Je ne suis ni religieux ni prêtre – je n’appartiens à aucun mouvement d’aucune confession ni à aucun parti politique. Je ne suis que chrétien.
Vous trouverez ci-après – quotidiennement ou presque – une méditation sur les textes de la liturgie du jour de l’Eglise catholique et de fois à autre des essais et rédactions ou de simples esquisses sur ce qui – en moi ou selon d’autres que j’ai rencontrés ou rencontre – a Dieu ou l’attente de Dieu, pour référence.
POUR DIALOGUER : b.fdef@wanadoo.fr
Unique femme dont l'Église catholique a reconnu les stigmates par décision pontificale
Saint patron
déclarée patronne des moyens de communication, de Rome (en 1866 par Pie IX), de l'Italie(en 1939 par Pie XII) et de l'Europe (en 1999 par Jean-Paul II)
Née à Sienne, elle y grandit et désire très tôt se consacrer à
Dieu, contre la volonté de ses parents. Elle rejoint les sœurs de la
Pénitence de saint Dominique et y prononce ses vœux. Très vite marquée
par des phénomènes mystiques comme les stigmates et le mariage mystique, elle se fait connaître.
Elle accompagne l'aumônier des dominicains auprès du pape à Avignon, en tant qu'ambassadrice de Florence, ville alors en guerre contre le pape. Son influence sur le pape Grégoire XI joue un rôle avéré dans la décision du pontife de quitter Avignon pour Rome.
Elle est ensuite envoyée par celui-ci négocier la paix avec Florence.
Grégoire XI étant mort et la paix conclue, elle retourne à Sienne. Elle
dicte à des secrétaires son ensemble de traités spirituels Le Dialogue. Catherine en dicte l'essentiel à Étienne Maconi1.
Le grand schisme d'Occident conduit Catherine de Sienne à aller à Rome auprès du pape Urbain VI.
Elle envoie de nombreuses lettres aux princes et cardinaux, pour
promouvoir l'obéissance au pape et défendre ce qu'elle nomme le « vaisseau de l'Église ». Elle meurt le , épuisée par ses pénitences. Urbain VI célèbre ses obsèques et son inhumation dans la basilique Santa Maria sopra Minerva à Rome.
La dévotion autour de la dépouille de Catherine de Sienne se développe rapidement après sa mort. Elle est canonisée en 1461, déclarée sainte patronne de Rome en 1866, et de l'Italie en 1939. Première femme déclarée « docteur de l'Église » le 3 octobre19702 par Paul VI avec Thérèse d'Avila, elle est proclamée sainte patronne de l'Europe en 1999 par Jean-Paul II3. Elle est aussi la sainte protectrice des journalistes, des médias, et de tous les métiers de la communication, en raison de son œuvre épistolaire en faveur de la papauté.
Par la forte influence qu'elle a eue sur l'histoire de la
papauté, Catherine de Sienne est l'une des figures marquantes du
catholicisme médiéval. Elle est à l'origine du retour du pape à Rome et a
effectué ensuite de nombreuses missions confiées par le pape, chose
assez rare pour une simple nonne au Moyen Âge. Elle a également fortement influencé Rose de Lima et Kateri Tekakwitha.
Ses écrits — et principalement Le Dialogue, son œuvre majeure qui comprend un ensemble de traités qu'elle aurait dictés lors d'extases — marquent la pensée théologique. Écrivain catholique des plus influents, elle est l'une des quatre femmes à être déclarées docteur de l'Église. Cette reconnaissance par l'Église, bien que tardive, consacre l'importance de ses écrits.
La vie de Catherine se déroule dans un contexte de grands changements à la fin du Moyen Âge
en Europe et particulièrement en Italie. L'apparition de nouvelles
cités puissantes (Florence, Gênes, Pise...) marque l'émergence d'un
monde nouveau avec la disparition progressive de la féodalité. Ces changements se traduisent par de nombreuses guerres entre les cités, ainsi que des divisions politiquesC 1.
Ces guerres, outre les dégâts qu'elles causent à l'agriculture,
modifient les rapports entre les villes : les cités sont assiégées, des
armées sont constituées de mercenaires se donnant au plus offrant et
tirant profit de la guerre ; elles contribuent à un climat instableC 2.
Le XIVe siècle
voit aussi un profond changement dans le rapport entre l'ordre
politique et social et le rapport au pouvoir temporel du pape. Les rois
et les princes rejettent la bulle papale Unam Sanctam,
dans laquelle le pape déclare la suprématie de l'Église sur les États.
Cette opposition et l'échec de la bulle papale conduisent à l'exil de
Rome : le pape se réfugie en Avignon en 1309,
créant une rupture dans la papauté qui continue à être présente à Rome.
Ces changements conduisent, là encore, à une remise en cause de l'ordre
féodal qui prévalait pendant le Moyen ÂgeA 1,C 2,C 3. Ce siècle voit également la naissance de la dévotion aux Cinq plaies, l'apogée du mouvement des Flagellants
et le développement des images de piété toutes dévouées à l'Homme des
douleurs sur lesquelles les dévots, les saints ou mystiques (comme Henri Suso, Brigitte de Suède ou Julienne de Norwich) peuvent dénombrer les plaies4.
De plus, la peste noire qui apparaît en 1347 et ne disparaît qu'en 1441,
marque profondément la société européenne, faisant de nombreuses
victimes et produisant des bouleversements importants. Cette peste noire
est interprétée comme un fléau divinC 4.
La société siennoise, lieu d'origine de Catherine de Sienne, doit
faire face à de nombreuses difficultés économiques, avec le déclin de
l'agriculture, du commerce et de l'industrie à la suite de la banqueroute de la famille Buonsignori, provoquant des révoltes populaires et l'apparition de bandes de brigandsA 1.
Enfance
Naissance de Catherine et Jeanne, Inconnu de l'École de Nuremberg, Legenda Maior, (1466), Berlin, Estampes et dessins, Hs. 78. A. 14, f. 2v.
Vœu de chasteté
Catherine est la vingt-troisième des vingt-cinq enfants5 d'un teinturier, Giacomo Benincasa, et de Monna Lapa. Elle et sa sœur jumelle Jeanne naissent à Sienne, en Italie (selon la date traditionnellement admise), le Note 1, jour de la fête de l'Annonciation faite à MarieA 2. Jeanne meurt peu de temps aprèsA 2,C 5. La famille Benincasa est une famille pieuse, assez proche de l'ordre des prêcheurs, les dominicains de CamporegioA 2. Giacomo est teinturier de laine, et sans doute de la classe des Popolani (personnes éligibles au gouvernement de Sienne)C 6. En 1348, la famille adopte un jeune garçon de dix ans, Tommaso della Fonte, devenu orphelin à cause de la peste, et dont l'oncle Palmiere della Fonte était marié à la sœur aînée de CatherineA 3.
L'enfance de Catherine de Sienne semble avoir été très vite marquée par un attrait profond pour DieuB 1. D'après les confidences de Raymond de Capoue,
elle a sa première apparition vers l'âge de 6 ans, lorsqu'elle marche
avec son frère Stefano dans les rues de Sienne. Elle voit, au-dessus de
l'église San Domenico, le Christ-Pontife la bénirB 2,C 6.
Cette expérience renforce la ferveur de Catherine. L'éducation
religieuse qu'elle reçoit est faite de lectures d'histoires de saints,
d'ermites ou des pères du désert. Catherine cherche alors à les imiterB 3,A 4, à travers une vie d'ascèse, se soumettant à des mortifications ou recherchant la solitudeB 4,A 5,C 7.
L'attrait pour l'ordre des dominicains grandit chez Catherine,
alors âgée de 6 ans, lorsque Tommaso entre au noviciat Saint-Dominique
en 1353A 3.
Tommaso favorise cette dévotion en poursuivant l'éducation chrétienne
de Catherine : il lui raconte l'histoire des dominicains, contribuant à
renforcer le désir de Catherine de se consacrer à la vie religieuseA 4.
Vers l'âge de 7 ans, Catherine fait vœu de chasteté, selon son biographe Raymond de Capoue. Elle a alors la conviction de sa vocation à entrer dans l'ordre des dominicainsB 5,C 6.
Vie mondaine
Catherine se coupe les cheveux en présence du frère Tommaso della Fonte par Alessandro Franchi (1898). Chambre de la maison natale de Catherine de Sienne dans la maison-sanctuaire. Sienne.
Catherine grandit et vers l'âge de treize ans, elle refuse toute
coquetterie, bien qu'elle y soit poussée par sa mère. Face à ce refus,
sa mère décide alors de passer par la sœur aînée de Catherine, Bonaventura, afin qu'elle développe chez la jeune fille le goût de la coquetterieB 1. Catherine se laisse convaincre, se farde, soigne sa toilette.
Quelques mois plus tard, en août 1362, Bonaventura meurt en couchesB 1,A 6. La mort de sa sœur traumatise profondément Catherine, elle y voit la conséquence des péchés de vanité et de coquetterieB 1,C 8.
Après ce deuil familial, ses parents cherchent à la marier, mais
Catherine s'y refuse catégoriquement. Face à ce comportement, ils
cherchent à avoir le soutien de Tommaso della Fonte, leur fils adoptif entré chez les dominicains, pour convaincre la jeune fille, considérée comme obstinéeB 3. Tommaso della Fonte
découvrant la ferme volonté de Catherine de vouloir se consacrer à Dieu
lui demande alors de couper ses cheveux afin de prouver la solidité de
son projet de vieB 3, ce qu'elle fait, puis elle rentre chez elleC 8.
Cette action agace profondément ses parents, qui ont toujours des
projets de mariage pour elle. Outre les punitions et les brimades, elle
est chassée de sa chambre, où elle passait de longs moments seule en
prière, et se voit contrainte de remplacer la servante dans les tâches
ménagèresB 3,C 8.
Cette réaction de ses parents ne change pas la volonté de Catherine et
ne diminue pas sa ferveur. Elle considère alors que si elle n'a plus de
chambre ou de cellule pour prier, c'est qu'elle doit donc faire de son
âme une « cellule intérieure », intuition qu'elle développe tout au long de sa vieB 3,C 8.
Catherine reste servante pendant plusieurs mois ; ayant du mal à
servir ses parents, elle décide de les servir comme si ses parents
étaient Dieu ou des saints. Mais c'est un songe qu'elle aura quelques
mois plus tard qui change son attitude. Lors de ce songe, elle voit Dominique de Guzmán
lui tendre un lys et un habit des sœurs dominicaines de la pénitence
lui assurant qu'elle fera partie de cette congrégation. Au réveil,
Catherine révèle devant toute sa famille le vœu secret de chasteté
qu'elle avait fait plusieurs années auparavantB 6.
Cette détermination et les phénomènes surnaturels dont elle bénéficiait
amènent son père à changer d'avis et à l'autoriser à entrer au couventB 6.
Entrée en religion
L'étrange maladie
L'autorisation donnée par son père permet à Catherine de mener une vie plus conforme à ce qu'elle désireB 7.
Elle redouble d'ascèse et dès l'âge de seize ans cherche à vivre une
vie assez extrême à travers des jeûnes (elle ne mange plus que du pain
et des herbes crues, les historiens parlant à son propos d'« anorexie
sainte »6), des privations de sommeil pour prier et diverses pénitencesB 8.
Sa mère, Lapa, s'inquiète de la santé de sa fille et décide de
l'emmener faire une cure à Vignone en val d'Orcia pour se reposerB 8.
Ce n'est que de retour des bains que Lapa se décide à demander
l'intégration de sa fille parmi les sœurs de la Pénitence de saint
DominiqueB 9.
Les sœurs de la Pénitence de saint Dominique (surnommées les Mantellate du fait de leurs habits noirs, mantello en italien) ont pour fondateur Dominique de Guzmán (1170-1221), qui a aussi fondé l'ordre des Frères Prêcheurs.
Elles constituent alors un groupement pieux essentiellement composé de
veuves qui ne suivent pas au sens strict une règle religieuse, dans la
mesure où elles ne font pas de vœux religieux. Elles se consacrent aux
œuvres de charité, aux visites des prisonniers ou des malades et se
réunissent pour la messe et pour recevoir des instructions religieusesB 9.
Lorsque sa mère la présente, Catherine essuie un refus de la part
des sœurs qui la trouvent trop jolie, trop jeune et sans doute trop
exaltée et immature pour la vie religieuseB 10. Catherine tombe gravement malade peu de temps après, avec de fortes fièvres et couverte de pustulesB 10.
Cette maladie inquiète Lapa. Catherine demande de nouveau à entrer chez
les Sœurs de la Pénitence de saint Dominique. Sa mère veut respecter
les volontés de sa fille et permet qu'elle postule de nouveau. Un
deuxième entretien a lieu chez les sœurs, bouleversées par l'ardeur et
le courage de Catherine, qui les décident finalement à l'intégrer au
sein de leur congrégation. La cérémonie a lieu entre fin 1364 et début
1365. Catherine reçoit l'habit blanc des mains du frère Bartolomeo Montucci, maître de la congrégationB 11,C 7.
Clôture
Admise chez les sœurs de la Pénitence, Catherine doit faire son noviciatNote 2 chez elles, sous la direction et l'enseignement des maîtres des tertiairesB 11.
Elle reste alors silencieuse et observe de longs moments de prière dans
sa chambre, sortant pour assister à la messe et aux officesB 12.
Elle continue sa vie d'ascèse et décide de ne prendre de la nourriture
qu'après avoir pleuré, ce qu'elle explique dans ses écrits en évoquant
le « don des larmes »B 12.
Dans le même temps, Catherine, souvent discrète et silencieuse,
commence à avoir une vie mystique importante, connue grâce à son
confesseur : elle a des visions et apparitions, et des colloques avec
Jésus qui l'enseigne. Elle affirme à son confesseur avoir été instruite
par ces apparitionsC 7. Ces visions sont aussi suivies de moments de doutes, d'angoisses et de fortes tentationsB 13.
De ces apparitions, décrites par ses biographes, découlent certains
dialogues et certaines intuitions qui ont une profonde influence sur sa
vie spirituelleB 14. Au cours de cette période, elle apprend à lire suffisamment pour pouvoir lire la liturgie des HeuresC 7.
Une des visions qu'elle a est celle de Dieu, vu sous la forme
d'un arbre dont les racines sont unies à la terre et le sommet au ciel.
Au pied de l'arbre, elle voit des épines. Ces épines représentent les
peines et les difficultés au début pour aller vers Dieu, comme le Christ
crucifié. Une personne qui veut aller vers Dieu doit donc passer par
ces peines, représentées par les épines, alors que beaucoup s'en
échappent, préférant rechercher les plaisirs du monde. Cependant,
l'arbre est immuable et ne se refuse à personne, ce que Catherine
interprète comme le fait que Dieu ne se retire pas d'une créature qui a
le désir de venir à luiB 14.
Mariage mystique
Le Mariage mystique de Catherine de Sienne, 1460, Giovanni di Paolo.
Pendant le carnaval de 1368, Catherine a une apparition qu'elle décrit comme étant son « mariage mystique avec le Christ »B 15,C 9,D 1. Au cours de la vision, le Christ lui apparaît et lui remet un anneau, signe qu'elle est son épouseB 16. La vision s'efface mais Catherine dit ressentir en permanence cet anneau et même le voir, et elle est la seule à l'avoir vuB 17.
Le
mariage mystique marque pour elle le début d'un nouveau changement dans
son attitude. Elle participe davantage aux activités des sœurs de la
Pénitence à travers la visite des malades qu'elle soigne. Elle met en
pratique son amour de Dieu en s'occupant des malades et pauvresB 18,C 9. Des phénomènes de thaumaturge lui sont attribués, ses biographes affirment qu'elle guérit miraculeusement des personnesB 19.
Elle a souvent des extases, de manière privée ou publique : elle se
raidit soudainement, perd connaissance et tous ses membres se
contractentB 19. Les moqueries s'accentuent, elle est calomniée et accusée d'être une femme de mauvaise vieB 20,C 9.
En août 1368, le père de Catherine, Giacomo, tombe malade et meurt, malgré les prières de sa filleC 10. À la même époque, la ville de Sienne est en proie à des révoltes importantes qui remettent en cause le pouvoir en place, dit « gouvernement des 12 »C 10.
Cette période marque le début d'un engagement public intense, où
elle commence à rencontrer et conseiller des dominicains : par
l'intermédiaire de Tommaso della Fonte, elle fait la connaissance de Bartolomeo di Domenico, un jeune dominicain qui lui rend visiteB 21.
De cette rencontre naît une grande amitié spirituelle entre eux deux :
Bartolomeo transmet à Catherine sa connaissance théologique ; elle lui
prodigue des encouragements et, plus tard, lui envoie des lettresB 21.
Elle rencontre aussi le frère Lazzarino de Pise, célèbre
prédicateur franciscain qui, après avoir été méprisant à son égard, lui
demande des conseils pour le guider spirituellement. Elle rencontre
ensuite, toujours par l’intermédiaire de Tommaso della Fonte, le frère Tommaso di Antonio di Nacci, dit Caffarini, dominicain qui, après la mort de Catherine, écrit une de ses premières biographies, la Legenda minoreB 22.
La renommée de Catherine se répand. Celle-ci commence à voyager, sans
doute avec Raymond de Capoue, nommé par le pape pour prêcher la croisadeC 11.
Stigmatisation de sainte Catherine, Domenico Beccafumi, XVI, Getty museum.
Le , lorsqu'une révolte éclate à Bologne, Catherine rencontre le cardinal Pierre d'Estaing, dit d'Ostie, légat de Bologne, et commence à écrire à d'autres prélats et à des fonctionnaires du pape Grégoire XIC 11. C'est le début de l'engagement de Catherine de Sienne pour la réforme de l'Église et le retour du pape à RomeC 11.
À la Pentecôte, elle reçoit les stigmates du Christ, stigmatisation qu'elle décrit à Raymond de Capoue. Elle n'est pas visible car Catherine aurait prié pour que les stigmates ne se voient pasD 2.
Ambassadrice officieuse de Florence auprès du pape
À partir de 1375, elle prend de manière publique la défense des intérêts du pape en s'engageant pour le retour des papes d'Avignon à Rome
et pour l'unité et l'indépendance de l’Église. Lors d'une rencontre
avec les responsables de la ville de Florence, elle est envoyée par eux
auprès du pape afin de tenter de réconcilier la papauté et FlorenceB 23.
Catherine, accompagnée des catterati (?) et de Raymond de Capoue, part en avril 1376 pour Avignon où réside le papeB 23. Ils passent par Bologne où ils se rendent sur la tombe de saint Dominique et arrivent le 18 juin à Avignon à la cour du pape Grégoire XI.
Elle obtient une audience avec le pape et informe Florence de
l'attitude positive du pape à leur égard, tout en critiquant ouvertement
les mesures que Florence a prises à l'encontre du clergéB 24.
Peu de temps plus tard, les ambassadeurs de Florence viennent à
Avignon afin de voir le Pape ; Catherine de Sienne est ouvertement
ignorée par la délégation d'ambassadeurs et la négociation avec les
ambassadeurs de Florence se conclut par un échecB 24.
Catherine de Sienne reste néanmoins auprès du pape, qu'elle revoit
plusieurs fois. Elle le conseille et lui demande à de nombreuses
reprises trois choses : la première est de partir pour Rome et de
revenir dans la « ville de saint Pierre », la deuxième est de relancer la grande croisade, et enfin de lutter contre les vices et péchés au sein de l'ÉgliseB 25. Le pape Grégoire XI
préfère rechercher la paix avant de partir en croisade, Catherine de
Sienne insiste sur le fait qu'il ne faut pas attendre, et qu'au
contraire, la paix viendra avec la croisade qui éloignera les guerriersB 26.
Dans ses lettres elle suggère souvent au pape de partir au plus vite
pour Rome, et cela malgré la forte opposition des cardinaux qui
préfèrent vivre dans la ville d'AvignonB 26.
Catherine suscite la méfiance à Avignon du fait de son influence
croissante auprès du pape, mais aussi par ses extases publiques. Elle
est suivie secrètement, à la demande du pape, par des théologiens qui
après examen ne lui reprochent rienB 26. Elle part visiter le duc d'Anjou pour le convaincre de prendre la gérance de la croisadeB 24. Elle reçoit une invitation pour Paris du roi de France Charles V, mais elle décline cette invitation afin de retourner en Avignon avant de rejoindre l'Italie par les voies terrestresB 27.
Le pape quitte Avignon pour Rome
Catherine de Sienne escorte le pape Grégoire XI à Rome, le 17 janvier 1377, fresque anachronique de Giorgio Vasari (1511-1574).
L'influence de Catherine de Sienne est sans doute le facteur
principal qui conduit le pape Grégoire XI à quitter Avignon pour RomeC 12. Il quitte la cité d'Avignon le et embarque pour Marseille, malgré l'opposition d'une partie des cardinaux et les dangers possibles, notamment l'opposition de Florence par la guerre des Huit Saints, mais aussi l'inconnue que représente le retour à RomeB 27,A 7. Le pape Grégoire XI part par la mer ; à la suite d'une tempête, il débarque à Gênes le 18 octobreA 8.
Quant à Catherine, elle part par voie terrestre en passant par Saint-Tropez, Varazze, puis GênesA 9. C'est dans cette dernière ville que, selon la Legenda minore, elle aurait de nouveau rencontré Grégoire XI. Le pape poursuit son voyage jusqu'à Rome en passant par Corneto où il parvient le , puis il arrive à Rome le en remontant le TibreB 28.
Catherine de Sienne demeure à Gênes et ne continue pas son chemin
jusqu'à Rome ; elle n'y est pas lors de l'arrivée de Grégoire XI dans
la « ville éternelle », bien que des représentations postérieures,
anachroniques, la représentent l'accueillant à Rome. Elle reste à Gênes
où ses compagnons de route sont victimes de maladies. De plus elle
reçoit la visite de sa mère qui la rejoint à GênesA 10. Elle rencontre les chartreux de Calvi, puis arrive dans sa ville natale, Sienne, au début de l'année 1377A 11.
Catherine obtient du Christ la libération de sa sœur Palmerina de son pacte avec le diable avant de mourir, Girolamo di Benvenuto (1470-1524), Cambridge (Ma), Fogg Art Museum.
Catherine s'installe à Sienne où sa renommée se fait de plus en plus
grande. La ville de Sienne lui fait don d'un château qu'elle transforme
en monastère, inauguré en avril 1377 : le monastère
Sainte-Marie-Des-Anges qui sera détruit peu de temps après sa mortB 28.
Elle rencontre Niccolo di Tuldo, condamné à mort car considéré comme
possédé par le diable. Elle aurait réussi à lui parler et obtenir sa
conversion à la foi catholiqueA 12. Ses biographes mentionneront au cours de cette période de nombreuses conversions et des exorcismesA 13,Note 3.
Dès le 15 avril 1377, Catherine fait preuve d'une activité
intense. Elle part pour Sienne et supplie par écrit le pape d'instaurer
la paix à la suite du massacre de Cesena commis par l'armée des Bretons fidèles aux papesB 29. Elle parle aux moines de la chartreuse de Mangiano, parcourt le val d'Orcia
afin de favoriser la paix avec le pape. Elle écrit à ce dernier pour
promouvoir la paix avec la Toscane et encourage la croisadeB 30. Pendant ce temps, la ville de Bologne décide de faire la paix avec Rome le B 31.
Paix florentine et la fin de la guerre des Huit Saints
La situation de la papauté de retour à Rome devient cependant
difficile concernant la ville de Florence. Face à la désobéissance de la
ville, le pape décide d'y instaurer des interdictions, notamment celle
d'y célébrer des sacrements, ou de commercer avec la ville sous peine
d'excommunicationA 14,B 32. Grégoire XI envoie une délégation afin de faire la paix mais cette entreprise menée par Raymond de Capoue
est un échec. La ville de Florence est d'autant plus opposée au pape
qu'elle craint l'arrivée de l'armée de Bretons. Elle décide par
conséquent de violer ouvertement l'interdit du pape le A 15,B 31.
Face à cette situation portant atteinte au pouvoir de la papauté,
d'autant que la ville de Florence est l'une des villes les plus
puissantes, Catherine implore la levée de l'interdit et la clémence du
pape à de nombreuses reprises dans ses lettresA 16. Le pape décide alors d'envoyer Catherine afin de faire plier la ville de Florence. L'envoyée part donc et arrive le dans la ville infidèle au papeB 32,A 16.
Les négociations commencent et Catherine demande à Florence d'obéir au
pape tout en demandant à de nombreuses reprises au pape de rechercher la
paix. Les négociations avancent notamment par l'intermédiaire du
seigneur de Milan, Barnabé Visconti, ce qui conduit à la levée de l'interdit en échange de la restitution des terres aux états pontificauxB 32.
Les négociations sont cependant suspendues le 27 mars 1378 par
l'annonce de la mort du pape Grégoire XI. Florence envoie immédiatement
une délégation pour négocier avec le nouveau pape élu le : Urbain VIA 16.
Face à l'opposition importante de groupes de Florence, qui
brûlent les maisons des compagnons de Catherine de Sienne, celle-ci
décide de partir un temps en ermitage dans les alentours de FlorenceA 13.
Elle écrit au nouveau pape Urbain, ancien cardinal que Catherine avait
rencontré lors de son passage à Avignon, en lui affirmant la nécessité
de faire la paix avec Florence quoi qu'il en coûte, craignant l'arrivée
de l'« hérésie » (le schisme)A 17.
Pour apaiser cette révolte et les tensions qui existent au Vatican, le nouveau pape envoie à Florence un rameau d'olivier le , signe de la volonté du pape de faire la paix avec FlorenceA 17,B 33. Le 28 juillet 1378, la paix est signée avec le pape, levant les interdits et mettant fin à la guerre des Huit SaintsA 17,B 33. Le 2 avril 1379 Catherine part de Florence pour sa ville nataleA 17.
La fin du conflit avec Florence permet un temps de tranquillité pour Catherine de SienneB 34.
Elle se retire et tombe souvent en extase, elle affirme converser avec
Dieu. Elle dicte alors les paroles qu'elle reçoit dans ses transesB 35,D 2.
Ses dialogues, sous sa dictée, sont mis par écrit par cinq secrétaires et seront publiés sous différents noms : Le Dialogue, Traité de la Divine Providence, Livre de la Divine Doctrine, Livre de la Divine révélationA 18. Ce livre se divise en quatre traités : le premier est la Discrétion, le deuxième est l'Oraison ou Traité des Larmes, le troisième est la Providence et le quatrième est sur l'ObéissanceA 19.
La nature de ces écrits, pour Catherine de Sienne qui n'avait pas
eu de formation poussée, a été l'objet de débats du fait de
l'importance théologique qu'elle a eue dans le christianisme avec la
proclamation de Catherine comme docteur de l'ÉgliseA 20,9.
Catherine de Sienne avait, dans ses écrits, mis en garde le pape à de
nombreuses reprises contre la possibilité de schisme, qu'elle appelle
dans ses écrits l'hérésie. Alors que le pape Urbain VI est élu
sans contestation, les cardinaux, principalement français, se réunissent
à Fondi le 18 septembre 1378 avec l'appui du comte Gæteni, et décident d'élire le cardinal Robert de Genève comme pape, devenant ainsi l'antipape Clément VIIA 21. Il prend tête de l'armée de Bretons et les envoie en Romagne où ils dévastent la régionA 21.
Catherine quitte Sienne en novembre 1378 pour Rome où elle arrive le 28 novembre accompagnée de plusieurs membres de son ordreA 22.
Elle est reçue par le pape Urbain VI qui voit dans sa présence un
soutien de taille. Catherine vit alors à Rome où elle commence une « croisade de prière » :
elle demande à ses amis de prier, décrivant comme une douleur immense
cette division de l'Église. Elle recommande d'agir avec charité, seule
solution pour elle pour parvenir à résoudre les problèmes de la
chrétientéA 23.
Elle reste souvent au Vatican pour prier, et montre un zèle particulier
pendant le carême pour la pénitence et les mortifications. Catherine
écrit à Louis Ier de Hongrie, roi de Hongrie et de Pologne, et appelle à l'obéissance au papeA 24.
Elle compare l'antipape au serviteur du démon et écrit aux nombreux
responsables des grandes villes d'Italie afin de les soumettre à
l'obéissance du papeA 25.
Cette séparation du pape est pour Catherine de Sienne un acte
très grave dans la mesure où il conduit à faire des membres
schismatiques. Selon elle, cela conduit à les couper de la relation avec
Dieu en faisant des « membres pourris exclus de la participation du
sang » et donc de DieuA 24.
Vaisseau de l'Église
Au début de l'année 1380,
Catherine continue de s'activer pour défendre le pape Urbain VI. Elle
veut aller à la rencontre de la reine de Naples afin de vaincre son
opposition au pape Urbain VI, mais ce dernier s'y oppose, craignant pour
sa vieA 26.
Catherine écrit aux cardinaux qui ont élu le pape, avant de s'opposer à
lui, leur disant qu'ils ont perdu toute révérence et qu'ils font
désormais l'office du démon en s'opposant au papeA 26.
Raymond de Capoue, le directeur spirituel de Catherine de Sienne, est
envoyé par le pape en mission auprès du roi de France, Charles, afin de
retrouver sa confianceA 27. Catherine, sachant sa mort proche, lui fait ses adieux, lui affirmant par écrit qu'ils ne se reverront plusA 24.
Catherine, qui a une influence grandissante auprès de religieux
se considérant comme ses disciples, décide de leur écrire. Elle demande
aux religieux et aux ermites de soutenir le pape mais aussi de venir
s'installer à Rome dans ces périodes troublesA 28.
Malade et affaiblie, sans doute en grande partie du fait de ses
nombreuses pénitences, elle est épuisée et fait ses adieux à ses amis.
Une anorexie mystique qui la mène au décès
Pendant
de nombreuses années, elle s'était habituée à une abstinence
rigoureuse. Elle recevait la Sainte Eucharistie presque tous les jours.
Ce jeûne extrême semblait malsain aux yeux du clergé et de sa propre
fratrie. Son confesseur, Raymond, lui a ordonné de manger correctement,
mais Catherine a affirmé qu'elle en était incapable, qualifiant son
incapacité à manger d'infermità (maladie). Dès le début de
l'année 1380, Catherine ne peut ni manger ni boire de l'eau. Le 26
février, elle perdit l'usage de ses jambes10.
Catherine meurt à Rome, le 19A 29 ou 2911
avril 1380, à l'âge de trente-trois ans, après avoir subi huit jours
plus tôt une forte attaque qui l'a paralysée à partir de la taille. Ses
derniers mots furent : "Père, entre tes mains, je remets mon âme et mon
esprit"12. Catherine de Sienne est morte de privations volontaires, certains voudraient ainsi la considérer comme la patronne des anorexiques13.
Catherine est enterrée quelques jours plus tard en présence du pape, qui célèbre des obsèques solennelles dans la basilique de la MinerveA 30.
La vie spirituelle consiste pour Catherine de Sienne à l'union à Dieu. Elle décrit cette union à Dieu comme une « voie de vérité ». La Passion du Christ
est centrale pour elle qui considère que la mort du Christ sur la croix
est un sacrifice, permettant la connaissance de Dieu par la présence du
« sang rédempteur »C 13.
Dans ses écrits, elle présente trois étapes de la vie
spirituelle. La première consiste en l'amour de la Passion ; elle
indique même que la passion du Christ est le meilleur guide pour la vie
spirituelle : il « vaut mieux que tous les livres »C 14.
La deuxième étape est la conséquence de la première : cet amour conduit
pour Catherine de Sienne à l'imitation du Christ, à travers une vie
d'ascèse, de sacrifices, de pénitences, de prière et de services aux
autres afin de ressembler au Christ et à son sacrifice sur la CroixC 14,C 15. Ainsi, l'imitation conduit à vouloir devenir un « Alter Christus »(« Autre Christ »).
La troisième étape consiste à désirer la Croix, c'est-à-dire les
souffrances et les difficultés quotidiennes et surmontées, et de s'y
attacher, non plus pour soi, mais pour les autresC 15.
La « cellule intérieure » : l'habitation de la Trinité en l'âme
Dans ses écrits elle développe ce que la théologie appelle « inhabitation de Dieu en l'âme », ou « l'habitation de la Trinité » : la croyance que Dieu est présent en l'âmeC 16.
Cette découverte se fait très tôt chez Catherine. Privée par ses
parents de l'accès à sa chambre où elle avait l'habitude de prier,
Catherine découvre alors qu'elle peut vivre avec Dieu qui est présent à
l'intérieur d'elle-même, dans l'âme. Ce lieu, Catherine le décrit comme
sa « cellule intérieure »C 8.
Dans ses écrits et les conseils spirituels qu'elle y donne, elle
mentionne à différentes reprises l'existence de cette cellule
intérieure, comme dans la lettre 223 à Alessia où elle affirme « Fais-toi,
ma fille, deux habitations : l'une dans ta cellule, pour ne pas aller
causer de tous les côtés, et pour n'en sortir que par nécessité, par
obéissance à la prieure, ou par charité. Fais-toi une autre habitation
spirituelle que tu porteras toujours avec toi : c'est la cellule de la
vraie connaissance de toi-même. Tu y trouveras la connaissance de la
bonté de Dieu à ton égard ; ce sont deux cellules dans une ; et, en
étant dans une, il ne faut pas quitter l'autre, car l'âme tomberait
ainsi dans le trouble et la présomption. »C 17,14 Elle affirme la nécessité d'entrer en soi-même afin d'« habiter par habitude » pour agir en union avec DieuC 18. Cette habitation de Dieu en l'âme est centrale pour Catherine de Sienne dans la mesure où elle conduit à « posséder Dieu »C 16.
La « cellule intérieure » : connaissance de soi et connaissance de Dieu
La connaissance de soi-même est un élément important déjà développé par des philosophes comme Socrate avec le célèbre connais-toi toi-même, mais aussi par de grands théologiens comme Augustin d'Hippone (Ve siècle) qui a, dans les « Soliloques », montré l'importance de la connaissance de soi dans la vie spirituelle : « Ô Dieu éternel, puissé-je savoir qui je suis et qui tu es ! », thème qu'il développe encore dans Les Confessions à propos de Dieu : « plus intime à moi que moi-même, plus haut que le plus haut de moi-même »C 19. Cette connaissance est aussi présente avec Bernard de Clairvaux (XIIe siècle) qui dans sa lettre au pape « De Consideratione » décrit l'importance de la connaissance de soi-même : « Commence
par te considérer toi-même. Évite de te disperser vers d'autres sujets
en négligeant ta propre personne. À quoi te servirait de gagner le monde
entier en étant le seul à te perdre ? Quelle que soit l'étendue de ton
savoir, il te manquerait toujours pour atteindre la plénitude de la
sagesse, de te connaître toi-même. »15,C 20
Catherine de Sienne, dans ses écrits et ses enseignements, développe
cette même conception de l'importance de la connaissance de soi-même. La
connaissance de soi-même proposée par Catherine de Sienne ne consiste
pas en une relecture psychologique, ou à un repliement égocentriqueC 21.
Elle considère cette connaissance comme centrale à la vie au point d'affirmer dans Dialogue que « la prière doit être fondée sur la connaissance de soi-même ».
Pour parvenir à se connaître soi-même, Catherine de Sienne affirme
qu'il est nécessaire de rentrer en soi-même, dans ce qu'elle appelle la « cellule intérieure »C 22. Elle invite à ne jamais quitter cette cellule intérieure, même quand on agitC 22.
Cette habitude d'intériorité conduit pour Catherine de Sienne à
comprendre dans quelle mesure nous n'existons que grâce à Dieu : « Nous devons reconnaître que nous n'avons pas l'être par nous-même, mais que nous le tenons de Dieu »C 22. Dans le Dialogue, elle voit dans les conséquences du péché, la manifestation de notre néantC 23.
Néanmoins, cette reconnaissance de notre néant et de nos fautes ne
constitue pas pour Catherine de Sienne la connaissance de soi, mais elle
doit aller plus loin, car la personne doit découvrir, par la foi, la
bonté et la miséricorde de Dieu dans ses limites : « Je
veux bien que tu voies ton néant, ta négligence, ton ignorance, mais je
veux que tu les voies non dans les ténèbres de la confusion, mais à la
lumière de la bonté divine que tu trouves en toi. Apprends que le démon
ne veut que vous arrêter à la connaissance de vos misères, tandis que la
connaissance doit toujours être accompagnée de l’espérance de la
miséricorde divine. »16,E 1,E 2
La connaissance de soi-même est donc profondément unie à la connaissance de Dieu, une connaissance en soi de DieuE 2.
Pour Catherine la connaissance de soi-même n’est possible qu’en passant
par le regard de Dieu : « L’âme ne se voit pas par elle-même mais par
Dieu, et elle voit Dieu par Dieu en tant qu’il est amour »E 2,17.
L’âme peut découvrir qu’elle a été créée à l’image de Dieu, et que bien
souvent elle s’en écarte par ce que Catherine appelle le péché, ce
n’est que par la connaissance de soi-même que nous pouvons faire
l’expérience de notre misère qui est surmontée par l’Amour de Dieu
présent en nous : « L’amour, ce lien si suave et
si doux. Oui, ma très chère fille, puisqu’il est si doux, si agréable et
si nécessaire, il ne faut plus dormir ; il faut se lever avec un vrai
et saint désir, avec zèle, il faut le chercher avec courage… Et si vous
me demandez « Où pourrai-je le trouver ? » Je vous répondrai dans la
cellule de la connaissance de vous-même, où vous trouverez l’amour
ineffable que Dieu vous porte ; car c’est par amour que Dieu vous a créé
à son image et ressemblance ; c’est par amour qu’il vous a fait
renaître à la grâce dans le sang de son Fils unique. »18
Pour Catherine de Sienne, la connaissance de Dieu commence par la
connaissance d'elle-même. C'est donc l’action de la connaissance de
soi-même, avec ses limitations, qui conduit, pour Catherine de Sienne, à
la découverte de l'amour de Dieu et de sa miséricorde, par la
contemplation de la PassionC 24.
Le chemin de cette connaissance de soi-même n'est cependant pas
facile pour Catherine de Sienne, car ce sentiment de l'amour et de la
miséricorde de Dieu peut disparaître. Elle invite donc à une vie de
vertu, de patience et d’humilité afin de fuir le péché et s’unir plus à
Dieu. Or cette recherche de vertu est difficile et demande de prendre le
chemin de la CroixE 3. L'existence de tentations est présente, ce qu'elle appelle une « descente aux enfers »C 25. Le moyen d'y résister est alors de revenir dans cette connaissance de soi-même.
La vie intérieure est pour Catherine de Sienne un continuel
va-et-vient entre la connaissance de soi-même qui conduit à la
connaissance de Dieu. Cette connaissance de Dieu conduit à une meilleure
connaissance de soi-même et à une plus grande persévérance qui s'ouvre à
la charité du prochain par humilitéC 25.
Néanmoins, la connaissance de soi-même et de Dieu n’est pas une
fin en soi pour Catherine de Sienne. Celle-ci doit conduire non pas au
repliement sur soi, mais à l’Amour du prochain qui est aimé de la même
manière. Catherine affirme ainsi : « Contemplant en elle-même l’effet de
l’amour infini et voyant l’image qu’est la créature, elle trouve Dieu
en son image. Cet amour que Dieu lui porte, elle le voit s’étendre à
toute créature, et cela la force aussitôt à aimer le prochain comme
soi-même, puisque Dieu l’aime souverainement. »E 4,19 La connaissance de soi-même devient pour Catherine la source de l’apostolat et de l’ouverture à l’autreE 5.
La vie de cette sainte est profondément marquée par sa volonté de
rénovation de l’Église. Son ecclésiologie, c'est-à-dire la conception
qu’elle se fait de l’Église, n’est pas à proprement parler
révolutionnaire : elle ne remet pas en question les structures
hiérarchiques traditionnelles de l’ÉgliseC 26, comme le fait plus tard le concile de Constance en 1417, et elle ne remet pas non plus en cause son système juridiqueC 26.
De même, elle ne remet pas en cause la possibilité pour le pape d’avoir
et de gérer des biens temporels. Cependant, elle considère que l’Église
est en crise du fait du manque d'intérêt pour la dimension spirituelle,
car les membres de l'Église sont trop préoccupés par les considérations
temporelles de pouvoir et de richesse. Catherine ne nie pas les
considérations temporelles mais elle considère que celles-ci doivent
toujours être secondes, la conversion et la vie des croyants avec Dieu
étant sa principale missionC 27. Elle appelle de ses vœux et à de nombreuses reprises à une rénovation.
Rôle de l’Église et ministère du Christ dans l’Église
Catherine de Sienne considère que l’Église est l’épouse du ChristE 6,C 28. Pour elle, le pape, mais aussi tous les baptisés, sont responsables des biens du « Sang de l’Agneau »C 29. L'Église est pour elle la gardienne, celle qui communique les dons de Dieu, c'est l'Église qui transmet la « vie » divineE 7. Pour Catherine, les fruits de l’Église sont nécessairement bons dans la mesure où ils dépendent de la charité et du « Sang de l’Agneau », mais aussi du fait de son origine spirituelle : l'Église est « fondée dans l'amour, elle n'est qu'amour »E 8.
Elle utilise la métaphore du jardin pour parler de l'Église,
jardin où tout le monde a une place, et où chaque baptisé est une plante20,E 9,C 30.
Elle considère les prêtres comme des plantes qui doivent être
odorantes, et ceux qui ne sont pas encore chrétiens comme de possibles
plantes dans le jardinC 26. Elle désire que l'Église puisse être le jardin où l'on puisse « voir le prochain, les chrétiens, les infidèles et toute créature raisonnable se nourrir »20,E 9.
L’Église reste profondément unie pour Catherine de Sienne :
chaque personne a non seulement sa place mais aussi son rôle. L’union de
toutes les personnes de l’Église se fait par sa relation à Dieu, au
« Sang de l’Agneau ». La raison de l’autorité de l’Église découle pour
Catherine de Sienne de cette union à Dieu qui engendre une union entre
tous les membresC 31.
L'Église est pour elle un lieu où chaque personne a une place, une
responsabilité spécifique, qui amène à une relation d'interdépendance.
C'est cette interdépendance qui conduit à avoir besoin les uns les
autres, à l'ouverture à l'autre et au respect des différentes vocations.
Cette ouverture conduit à faire naître la charité entre ses membres,
charité qui n'est possible que par l'amour du prochainE 10.
L’Église, avec les papes en exil à Avignon et les divisions qu'elle
traverse, notamment sur le rôle temporel du pape et de ses biens, sont
les éléments marquants pendant l’époque de Catherine de Sienne. Face à
cette situation, Catherine appelle à la rénovation de l’Église. Elle
analyse ces difficultés comme étant le fruit d’un manque de foi, de
piété, et les conséquences du péchéC 30,C 32.
Pour elle, les difficultés sont le fruit du péché et du manque de vertu
de l’Église. Elle ne nie pas les prétentions temporelles des papes,
mais elle considère que le service de Dieu doit être prioritaire sur
toute autre considérationC 21.
Catherine de Sienne affirme aussi à de nombreuses reprises dans
sa correspondance avec le pape, que les problèmes ne sont pas extérieurs
à l'Église, mais qu'une grande source des problèmes vient de
l'intérieur de l'Église. Elle considère que les problèmes de l'Église
viennent de ses membres qui sont remplis d'amour-propre, d'impureté et
d'excès d'orgueil20,E 9. Dans sa correspondance, elle admet avoir elle aussi une part de responsabilité dans les problèmes de l'ÉgliseE 11.
Ainsi le manque de foi, de vertu des prêtres ou des cardinaux est
pour Catherine de Sienne l'une des principales difficultés de l'ÉgliseE 12. Elle n'hésite pas à écrire au pape Urbain VI, lui recommandant de mener une guerre contre les péchés, et les siens aussi, plutôt que tout autre type de guerreE 13.
Rénovation de l'Église
Catherine
de Sienne juge la crise de l'Église comme étant une crise spirituelle.
Elle y voit une occasion pour l'Église de retrouver sa nature primitiveE 14. Elle appelle ainsi à cette Église primitive, comme elle l'écrit dans une lettre à Grégoire XI : « lorsque
les ministres ne songeaient qu'à l'honneur de Dieu et le salut des
âmes, s'appliquant aux choses spirituelles, et non pas aux choses
temporelles »E 15.
Afin de parvenir à la rénovation du corps religieux, elle demande
souvent au pape de nommer des pasteurs vertueux et appelle à la
conversion des membres de l’ÉgliseC 21. Elle recommande au pape Urbain VI de s’entourer d’un « Conseil des saints » composé de personnes vertueusesC 33, affirmant « votre autorité s’étend à tout, mais votre vue est bornée comme celle de tout homme »C 31. Dans sa correspondance, elle invite ses disciples à obéir et à lutter pour l'Église, en s'oubliant et en affrontant les « tribulations ». Afin d'y parvenir elle n'hésite pas à inviter à une lutte virile pour l'Église « Jetez
loin de vous toute tendresse pour vous-même et toute crainte servile,
car la douce Église n'a pas besoin de telles gens, mais de personnes
cruelles à elles-mêmes et compatissantes pour elle »E 16.
Enfin, elle voit dans l’arrivée de nouveaux convertis (notamment les
« infidèles ») une source de rénovation, ceux-ci étant à même de lutter
par leurs futurs exemples contre le vice et le péché qui règnent dans
l’ÉgliseC 34.
Pour les relations que doit avoir l'Église avec ceux qui
s'opposent à elle, comme Florence puis les autres villes, Catherine
recommande toujours la clémence et la douceur de la part du pape. Elle
affirme à de nombreuses reprises que Florence, alors en conflit ouvert
avec le pape, ne sera vaincue que par la paixE 17.
Catherine demande avant tout de la douceur, de la clémence et de la
paix aux papes face aux villes rebelles contre son autoritéC 32,E 18.
C'est ainsi qu'elle incite le pape à la douceur : « avec les armes de
la douceur, de l’amour et de la paix, plutôt que la rigueur et la
guerre »C 27.
Cette recherche de la clémence vient de sa conception de l'Église,
composée de pécheurs, et le meilleur moyen de vaincre le péché est par
le moyen de l'amour et de la prière et en s'offrant pour le salut des
pécheursE 19.
Départ d'Avignon et arrivée à Rome de Grégoire XI, fresque de Girolamo di Benvenuto à l’Ospedale Santa Maria della Scala à Sienne.
La dévotion au « sang du Christ » ou « sang de l'Agneau »
est une dévotion qui existe déjà dans le christianisme à la naissance
de Catherine de Sienne, notamment auprès d'autres mystiques chrétiens.
Dans ses écrits, Catherine se réfère à de nombreuses reprises au sang du
Christ et invite à « se plonger dans le précieux sang »C 35.
Cette dévotion est une conception théologique développée par de
nombreux théologiens qui voient dans le sang du Christ, versé sur la
Croix, le fait que le Christ, par son sang, rachète le péché. La
délivrance du péché n'est pas seulement un discours, mais peut se
vérifier par le sang verséC 36. Pour Catherine de Sienne, le sang devient une preuve du rachat des fautes par le Christ : « Nous n'avons pas été rachetés à prix d'or, ni même par l'amour seulement, mais par le sang. »21,C 37
Le péché nécessite une réparation, pour Catherine de Sienne,
parce que c'est une offense faite à Dieu. Or aucune réparation ne peut
être à la hauteur de l'offense qui est faite à Dieu : « C'est
à la lumière de la foi qu'il nous est donné de voir que le bien doit
être rémunéré et la faute punie et que chaque petite faute mériterait
une peine infinie parce qu'elle est faite contre le Bien infini »22.
Pour expier ces fautes, et donc accéder à la justice de Dieu, c'est le
sang du Christ qui est versé à travers sa mort sur la croixC 37.
Le sang du Christ représente donc pour Catherine de Sienne le
salut pour les pécheurs. Ce salut est donné à chacun afin de le sauver
du péché, et le sang versé représente donc la justice de Dieu et le
salut donnés par amour par Dieu comme l'écrit Catherine de Sienne : « Avec
l'amour et le zèle de la sainte justice, parce que le regard de son
intelligence est fixé sur la sagesse du Fils de Dieu où elle voit
abonder la justice au point que, pour ne pas laisser la faute impunie,
il l'a expiée dans son humanité »23,C 38. Le précieux sang représente donc pour Catherine de Sienne l'amour de Dieu qui meurt par amour et pour nous sauver : « Je suis le voleur et tu t'es pendu à ma place »24,C 38.
Dans les écrits de Catherine de Sienne, le sang est donné par Dieu pour sauver l'humain du mal, et elle l'identifie à la grâceC 39.
De cette dévotion naît aussi la dévotion au cœur du Christ, source
inépuisable du sang. Elle est, pour Catherine de Sienne, le signe de la
nouvelle alliance entre Dieu et les hommes et qui permet d'accéder au
paradis.
Catherine de Sienne met en garde à de nombreuses reprises sur la
division qui peut exister dans l'amour. Elle affirme qu'en l'homme il
existe deux types d'amour, l'un qui est dirigé vers Dieu et l'autre, qui
est égocentrique, l'amour propre. Elle considère ces deux types d'amour
comme étant irréconciliablesE 20,17.
Pour Catherine de Sienne, l'amour propre est le foyer de tous les vices
et de tous les péchés et il conduit à la séparation de DieuE 21.
Il est nécessaire pour Catherine de Sienne de se séparer de l'amour
propre et de ses conséquences, c'est-à-dire la sensualité ou la
recherche du plaisir ou de la reconnaissance, dans la mesure ou cet
amour propre s'oppose à l'amour de Dieu : « Tant que le vase du cœur est plein d'amour propre spirituel ou temporel, il ne peut se remplir de l'amour divin »25,E 20.
Catherine de Sienne invite donc ses disciples à une guerre contre la sensualité par le moyen de la raison : « Je veux que chacun de vous sépare en lui la sensualité et la raison, et qu'il en fasse des ennemis irréconciliables »E 20.
C'est par le moyen de la conscience que l'on peut parvenir à dominer la
sensualité comme elle l'écrit dans une de ses lettres : « Voici
la manière de s'y prendre. Sur le siège élevé de votre conscience vous
vous asseyez pour vous juger vous-même. Ne laissez point passer la
moindre pensée en dehors de Dieu sans la corriger avec une grande
sévérité. L'homme doit faire de soi-même deux parts, qui sont la
sensualité et la raison. Cette raison doit tirer du fourreau le glaive à
deux tranchants : haine du vice et amour de la vertu. Armée de ce
glaive, elle réduira la sensualité à merci. »26,E 22
Elle invite à avoir une « sainte haine » contre la vie des sens et lutter contre la sensualitéE 23.
Elle invite à toujours lutter contre la sensualité, afin de ne pas
avoir deux amours inconciliables, entre l'amour de Dieu et l'amour
propre. Ce combat n'est pas sans difficultés, et elle affirme à ce
propos, que « les vertus s'acquièrent avec peine, en faisant violence à sa faiblesse »27, ou encore « c'est par la violence que nous acquerrons les vraies et solides vertus »28,E 24.
Cette recherche de la vertu est importante, mais elle doit tout le
temps chercher à connaître la source de l'amour propre. Elle invite à
toujours couper à la source la sensualité par la recherche de l'origine
de son amour propre « Visite chaque jour le
jardin de ton âme à la lumière de la foi pour en arracher les épines qui
étoufferaient la bonne semence et pour remuer la terre, c'est-à-dire
dépouiller ton cœur »E 25. Elle met ainsi en garde contre la vertu qui ne serait pas réfléchie par la recherche de l'origine de la sensualité : « La pénitence ne fait que tailler, mais ainsi tu arraches la racine propre à donner une nouvelle pousse »29,E 25.
Le combat qu'elle préconise conduit à vider son être de tout
amour propre, et cette absence permet de remplacer l'amour propre par
l'Amour de Dieu qui emplit la personne : « Dès
qu'on vide des choses périssables, l'air la remplit, c'est-à-dire le
céleste et doux amour divin avec lequel l'âme parvient à l'eau de la
grâce »30,E 26.
La source du combat et de la haine de la sensualité n'est autre que
l'amour de Dieu, qui très vite s'avère plus facile. Elle affirme ainsi :
« La voie de la pénitence et de mes
commandements apparaît tout d'abord rude et difficile, mais plus on y
avance, plus elle devient douce et facile. La voie du vice, au
contraire, semble dans le principe fort agréable ; mais plus on y
marche, plus on y trouve d'amertumes et de ruines »E 27.
Dans son ouvrage Le Dialogue, Catherine développe un traité de christologie (doctrine sur Jésus-Christ), à travers ce qui est appelé la « doctrine du pont »D 3. Ce traité se veut une démonstration de la place centrale du Christ dans le rôle de médiateur entre l'homme et DieuB 36.
Au cours d'une image qu'elle développe, Catherine décrit
l'importance du Christ comme un pont qui permet de traverser un fleuve
où tout le monde se noie. Ce fleuve empêche d'accéder à l'autre rive,
celle qui est décrite alors comme le paradis, le lieu de l'union à DieuD 4.
Le pont qui permet de traverser ce fleuve est le Christ, avec trois
marches. Ces trois marches représentent les trois étapes de la vie
chrétienne, mais aussi les principales plaies du Christ en croix : les
pieds sont les premières marches du pont, mais ils représentent le désir
de Dieu qui conduit l'âme à vouloir connaître et mieux aimer Dieu. La
deuxième marche du pont est le cœur du Christ, lieu de l'union à Dieu et
de la connaissance de soi et de Dieu. La dernière marche est la bouche
du Christ, symbole de l'union à Dieu et de la paix intérieureD 5. Le pont n'est accessible qu'à travers la connaissance de soi, la pratique des vertus, mais aussi la miséricorde de DieuD 6.
La pratique de la connaissance de soi et des vertus est le seul
moyen de passer le pont. Ceux qui ne suivent pas cette voie sont alors
emportés par les flots des divers désirs désordonnés comme l'avarice, la
concupiscence charnelle, l'orgueil, l'injustice et le mensonge qui
conduisent à l'enferD 6.
Le libre arbitre a une place primordiale dans cette doctrine du pont.
En effet, pour Catherine, l'homme étant libre et à l'image de Dieu,
c'est par sa volonté et le désir de Dieu que l'homme peut le choisir ou
non en succombant aux tentations : « Personne ne
peut avoir peur d'aucune bataille, d'aucun assaut du démon, parce que
j'ai fait de tous des forts. Je leur ai donné une volonté intrépide, en
trempant dans le sang de mon Fils. Cette volonté, ni démon, ni aucune
puissance créée ne peut l'ébranler. Elle est à vous, uniquement à vous,
c'est Moi qui vous l'ai donnée avec le libre arbitre. C'est donc à vous
qu'il appartient d'en disposer, par votre libre arbitre, et de la
retenir ou de lui lâcher la bride suivant ce qu'il vous plait. La
volonté voilà l'arme que vous livrez vous même aux mains du démon : elle
est vraiment le couteau avec lequel il vous frappe, avec lequel il vous
tue. Mais si l'homme ne livre pas au démon ce glaive de la volonté, je
veux dire s'il ne consent pas aux tentations, à ses provocations, jamais
aucune tentation ne pourra le blesser et le rendre coupable de péché :
elle le fortifiera au contraire lui faisant comprendre que c'est par
amour que je vous laisse tenter, pour vous faire aimer et pratiquer la
vertu. »D 7,31
Cette pratique de la vertu, à travers les tentations, a pour objectif
de mieux se connaître soi-même et de développer la connaissance de Dieu
en soi. Elle conduit à développer la vertu mais aussi la vie d'oraisonD 8.
Le problème de la providence
en théologie, pose celui de la liberté de l'homme, dans la mesure où
Dieu aurait par la providence une action sur l'homme. La théologie
cherche alors à concevoir dans quelle mesure l'homme peut être libre, et
Dieu intervenir dans la vie. Dans son ouvrage Le Dialogue, Catherine de Sienne fait une demande à Dieu, celle que la miséricorde soit faite à l'ÉgliseD 9. La réponse à cette question conduit à développer toute une vision de la providence, au point que Le Dialogue est considéré comme un traité sur la ProvidenceA 18.
Au cours du développement de la question de la miséricorde, la liberté de l'homme est clairement réaffirmée « L'âme (...) par son libre arbitre peut faire le bien ou le mal selon qu'il plait à sa volonté »32,D 9.
Néanmoins, la finalité de l'homme est décrite comme l'union à Dieu.
Dieu cherche donc à faire miséricorde à l'homme. Outre le désir de
l'eucharistie qui est décrite comme l'un des moyens de rapprocher
l'homme de Dieu, Catherine affirme que Dieu donne aux pécheurs
progressivement les conditions appropriées de la connaissance de leurs
erreurs par des moyens pratiques et théoriquesD 10.
Dieu agit avec la providence par le moyen de la charité qui unit
les hommes les uns aux autres du fait de l'interdépendance de l'homme : « En
cette vie mortelle, tant que vous êtes voyageurs, je vous ai liés du
lien de la charité : le veuille ou non l'homme est lié. S'il se délie
par un sentiment qui n'est pas la charité du prochain, il est lié par
nécessité »D 11.
Le deuxième moyen est celui de la conscience de l'homme, qui a
progressivement du dégoût et des remords pour les actions liées à
l'amour propreD 10.
Des changements de situations personnelles, produites par la providence
selon les personnes, ont pour objectif de sortir l'homme de ses
attaches, afin qu'il ne puisse plus réaliser ses erreurs « Et
parfois (...), le cœur de l'homme concevant l'amour du péché mortel ou
de la créature hors de ma volonté, je lui enlèverai le lieu et le temps
et il ne pourra réaliser ses volontés, jusqu'à ce qu'avec la fatigue de
la peine du cœur qui lui vient par sa faute, et ne pouvant réaliser ses
volontés désordonnées, il revienne à lui-même avec la componction de
cœur et le remords de la conscience et il rejette sa folie »33,D 10.
Toujours selon Catherine, ces remords de conscience ont pour
objectif de se connaître soi-même et donc de découvrir Dieu, donnant le
désir de commencer un chemin de vertu. En découvrant Dieu en lui, cela
conduit à développer le désir de s'unir avec Dieu, contribuant à
approfondir la vie spirituelleD 11.
Le don des larmes, ou doctrine des larmes, est un enseignement développé dans le livre du Dialogue
de Catherine de Sienne (aux chapitres 88 à 97). Elle affirme avoir, à
sa demande, eu un enseignement sur ce que la théologie appelle le « don des larmes ». C'est-à-dire la valeur spirituelle des larmes et leurs fruits respectifsB 37.
L'importance que Catherine de Sienne donne aux larmes dépasse la
perspective théologique classique dans la mesure où le corps devient un
instrument de communication privilégié avec DieuD 12.
Catherine de Sienne développe dans Le Dialogue cinq sources de larmes, qui n'ont pas la même valeur spirituelleD 13.
Ces larmes dont elle parle sont des larmes qui procèdent du cœur. Les
larmes qui ont le plus de valeur pour elles sont celles qui sont dues à
l'amour et à la vertu ; elles peuvent avoir une valeur « infinie »D 13.
Les premières sont celles qui découlent de l'amour sensuel, de
l'attachement aux choses matérielles et aux plaisirs. Elles n'ont pour
Catherine pas de valeur spirituelle car elles proviennent de l'amour
propre. Le deuxième type de larmes est celles qui sont le fruit de la
peur du péché et de l'enfer. Même si elles sont décrites comme
imparfaites, car très peu liées à l'amour, elles ont néanmoins une
valeur spirituelleB 37.
La troisième source des larmes vient des personnes qui pleurent tout en commençant à aimer « la douce vérité première de Dieu », mais qui continuent d'avoir de l'amour propreB 37.
Le quatrième type de larmes, sont celles qui proviennent de la
charité pour le prochain, ceux qui pleurent, en aimant Dieu sans égard
pour eux, elles ont une grande valeur spirituelle, puisqu'elles n'ont
pour source que l'amour et la compassion du prochainB 37.
La cinquième source des larmes, appelées les « larmes de douceurs, fruit de l'union et de la connaissance de Dieu ».
Ces pleurs sont le fruit de l'union à Dieu, dans la mesure où l'union
entre l'âme et Dieu est telle qu'elle conduit à ne plus pouvoir se
communiquer par les mots. Les larmes deviennent l'ultime langage, elle
fait alors parler Dieu pour décrire la valeur du sentiment dont provient
ces larmes : « Alors le sentiment qui suit
l'intelligence s'unit avec un tel parfait et très ardent amour, et si
quelqu'un me demandait qui est cette âme, je dirais : un autre moi, elle
est faite pour une union d'amour. Quelle langue pourrait décrire
l'excellence de cet ultime état unitif. »D 14
Catherine de Sienne, bien qu'elle ne soit pas contemporaine du fondateur de l'ordre des Prêcheurs, est néanmoins l'une des principales figures dominicainesD 15. Elle est devenue la figure féminine de l'ordre dominicain, comme Claire d'Assise l'est pour les franciscainsD 15. Elle est d'autant plus importante qu'elle est, avec Albert le Grand et Thomas d'Aquin, l'une des trois personnalités dominicaines à avoir été déclarée docteur de l'Église du fait de l'importance de ses écrits spirituels et théologiques.
Catherine de Sienne et Raymond de Capoue
jouent un rôle important dans le processus de rénovation de l'ordre des
prêcheurs. En effet dans la période troublée que vit l'Église
Catholique au XIVe siècle, Catherine appelle à un retour aux sources de la vocation dominicaineD 16,C 40. Elle prend souvent pour modèle saint Dominique, et dans son ouvrage majeur, Le Dialogue,
elle cite à plusieurs reprises le charisme originel donné par
Dominique, mettant en garde contre ceux qui désobéissent à la règle
qu'il donna34,D 16,C 40. Cette volonté de retourner aux sources de l'Ordre des Prêcheurs,
faite avec Raymond de Capoue, qui devient maître de l'ordre des
Prêcheurs, conduit à en faire une figure importante au sein des
dominicains.
De plus la spiritualité et la vie de Catherine de Sienne
correspondent sous de nombreux aspects à la spiritualité de saint
Dominique : la place importante de la prédication et de la recherche du salut,
mais aussi l'importance de la contemplation et de la transmission de la
connaissance de Dieu, propres à la spiritualité dominicaineC 41. Cette correspondance entre la vie et les écrits de Catherine de Sienne et le fondateur de l'ordre, Dominique de Guzmán,
conduit ainsi à en faire l'une des principales figures féminines de
l'ordre, notamment à travers des œuvres d'art, qui représentent Dominique de Guzmán avec Catherine de Sienne. Ces représentations sont anachroniques dans la mesure où Dominique de Guzmán est mort en 1221, plus d'un siècle avant la naissance de Catherine de Sienne.
Postérité
Reconnaissance par l'Église catholique
Pie II canonise Catherine de Sienne, Fresque de Pinturicchio dans la Libreria Piccolomini à la cathédrale de Sienne. Entre 1502 et 1507.
Canonisation, docteur de l'Église, patronage
Le procès en canonisation de Catherine de Sienne commence dès 1411, mais est suspendu du fait du Grand Schisme d'Occident et ne reprend qu'après le Concile de Constance et l'élection du pape Martin VA 31,E 28. C'est le pape Pie II qui déclare Catherine de Sienne sainte le 29 juin 1461, jour de la fête des apôtres Pierre et Paul, dans la Basilique vaticaneA 31. Sa fête se célèbre initialement le jour de sa mort, le 29 avril. En 1628, le pape Urbain VIII déplace la date au jour suivant afin de ne pas superposer sa fête avec celle de saint Pierre de Vérone. Par ailleurs, il reconnaît à Catherine de Sienne la véracité des stigmatesA 31.
La ville de Rome rend d'importants hommages à Catherine de Sienne
par la restauration de l'église où elle est vénérée en présence du pape
Pie IX en 1855.
Pie IX dans le décret du 13 avril 1866 déclare Catherine de Sienne co-patronne de RomeA 32. Le , Pie XII déclare Catherine de Sienne sainte patronne principale d'Italie, au même niveau que saint François d'AssiseA 32.
L'existence des stigmates de Catherine de Sienne est reconnue par l'Église catholique. Bien qu'il existe plusieurs personnes qui auraient reçu des stigmates, comme le capucin Pio de Pietrecilna au XXe siècle
dont le processus de reconnaissance a été ouvert lors de sa
canonisation, l'Église catholique a toujours été particulièrement
prudente, refusant généralement de les reconnaître officiellement. Au
cours de l'histoire, seulement deux personnes ont bénéficié de la
reconnaissance officielle des stigmates : François d'Assise et Catherine de Sienne35.
Après son procès en canonisation en 1461, l'ordre dominicain
cherche à faire reconnaître les stigmates de Catherine de Sienne ; ils
reçoivent une opposition des Franciscains, dont le fondateur est alors
le seul stigmatisé reconnuD 17. Le pape Sixte IV,
pape anciennement franciscain, interdit par une série de bulles entre
1472 et 1478, de représenter la stigmatisation de Catherine sur les murs
des églises, et d'en parler aux fidèlesD 17,D 18. Ce n'est qu'en 1630 que le pape Urbain VIII
reconnaît l'existence des stigmates, tout en précisant qu'ils n'étaient
pas sanglants mais des stigmates lumineux, cela étant dû à la
description que Catherine donne à Raymond de Capoue de sa
stigmatisation : « Avant de m'atteindre, les rayons changèrent de couleur de sang en éclat resplendissant »D 17. Catherine de Sienne ayant, d'après Raymond de Capoue, prié pour que les stigmates ne se voient pasD 17.
Cette reconnaissance tardive des stigmates est peut-être due aussi à la place des femmes dans la sociétéD 17.
Les hommes ayant le contrôle intellectuel et spirituel de l'Église, ils
admettent moins facilement la reconnaissance des révélations privées et
le rôle public des femmes dans l'Église, même si Raymond de Capoue, supérieur de l'ordre des prêcheurs, reconnaît et valorise cette intervention publiqueD 19.
De plus, des critiques sur le rôle de Catherine de Sienne sont émises,
lui attribuant du fait de ses mauvais conseils la responsabilité du Grand Schisme d'Occident
par son manque de connaissance politique. La place de Catherine de
Sienne et de ses écrits est au début critiquée, ce qui ne facilite pas
la reconnaissance de sa stigmatisationD 19.
Dévotion
Les
dévotions autour de Catherine de Sienne se développent rapidement. Très
vite, elle reçoit les honneurs réservés aux serviteurs de Dieu. Trois
ans après sa mort, le 3 octobre1383, son cercueil est transporté du cimetière du couvent à la basilique Santa Maria sopra Minerva de Rome par Raymond Delle VigneA 33. C'est en 1430 que l'archevêque de Florence, Antonino Pierozzi, décide de donner un tombeau à Catherine de Sienne. Il fait faire, par le sculpteur Isaia da Pisa, une châsse qui est le reliquaire actuel de Catherine de SienneA 31.
Raymond delle Vigne décide de séparer la tête du reste du corps et l'envoie à SienneA 33.
Sa tête est translatée lors d'une cérémonie le 5 mai 1384 à l'église
Saint-Dominique de Sienne, avec une grande fête, en présence de plus de
400 filles vêtues de blanc, ainsi que des dominicains, sa mère Lapa et
de nombreuses personnes. Dans le même temps, un doigt de Catherine de
Sienne est donné à Stefano Maconi, chartreux, relique qui est
aujourd'hui exposée dans la basilique Santa Maria sopra MinervaA 34.
Un reliquaire avec une phalange du pouce de la sainte figure également
dans la vitrine des reliquaires de la basilique San Domenico de Sienne,
près de sa chapelle36.
Statue de Catherine de Sienne au sommet de l'église et monastère de Catherine de Sienne à Buenos Aires.
Sources de la biographie
Image pieuse de Raymond de Capoue, peinture des XVIIe et XVIIIe siècles
Les principales sources biographiques de Catherine de Sienne sont
assez précoces après sa mort. Bien que ces sources soient en grandes
parties hagiographiques,
dans la mesure où elles insistent principalement sur les évènements
extraordinaires de sa vie en cherchant à les crédibiliser, elles ne sont
cependant pas reniées comme sources historiquesC 42.
Ces sources n'offrent pas une description historique rigoureuse selon
les critères modernes de l'histoire, mais elles permettent quand même
une analyse historique, dans la mesure où de nombreux évènements de la
vie de Catherine sont vérifiables à travers d'autres sourcesC 42.
La principale source provient de Raymond de Capoue,
l'un des confidents de Catherine de Sienne, qui écrit sa biographie
après sa mort, racontant de nombreuses anecdotes ou des faits dans le
livre « Legenda maior »A 35.
Il s'appuie sur sa connaissance de Catherine de Sienne mais aussi sur
les confidences qu'il a pu recevoir des proches amis de Catherine de
Sienne tels Tommaso della Fonte son confesseur, sa mère Lapa, ou des proches de sa familleA 36,C 43.
Les trois autres sources principales sur Catherine de Sienne sont
celles écrites par Tommaso Caffarini, dominicain qui rencontre
Catherine de Sienne et écrit « Legenda minore »,
abrégé de confidences de Catherine de Sienne. Il écrit sa biographie
après sa mort, racontant de nombreuses anecdotes ou des faits déjà
présent dans le livre « Legenda maior » complété par des témoignages recueillis par ses soinsA 37,C 43.
C'est aussi les écrits d'un anonyme, « Miracoli della beata Caterina » (« Miracle de la bienheureuse Catherine »), qui sont l'une des sources de sa biographieC 5. La dernière source importante est le procès en canonisation de Catherine de Sienne, dit « procès de Venise », qui donne des indications sur sa vieA 38,C 43.
Les autres sources importantes de la biographie de Catherine de
Sienne sont les nombreuses lettres qu'elle écrit. Ces lettres permettent
de connaître ses différentes correspondants et le contenu de sa
correspondance. Bien que recopiées à diverses reprises, elles sont
cependant considérées par les recherches historiographiques de
l'historien R. Fawtuer comme étant de « valeur authentique »38.
Les écrits spirituels de Catherine de Sienne, les Oraisons, et le Dialogue,
écrit ou recueillis par ses secrétaires ou ses proches sont les
principales sources de sa pensée, permettant de connaître son évolution
et sa pensée doctrinaleC 44.
Iconographie catherinienne
Catherine de Sienne est rapidement devenue un sujet des peintres pendant la RenaissanceA 39. La plus ancienne représentation connue de Catherine de Sienne est due au peintre Andrea Vanni, son contemporain et l'un de ses proches « caterinarti », en 1390. Cette représentation sur un mur de l'église Saint-Dominique à Sienne a été déplacée dans la Chapelle des voûtes, en 1667, où elle est encore présenteA 39.
De nombreuses représentations se développent autour de Catherine
de Sienne, représentant les différents faits marquants de sa vie,
notamment le « mariage spirituel » ou « mariage mystique »Note 4,
les stigmates, ou encore sa présence auprès du pape. Les peintres
représentent aussi Catherine tenant un lys dans ses mains, symbole de sa
virginité, ou des écritsA 40.
En plus du lys et de l'habit religieux blanc à manteau bleu des
dominicaines, elle est souvent représentée avec une couronne d'épines ou
un crucifix, et parfois avec une discipline, un cœur à ses pieds, un
crâne, un livre39.
Les peintres la représentent à côté de la Vierge, ou d'autres saints,
notamment les représentations de Notre Dame du Rosaire qui la
représentent avec saint DominiqueA 39.
Le pape Pie IX la fait représenter dans la mosaïque de sa tombe,
d'après un dessin de Lodovico Seitz, comme protectrice de la papauté, en
train de tenir la tiare et la rapporter à RomeA 41.
Catherine de Sienne est entrée dans la postérité du fait de l'importance qu'ont prise ses écrits. Proclamée docteur de l'Église par le pape Paul VI,
ce titre de l'Église catholique consacre l'importance de ses écrits, le
titre de docteur de l'Église étant une reconnaissance de l'« autorité
particulière de témoins de la doctrine, en raison de la sûreté de leur
pensée, de la sainteté de leur vie, de l’importance de leur œuvre »41.
Catherine de Sienne, ne sachant pas écrire, dictait ses écrits.
On note cependant trois grands types d'écrits de Catherine de Sienne :
sa correspondance tout au long de sa vie, que ce soit à ses disciples, à
Raymond de Capoue ou aux papes, son ouvrage Le Dialogue, qui est un traité spirituel, et ses « Oraisons »C 45.
Les « Oraisons » ou « prières »
de Catherine de Sienne devaient être nombreuses, mais seulement 26 en
ont été transmises. La première édition des oraisons a été publiée en
1500, dans une édition des lettres de Catherine de Sienne dans laquelle
les Oraisons ont été publiées en appendice. En 1707, elles furent réimprimées, puis réimprimées de façon régulière à partir de 1886C 45.
Ces Oraisons ont été écrites entre 1376 et 1380, sans doute par des
disciples de Catherine de Sienne : elles ne furent pas dictées par
Catherine de Sienne, mais plutôt recueillies par ses disciplesC 46.
Le Dialogue,
dicté par Catherine de Sienne à ses secrétaires, connaît une renommée
grandissante à partir de la canonisation de Catherine de Sienne. La
première édition de son ouvrage a lieu à Bologne en 1472, alors que
l'imprimerie n'est présente en Italie que depuis 5 ansD 18. Les rééditions à Venise sont particulièrement nombreuses : 1504, 1517, 1547, 1579, 1589D 18. Une traduction en latin est publiée en 1601 à Cologne, puis rééditée de manière régulière jusqu'au XXe siècle.
La proclamation de Catherine de Sienne comme docteur de l'Église en
1968 contribue à la réédition de ses œuvres, la dernière traduction en
langue française étant faite en 1992 par Lucienne PortierD 20.
« Un jour je demandais au Seigneur : « Doux Agneau immaculé, vous
étiez déjà mort sur la croix, quand votre côté fut percé par la lance ;
pourquoi donc avez-vous décrété qu'il fût alors frappé et si cruellement
blessé ? » Jésus répondit : « Pour plusieurs motifs dont voici le
principal : Mon amour pour les hommes était sans mesure tandis que les
souffrances et la torture que j'endurai étaient limitées ; et ainsi je
ne pouvais pas leur manifester l'étendue de mon amour pour eux, puisque
mon amour est sans limites. J'ai donc voulu que mon cœur soit ouvert ;
par là, vous connaîtriez ses secrets intimes et qu'il vous aimait bien
plus que ne peut le montrer une douleur fini. »
« J'ai manifesté tout cela par la plaie de mon côté ; là vous découvrez
le secret de mon Cœur. Mon Cœur vous prouve mon Amour beaucoup plus
qu'aucune souffrance limitée ne pourrait le faire. » »
— Ste Catherine de Sienne. Dialogue, Paris, Lethielleux, 1892, p. 120.
Le Dialogue de sainte Catherine de Sienne, traduction Hurtaud, tome deuxième, 1913.
« Je vous ai tous placés dans la vigne de l'obéissance : vous avez
chacun votre tâche. Chacun recevra le prix de son amour et non de son
travail et de son temps.
Celui qui viendra à temps ne recevra pas plus que celui qui arrivera sur
le tard. C'est ce que vous dit le saint Évangile quand ma vérité vous
conte la parabole de ceux qui ne faisaient rien et qui ont été placés
dans la vigne par le Seigneur afin qu'ils la travaillent : ceux qui
arrivèrent à l'aurore reçurent autant que ceux qui étaient arrivés à la
première , à la troisième, à la sixième, à la neuvième heure.
Ma vérité voulait vous montrer que vous ne seriez pas récompensés selon
le temps ou le travail, mais selon la mesure de l'amour. Nombreux sont
ceux qui sont mis dans cette vigne dès leur enfance. D'autres n'y
entrent que plus tard. Certains attendent la vieillesse. Ceux-ci
s'emploieront alors avec un tel feu d'amour qu'ils rattraperont les
premiers qui ont marché à pas très lents. C'est donc dans l'amour pour
l'obéissance que l'âme reçoit sa récompense. C'est ainsi qu'elle remplit
sa coupe en moi, mer pacifique. »
— Ste Catherine de Sienne. « Traité de l'obéissance », Livre des dialogues, Paris, Seuil, 1953, p. 590.
Voir aussi
Bibliographie
Œuvre de Catherine de Sienne
Œuvres complètes, préface de François Daguet o.p., Les Belles Lettres, 1664 p., 2019 (ISBN2-2514-4936-1)
Catherine de Sienne (trad. de l'italien par J. Hurtaud, o.p.), Le dialogue, Paris, Pierre Téqui éditeur, coll. « Livres d'Or des Ecrits Mystiques », , 358 p. (ISBN2-85244-195-0)
Catherine de Sienne, Lettres de sainte Catherine de Sienne, Pierre Téqui éditeur, coll. « Livres d'Or des Ecrits Mystiques », , 360 p. (ISBN978-2-7403-1337-4)
Catherine de Sienne, Les Oraisons, Le Cerf, coll. « Sagesses chrétiennes », , 116 p. (ISBN978-2-7403-1337-4)
Sources
Raymond de Capoue, Thomas Caffarini, Vie de sainte Catherine de Sienne, Supplément, Témoignages des disciples (procès de Venise), E. Cartier, Librairie de Mme Vve Poussielgue-Rusand,
Christiane Rancé, Catherine de Sienne, Le feu de la sainteté, Le Seuil, 2008
Mgr Lodovico Ferretti, Sainte Catherine de Sienne, Cantagalli, 1998
Émile Chavin de Malan, Vie de Catherine de Sienne, 1850
Bernard Sese, Petite Vie de Catherine de Sienne, Desclée de Brouwer, 2005
Francine de Martinoir, Catherine de Sienne, ou la traversée des apparences, Éditions du Rocher, coll. « Biographie », , 192 p. (ISBN978-2-268-03244-3)
Études, essais
Antoine Lemonnyer, Notre vie spirituelle à l'école de sainte Catherine de Sienne, Cerf, coll. « Trésors du christianisme », , 141 p. (ISBN978-2-204-09079-7)
Marie-Vincent Bernadot, Catherine de Sienne : L'audace de la parole au service de l'Église, Paris, Cerf, coll. « Trésors du christianisme », , 94 p. (ISBN978-2-204-08541-0)
Dominique de Courcelles, Le « Dialogue » de Catherine de Sienne, Cerf, coll. « Classique du christianisme »,
Elisabeth Lacelle, Ne dormons plus il est l'heure de se lever. Catherine de Sienne (1347-1380), CERF Fides, coll. « Épiphanie », (ISBN2-204-06251-0)
André Knockaert et Chantal van der Plancke, Prier 15 jours avec Catherine de Sienne, Nouvelle Cité, , 128 p.
Bézine S. o.p. (préf. R.P. Fernandez), Docteur de la Miséricorde, Sainte Catherine de Sienne, Paris, Couvent Saint Jacques,
Conférence de Père François Marxer - Catherine de Sienne ou la conduite du monde - KTO TV (Hors-Série du 27 et 28/03/2018) - Partie 1 [archive] et Partie 2 [archive]
L'iconographie la représente souvent avec Jésus qui lui passe un anneau au doigt, et l'empereur Maximilien qu'elle refusa d'épouser, foulé à ses pieds. Cf. Louis Réau, Iconographie de l'art chrétien, Presses universitaires de France, , p. 1485
Références
Principales sources utilisées
Mgr Lodovico Ferretti o.p., Catherine de Sienne, Sienne, Éditions Cantagalli, , 176 p.
Sous la direction de Elisabeth Lacelle.
Yvon-D Gélinas, o.p., Marie-Thérèse Miville-Deschênes,o-p, A. Dalmazio
Mongillo, o.p., Gilles Berceville o.p., Yves-M. Congar o.p., Ne dormons plus il est l'heure de se lever. Catherine de Sienne (1347-1380), CERF Fides, coll. « Epiphanie », , 220 p. (ISBN2-204-06251-0)
p. 84
Dominique de Courcelles (trad. de l'italien), Le " Dialogue" de Catherine de Sienne, France, CERF, coll. « Classiques du christianisme », , 135 p. (ISBN2-204-06270-7)
Notices dans des dictionnaires ou encyclopédies généralistes
La
date de naissance de Catherine de Sienne est le fruit de controverses
historiographiques. Caffarini donne pour sa naissance la date du 25 mars
1347, jour de l'Annonciation, date marquant le début de l'année dans le
calendrier de Sienne de l'époque. Une étude critique de R. Fawtier de
1921, ramène de dix à quinze ans en arrière la date de sa naissance.
Cependant la date du 25 mars 1347, celle de la tradition reste la plus
communément admise.
Le noviciat est la période de probation et de découverte d'un ordre religieux.
La
geste pour Niccolo di Tuldo et les autres, mentionnée dans les
biographies de Catherine de Sienne, contribuent à développer l'image de
Catherine comme exorciste, rôle dévolu généralement aux prêtres, et qui
reste relativement rare pour les saints mais aussi pour les saintes (en
dehors de la Sainte Vierge). Des représentations picturales représentent Catherine chassant des démons.
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Catherine de Sienne texte, Le Dialogue de sainte Catherine de Sienne. Traduction de l'italien par le R. P. J. Hurtaud, T.2 (lire en ligne [archive])
Bernard Sesé, Petite vie de de Sienne, Desclée de Brouwer, , p. 13
Ginette Raimbault et Caroline Eliacheff, Les indomptables : figures de l'anorexie, Odile Jacob, , p. 231.
Dominique Poirot, Jean de la Croix et l'union à Dieu, Paris, Bayard éditions, coll. « L'aventure intérieure », octobre 1996, p. 218 sur 268 p. (ISBN2-227-32513-5)
« Mais
les misérables, non observateurs de la règle mais transgresseurs, l'ont
tout ensauvagée et engrossée avec odeur de peu de vertu et de lumière
de science à ceux qui se nourrissent à la poitrine de l'Ordre... » Le Dialogue (155)
pour correspondre : b.fdef@wanadoo.fr ---
né le 9 Avril 1943, marié, fille née le 22 Novembre 2004 --
carrière apparente . . .
premier ambassadeur de France au Kazakhstan --
conseiller économique et commercial près les ambassades françaises (Portugal, Bavière, Grèce, Brésil, Autriche)--
ancien élève à l'Ecole nationale d'administration - Institut d'Etudes politiques Paris - école Saint-Louis de Gonzague Paris --
universitaire, agrégatif science politique droit public --
-- projet de notes et entretiens politiques : de grandes fréquentations - 1964 à nos jours - ou la constellation de Gaulle
réalité . . .
bibliothèque brochée de ma mère (années 1930 à 1960), mes 20.000 livres : histoire, fiction -- journal manuscrit depuis l'été de 1964 jusqu'en 1976, carnets de terrain : plus de 420 de 1975 à 2015 journaux dactylographiés intimes & publics quotidiens : 1973 à 1992, informatisés depuis 1992 : 300ème fichier ouvert 20 Mars 2015 - inédits romanesques : 10 ; poésie : 3 ; essais philosophiques : 1
--- publié par Le Monde 1972 à 1982 & La Croix 1972 à 1997 - Le Calame depuis Mai 2007