COMMENTAIRE DE SAINT AUGUSTIN SUR LE PSAUME 85
Dieu ne pouvait pas faire de plus grand don aux hommes que d'établir le
Verbe, par qui il a tout créé, comme leur tête, et de les relier à lui
comme des membres, pour qu'il soit Fils de Dieu et fils d'homme, un seul
Dieu avec le Père, un seul homme avec les hommes. C'est au point que
lorsque nous parlons à Dieu dans la prière, nous ne séparons pas son
Fils de lui ; lorsque le corps du Fils est en prière, il ne se sépare
pas de sa tête. Notre Seigneur Jésus Christ, Fils de Dieu, est seul le Sauveur de son corps, lui qui prie pour nous, et qui prie en nous, et qui est prié par nous.
Il prie pour nous comme notre prêtre ; il prie en nous comme notre tête ; il est prié par nous comme notre Dieu.
Reconnaissons donc notre voix en lui, et sa voix en nous. Et lorsqu'il
est dit, au sujet du Seigneur Jésus Christ, surtout dans les prophéties,
une parole qui concerne une bassesse indigne de Dieu, n'hésitons pas à
la lui attribuer, puisqu'il n'a pas hésité à s'unir à nous. Toute la
création est à son service, parce que toute la création est son œuvre.
Nous considérons sa souveraineté et sa divinité quand nous entendons
dire : Au commencement était le Verbe, et le Verbe était avec Dieu,
et le Verbe était Dieu. Il était au commencement avec Dieu. Par lui tout
s'est fait, et sans lui rien ne s'est fait. Alors nous contemplons
cette divinité du Fils de Dieu qui surpasse et dépasse infiniment ce
qu'il y a de plus haut chez les créatures. Mais d'autres endroits des
Écritures nous le font voir en train de gémir, de prier, de rendre
grâce.
Alors nous hésitons à lui rapporter ces paroles, parce que notre pensée,
qui vient de contempler sa divinité, répugne à descendre jusqu'à sa
bassesse. Il nous semble que c'est lui faire injure que de reconnaître
ces paroles qui concernent l'homme chez celui auquel on adressait
d'autres paroles lorsqu'on priait Dieu. On est embarrassé bien souvent,
on essaie de changer le sens de ces mots ; on ne trouve rien dans
l'Écriture qui ne nous invite à revenir à lui et ne nous interdise de
nous écarter de lui.
Il faut donc s'éveiller, demeurer vigilant dans sa foi, et découvrir celui que l'on contemplait peu de temps auparavant dans la condition de Dieu, comme ayant pris
la condition de serviteur. Devenu semblable aux hommes et reconnu comme
un homme à son comportement, il s'est abaissé lui-même en devenant
obéissant jusqu'à mourir. Et lorsqu'il était attaché à la croix, il a voulu s'approprier les paroles du psaume en disant : Mon Dieu, mon Dieu, pourquoi m'as-tu abandonné ?
Dans sa condition de Dieu, il reçoit notre prière, et dans la condition
de serviteur, il prie. Là, il est le créateur, ici il est créé. Sans
subir lui-même de changement, il assume la créature pour la changer, il
fait de nous un seul homme avec lui, tête et corps. Nous prions donc
vers lui, par lui, en lui, nous parlons avec lui et il parle avec nous.
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire