Journée
d’hier… apparemment stérile, mon livre reste en plan depuis le début de
Décembre alors qu’il évolue, frémit, s’agite, existe en moi mais j’ai si peu de
temps à lui donner, quoique je ne sois pas plus disponible à ma femme, à notre
enfant, selon ce qu’elles me disent et me réclament, qu’à moi-même et à ces
écrits que je dois… à je ne sais qui… à je ne sais quoi, car c’est virtuel mais
pourtant certain, ce lectorat, cette époque…mais journée marquante. Une phrase
de notre recteur à la messe des familles, incidente, mais forte, presque
involontaire, on ne fait pas sa prière, on prie…et puis Marguerite voulant
faire une vidéo à offrir sa petite cousine de deux mois… ratant complètement
selon moi sa première prise de vues, confuse et ennuyeuse… et acceptant après
le choc de ma critique, de préparer son scenario et ses plans pour me confier
la tenue de l’appareil… qui n’enregistre pas
et nous impose une seconde mouture. Une grande heure face à face en
observant comment notre fille pratique son talent de metteuse en scène, de
chorégraphe, de conteuse en l’appliquant à de la tendresse… Journée ainsi, avec
le bois à transbahuter pendant une éclaircie et une interruption des déluges de
ces semaines-ci… Quelques pages enfin de MAURIAC [1] systématiquement
collectionné et guetté en bouquinerie et en marché internet par ma chère femme…
la dialectique de l’écriture de celui-ci et du choix de ses personnages, les
abandonner ou les reprendre, sa sensibilité aux jugements de SARTRE sur son œuvre,
tandis que de soir en soir, j’ai lu cette semaine Jean d’ORMESSON, sans
structure, sans profondeur mais touchant par une plume impeccable et la
pauvreté convenue de ses propres souvenirs, sa richesse avouée mais pas dite n’étant
que les autres… ce qui peut faire arriver à la grandeur. Un
numéro de Elle que j’avais chipé en salle d’accueil médical, pour sa couverture
puisque notre fille veut être styliste. Je croyais à un numéro sur les robes de
mariées, et ne l’ouvre que par hasard hier en mettant le couvert de notre dîner :
texte au titre provocateur qui le trahit d’ailleurs, puis photos seulement ce
matin [2]. Coincidence, je
reçois un « diaporama » tandis que je scannais le numéro, la femme,
sa beauté. Il y a de l’excellent dans nos débats de maintenant : la beauté
n’est plus objet ou prédation, les débuts de la vie, la fin des vies ne sont
plus des projets de loi ou des rapports, même si pour la « sphère »
politique et publique, c’en sont encore, mais bien des préoccupations de
chacun, pour soi, pour les siens, en famille, et souvent en situation
professionnelle puisque les assistantes maternelles ou les aides à la personne
sont désormais des métiers de substitution ou de commencement pour quantité de
chômeuses et chercheuses d’emploi. Mais fondamentalement, nous ne savons pas
débattre, nous nous bloquons vite, nous sommes superficiels par haine ou peur,
par a priori et nos formes de débat vite binaires nous font nous heurter non en
vérité mais à propos de caricatures des thèses ou des convictions ou de la vie
de l’autre, que nous connaissons de moins en moins, dans l’intimité et dans la généralité. L’indivualisme
au lieu de la solidarité, qui me paraît la mûe de nos sociétés, surtout en France,
enferme et recroqueville, enorgueillit et apeure. De plus en plus convaincu de
ce qu’apporte la mémoire en matériaux, en associations d’idées, en rapprochements
et constatant combien elle est délaissée – rien que de mettre de côté les « unes »
de Ouest-France pour faire des pages
intérieures de l’allume-feu pour notre poêle me fait voir la répétitivité des
discussions (AYRAULT en Février 2012 stigmatisant la politique récessive de
ceux qu’il va remplacer pour… la continuer et la renforcer), la cécité des
experts (une analyse du « front de la foi » en Décembre 2012 ne
prévoit en rien la pérennisation et les rééditions de la Manif.pour tous qui il est vrai n’a pas encore trouvé le
nom que précisément va lui inspirer le slogan présidentiel) et parfois quelques
gemmes (un livre de BEFFA antérieur à l’élection présidentielle et déplorant l’inertie
et la faiblesse de l’Etat, sous sa plume de très grand patron… [3]). Il m’apparaît en me
laissant conduire par ces matériaux et rêveries – tout l’après-midi d’hier à
chercher de bons portraits de ma belle-mère dans nos paquets et albums de
photos. et n’en pas trouver, mais à voir aussi en vingt ans ma chère femme de
silhouette et de visage, puis en neuf ans notre adorable fille, et moi… parfois
à faire peur, parfois conciliable… les idées que nous portons les uns les
autres de nos apparences physiques… il m’apparaît que politique et religion, chez
nous, pâtissent d’une même crise ni économique, ni sociale, ni morale, mais
mentale, presque d’ordre cérébral…, d’un même manque de franchise, de véritable
considération de la vie, de la réalité, d’une même erreur, celle de chercher
des refuges dans des mots et des images éprouvés. Sans réfléchir librement
jusqu’à retrouver les fondements, si souvent enfouis, sans écouter cette sorte
d’esprit commun qui ne s’écrit ni ne se dit mais gît en nous quand nous nous
taisons et nous arrêtons. – Trop de bla-bla, dit Marguerite ce matin évoquant
ce que nous vivons ou allons vivre : un enterrement, un baptême. Je lui réponds :
il y a quand même le sacrement. Le signe de la croix, l’eau, c’est à juste
titre, ô combien, ce qu’elle a retenu et qui lui semble commun. – L’Esprit
saint ne fait pas sien les compartimentages que nous faisons e subissons entre
profane et sacré, politique et intime. Il inspire tout l’homme, le croyant et l’incroyant,
le pieux et le distrait, chacun sans doute excessif et ne sachant pas respirer
complètement. – Je ne me sens toujours pas à l’aise avec notre nouveau pape,
des surabondances de paroles du genre patronage, des catéchèses dont d’autres s’extasient
qu’elles soient à la portée de chacun. La banalité ne m’attirant pas, elles ne
sont donc pas à ma portée : je dois manquer quelque chose. Un jeune ami,
mon soutien du tout au tout pendant ma tentative d’élection à la succession d’Edgar
FAURE dans le Haut-Doubs, région splendide s’il en est, lui, planiste chez Alcatel, quand cela existait encore, mais démuni pour ce qu'on appelle la culture générale et même d’une certaine « teinture »
religieuse : je l’invite avec une de ses sœurs et le mari de celle-ci,
quelques années plus tard, à venir passer un mois en Grèce où j’étais affecté :
je n’ai jamais vu quelqu’un faire autant silence, contempler aussi intensément,
comprendre assurément comme lui du haut de l’Acro-Corinthe quand nous méditâmes
Paul et la cité antique. J'en ai été bouleversé, j'avais déjà éprouvé sa disponibilité, sa fidélité. J'ai vu que c'était un seul tenant. Aujourd'hui, Eglise et politique enseignent - s'en rendent-elles compte - une fragmentation une, désarmant les uns, mettant au combat les autres, et nous sommes successivement ces uns et ces autres.
Prier… parmi les frères,
l’homme de basse condition pourra s’enorgueillir de ce que Dieu l’élève… s’il
manque à l‘un de vous la sagesse, qu’il la demande à Dieu : lui qui donne
à tous avec simplicité et sans faire de reproches, il la lui donnera. Mais qu’il
demande avec foi, sans la moindre hésitation, car celui qui hésite est
semblable au va-et-vient ds flots de la mer agités par le vent. Qu’il ne s’imagine
pas, cet homme-là, qu’il recevra du Seigneur quoi que ce soit, s’il est
partagé, instable dans tout ce qu’il fait. Regarder,
suivre chacun des apôtres, nos épistoliers : mystique comme Paul ou
sociologue, psychologue comme Jacques et pasteur par excellence en cela… nous
les voyons en enseignant, alors qu’ils payent d’abord de leur personne, de leur
expérience des hommes et de Dieu, dans leur travail missionnaire, dans leur vie
intime, spirituelle. Ils enseignent sans doute révélation et mémoire, mais ils disent
juste et nous atteignent par cette science humaine qu’a déposée et que mobilise
en eux l’Esprit Saint. [4]. Toi, tu es bon,
tu fais du bien, apprends-moi tes commandements. En nous, l’Esprit, et Le
refuser, Le repousser, c’est nous organiser pour notre malheur, notre cécité. Pourquoi
cette génération demande-t-elle un signe ? La génération du Christ, ses contemporains, ceux qui l’approchent, survinrent
et se mirent à discuter avec Jésus. Notre
générations archi-pourvue en exemples et en enseignements, constamment
gratifiée mais marchant à côté, parfois avec violence. Toujours à l’époque du Christ ou à la nôtre, l’idée
préconçue du Messie, de Dieu, de la morale, des rites, de l’attendu. Alors que
l’œuvre du Seigneur, de l’Esprit en nous, est inattendue. « Amen, je
vous le déclare : aucun signe ne sera donné à cette génération ». Puis,
il les quitta, remonta en barque et il partit vers l’autre rive.
[2] - Marie-Josèphe
BONNET … Il y a une telle homophobie
chez les adversaires du mariage pour tous que cela rend tout débat impossible à
l’intérieure de la « communauté » homosexuelle. C’est grave parce que
tout le monde n’est pas d’accord … C’est humain d’avoir envie de faire un
enfant, mais ce désir est surdéterminé par une pression sociale très forte… La
lesbienne, c’était l’archétype même de la femme sexuellement libre et socialement
indépendante… Mon objectif à moi, c’est l’émancipation de l’individu, vers une
vie commune respectueuse des différences. La contre-culture dont a été porteur
le mouvement homosexuel est à mon regret en train de disparaître… Elle .n° 3499 Janvier
2013 pp. 76 & 77
[3] - Jean-Louis
Beffa, La France doit choisir
(Le Seuil . janvier 2012 . 283 pages)
qui se prononce contre « l’acceptation de la primauté de l’actionnaire
qui est à l’origine de la désindustrialisation française ». On a tout faux
quand on passe « brutalement … d’ un Etat puissant et décisif à
un Etat passif, voire inerte »
[4] - lettre de Jacques I 1 à 11 ; psaume CXIX ; évangile selon
saint Marc VIII 11 à 13
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