Bien dormi, je ne suis pas terrassé par le retard que j’ai pris en tout, et même pour l’immédiat : rangements ici, écriture. Comme si une force – la Grâce – me tenait désormais que j’ai atteint le fond avec tous les handicaps et limites de l’âge, et le poids des conséquences de tout mon parcours, de ces non-sagesses qui me sont échues, ou de… peu importe, je marche, suis éclairé, aidé et entouré. – Terrifié à la découverte des programmes de baccalauréat pour lesquels en 1ère S je dois aider Alexis M. : les intitulés montrent le désordre mental, l’absence de structures que nous sommes en train de transmettre, et cela, depuis combien de temps. Il me semble l’avoir pressenti il y a dix-vingt ans en feuilletant un manuel d’histoire. A cela ajouter ce que ma chère femme m’a fait vivre par le partage de son expérience au jour le jour, et surtout la lettre que nous avons écrire ensemble selon son premier, son souvenir et ses papiers au recteur d’académie. Comment ne pas comprendre le désordre intime qui régit la politique française et la vie personnelle de chacun des jeunes, les quartiers et notre errance nationale, sont là… la source des grands enseignements, des structures d’un pays est devenue nauséabonde, insipide. Rien que le dévoiement de Sciences-Po. depuis vingt ans alertait déjà. Pour l’ENA, je ne sais pas. La prolifération des cabinets de conseils, et maintenant pour tous les grands marchés à refaire, la marche et les fusions (braderies) de nos entreprises, ce sont ces parasites du « consulting », généralement et « en plus » étrangers. Perdus ? non, mais réagir. Résultats ambiants, loi Macron ou “réforme” territoriale. Que de l’hors-sol, de l’artifice¸de l’anaérobie avec la prétention de suprématie, de souveraineté intellectuelle, mentale, dogmatique. Pédagogie des fous aux générations arrivantes… Le dénuement est là, avec ce qui aggrave : le refus d’en être conscient, on est formidable, grand pays… nous nous sommes détruits de l’intérieur. POMPIDOU et le latin, les préfectures et les affluents, la dynastie. En est-il de même pour les mathématiques ? les sciences expérimentales ? au contraire, par Marguerite tous les bienfaits de l’informatique, de sites, de séries et de films. Il y a un choc… entre des avances et des vides… il en est de même pour l’évangélisation, cf. dialogues d’hier au téléphone avec ma chère femme et à Saint-Joachim. Idem pour l’entreprise européenne, la façon terrible dont nous avons traité et si superficiellement les adhésions des pays anciennement dominés par l’URSS. Le contre-sens que nous avons fait à l’égard de celle-ci. Peut-être celui d’une décolonisation aboutissant presque partout, du moins dans notre imperium à la dictature, à la corruption. Trait tiré et résultat final : le djihadisme ? non. De même qu’il n’y a pas eu l’anéantissement nucléaire. Chemin ? je vois l’horizon, le premier pas aussi… mais entre là-bas et tout de suite ?
Prier… [1]
pages choquantes que ce destin de Caïn, admirablement
imaginé pour sa suite errante et terrible par Victor
HUGO, l’œil
était dans la tombe et regardait Caïn et l’interrogation
de Dieu : aussi impérieuse que son interrogation à
Adam : où es-tu ? où est ton frère Abel ?
pourquoi une offrande agréée et pas l’autre. Jalousie
fondée de Caïn, mais l’assassinat ? conseil ou
diagnostic spirituel de Dieu ? destin à la Judas en
toute prescience de Dieu : ce que tu as à faire,
fais-le vite ! L’histoire est vite dite, mais nous
continuons de la vivre : le Seigneur tourna son
regard vers Abel et son offrande, mais vers Caïn et son
offrande, il ne le tourna pas. Caïn en fut très irrité et
montra un visage abattu… Pourquoi es-tu irrité, pourquoi
ce visage abattu ? Si tu agis bien, ne relèveras-tu pas
ton visage ? Mais si tu n’agis pas bien.., le péché est
accroupi à ta porte. Il est à l’affût, mais tu dois le
dominer. Liberté sans aide ? Différence des offrandes,
des produits de la terre selon Caïn, et les premiers nés
de son troupeau selon Abel. Sociologie, civilisations,
économie politique, soit, mais pourquoi ? l’un berger et
l’autre cultivateur, l’un béni mais tué de mort
violente, l’autre…. Pas de réponse qui me vienne à
l’esprit… Donc prier… notre monde a aussi cette
illisibilité, si souvent. L’innocence pourquoi ? et
l’envie ? assassine. Pourtant, Dieu mettant Caïn au ban
le protège physiquement… il y a une suite, que nous ne
savons pas mais que nous vivons, de même à la suite du
péché et de l’expulsion d’Eden, il y a une suite.
Le secret de ces jours, malgré
l’échec apparent : le temps perdu du fait de ma
distraction ou de mon inorganisation, de mes
inapplications, l’écriture compris mais pas encore
effective, quantité de modes d’emploi pour ce que je
veux réaliser et dont je sens que c’est impérieux et
utile, le secret, c’est que je suis décapé. Je n’y puis
rien, c’est inattendu, ce m’est donné. Oui, je suis aidé
et soutenu. Voulu tel que je deviens, tel qu’il m’est
demandé, je crois, de devenir et de faire. D’être ?.
Mais ce n’est pas moi qui précise. Dieu qui nous demande
d’être adulte et debout : qu’as-tu
à réciter mes lois ? … toi qui n’aime pas les reproches et
rejettes loin de toi mes paroles ? … Penses-tu que je suis
comme toi ? Heureusement, non ! Puis, il les
quitta, remonta dans la barque et il partir vers l’autre
rive. Qu’avaient donc fait les pharisiens ? pour
le mettre à l’épreuve, ils cherchaient à obtenir de lui un
signe venant du ciel. L’acharnement de la non-foi… qui
n’est pas du tout une adhésion ou pas à des contenus ou
à des dogmes, qui est simplement un refus de cette
présence, de la personnalité de Dieu tel qu’Il en est
tel qu’Il nous donne la nôtre. Caïn pourtant… mon
châtiment est trop lourd à porter. Voici qu’aujourd’hui tu
m’as chassé de cette terre. Or, il est agriculteur.
Mystère de nos vies, qui ne se résout quand dans la foi,
la prière, l’écoute, la confiance. La prière.
Tandis que j’arrivais ce matin
à Saint-Joachim, juste avant la messe, téléphone de ma
femme, en larmes à l’évocation de la prière et des
chants à Béthel, la veille pour une messe dominicale
anticipée : maison de retraite aussi… sa chère Tante
Marraine, perdue de mémoire, interrogeant pourquoi son
mari adoré ne vient-il pas la chercher de là où il se
trouve, une telle ferveur, les yeux tellement bandés, le
cœur seul présent. Au téléphone, en milieu de semaine
quand ma femme lui donne l’appareil, elle ne sait que
dire et répéter : Bertrand, je vous aime beaucoup… et
cette cinquantaine de vieillards, perclus, en aube et
étole mais se tenant à peine debout pour le etit nombre
qui n’est pas en fauteuil roulant, qui chante, prie,
communie. La voix chevrotante pour une admirable et
audacieuse homélie. Ma question plus tard à mon cher
Denis, lui aussi, sans mémoire précise pour des pans
entiers de sa vie immédiate, son incapacité de se situer
là où il vit désormais, ni dans le temps, mais les
dialogues de fond possibles et le montrant intact. Votre
foi, cher Père, le sacerdoce, vous aident-ils à vivre ce
que vous vivez ? Il a le bras droit qui maintenant
s’alourdit et dont les mouvements sont lents, parfois la
main se dissimule, ou l’avant-bras pend. Il me répond.
Oui, donner la communion, les sacrements, je les reçois
alors doublement. Je ne lui réplique pas qu’il est
désormais inerte dans son fauteuil roulant à la messe et
n’administre plus. N’importe. Il ajoute que la
communauté, ces prêtres, ces camarades dans la vie
diocésaine, ordination à Pâques 1956… le soutient qu’il
en est heureux, et il y a la prière. Définition non
sollicitée et que je reçois, c’est écouter, écouter. A
l’accueil, une religieuse de Ker Maria, quarante-cinq
ans de vie consacrée, plus de vingt-cinq ici et au
service de vieillards. Elle insiste : l’évangile,
l’évangile.
[1]
- Genèse IV 1 à 25
passim ; psaume L ; évangile selon saint Marc VIII 11 à
13
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