Dieu, à
travers son messager, a voulu qualifier la Vierge. C'est de
cette façon qu'Il l'a pensée et vue depuis toujours, ab aeterno.
3. Dans l'hymne de la Lettre aux Éphésiens, qui
vient d'être proclamé, l'Apôtre loue Dieu le Père car il « nous a bénis par toutes sortes de
bénédictions spirituelles aux cieux, dans le Christ » (1, 3). Avec
quelle bénédiction très spéciale Dieu s'est-il adressé à Marie depuis le début
des temps ! Marie est véritablement bénie entre toutes les femmes (cf.
Lc 1, 42)!
Le Père l'a choisie dans le Christ avant la création
du monde, afin qu'elle soit sainte et immaculée en sa présence dans l'amour, la
prédestinant d'avance à l'adoption filiale par Jésus Christ (cf. Ep 1, 4-5).
4. La prédestination de Marie, comme celle de chacun
de nous, est relative à la prédestination du Fils. Le Christ est la souche
qui devait écraser la tête de l'antique serpent, selon le Livre
de la Genèse (cf. Gn 3, 15) ; c'est l'Agneau sans
tache (cf. Ex 12, 5; 1 P 1, 19), immolé pour racheter l'humanité
du péché.
En prévision de sa mort salvifique, Marie, sa Mère, a
été préservée du péché originel et de tout autre péché. Dans la victoire du
nouvel Adam, il y a également celle de la nouvelle Ève, mère des rachetés.
L'Immaculée est ainsi un signe d'espérance pour tous les vivants, qui ont
vaincu Satan par le sang de l'Agneau (cf. Ap 12, 11).
5. Nous contemplons aujourd'hui l'humble jeune fille
de Nazareth sainte et immaculée en présence de Dieu dans la charité
(cf. Ep 1, 4), cette charité qui, dans sa source originelle,
est Dieu lui-même, un et trine.
Œuvre sublime de la Très Sainte Trinité
que l'Immaculée Conception de la
Mère du Rédempteur! Pie IX, dans la Bulle Ineffabilis
Deus, rappelle que le Tout-Puissant a établi « par un seul et même
décret l'origine de Marie et l'incarnation de la Sagesse divine » (Pie
IX Pontificis Maximi Acta, Pars prima, p. 559).
Le oui de la Vierge à l'annonce de
l'Ange prend place dans la situation concrète de notre condition terrestre, en
humble obéissance à la volonté divine de sauver l'humanité non pas de
l'histoire, mais dans l'histoire. En effet, préservée de toute tache de péché
originel, la « nouvelle Ève » a bénéficié de façon particulière de l'œuvre
du Christ comme Médiateur et Rédempteur très parfait. Rachetée la première par
son Fils, participant en plénitude à sa sainteté, Elle est déjà ce que toute l'Église
désire et espère être. Elle est l'icône eschatologique de l'Église.
6. C'est pourquoi l'Immaculée, qui marque « le début
de l'Église, épouse du Christ sans tache et sans ride, resplendissante de
beauté » (Préface), précède toujours le Peuple de Dieu, dans le pèlerinage
de la foi vers le Royaume des cieux (cf. Lumen gentium, n. 58 ; Enc. Redemptoris
Mater, n. 2).
Dans la
Conception immaculée de Marie, l'Église voit se projeter,
anticipée à travers son membre le plus noble, la grâce salvifique de Pâques.
Dans l'événement de l'Incarnation, elle trouve le Fils
et la Mère
indissolublement associés: « Celui qui est son Seigneur et sa Tête et
celle qui, en prononçant le premier fiat de la Nouvelle Alliance,
préfigure sa condition d'épouse et de Mère » (Redemptoris
Mater, n. 1).
7. À Toi, Vierge immaculée, prédestinée par Dieu
par-dessus toute autre créature comme avocate de grâce et modèle de sainteté
pour son peuple, je renouvelle aujourd'hui de façon particulière l'acte de
consécration de toute l'Église.
Puisses-tu guider ses fils dans leur pèlerinage de foi, les faisant
devenir toujours plus obéissants et fidèles à la Parole de Dieu.
Puisses-tu accompagner chaque chrétien sur le chemin de la conversion et de
la sainteté, dans la lutte contre le péché et dans la recherche de la beauté
véritable, qui constitue toujours la marque et le reflet de la Beauté divine.
Puisses-tu encore obtenir la paix et le salut pour tous les peuples. Que le Père éternel, qui t'a voulue Mère immaculée
du Rédempteur, renouvelle également dans notre temps, à travers toi, les
prodiges de son amour miséricordieux. Amen !
Source principale : vatican.va (« Rév. x gpm»).
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