Dimanche 22 Juin 2014
Prier…
[1] le Saint-Sacrement,
les « espèces », l’ensemble de la liturgie eucharistique, et,
probablement pour les tiers, l’ensemble de nos rites chrétiens sont paradoxaux.
Tout est centré sur une présence, la présence divine, mais de celle-ci rien ne
se constate selon nos sens, les sens humains. Rassemblement de mimes ? effusions
appelant une présence, une personne et rien n’en paraît qu’une attente exprimée
rituellement ou personnellement, en routine ou en conviction ? Le vide ou
l’invisible, une même « substance » ou une même absence ? La
prière se conçoit aisément pour tout vivant, pas seulement de l’espèce humaine,
elle manifeste celui qui prie et parfois le résultat de sa prière, à défaut de
Celui qui intervient… mais la liturgie, l’adoration devant un tabernacle, l’exposition
du Saint-Sacrement ou aux instants de la consécration… de la transusbstantation,
à laquelle d’ailleurs une partie des chrétiens ne « croient » pas… Tel est le pain qui descend du ciel : il n’est
pas comme celui que vos pères ont mangé. Eux, ils sont morts ; celui qui
mange ce pain vivra éternellement. Ce qui
est déjà en soi paraadoxal, signifie pour nous une réalité, une promesse, une
anticipation décisives, changeant complètement non seulement notre conception
courante, « vécue » de la vie, mais chacun des paramètres de notre
psychologie, de nos relationnements au matériel, au vivant, au conjoncturel,
aux événements. Notre appréhension de nous-mêmes et notre prise sur ce qu’il
nous est donné de recevoir, de vivre, de comprendre en sont substantiellement
changés, par rapport – notamment – à celle/celui qui ne « croit »
pas. Quoiqu’un salut qui ne serait pas universel, n’en serait pas un. Les
contemporains du Christ, les « Juifs » au sens des hiérarchies de l’époque,
mais aussi tout auditeur de bonne volonté en restent à un commandement scandaleux :
littéralement, d’anthropophagie. Attitude qui peut nous faire comprendre où et
comment s’ouvre le chemin de la
foi. L’enseignement sur le « pain de vie » succède chronologiquement
à la multiplication des pains et des poissons, événement prodigieux mais
matériel. Paul y voit la communion des saints, le corps mystique du Christ, l’Eglise,
l’assouvissement de notre soif d’universalité qui va de pair avec notre hantise
d’une éternité plus difficile à concevoir et même à désirer, tant l’usure du
temps nous obsède. L’usure par le temps. Ou le temps ? mesure de notre
usure. Le pain que nous rompons, n’est-il pas communion au corps du Christ ?
Consécration, communion, mémoire de vie.
Le sens est là. Accepter le signe et ce vers quoi il nous emmène, c’est déjà être
dans nos dimensions définitives même si nos sens sont muets ou dépassés. Dieu s’explique,
s’il nous le faut. Souviens-toi de la longue marche que tu as faite pendant
quarante années dans le désert (une
vie d’homme… ma vie « adulte »); le Seigneur ton Dieu te l’a
imposée pour te faire connaître la paauvreté ; il voulait t’éprouver et
savoir ce que tu as dans le cœur : est-ce que tu allais garder ses
commandements, oui ou non ? Exactement
le retour à la Genèse, à la situation humaine initiale mais Adam et Eve ne
savaient pas qu’ils étaient en probation, ou plutôt Satan les mit en probation,
ce qui n’était nullement le projet de Dieu : ne nous laisse pas entrer
en tentation. C’est donc le constat divin
du coeur humain concoctant à longueur de vie le pire et le banal, et le constat
humain de la nudité et du dénuement. La foi est le constat humain du cœur de
Dieu. Il t’a fait connaître la pauvreté, il t’a fait sentir la faim, et il
t’a donné à manger la manne – cette nourriture que ni toi ni tes pères ,’aviez
connue – pour te faire découvrir que l’homme ne vit pas seulement de pain, mais
de tout ce qui vient de la bouche de Dieu. Le
Christ au désert réplique ainsi à Satan. Nous vivons les liturgies
eucharistiques selon ce que reçoit notre bouche humaine, alors que le mouvement
réel, profond, nourricier est tout ce qui vient de la bouche de Dieu. … C’est
lui qui, pour toi, a fait jaillir l’eau de la roche la plus dure.
[1] - Deutéronome VIII 2 à 16 ; psaume CXLVII ; 1ère
lettre de Paul aux Corinthiens X 16.17 ; évangile selon saint Jean VI 51 à
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