mardi 2 août 2016

compilation du Monde.fr sur l'Islam en France


Islam en France : « La question du financement des lieux de culte est accessoire »

LE MONDE | 01.08.2016 à 17h30 • Mis à jour le 02.08.2016 à 11h31 | Propos recueillis par Perrine Mouterde
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Dans la mosquée de la Saint-Etienne-du-Rouvray, commune située près de Rouen où a été tué le père Jacques Hamel, le 26 juillet.

Instaurer une « taxe halal » pour financer l’islam en France, suspendre temporairement les financements étrangers de mosquées… Depuis l’assassinat du père Jacques Hamel le 26 juillet à Saint-Etienne-du-Rouvray, dans une attaque revendiquée par l’organisation djihadiste Etat islamique (EI), plusieurs responsables politiques ont avancé des propositions pour réformer l’organisation et le financement de l’islam en France.

Pour Nathalie Goulet, sénatrice UDI de l’Orne et rapporteure d’une mission d’information sur le sujet, dont le rapport a été publié le 5 juillet, la priorité est de mettre fin au principe des imams détachés et d’établir une fondation transparente afin de centraliser les financements de l’islam.
L’influence de pays étrangers dans l’organisation de l’islam de France est souvent dénoncée. Est-ce une réalité ?
Nathalie Goulet : Le poids de certains pays a été une grosse surprise au moment de la rédaction de notre rapport. Mais ce ne sont pas forcément ceux que l’on croit qui sont les plus influents. Les pays du Golfe sont bien moins présents que les « pays d’origine », l’Algérie, le Maroc et la Turquie. Ces trois Etats exercent une réelle influence par le biais du financement de bâtiments, d’écoles, de la formation d’imams et de l’envoi d’imams détachés – qui sont des fonctionnaires payés par leur pays d’origine –, et par le biais de la gouvernance du Conseil français du culte musulman (CFCM).
L’Arabie saoudite n’est pas le pays qui finance le plus l’islam en France. Et elle est traditionnellement très attentive à ce qu’elle finance, pour ne pas aggraver une réputation déjà mauvaise.
Manuel Valls s’est dit favorable à la suspension temporaire des financements étrangers des mosquées. Y êtes-vous également favorable ?
Le premier ministre parle de suspendre les financements étrangers, mais par quoi vont-ils être remplacés ? Par des financements du ministère de la fonction publique ? Il est souhaitable qu’il n’y ait plus de financements étrangers, mais c’est une imposture de laisser penser que le problème peut se régler comme ça.
La question du financement des lieux de culte est accessoire. Le Louvre ou l’Institut du monde arabe reçoivent bien des financements étrangers, de façon transparente. Avant tout, il faut travailler à mettre un terme au principe des imams détachés et à celui des imams français qui vont se former au Maroc.
D’autre part, cette proposition de Manuel Valls repose sur l’idée selon laquelle la radicalisation se fait dans les lieux de culte, ce qui n’est pas forcément le cas. Si on réduit la voilure pour la construction des mosquées, on va retourner à l’islam des caves où l’on peut prêcher n’importe quoi.
Il y a, selon votre rapport, 301 imams détachés en France pour environ 2 500 lieux de culte musulmans. En quoi est-ce un problème ?
Il y a 301 fois la possibilité, pour des citoyens français de confession musulmane, d’assister à des prêches dirigés par des imams qui ne sont pas français et sont payés par un Etat étranger. C’est plus problématique que les financements étrangers de mosquées. Là, il ne s’agit pas de pierres…
« La plupart des imams détachés n’ont jamais reçu d’éducation sur la Shoah, l’homophobie, la peine de mort… »
Les imams détachés turcs, par exemple, arrivent sous l’appellation d’assistants sociaux et non d’imams. Ils parlent à peine français, n’ont jamais vu un Arménien de leur vie, ne savent pas qu’en France on reconnaît le génocide arménien. La plupart des imams détachés n’ont jamais reçu d’éducation sur la Shoah, l’homophobie, la peine de mort… Ils n’ont pas ces éléments de contexte importants, or ils jouent un rôle dans les communautés.
Aujourd’hui en France, la formation des imams est éclatée et payante. Cela revient souvent moins cher d’aller se former au Maroc. Il faut mettre en place une formation qui soit homologuée, scientifiquement et religieusement.
Pourquoi cette question du financement est-elle cruciale ?
On considère que l’islam est une religion comme une autre, mais on ne lui donne pas les moyens de l’être. L’islam est une religion récente sur le territoire national, confrontée à un accroissement de sa population. Il y a un besoin de rattrapage par rapport aux autres religions. Les communautés musulmanes ont besoin d’avoir des structures, des écoles, des mosquées, des lieux associatifs. Il faut que les musulmans puissent exercer leur culte de façon décente.
Aujourd’hui, si une fille de 14 ans veut porter le voile, elle va chercher une école religieuse musulmane, mais il y en a très peu. Un enfant juif qui veut manger casher et porter sa kippa trouvera lui une école juive. Les crispations sont plus fortes dans les communautés musulmanes car elles ne disposent pas de tous les outils pour exercer leur culte.
Quelles sont les pistes pour un financement français de l’islam ? Que pensez-vous de l’idée de relancer une « fondation de l’islam de France », évoquée par M. Valls ?
Il faut réactiver cette Fondation pour les œuvres de l’islam de France [créée par décret en 2005] pour que tous les financements transitent par elle. Ceux de l’étranger, et ceux des communautés musulmanes françaises [ce sont elles qui financent, par leurs dons, l’essentiel des coûts de construction et d’entretien des mosquées – seule une vingtaine de mosquées ont été financées par des organisations ou des Etats étrangers].
Cette fondation doit avoir une gouvernance mixte avec un représentant du Conseil d’Etat, un comptable du Trésor. Il faut également mettre en place une comptabilité analytique pour que l’argent algérien soit utilisé pour des lieux de culte algérien, l’argent marocain pour les lieux de culte marocain… C’est nécessaire, si l’on veut que les communautés donnent leur accord à cette fondation. Les Algériens ne veulent pas payer pour les Turcs, et vice versa, même si l’idée d’un lieu de culte algérien n’a pas de sens en France. Si la mise en place de cette fondation a été un échec il y a dix ans, c’est pour des raisons de gouvernance.
Une fois que cette fondation sera établie et fonctionnera de façon transparente, les musulmans qui ont réussi pourront donner de l’argent et obtenir une déduction fiscale. Le premier à avoir mis de l’argent sur le compte de la fondation il y a dix ans, où il se trouve toujours, c’est Serge Dassault [sénateur de l’Essonne et chef d’entreprise].
Il y a urgence pour les communautés musulmanes à s’organiser et à se mettre d’accord sur cette gouvernance. C’est à elles de le faire. Je pense que des choses qui étaient inimaginables il y a dix ans paraissent évidentes dans le contexte actuel, pour des questions de sécurité et de cohésion de la société française. Ces musulmans sont avant tout des Français.
Julien Dray (PS), Nathalie Kosciusko-Morizet (LR) ou François Bayrou (Modem) prônent l’instauration d’une « taxe halal » pour financer l’islam de France.
Légalement, il n’est pas possible d’instaurer une taxe sur une donnée religieuse [une « taxe halal » pourrait contrevenir au principe constitutionnel d’égalité devant l’impôt. L’objectif de financement du culte musulman ne correspond pas à un objectif d’intérêt général permettant de justifier une différence de traitement entre produits halal et non halal]. Et techniquement, une « taxe halal » serait aussi impossible à mettre en œuvre, parce qu’il n’y a pas d’unité autour de la notion de halal.
Ce qui serait possible, c’est que les représentants du culte instaurent eux-mêmes une redevance privée pour services rendus au moment de l’abattage, qui serait fixée par la communauté, collectée et envoyée à la fondation.
Voyez-vous d’autres pistes pour améliorer le financement de l’islam de France ?
Il faut développer Tracfin, la cellule antiblanchiment rattachée au ministère des finances, même si elle fonctionne déjà. Si un versement anormal arrive sur le compte d’une association, quelle qu’elle soit, cela envoie immédiatement un signal. Vous ne pouvez pas recevoir 100 000 euros sans que Tracfin le sache.
Les communautés musulmanes pourraient aussi améliorer le contrôle de la « zakat » (l’aumône), en instaurant un guide de bonne conduite selon lequel l’argent devrait être versé directement aux associations homologuées. Pendant le mois de ramadan, une mosquée moyenne de banlieue parisienne peut récolter près d’un million d’euros.
Au-delà du financement, y a-t-il un problème de représentation de l’islam ?
La mise en place du Conseil français du culte musulman (CFCM) était une nécessité, il fallait un interlocuteur à l’Etat. Mais depuis des années, cet organe n’a jamais réussi à être représentatif. Si j’étais présidente du CFCM, j’ouvrirais un grand débat, je mettrais en place une assemblée constituante pour revoir les statuts, j’appellerais les jeunes et les membres d’associations qui peuvent se sentir exclus à participer aux travaux, je mettrais en place le principe un homme ou une femme égale un vote… Mais cela doit venir des musulmans eux-mêmes. Peut-être qu’un jour, de jeunes musulmans lanceront une pétition en ligne et créeront une grande association concurrente.
  • Perrine Mouterde
    Journaliste au Monde

En savoir plus sur http://www.lemonde.fr/religions/article/2016/08/01/on-ne-reglera-pas-les-problemes-de-l-islam-en-france-en-suspendant-le-financement-etranger-des-mosquees_4977157_1653130.html#ijObqXAyq1JkuZcm.99



Comment est organisé l’islam de France ?

LE MONDE | 29.07.2016 à 16h55 • Mis à jour le 30.07.2016 à 12h07 | Par Samuel Laurent et Mathilde Damgé

image: http://s2.lemde.fr/image/2016/07/29/534x0/4976387_6_c103_priere-a-la-grande-mosquee-de-strasbourg-en_b0e7ea729005db4eca71c32ed8a47d61.jpg
Prière à la grande mosquée de Strasbourg, en 2013.

Dans un entretien au Monde, le premier ministre, Manuel Valls, s’est dit « favorable » à une interdiction du financement étranger des mosquées et a souhaité « inventer une nouvelle relation » avec l’islam de France.

A l’issue d’une rencontre, mercredi 27 juillet, à l’Elysée, entre François Hollande et les représentants des cultes, le recteur de la Grande Mosquée de Paris, Dalil Boubakeur, avait lui-même suggéré « une certaine réforme dans les institutions » de l’islam.
Comment s’organise l’islam de France ? Comment est aujourd’hui financée la pratique du culte musulman ? Le point en cinq questions.

1/Combien de musulmans et de mosquées en France ?

Premier point, qui peut sembler évident, mais qui ne l’est pas toujours dans les discours : l’islam, comme le catholicisme et le bouddhisme, est une croyance religieuse. On peut donc y croire ou non, ou en observer plus ou moins les pratiques. On ne naît pas musulman, même si on peut naître dans une famille qui adhère à cette religion.
C’est ce qui explique la difficulté à comptabiliser le nombre de musulmans vivant en France, outre le fait que la loi française interdit de recenser les populations par religion. Le ministère de l’intérieur parle de 4 à 5 millions de personnes, mais ce chiffre est une extrapolation fondée sur l’origine géographique des populations, et non sur un recensement précis.
Autre chiffre : en 2008, l’enquête « Trajectoire et origines » menée par l’Insee et l’INED, sur la base de sondages, estimait les fidèles musulmans à 2,1 millions.
Par ailleurs, croire n’implique pas forcément une pratique régulière : seules 41 % des personnes « d’origine musulmane » se disaient « croyantes et pratiquantes », selon une enquête de l’IFOP pour le journal La Croix en 2011.
Les lieux de culte musulman sont plus précisément comptabilisés : 2 449 en 2012, dont 318 outre-mer. Néanmoins, un lieu de culte n’est pas forcément une mosquée et nombre de musulmans français prient dans des salles discrètes non officielles. Sur l’ensemble des mosquées, seules 64 mosquées sont dotées de minarets.

2/Comment se finance le culte ?

En France, la loi de 1905 interdit à l’Etat de financer quelque culte que ce soit. Il existe plusieurs exceptions, notamment en outremer, mais la plus connue est celle du concordat en Alsace-Moselle. Ces départements étant allemands à l’époque de la séparation des églises et de l’Etat, ils ont gardé ce statut datant de 1802, qui autorise la puissance publique à rémunérer prêtres, pasteurs et rabbins.
Autre exception inscrite dans la loi de 1905 : « Pourront toutefois être inscrites auxdits budgets les dépenses relatives à des services d’aumônerie et destinées à assurer le libre exercice des cultes dans les établissements publics tels que lycées, collèges, écoles, hospices, asiles et prisons. » Ainsi, des aumôneries sont subventionnées par l’Etat dans l’armée, les prisons et les hôpitaux. Par exemple, les aumôniers militaires sont des contractuels de l’armée, qui occupent un grade.
Ailleurs sur le territoire, il est impossible à l’Etat où à une collectivité de financer la construction d’une mosquée ou de salarier un imam. C’est donc aux fidèles de trouver des financements. Ceux-ci le font le plus souvent par des collectes, parfois en faisant appel à un mécénat de l’étranger.
Amar Lasfar, président de l’Union des organisations islamiques de France (UOIF), qui rassemble le nombre de mosquées le plus important parmi les grandes fédérations nationales, a ainsi indiqué, dans le cadre d’un rapport sénatorial de 2016, que « hormis une vingtaine de mosquées financées par des organisations ou des Etats étrangers, l’immense majorité est financée par la communauté musulmane ».
Pour les imams, ce sont bien des bénévoles en majorité (700 à 800 d’entre eux, soit environ un tiers, seraient rémunérés à temps partiel ou à temps complet).
L’autre source de revenus est celle du halal, la nourriture (principalement animale) que consomment les musulmans pratiquants, et qui doit avoir été préparée d’une certaine manière et certifiée par une autorité compétente, en général une grande mosquée (Paris, Evry ou Lyon). Mais, tout comme les comptes des mosquées, il est très difficile de trouver des chiffres fiables sur ce marché.

3/Comment est organisé l’islam ?

Il n’existe pas dans l’islam de réel « clergé » qui fournirait une hiérarchie et des représentants identifiés. En réalité, un imam est avant tout un « guide » de la prière, qui peut être élu par la communauté, et n’a pas nécessairement de formation spécifique.
Ils sont étrangers pour la plupart (seuls 20 % à 30 % des imams auraient la nationalité française), le plus souvent issus de la même communauté d’origine que celle de la mosquée à laquelle ils sont rattachés. Il arrive que des imams viennent de pays où ils ont un statut public (Maroc, Algérie ou Tunisie), mais ce n’est pas la majorité des cas (300 imams sur 2 500 lieux de culte en France).
A titre de comparaison, les prêtres catholiques étrangers représenteraient environ 10 % de l’effectif total des prêtres en activité pastorale dans les diocèses de France, soit quelque 1 500 prêtres.
Cet éclatement de la communauté musulmane, lié aux courants spirituels et aux nationalités d’origine des communautés, ne facilite pas son organisation en France. Pour y pallier, Nicolas Sarkozy a initié la mise en place, en 2003, du Conseil français du culte musulman (CFCM) et de ses antennes régionalisées, supposés constituer une instance de dialogue et d’organisation. Mais cette institution est paralysée par des querelles d’influence intestines et peine à se faire entendre.
Plusieurs responsables musulmans ont critiqué, dans les dernières années, les liens du CFCM avec les autorités françaises : le recteur de la mosquée de Lyon, Kamel Kabtane (membre de l’UOIF) a par exemple dénoncé « la gestion de l’islam de France par la Place Beauvau [ministère de l’intérieur] et les consulats » des pays d’origine des fidèles musulmans.

4/Combien de lieux « radicalisés » ?

Corollaire de celle du terrorisme, la question de la radicalisation qui s’opérerait dans certaines mosquées, le plus souvent du courant salafiste, est souvent posée. Le salafisme, courant issu d’Arabie saoudite et prônant un retour à un islam « des origines », est bien souvent accusé d’être un terreau de radicalisme, même si la plupart des salafistes sont quiétistes, et ne prônent pas le djihad armé, apanage du courant « takfiriste ».
Le salafisme encourage le prosélytisme, au détriment de courants plus modérés. On compterait une petite centaine de mosquées salafistes en France, notamment à Marseille et en région parisienne. Si le salafisme promeut le voile intégral, la soumission de la femme à l’homme et fait de la visibilité de la religion dans la sphère publique un combat, on ne peut pas pour autant le rendre « responsable » des attentats.
Les profils des djihadistes ayant frappé la France ne correspondent en général pas au cliché du salafiste barbu ayant étudié le Coran durant des années, mais plutôt à de jeunes délinquants radicalisés en prison ou par de la propagande sur le Web.

5/Quelles sont les pistes de réflexion ?

Les questions qui se posent sont donc multiples : ne pas financer le culte implique que les fidèles musulmans doivent soit pratiquer leur religion dans des lieux inappropriés (Nicolas Sarkozy parlait ainsi d’« islam des caves ») et peu surveillés, ou faire appel parfois à des pays étrangers pour financer mosquées ou imams, qui ne prêchent pas toujours en français.
Mais financer le culte est impossible, la France étant laïque ; d’où le recours, dans certaines municipalités, à des « ruses », comme des associations, ou des lieux à destination multiple abritant notamment des salles de culte.
Au-delà de la question du financement se pose celle de la formation des imams et du contenu des prêches. Plusieurs imams salafistes, très visibles sur Internet, diffusent ainsi des discours radicaux, notamment l’imam de Brest Rachid Abou Houdeyfa, objet d’une enquête judiciaire.
Plusieurs voix cherchent désormais à trouver d’autres solutions pour mieux cadrer le culte musulman. Et se tournent notamment vers le cas alsacien et mosellan. Un écho du Canard Enchaîné prêtait une réflexion de ce type au ministre de l’intérieur et des cultes, Bernard Cazeneuve, qui a fermement démenti, mais confirme mener une réflexion, notamment sur la formation des imams.
Il est rejoint sur ce sujet par Manuel Valls, qui lui non plus n’utilise pas le terme de « concordat », ce qui impliquerait de financer le culte musulman en France (ce que prône, par exemple, Jean-François Copé). Mais le chef du gouvernement se prononce en faveur d’une « nouvelle relation avec l’islam de France », un « nouveau modèle » qui inclurait la formation des imams « en France et pas ailleurs ».
Autre piste : l’encadrement et la surveillance. Dans son entretien, vendredi 29 juillet, Manuel Valls a précisé que les autorités françaises avaient déjà « expulsé quatre-vingts imams ou prêcheurs de haine ».
Il est également possible de fermer des mosquées : plusieurs lieux de cultes ont d’ailleurs fait l’objet, dans les dernières années, d’une fermeture sous le régime de la dissolution des groupements de fait ou des associations portant gravement atteinte à l’ordre public.
Les propositions de Manuel Valls ne sont pas inédites dans le débat politique. Lors de la présentation du rapport du député-maire socialiste Sébastien Pietrasanta, le député Les Républicains Guillaume Larrivé avait souhaité que « le ministre de l’intérieur ait le pouvoir de s’opposer à l’ouverture ou celui d’ordonner la fermeture de tout lieu de culte présentant une menace grave pour la sécurité nationale. Cette mesure principale devrait être assortie d’une mesure complémentaire qui serait l’interdiction de tout financement étranger direct ou indirect des lieux de culte ».

 Mathilde Damgé
De l'éco, du décryptage et une pincée de data
 Samuel Laurent
Responsable des Décodeurs - Vérifications, contexte, données.


Cinq idées reçues sur l’islam et le terrorisme

Le Monde | 25.11.2015 à 15h30 • Mis à jour le 25.11.2015 à 17h18 | Par Madjid Zerrouky, Mathilde Damgé, Samuel Laurent et William Audureau
Le Coran, livre sacré de l'islam.

Beaucoup de préjugés ou de contre-vérités circulent sur l’islam depuis les attentats du 13 novembre revendiqués par l’Etat islamique. Décryptage.

1. Un salafiste n’est pas forcément un terroriste en puissance

Nombre de discours se concentrent en ce moment sur l’islamisme, et particulièrement sur le salafisme, courant traditionaliste, qui veut revenir à l’islam des origines. Sa montée en puissance dans l’Hexagone date des années 1990, grâce notamment au prosélytisme d’étudiants diplômés revenus d’Arabie saoudite où ils étaient allés suivre une formation en sciences religieuses. Il est associé à une vision de l’islam qui choque en France : port du voile ou d’un habit spécifique, de la barbe pour les hommes, pratique très rigoriste…
Néanmoins, dire que le salafisme est en soi un vecteur de terrorisme serait un raccourci abusif : la majorité des salafistes ne se reconnaissent pas dans le djihadisme et la plupart appartiennent à ce que l’on appelle la branche quiétiste, non violente, qui se refuse à tout engagement politique, source de « fitna » (« division »), et se concentre sur la pratique religieuse.
Il existe cependant une branche « révolutionnaire » du salafisme, le takfirisme, qui vise l’instauration par la force d’un Etat gouverné selon les règles de l’islam radical.
Si on observe les profils des terroristes djihadistes qui ont frappé la France, de Mohamed Merah à Abdelhamid Abaaoud, on constate par ailleurs qu’ils ne correspondent pas au cliché du « salafiste » barbu, étudiant l’islam pendant des années. Ce sont de jeunes délinquants, radicalisés suite à des rencontres, notamment en prison, qui ont souvent fait des voyages en Syrie, mais qui n’avaient pas un passé de religieux fervents.

2. L’islam n’est pas un critère ethnique, c’est une pratique religieuse

« Les musulmans doivent se désolidariser des terroristes », « les musulmans français ne doivent pas céder au communautarisme »… Depuis plusieurs années, on observe dans le discours une essentialisation de l’islam, comme dans ce tweet de Marion Maréchal-Le Pen, candidate du Front national aux élections régionales en Provence-Alpes-Côte d’Azur.
"Dans les banlieues, ce n'est parfois plus la loi de la République mais la loi de l'Imam !" #AixenProvence https://t.co/dH73hAwN8F
— Marion_M_Le_Pen (@Marion Le Pen)
A travers ce discours, les « musulmans » sont assimilés à une sorte de « bloc » unique, à qui on reproche son communautarisme… tout en le considérant d’emblée comme une communauté. Au point, d’ailleurs, de donner à penser que toutes les personnes de culture musulmane sont des croyants.
Or rien n’est plus faux : d’une part, l’islam, comme le christianisme ou le bouddhisme, est une religion. On ne naît pas musulman, on le devient, ou non. On peut être maghrébin et athée, être Syrien et chrétien…. Et même si l’on se dit croyant, la pratique peut être plus ou moins régulière, l’observation des dogmes et des règles également.
Sans compter qu’il n’y a pas une seule pratique mais des pratiques : chiites ou sunnites n’observent pas tout à fait les mêmes rites, et d’une mosquée à l’autre, prêches et vision de l’islam peuvent fortement changer, comme c’est le cas d’ailleurs de toutes les religions.

3. Tous les musulmans ne sont pas arabes, et réciproquement

En raison de son héritage colonial et de l’important contingent de Français d’origine marocaine, algérienne et tunisienne présents sur le territoire national, il est fréquent d’assimiler en France musulmans et arabes. L’idée est triplement absurde.
D’abord, à strictement parler, le terme « arabe » renvoie aux populations originaires de la péninsule arabique (Arabie saoudite, Qatar, Emirats arabes unis…) et est donc inadéquat pour les populations d’origine maghrébine.
Ensuite, la confession et l’origine géographique ne préjugent évidemment pas l’une de l’autre. De même qu’il existe des Marocains juifs et chrétiens, il existe des musulmans français de longue date : à Saint-Denis à la Réunion, la première mosquée a été construite en 1905.
Enfin, le visage de l’islam change considérablement d’un pays à l’autre, selon son histoire. Au Royaume-Uni, par exemple, la plus grande partie de la population musulmane est d’origine pakistanaise ; en Allemagne, elle est d’origine turque. Au niveau mondial, le pays musulman le plus peuplé se situe en Asie : il s’agit de l’Indonésie, avec plus de 200 millions de fidèles, devant l’Inde et le Pakistan.

4. La France n’est pas « envahie » par les mosquées

Contrairement à ce qu’avancent plusieurs personnalités ou médias comme Valeurs actuelles, la France n’est pas « envahie » par les mosquées.
Le nombre des lieux de culte n’est pas facile à quantifier, notamment en raison du manque de centralisme de l’islam en France. Contrairement au catholicisme, qui dispose d’une organisation claire et structurée, l’islam, est très peu hiérarchisé.
En 2012, le ministère de l’intérieur estimait qu’il y avait dans le pays 2 449 lieux de culte musulman, dont seulement 2,5 % de mosquées avec minaret. Ce nombre a fortement augmenté durant la dernière décennie : le précédent recensement faisait état de 1 536 lieux de culte en 2000.
Mais, rapporté au nombre de fidèles, ce chiffre reste très inférieur aux lieux de culte catholique. Si on estime qu’il y a en France 2 millions de pratiquants musulmans, on parvient au ratio d’un lieu de culte pour 816 fidèles. Si on reprend le chiffre de 3 millions de catholiques pratiquants (qui fréquentent au moins une messe par mois), et qu’on le rapporte aux 40 000 églises consacrées en France, on arrive à un ratio d’1 église pour 75 fidèles.

5. Le Coran n’appelle pas explicitement au djihad armé

Après les attentats du 13 novembre, comme après ceux de janvier, les ventes de Coran se sont envolées (7 des 20 meilleures ventes de livres religieux sur Amazon France concernent l’islam, dont le Coran en première place), comme s’il s’agissait de trouver dans le livre l’origine de cet appel à la violence.
A l’instar de la Bible ou de la Torah, le Coran a parfois des conceptions très datées de la justice et certaines sourates prônent la violence vis-à-vis des autres confessions, tout comme d’autres appellent au contraire à la tolérance.
Par exemple, dans la sourate 47, dite sourate de Mohammed, il est écrit :
« Quand vous êtes en guerre avec les impies, passez-les au fil de l’épée jusqu’à leur reddition. »
Mais dans la sourate 3, dite sourate de la famille d’Imran, il est aussi écrit :
« Le fait qu’ils soient coupables ne te permet pas de décider de leur sort. C’est à Dieu seul qu’il appartient de leur pardonner ou de les punir. »
Néanmoins, le djihad n’y est nullement décrit comme l’un des piliers de l’islam. Le concept de « djihad » (littéralement « l’effort ») s’applique avant tout au travail du pratiquant pour se conformer aux règles dictées par sa croyance. Ce n’est pas un appel au combat armé.
« Aucun livre sacré n’est aujourd’hui aussi souvent invoqué à l’appui de la violence ou de l’oppression, affirment Faker Korchane, professeur de philosophie, et Sophie Gherardi, fondatrice du site d’information Fait-religieux.com. Au point qu’il est légitime de se demander ce qui, dans ses versets ou dans son statut même, peut prêter à une telle instrumentalisation politique et religieuse ».
L’alternance entre explicite et ambigu dans le livre lui-même autorise de fait beaucoup d’interprétations. Pour Faker Korchane et Sophie Gherardi, l’interprétation est une véritable « passion » dans l’islam. Ils citent d’ailleurs Youssef Seddik, philosophe et anthropologue : « Le Coran a aboli toute interprétation imposée par une Eglise. En islam, chacun peut interpréter selon ses moyens, même le plus simple des croyants. Seule compte l’intention. »
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Le Coran, voix divine, voies humaines

LE MONDE CULTURE ET IDEES | 05.02.2015 à 11h44 • Mis à jour le 09.02.2015 à 12h32
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Un mot de trois syllabes peut contenir tout un monde de malentendus. Al Qur’an,Alcoran en français jusqu’au XVIIIsiècle et désormais le Coran est de ces mots-là. On peut platement rappeler qu’il s’agit du livre sacré de l’islam, que son titre signifie en arabe « la récitation », qu’il contient la révélation reçue par le prophète Mahomet (Muhammad, Mohammad ou Mohammed, selon les transcriptions) entre l’an 610 et sa mort en 632, et qu’il a été couché par écrit une vingtaine d’années plus tard.
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Un fidèle lit le Coran à la mosquée Al-Fath, à Tunis, le 16 janvier.
Ce serait passer à côté de la puissance de ce simple mot, le Coran, qui produit un effet diamétralement opposé selon qu’on est musulman ou non-musulman. Aux yeux et aux oreilles d’un croyant musulman, le Coran évoque immédiatement le beau, le bien, le vrai, le doux. Lu, récité, chanté, psalmodié, le Coran émerveille, le Coran apaise, le Coran élève. Un Dieu compatissant et matriciel (Allah le clément, le miséricordieux, al-Rahman, al-Rahim, ce dernier mot ayant la même racine que le mot « utérus »), un Prophète parfait, un Livre de nature sacrée, telle est la symbolique qui relie l’ensemble des croyants, l’Oumma. Une expression traditionnelle résume tous ces bienfaits : « Coran divin, Livre révélé, Manuscrit noble, Paroles antiques ». Un milliard six cent millions de musulmans dans le monde, même différents, même divisés, adhèrent à cette définition que le philosophe Malek Chebel, auteur d’une traduction du Coran et d’un Dictionnaire encyclopédique du Coran (Fayard, 2009), explicite ainsi : « Si aux yeux des chrétiens le Verbe divin s’incarne dans Jésus, en islam il se manifeste dans le Coran, conçu comme un “dépôt sacré” qui a les caractéristiques de son Créateur, c’est-à-dire l’amplitude, la beauté la majesté. »
Peur, attirance ou simple curiosité, les grands attentats islamistes, à New York, Londres, Madrid ou Paris ont été suivis d’une ruée dans les librairies, où les exemplaires du Coran s’arrachent
Quel contraste avec ce qu’évoque le Coran chez la plupart des non-musulmans ! Toute une palette d’émotions négatives – la méfiance, l’incompréhension, le sarcasme, le mépris, la peur – se déploie sous un vaste manteau d’ignorance. Ce rejet a une actualité, indexée sur les actions terroristes commises au nom de l’islam, justifiées au nom du Coran, et ce bien avant les attentats du 11 septembre 2001 aux Etats-Unis et ceux des 7, 8 et 9 janvier à Paris. Mais ce rejet a surtout une histoire. La conquête arabo-musulmane d’immenses territoires au Moyen-Orient, en Afrique, en Asie et en Europe a défini pendant de longs siècles la frontière entre « nous » et « eux ». Dans cette représentation encore très ancrée (son exact symétrique existe côté musulman), les croisades, la Reconquista espagnole, l’endiguement des Turcs ottomans aux batailles de Lépante (1571) et de Vienne (1683) forment un grand feuilleton historique où l’Occident chrétien « gagne à la fin » mais déplore pour toujours la « perte » de Byzance-Constantinople, devenue Istanbul en 1453.
Conséquence de cet affrontement séculaire entre la chrétienté et l’islam, l’Alcoran a été considéré jusqu’au XVIIsiècle comme un texte hérétique qui ne méritait pas d’être étudié ni même réfuté. Juste ridiculisé et anathématisé. Approximations, fantasmes orientalisants et peur du musulman cruel ont nourri les imaginaires jusqu’à nos jours. Pourtant, le livre sacré de l’islam fascine – plus de 3 000 traductions dans toutes les langues de la terre se sont sédimentées depuis quatre siècles. Peur, attirance ou simple curiosité, les grands attentats islamistes, à New York, Londres, Madrid ou Paris ont été suivis d’une ruée dans les librairies, où les exemplaires du Coran s’arrachent.
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Le 24 janvier, à Dakar (Sénégal), des manifestants brandissent un Coran et des affiches pour dénoncer la publication d’une caricature de Mahomet dans « Charlie Hebdo ».
Qu’est-ce au juste que cet objet ? Le Coran est un livre qui se compose de 114 chapitres appelés « sourates », elles-mêmes subdivisées en 6 236 versets. Selon la tradition islamique, l’ange Gabriel a transmis les versets au prophète Mahomet, tels quels, déjà formulés, lui n’a fait que les réciter. Ses compagnons, à leur tour, les apprenaient par cœur et les répercutaient. Cet imposant corpus oral, reçu à La Mecque puis à Médine, où le prophète avait dû s’exiler, a été transcrit, classé et mis en forme sous Othman, l’un des premiers califes. Ces « successeurs » qui ont connu le prophète sont au nombre de quatre : Abou Bakr, Omar, Othman et Ali(ce dernier, gendre de Mahomet, est spécialement révéré par les chiites).
En moins de trente ans, au milieu des luttes de pouvoir, se fixe le texte sacré de l’islam tel qu’il nous est parvenu, appelé « vulgate othmanienne ».
La plupart des musulmans ne connaissent du Coran que les « petites sourates » de la fin et, bien sûr, la toute première, « la Fatiha » (« l’ouverture », la « mère du Coran »). Ils les apprennent à l’école ou à la mosquée. Elles sont le support des cinq prières quotidiennes, à l’aube, au zénith, l’après-midi, au crépuscule et le soir.
« La Fatiha » figure dans chaque prière mais, même pour les non-pratiquants, elle rythme les moments importants de la vie (circoncision, mariage, décès). Les noms des sourates sont poétiques et évocateurs : la sourate II, dite « la Génisse » (ou « la Vache »), est la plus longue du Coran (les sourates sont classées des plus longues aux plus courtes) ; « la Caverne » (XVIII) est la médiane, celle qui sépare le Livre en deux moitiés égales ; « l’Unité de Dieu », l’antépénultième sourate, qui compte seulement quatre versets, est en quelque sorte le credo en un Dieu unique et indivisible ; les deux dernières, « l’Aube » et « les Hommes », sont les sourates dites « de protection » : quand on a peur, ou avant de dormir, on prononce ces versets : « Je cherche refuge dans le Seigneur de l’aube », ou « Je cherche refuge dans le Seigneur des hommes ». La rythmique de la récitation, parfois lente et langoureuse, parfois rapide et percutante, les répétitions si chères aux langues sémitiques, la puissance des mots et des images, c’est cela que les musulmans ressentent quand ils pensent au Coran.
Même dans les discussions les plus quotidiennes, en famille ou au travail, le texte coranique est convoqué à l’appui de l’argumentation – sous réserve de ne pas le banaliser : chaque citation est obligatoirement introduite par « au nom de Dieu, le clément, le miséricordieux » (la basmala) et conclue par « la vérité vient de Dieu ». En 2011, les jeunes révolutionnaires des « printemps arabes » se sont emparés de la sourate XIII, verset 11, qui dit : « Dieu ne modifie rien en un peuple avant que celui-ci ne change ce qui est en lui ».
La religion du Coran ne rompt pas avec celles qui précédent, le judaïsme et le christianisme, elle veut en être le parachèvement
Le non-initié qui se lance dans la lecture du Coran, lui, risque d’être surpris. Il ne s’agit pas d’un récit linéaire ou chronologique. La pure louange, les préceptes moraux, les épisodes édifiants, les imprécations, les rappels historiques s’entremêlent. La religion du Coran ne rompt pas avec celles qui précédent, le judaïsme et le christianisme, elle veut en être le parachèvement. De nombreuses sourates reprennent les récits et les personnages de la Bible (Adam, Noé, Abraham, Moïse) et du Nouveau Testament (Jésus, considéré comme un prophète, Jean-Baptiste et surtout Marie).
Il importe de savoir que le Coran n’est pas la seule source de la pensée islamique. Les musulmans peuvent aussi se référer aux hadiths, les « dits » du prophète, qui doivent être « authentifiés par la “chaîne de transmission”, une traçabilité permettant en principe de remonter jusqu’à Mahomet lui-même ». Il y en a des milliers, certains étant admis par toutes les branches de l’islam, d’autres seulement par certaines.

Actualité sanglante

Voilà pour la structure de ce texte religieux. Mais le Coran, qui s’est si souvent trouvé depuis vingt ans au centre d’une actualité sanglante, est aussi l’objet d’un grand mystère. Car après tout, aucun livre sacré n’est aujourd’hui aussi souvent invoqué à l’appui de la violence ou de l’oppression. Au point qu’il est légitime de se demander ce qui, dans ses versets ou dans son statut même, peut prêter à une telle instrumentalisation politique et religieuse.
La première réponse relève du contenu même du Coran, où alternent l’explicite et l’ambigu. Au lecteur néophyte (un conseil : commencer par la fin, c’est plus facile), le Livre peut sembler touffu, décousu, répétitif et surtout contradictoire. L’un des versets les plus cités dit : « Point de violence en matière de religion ! La vérité se distingue assez de l’erreur » (sourate II, verset 256). Mais à la sourate IX, au verset 5, connu comme le « verset du sabre », il est dit : « Tuez les polythéistes partout où vous les trouverez, capturez-les, assiégez-les, dressez-leur des embuscades. » Et juste après, au verset 6 : « Si un polythéiste cherche asile auprès de toi, accueille-le pour lui permettre d’entendre la parole de Dieu. Fais-le ensuite parvenir dans son lieu sûr, car ce sont des gens qui ne savent pas. » Assez pour y perdre son latin ou alors, au contraire, pour mettre ce texte au service d’une cause, en le tirant dans un sens ou dans l’autre. Jacques Berque (1910-1995), à propos de la sourate XXIV, « la Lumière », note que les versets 2 et 3 sur le châtiment des adultères (cent coups de fouet) sont suivis d’une vingtaine de versets rappelant la miséricorde divine. Or, constate l’islamologue, les docteurs de la loi ont écarté la mansuétude et alourdi la peine, commuée en lapidation.

L’interprétation est une véritable passion dans l’islam

Peu claire aussi la prétendue obligation islamique du port du voile. Elle repose sur le verset 31 de cette même sourate XXIV : « Dis aux croyantes de baisser leur regard, d’être chastes, de ne montrer que l’extérieur de leurs atours, de rabattre leur voile sur leur poitrine. » Observons cependant que le Coran lui-même offre une ligne de conduite au lecteur désorienté : celui-ci doit s’en tenir à ce qui est clair. Le verset 7 de la sourate III dit ainsi : « C’est Lui qui t’a envoyé le Livre. On y trouve des versets explicites qui sont la mère du Livre, et d’autres ambigus. Ceux dont les cœurs sont enclins à l’erreur s’attachent à ce qui est ambigu car ils recherchent la discorde et sont avides d’interprétations. »
L’interprétation, à vrai dire, est une véritable passion dans l’islam. Youssef Seddik, érudit aux talents multiples qui a réalisé en 2001 pour Arte un Mahomet en cinq épisodes, donne l’explication suivante : « Le Coran a aboli toute interprétation imposée par une Eglise. En islam, chacun peut interpréter selon ses moyens, même le plus simple des croyants. Seule compte l’intention. » Mais, dans l’histoire, cette prolixité interprétative a eu, et a encore, de lourdes conséquences.
« Se référer à la parole de Dieu à tout bout de champ freine le développement des sociétés musulmanes »
Abdelmajid Charfi, réformateur tunisien
L’autre grande source de tensions tient dans les divergences sur la nature du texte. Comment lire le Coran et quel statut lui donner ? Le débat d’idées a eu son âge d’or dans l’islam entre le VIIIe et le XIsiècle. Le calife Al-Mamoun, au début du IXe siècle, est resté célèbre pour les joutes oratoires qu’il organisait à sa cour de Bagdad entre des théologiens sunnites, chiites, juifs, chrétiens, zoroastriens… Il est aussi célèbre pour avoir imposé aux oulémas de son temps l’idée du Coran créé, et non incréé. Théologiquement, la différence est immense. Créé par Dieu, comme le ciel ou la terre, le Coran peut être contextualisé, interprété, soumis à l’examen critique de la raison – et aujourd’hui des sciences ; un point de vue défendu inlassablement par le regretté Abdelwahab Meddeb, écrivain et poète disparu en novembre 2014. Incréé, le Coran est en revanche intouchable, sacré à la lettre près et non interprétable. Un texte d’ordre divin que nul ne peut remettre en question.
Or la tradition sunnite, majoritaire, considère que le Coran est incréé, qu’il est la parole de Dieu matérialisée. A ceci près que l’ambiguïté du texte impose malgré tout certaines interprétations. Pour cela, le corpus interprétatif que sont les hadiths a beaucoup été utilisé à des fins politiques, notamment par les plus fondamentalistes des musulmans. Pour le réformateur tunisien Abdelmajid Charfi, le statut du Coran est le problème que doit résoudre l’islam aujourd’hui : « Se référer à la parole de Dieu à tout bout de champ, et dans un sens anthropomorphique inacceptable pour la rationalité moderne, freine le développement des sociétés musulmanes, empêchées d’assumer leurs responsabilités et d’organiser leur vie conformément aux exigences des temps modernes. »De son côté, le grand islamologue français Régis Blachère (1900-1973) juge que, s’il y a un « humanisme musulman », celui-ci procède « du Coran et du Coran seul ».

« Cancer islamiste »

Aujourd’hui, ces questions font couler le sang. Le penseur soudanais Mahmoud Mohamed Taha (1909-1985) a défendu l’idée que les sourates révélées à La Mecque (les plus anciennes) formaient le cœur de la religion musulmane, tandis que les sourates de Médine étaient contingentes, marquées par le contexte et donc vouées à être abrogées par l’effet du temps – l’esclavage pratiqué à l’époque de Mahomet, par exemple. Cette interprétation a valu à l’auteur de The Second Message of Islam (Syracuse University Press, 1996) d’être condamné à mort et exécuté en 1985. La fatwa lancée en 1989 contre l’écrivain d’origine indienne Salman Rushdie après la publication de son roman Les Versets sataniques (Viking Press, 1988) ou les violences extrêmes contre des dessinateurs ayant caricaturé le Prophète s’inscrivent dans la même ligne de terreur : des fondamentalistes s’arrogent le droit de tuer pour une interprétation qu’ils jugent blasphématoire.
Est-ce à dire que la réflexion sur le texte saint de l’islam est à l’arrêt ? Pas du tout. D’un bout à l’autre du monde musulman, les relectures du Coran dans un sens libéral se multiplient au moins aussi vite que les groupes intégristes, « ces hommes barbus et ces femmes tout de noir vêtues qui terrorisent une société tout entière en diffusant la haine », selon les mots d’Abdelwahab Meddeb dans Sortir de la malédiction. L’islam entre civilisation et barbarie (Seuil, 2008). Ce que Meddeb appelle le « cancer islamiste », des hommes et des femmes ont décidé de le combattre.

L’imaginaire tribal de l’Arabie du VIIe siècle

Nées en Malaisie, les Sisters in Islam proposent par exemple une lecture féministe du Coran, aisément justifiable par l’égalité scrupuleuse qu’il établit entre croyants et croyantes sur terre et au paradis : l’égalité commence d’ailleurs entre Adam et Eve, solidaires dans le péché (et pardonnés par Dieu, contrairement à ce que dit la tradition biblique). L’un des défis est de replacer le Coran dans l’histoire de la pensée humaine. Youssef Seddik, dans Nous n’avons jamais lu le Coran (L’Aube, 2013), explore les apports intellectuels et linguistiques de la Grèce sans lesquels on comprend mal le Coran.
L’époque contemporaine est aussi marquée par l’essor d’une islamologie non religieuse. Elle ne va pas de soi car, instinctivement, beaucoup accordent au Coran, comme à la Bible, une valeur sacrée : on ne les examine pas comme n’importe quel texte, « et si Deus non daretur » (« comme si Dieu n’existait pas »). Les nouvelles approches scientifiques du Coran sont néanmoins foisonnantes : archéologiques, épigraphiques, littéraires, psychanalytiques, anthropologiques… Ainsi, l’historienne Jacqueline Chabbi travaille sur l’imaginaire tribal de l’Arabie du VIIsiècle qui imprègne le Coran : le paradis y est une oasis verte, fraîche et ombragée, tandis que les damnés tourmentés par la soif sont soumis à un « feu solaire » perpétuel (Le Seigneur des tribus. L’islam de Mahomet, CNRS Editions, 2013).

Effort spirituel de relecture du Coran

Les chercheurs ne manquent pas de grain à moudre. Un trésor, environ 40 000 pages manuscrites du Coran datant pour beaucoup de l’époque omey­yade, a été découvert en 1972 derrière un mur de la Grande Mosquée de Sanaa, au Yémen. Tout récemment, un codex encore plus ancien, datant des années 20 à 40 de l’hégire (ère musulmane, commencée en 622), a été retrouvé dans les réserves de l’université de Tübingen, en Allemagne, où il dormait depuis 1864. Ce sont des témoignages inestimables de la mise par écrit du Coran à l’aube de l’islam. Un vaste projet européen, le Corpus Coranicum, associe des chercheurs allemands, français et moyen-orientaux dans les recherches les plus nouvelles.
Cependant l’enjeu savant ne saurait se comparer à l’enjeu politique, au sens le plus large, que constitue le « nouvel ijtihad », effort spirituel de relecture du Coran promu par des générations d’intellectuels musulmans depuis le XIXsiècle. L’anthropologue et philosophe Malek Chebel le décrit ainsi : « Nos ancêtres ont cherché à adapter leur univers matériel aux préceptes de l’islam. Il nous incombe, à nous, de le faire pour la réalité d’aujourd’hui. »
Sophie Gherardi, journaliste, a fondé en 2012 le site d’information Fait-religieux.com.
Faker Korchane est professeur de philosophie et journaliste.

Une sélection des traductions du Coran

Pas moins de 19 traductions en français du Coran sont accessibles en ligne sur le site www.lenoblecoran.fr. Parmi elles, celle pleine d’élégance de Denise Masson (Gallimard, « La Pléiade » et Folio), celle bien équilibrée d’Edouard Montet (Payot), avec une magnifique ­préface de Malek Chebel, lui-même auteur d’une traduction plus ­récente (Fayard), la classique d’Albert Kasimirski (Points), ramassée et accessible, et celle très personnelle de Jacques Berque (Albin Michel).

Vos réactions (401) Réagir
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Un Suisse 15/02/2015 - 17h30
L'oeuvre d'interprétation que certains pseudos-sages font avec le coran est réalisée tous les jours par les juges et autres avocats pour l'ensemble du droit et notamment le code civil, conçu plus ou moins comme un livre destiné à remplacer la bible. Aucun juge n'irait croire que ce livre est la vérité absolue et que le texte est clair. En matière d'interprétation d'un texte / d'exégèse, il semble que nombre de "savants" musulmans aient quelques siècles de retards sur l'"occident corrompu".
 
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Un Suisse 15/02/2015 - 17h20
Sauf erreur, y a déjà eu des traductions qui remettent les versets dans l'ordre historique. Cette version laisse si je ne m'abuse fortement soupçonner une influence des évènements extérieurs sur la rédaction du texte: pacifiste quand les musulmans sont une minorité qui combats pour ses droits et beaucoup moins tolérante lorsque la conquête musulmane commence. Un phénomène notoire, observé également pour le christianisme (dont la période réprimée a cependant été beaucoup plus longue).
 
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Matteo S. 09/02/2015 - 15h41
La Bible, partie ancien Testament, comporte aussi ses passages violents "tuez les amalécites, ...etc". Hormis quelques extrémistes, personne ne nie qu'il s'agit là non pas de commandements divins ou religieux, mais d'une trace des conflits tribaux locaux auxquels les tribus juives ont été confrontées. Il est temps pour tous les musulmans de faire cette même exégèse. Toute autre lecture du Coran est une abomination. Tout projet islamiste totalitaire conduira au rejet et à la guerre civile.
 
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Philibert Delorme 09/02/2015 - 14h57
Pour l'athée que je suis (comment peut-t-on croire à quelque chose qui n'existe pas ?), point n'est besoin de texte "sacré" pour apprécier les belles choses de l'univers, et tout ce que la vie nous offre.
 
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Idriss 09/02/2015 - 16h04
Tout dépend de ce que vous appelez "quelque chose", Philibert, et de ce que d'autres appellent "Dieu". Ce qui existe, en tout cas, c'est le feeling qu'ont certains qu'il existe, sans savoir où ni comment, quelque chose qui nous échappe et que l'on peut nommer "Dieu". Comme dit le Coran, si Dieu avait voulu que tous les hommes croient en lui, il en aurait fait ainsi. Mais rassurez-vous, même pour le croyant que je suis, point n'est besoin de texte sacré pour apprécier ce que la vie nous offre.
 
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@Idriss Blog 09/02/2015 - 13h20
Religion "miséricordieuse" et loi du Talion (Bible et Coran) ne sont pas compatibles. Le "talion", c'est la loi de la vengeance codifié. C'était une avancée juridique il y a 3.700 ans. Cette loi "divinisée" par des textes prétendument sacrés a autorisé les pires horreurs. En 2015 encore, elle permet au grand imam d'Al Hazar en 2015 de proposer de couper les pieds et les mains des séides de l'EI. Avis religieux pondéré et éclairé s'il en est.
 
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Idriss 09/02/2015 - 14h24
Que croyez-vous que font les Rafales français en Irak ? Venger la France ? Le Coran autorise, comme l'Ancien Testament, la loi du talion et la légitime défense pour neutraliser les agresseurs, pas plus, et quand une punition est envisagée, il est souvent précisé 1) que c'est à Dieu et à lui seul d'en juger, pas aux hommes pris par l'émotion et l'envie de vengeance, et 2) qu'il est "le plus miséricordieux", donc beaucoup plus clément que ne pourrait l'être la justice des hommes. Ca va mieux ?
 
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Idriss 09/02/2015 - 14h32
Dernière chose : il n'y a pas de clergé dans l'Islam. Le "grand imam d'Al Hazar" ne représente donc que lui-même. Libre à vous de croire qu'il parle au nom de l'ensemble des musulmans. En ce qui me concerne, l'envoi des Rafales me convient mais si vous y réfléchissez deux secondes, est-ce une façon tellement plus "pondérée et éclairée" de couper des pieds et des mains ? Une dernière chose : croyez-bien que je suis le premier désolé d'avoir à intervenir si souvent sur ces forums.


« Nous avons trop longtemps négligé le travail intellectuel sur le Coran et l’islam »

LE MONDE CULTURE ET IDEES | 05.02.2015 à 11h12 • Mis à jour le 05.02.2015 à 11h47 | Propos recueillis par Sophie Gherardi
Angelika Neuwirth, professeure de littérature arabe à la Freie Universität de Berlin et directrice du projet Corpus Coranicum, est une spécialiste mondialement reconnue des études coraniques.
N’avez-vous pas l’impression qu’il est plus facile de dialoguer avec les penseurs musulmans du IXsiècle qu’avec ceux d’aujourd’hui ?
Le Prophète et ses compagnons pensaient que leur message valait pour le monde entier. Aujourd’hui il ne semble plus s’adresser qu’au monde musulman, et c’est dommage. Mais balayons devant notre porte, nous autres Européens. Pourquoi avons-nous exclu l’islam de la famille ? Si le judaïsme appartient à notre culture, alors l’islam aussi. On parle de tradition « judéo-chrétienne », mais c’est une notion artificielle, qui a peut-être à voir avec un sentiment de culpabilité après la Shoah. Simplement, il est plus facile d’intégrer un judaïsme familier que le vaste islam qu’on a préféré tenir à distance. Nous avons trop longtemps négligé le travail intellectuel sur le Coran et l’islam.
Vous animez à Berlin un ambitieux programme de recherche international appelé Corpus Coranicum, comment fonctionne-t-il ?
Après les attentats du 11-Septembre, l’Europe a en quelque sorte redécouvert l’islam. Des fonds ont été dégagés pour créer un important projet de recherche, sous l’égide de l’Académie des sciences de Berlin-Brandebourg. Avec les chercheurs Michael Marx et Nicolai Sinai, nous avons eu l’idée de réunir les trois branches des sciences du Coran. La première branche est l’étude des manuscrits. La deuxième branche s’intéresse aux références de l’Antiquité tardive [les deux siècles qui précédèrent la chute de l’Empire romain, en 476] : nous avons rassemblé une base de textes hébreux, araméens, grecs, éthiopiens qui forment le contexte théologique et exégétique dans lequel est apparu le Coran. La troisième branche consiste à commenter les sourates en cherchant à relier le texte coranique aux débats de son temps. On découvre ainsi que si le Coran insiste sur la miséricorde, la charité, l’attention portée aux faibles, c’est pour contrer la tradition très ancrée de l’excès héroïque, excès de dépenses et excès de cruauté. L’époque valorise l’émotion, de même que l’image de soi. Il faut s’occuper de sa santé spirituelle.
Vos travaux sur le Coran vous font dire que le livre saint de l’islam est « un enfant de l’Antiquité tardive ». La notion n’est pas seulement chronologique ?
Non, bien sûr. L’Antiquité tardive est un moment très particulier où chaque religion revisite sa propre tradition pour la transformer. Le judaïsme et le christianisme naissant étaient jumeaux et n’ont développé des identités distinctes qu’au fil de longs débats. L’islam a très tôt été considéré comme « autre » : par les chrétiens, pour des raisons politiques liées aux conquêtes musulmanes, et par les musulmans eux-mêmes, qui proclamaient la nouveauté absolue du Coran. Cette idée, fausse selon moi, a conditionné notre regard.
Aujourd’hui, nous replaçons le Coran dans son temps. Au moment de l’émergence du Coran, au VIIsiècle, il y avait déjà une longue tradition de transmission orale des histoires bibliques. Les récits, bien connus, intéressaient moins que les interprétations. Il ne s’agissait pas de renouveler l’intrigue pour divertir un public, mais de reformuler certains épisodes à l’usage de la communauté naissante. La grande question qui se posait aux premiers adeptes mecquois de Muhammad (Mahomet) était de savoir comment préserver la foi face aux persécutions. La Bible leur fournissait des exempla qui les aidaient à tenir malgré l’oppression.
On assiste à la construction d’une identité séparée dans un milieu décadent, celui des villes d’Arabie à l’époque, un peu comme Moïse en Egypte. Muhammad reprend les phrases de Moïse aux israélites pour s’adresser aux siens. Il faut bien se rendre compte que Muhammad devait s’occuper de sa communauté, pour une raison simple : si ses disciples n’avaient pas accepté ce qu’il leur disait, ils ne l’auraient pas transmis.
  • Sophie Gherardi


Vos réactions (11) Réagir
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Philibert Delorme 09/02/2015 - 14h44
@ Najib suite Il est incontestable que la civilisation Arabe, au temps de l'Andalous ait été brillante et raffinée, Je me permets de vous signaler qu'à présent, dans le petit Israël, il est édité davantage de livres que dans l'ensemble du monde Arabe. On est loin de Tolède !
 
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Philibert Delorme 09/02/2015 - 14h37
@Najib, vous dites que c'est en se frottant aux sociétés musulmanes que l'occident en a profité et est devenu ce qu'il est aujourd'hui, d'accord avec vous, du temps de l'Andalous, la civilisation arabe était cultivée et raffinée, faisait progresser les mathématiques, l'astronomie, la philosophie, la médecine, la gastronomie, le mode de vie. Mais, depuis ce temps, l'occident a évolué, lui.....
 
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JM 06/02/2015 - 15h19
"On parle de tradition « judéo-chrétienne », mais c’est une notion artificielle, qui a peut-être à voir avec un sentiment de culpabilité après la Shoah." Ben voyons,ceci est sidérant. Oui nous sommes de culture judéo-chrétienne, grecque et latine: c'est l'Histoire qui le prouve. On se demande ce que vient faire la Shoah là-dedans ! C'est peut-être Madame qui est allemande qui culpabilise...Par ailleurs je ne vois pas en quoi l'islam ferait partie de l'Occident ?
 
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Najib 06/02/2015 - 16h38
Je pense que les Égyptiens, Turques, et proche-orientaux ayant fait partie du monde hellénique peuvent revendiquer l'héritage Grecque au mois autant que les Européens de l'Ouest. Je dirais la même chose de l’héritage romain (Saint Augustin qui est un des fondateur de l'église catholique était Berber nord africain, ...). Comme dit David Groeber c'est en se mettant à ressembler de plus en plus aux musulmans que les royaumes barbares d Europe du moyen age sont devenu l'occident d'aujourd'hui.
 
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Najib 06/02/2015 - 16h38
Je pense que les Égyptiens, Turques, et proche-orientaux ayant fait partie du monde hellénique peuvent revendiquer l'héritage Grecque au mois autant que les Européens de l'Ouest. Je dirais la même chose de l’héritage romain (Saint Augustin qui est un des fondateur de l'église catholique était Berber nord africain, ...). Comme dit David Groeber c'est en se mettant à ressembler de plus en plus aux musulmans que les royaumes barbares d Europe du moyen age sont devenu l'occident d'aujourd'hui.
 
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Najib 06/02/2015 - 17h12
L’intérêt pour la philosophie Grecque, pour les sciences, pour le commerce (qui a permis l’avènement de la bourgeoisie en Europe), pour les lois. Tout ça était largement répandu dans le monde musulman du 9eme au 15eme siècle. Et ça c'est rependu en Europe après la renaissance (qui a commencé en Espagne musulmane). Il y a avait à l'époque plus de livres dans la seule ville de Toléde que dans toute l'Europe du nord.
 
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Vincent CABANEL 06/02/2015 - 13h02
Bonjour Votre interview est trop courte et laisse le lecteur sur sa faim. Il faudrait permettre à l'auteur de développer cette piste ! On a même l'impression que la fin de l'article est bâclée et mal retranscrite. Aucune mention des communautés juives et chrétiennes en Arabie de cette époque. Quid des églises nestoriennes ? Dommage, mais approfondissez SVP. C'est "Le Monde" que diable, pas France Soir
 
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Ni Ko 06/02/2015 - 12h43
Et si le véritable travail consistait plutôt à dissoudre toutes ses croyances religieuses d'un autre âge (qui ne reposent sur rien de concret) ?



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